Le coup de gueule est à la hauteur de l’attente… déçue. On était très heureux de voir que Decca avait rassemblé dans un coffret tout ce que le chef américain d’origine hongroise, Antal Doráti(1906-1988), avait enregistré du temps où il était le directeur musical de l’orchestre symphonique de Detroit, de 1977 à 1981. (*)
L’objet en impose, un gros boîtier pour seulement 18 CD – vendu au prix très fort de 75 à 98 € selon les fournisseurs !. La mauvaise surprise, c’est qu’à peu près tout avait déjà été réédité souvent dans des collections économiques, et qu’on nous ressert les pochettes d’origine (qui cela intéresse-t-il encore ?) et surtout les minutages d’origine ! Autrement dit 1 CD pour Le Sacre du printemps (36 minutes !), idem pour les autres ballets de Stravinsky… En bon français, ça s’appelle du foutage de gueule.
S’il s’agissait de republier les enregistrements de la dernière époque de Doráti, pourquoi ne pas y avoir inclus la petite dizaine de disques réalisés à Washington, quand il était à la tête du National Symphony Orchestra, voire ceux qu’il a faits avec le Royal Philharmonic de Londres pour Decca ?
On eût aimé retrouver les Nocturnes de Debussy (l’un des très rares disques de Dorati consacrés à ce compositeur) captés à Washington
En l’état ce coffret n’a aucun sens.
Une discographie pléthorique
Cela dit, Antal Doráti est un cas. C’est probablement le détenteur du record de disques enregistrés. Personne, à ma connaissance, ne s’est risqué à dresser une discographie exhaustive du chef hongrois, à l’exception du site Discogs qui a relevé 745 occurrences (ce qui ne veut pas dire autant de disques !).
Notons d’abord, qu’à la différence de nombre de ses contemporains – pour ne prendre que des Hongrois d’origine comme lui, Ormandy, Solti – Doráti n’a jamais occupé longtemps de fonctions de directeur musical. Après guerre, 4 ans à Dallas, 11 ans à Minneapolis, 4 ans à la BBC, 8 ans à Stockholm, 6 ans à Washington, 3 ans au Royal Philharmonic, 4 ans à Detroit, puis une dizaine d’années sans poste fixe. Cette relative « instabilité » peut signifier que chef et musiciens se lassaient vite les uns des autres, ou que le tempérament de Dorati, sa boulimie d’enregistrements, ne favorisaient pas l’établissement de relations de longue durée.
Ce n’est d’ailleurs avec aucun de « ses » orchestres qu’il a réalisé ses enregistrements les plus fameux, on pense bien sûr à ce qui, sans même tout le reste, aurait assuré sa postérité : les Symphonies de Haydn (avec le Philharmonia Hungarica) et les opéras de Haydn (avec l’Orchestre de chambre de Lausanne).
Bien sûr, il y a l’immense collection réalisée pour Mercury Living Presence, là encore quelques-uns, les premiers, avec Minneapolis, mais l’essentiel avec le London Symphony, ou le Concertgebouw d’Amsterdam (peut-être le plus beau Casse Noisette de toute la discographie)
Quant au répertoire, seul un Neeme Järvi dépasse Dorati en curiosité tous azimuts. Tous les grands symphonistes, à l’exception notable de Rachmaninov (sauf pour accompagner – et comment ! – le légendaire Byron Janis dans les concertos n° 2 et 3)
Difficile pour moi de faire un choix dans ma propre discothèque, où je pense avoir à peu près tous les enregistrements Mercury et Decca d’Antal Dorati.
Si l’on cherche un modèle de prise de son « réaliste », les rhapsodies hongroises captées à Londres sont spectaculaires :
J’ai longtemps eu une seule version du ballet La boutique fantasque de Respighi :
Ce fut un disque vraiment surprenant, l’un des premiers que mon tropisme russe me fit acheter même à prix fort: le grand Claudio Abbado dirigeant à Londres tout un programme Moussorgski avec beaucoup de raretés voire d’inédits.
C’est par ce disque paru en 1980 que j’ai découvert autre chose que la version Rimski-Korsakov d’une Nuit sur le mont chauve, la version non remaniée, brute, sauvage, de Moussorgski.
Avec le recul, et les comparaisons ultérieures avec, par exemple, les versions de Svetlanov, on peut trouver ces visions londoniennes d’Abbado trop « civilisées » comme s’il fallait nécessairement réfuter l’universalité de la musique russe…
Un disque précieux réédité il y a quelques années dans un coffret RCA/Sony indispensable (en ce qu’il montre Abbado dans des répertoires moins courus que ceux qu’il a gravés pour Deutsche Grammophon)
Quinze ans plus tard, Claudio Abbado, devenu directeur musical des Berliner Philharmoniker, reprendra quasiment le même programme pour Deutsche Grammophon. Il y manque un peu de la fougue, de l’élan, de la verdeur, qu’il mettait à Londres dans cette musique.
Ne pas oublier non plus que le chef italien a laissé l’une des grandes versions de l’opéra La Khovanchtchina`que je ne suis pas loin de préférer à son Boris Godounov berlinois.
Rien de nouveau sous le pâle soleil de ce matin : c’est le premier jour de l’hiver !
Il y a un an, j’avais consacré un long article à la Première symphonie de Tchaikovski. Je le reproduis ici, et l’actualise à la fin, en évoquant des versions ou rééditions récentes, qui surprennent… ou déçoivent !
Les rêves d’hiver de Tchaikovski
Comme je l’ai raconté dans le premier billet de cette série – La découverte de la musique (I) – j’ai, adolescent, en grande partie constitué ma discothèque classique grâce à une filiale de la puissante coopérative suisse Migros, Ex Libris, qui était à la fois un club et une chaîne de magasins culturels. C’est grâce à Ex Libris que j’ai eu ma première version d’une oeuvre qui a toujours puissamment résonné en moi (Musiques climatiques) : la première symphonie « Rêves d’hiver » de Tchaikovski
Cette symphonie, commencée au printemps 1866, est sans doute celle qui va donner le plus de mal à son auteur, qui traverse de graves crises nerveuses : « Mes nerfs sont à nouveau complètement détraqués. Les raisons en sont les suivantes :
1) les difficultés dans la composition de la symphonie ;
2) Rubinstein et Tarnovski, remarquant à quel point je suis susceptible, passent leur temps à me faire enrager ;
3) la pensée omniprésente que je mourrai bientôt sans avoir eu le temps d’achever ma symphonie.
J’attends l’été et Kamenka comme une terre promise. Depuis hier, je ne prends plus de vodka, de vin ni de thé fort. Je hais l’humanité et voudrais me retirer dans un désert. J’ai déjà pris mon billet de diligence pour le 22 mai… »
Il faudra à Tchaikovski surmonter les refus, les sarcasmes, pour enfin atteindre le succès, deux ans plus tard, lorsque sa symphonie est créée par son dédicataire, Nikolai Rubinstein, le 15 février 1868, à Moscou, lors d’un concert de la Société musicale russe. Ce n’est pourtant que, quinze ans plus tard, le 1er décembre 1883, qu’on pourra la réentendre à Moscou et lire dans Les Nouvelles russes cette critique qui résume bien l’oeuvre : « C’est une symphonie authentiquement russe. Dans chaque mesure, on sent qu’ellen’a pu être écrite que par un Russe« . Tchaikovski lui-même écrit à Nadiejda von Meck: « Même si elle demeure à bien des égards d’une immaturité évidente, elle a pourtant au bout du compte plus de substance et s’avère bien plus réussie que beaucoup de mes œuvres ultérieures« .
C’est donc avec Lorin Maazel – lire Un Américain de Paris – et l’Orchestre philharmonique de Vienne (ah ces couleurs du hautbois solo, des cors !) que je découvre ces Rêves d’hiver, une version qui ne m’a jamais quitté et que je place toujours en tête de ma discographie personnelle de l’oeuvre.
Quelques mois plus tard, je découvrirai l’un des premiers disques du jeune Michael Tilson Thomas
Et lorsque Karajan, qui a si souvent enregistré les trois dernières symphonies, grave les trois premières pour Deutsche Grammophon, cela donne une Rêves d’hiver intensément lyrique, tragique parfois, comme dans le mouvement lent, d’une abyssale nostalgie
Au moment de clore ce billet, j’ai une pensée toute particulière pour Patrick Davin, tragiquement disparu au début de l’automne (Un ami disparaît) qui avait magnifiquement dirigé, à ma demande, cette symphonie qu’il ne connaissait pas, à la tête de l’Orchestre philharmonique royal de Liège.
Aux versions citées dans cet article, je voudrais en rajouter quelques-unes, à conseiller.. ou à fuir !
Markevitch et Marriner à Londres
La réédition unanimement saluée dans la collection Eloquence des disques enregistrés par Igor Markevitch pour Philips (voir Igor Markevitch la collection Philips) comprend l’intégrale des symphonies de Tchaikovski réalisée à Londres au début des années 60, intégrale inégale dont se distingue une première symphonie idéale d’allure, d’atmosphère juvénile.
Une autre surprise de ma discothèque, vraiment passée sous le radar de la critique, est une intégrale des symphonies de Tchaikovski dirigée par Neville Marriner – qui l’eût cru ? Ses « rêves d’hiver » bien peu « tranquilles » captent notre attention
Désolé pour eux !
Le grand Bernstein a laissé plusieurs enregistrements des dernières symphonies de Tchaikovski. C’est peu dire qu’il a raté les premières : où sont les grands paysages enneigés dans ce premier mouvement qui commence de manière si scolaire, et se poursuit dans une instabilité rythmique bien peu contrôlée ?
Beaucoup plus surprenant le prosaïsme de chefs qui sont nés dans ces contrées, comme Valery Gergiev capté ici avec son orchestre du Marinski à la salle Pleyel à Paris.
Le grand Svetlanov n’est guère plus inspiré par la poésie de ces paysages d’hiver.
On n’est guère plus convaincu par une Première symphonie bien sérieuse et terre-à-terre captée à Zurich – la dernière intégrale en date des symphonies de Tchaikovski.
Même Mariss Jansons – dans une intégrale pourtant souvent célébrée – reste dans un entre-deux, loin des emballements poétiques de Tilson Thomas ou Markevitch.
Josef Krips, né à Vienne en 1902, mort à Genève en 1974, est sans doute l’incarnation du chef d’orchestre viennois. Reste à définir ce qui distingue Vienne du reste des capitales européennes.. et ce n’est pas ici qu’on va s’y risquer en quelques mots. Historiquement, c’est en tous cas le centre et le phare de l’Europe musicale aux XVIIIème, XIXème et (début du) XXème siècles.
J’ai failli ne pas apercevoir une édition/réédition qui me réjouit au plus haut point.
L’intérêt considérable de ce coffret c’est de regrouper des disques publiés jusqu’alors sous des labels disparates, voire de révéler des enregistrements que je ne connaissais pas. Voir le détail ci-dessous.
Premier souvenir personnel : pour l’option musique du bac, il y avait au programme la première symphonie de Beethoven. J’ai déjà raconté mes premiers pas dans la constitution d’une discothèque classique (Initiation), c’était à Poitiers. Priorité aux collections « économiques », vu la modestie de mes moyens. Et pour écouter cette première symphonie de Beethoven, c’est sur ce disque bon marché que je jetai mon dévolu :
Déjà à l’époque, sur ma petite chaîne stéréo Dual, et malgré un diamant de bonne qualité sur ma platine, je trouvais que la prise de son et/ou la gravure n’étaient pas satisfaisantes.
Plus tard, sous différents labels, je chercherais à acquérir l’intégrale de ces symphonies gravées à Londres par Josef Krips au début des années 60. On frisait souvent la catastrophe, comme le montre cet extrait :
Le coffret Scribendum nous restitue enfin cette intégrale de référence dans un son enfin lumineux.
Il y a bien sûr quelques enregistrements bien connus, déjà réédités par Decca, et récemment dans la merveilleuse collection Eloquence (les Strauss par exemple).
C’est ici que s’exprime le mieux l’art de Krips le Viennois, le sens parfait des proportions, la justesse des tempi, des articulations : rien n’est plus difficile à diriger qu’une valse de Strauss, on en a la démonstration chaque année le 1er janvier. Avec Krips tout semble si naturel. Comme dans ses Schubert.
Pour le reste, les collectionneurs avaient depuis longtemps repéré des Mozart et Haydn parus, entre autres, sous le label Chesky, les ouvertures de Beethoven (avec un « orchestre du festival de Vienne » qui n’est autre que le faux nez des Wiener Philharmoniker), des Brahms et Schubert chez Concert Hall, et – pour moi une découverte – des Brahms et Richard Strauss gravés avec le Philharmonia, réédités par Testament.
Encore un indispensable de toute discothèque.
Les détails du coffret
CD 1 Franz Joseph Haydn (1732-1809) Symphony No.94 in G major « Surprise » Symphony No.99 in E flat major Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) Symphony No.40 in G minor KV 550 *
Wiener Philharmoniker Orchestre National de France * Recording: Sept. 1957 [Haydn]; Nov. 2, 1965 [Mozart]
CD 2 J. Strauss II (1825-1899) An der schönen blauen Donau Op.314 J. Strauss II (1825-1899) & Josef Strauss (1827-1870) Pizzicato-Polka Op.447 J. Strauss II (1825-1899) Kaiser – Walzer Op.437 Rosen aus dem Süden – Walzer Op.338 Accelerationen – Walzer Op.234 Josef Strauss (1827-1870) Dorfschwalben aus Österreich – Walzer Op.164 * J. Strauss II (1825-1899) Frühlingsstimmen – Walzer Op.410 *
CD 3 Piotr Illich Tchaikovsky (1840-1893) Symphony No.5 in E minor Op.64 Franz Peter Schubert (1797-1828) Symphony No.8 in B minor D. 759 « Unfinished » *
Wiener Philharmoniker Wiener Symphoniker * Recording: Sept. 1958; June 3, 1962 [*]
CD 4 Johannes Brahms (1833-1897) Symphony No.1 in C minor Op.68 * Robert Schumann (1810-1856) Symphony No.1 in B flat major Op.38 « Spring »
Wiener Philharmoniker * London Symphony Orchestra Recording: Oct. 1956 [*]; May 1957
CD 5 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Overtures: Fidelio, Op.72 Egmont, Op.84 Coriolan, Op.62 Leonore No.3, Op.72a Die Weihe des Hauses, Op.124
Wiener Festspielorchester Recording: 1962
CD 6 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Symphony No.1 in C major Op.21 Symphony No.3 in E flat major Op.55 « Eroica »
London Symphony Orchestra Recording: Jan. 1960
CD 7 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Symphony No.2 in D major Op.36 Symphony No.6 in F major Op.68 « Pastorale »
London Symphony Orchestra Recording: Jan. 1960
CD 8 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Symphony No.5 in C minor Op.67 Symphony No.7 in A major Op.92
London Symphony Orchestra Recording: Jan. 1960
CD 9 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Symphony No.4 in B flat major Op.60 Symphony No.8 in F major Op.93 Egmont; Overture Op.84
London Symphony Orchestra Recording: Jan. 1960
CD 10 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Symphony No.9 in D minor Op.125 « Choral »
Jennifer Vyvyan soprano, Shirley Verrett mezzo-soprano Rudolf Petrak tenor, Donald Bell bass BBC Chorus, Leslie Woodgate Chorus Master London Symphony Orchestra Recording: Jan. 1960
CD 11 Robert Schumann (1810-1856) Symphony No.4 in D minor Op.120 * Franz Peter Schubert (1797-1828) Symphony No.9 in C major D. 944 « The Great »
London Symphony Orchestra Recording: Oct. 1956 [*]; May 1958
CD 12 Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) Symphony No.35 in D major KV 385 « Haffner » Franz Joseph Haydn (1732-1809) Symphony No.104 in D major « London » Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) Symphony No.41 in C major KV 551 « Jupiter » *
Royal Philharmonic Orchestra Israel Philharmonic Orchestra * Recording: Sept. 28-29, 1962; April 1957 [*]
CD 13 Johannes Brahms (1833-1897) Academic Festival Overture Op.80 * Variations on a theme by Joseph Haydn, Op.56a Tragic Overture Op.81 * Richard Strauss (1864-1949) Der Rosenkavalier Suite
Philharmonia Orchestra Recording: June 22, 1963 [*]; June 1, 1963
CD 14 Johannes Brahms (1833-1897) Symphony No.2 in B minor Op.73 * Richard Strauss (1864-1949) Till Eulenspiegels lustige Streiche Op.28
Tonhalle Orchester, Zürich * Wiener Symphoniker Recording: May-June 1960 [*]; August 1972
Reprenons le fil après l’interruption involontaire survenue il y a une semaine (Une expérience singulière) non sans avoir exprimé ma gratitude aux amis et lecteurs de ce blog pour leurs messages de soutien et de réconfort.
J’avais donc reçu un coffret de 36 CD, commandé il y a plusieurs semaines :
Decca a entrepris, semble-t-il, de rééditer, au fil des ans, le legs discographique considérable du chef anglais d’origine hongroise, Georg Solti (né le 21 octobre 1912 à Budapest et mort le 5 décembre 1997 à Antibes). En 2017, un énorme pavé de 108 CD reprenait tous les enregistrements réalisés à Chicago (lire : Solti à Chicago). Normal après tout, puisque Solti a été le patron du Chicago Symphony durant 22 ans, de 1969 à 1991, et directeur musical honoraire jusqu’à sa mort.
Ce nouveau coffret « londonien » couvre une première période de 1949 au début des années 70 – avec le London Symphony, le London Philharmonic et l’orchestre de l’opéra royal de Covent Garden – puis plus tardivement dans les années 90 essentiellement avec le LPO.
Ce coffret est un bon résumé de ce qu’on a aimé… et moins aimé chez ce grand chef.
Les gravures londoniennes des oeuvres qu’il a enregistrées plusieurs fois ou avec plusieurs orchestres sont toujours préférables – c’est vrai pour Bartok et Mahler. L’énergie débordante, la précision rythmique, qui sont la marque du jeune Solti y sont flagrantes, y compris dans des répertoires inattendus : la Gaîté parisienne de Rosenthal d’après Offenbach, gravée en 1958 avec l’orchestre de Covent Garden, est menée à un rythme d’enfer.
Plus les années passent, plus Solti succombe à une sorte de perfection marmoréenne, glacée comme dans les symphonies londoniennes de Haydn, gravée dans les années 80 (quelle lourdeur dans les menuets !). il n’est que de comparer les mêmes symphonies enregistrées avec le même orchestre (le London Philharmonic) avec Eugen Jochum ! Chez Jochum, tout vit, tout pétille… avec Solti on passe complètement à côté de l’esprit même du compositeur.
Les Anglais, Elgar, Walton, réussissent particulièrement à Solti. On se demande ce qu’il aurait fait des symphonies de Vaughan Williams par exemple.
Mozart: Symphony No. 25 in G minor, K183
London Symphony Orchestra
Sir Georg Solti
Mozart: Symphony No. 38 in D major, K504 ‘Prague’
London Symphony Orchestra
Sir Georg Solti
Mozart: Piano Concerto No. 20 in D minor, K466
Sir Georg Solti (piano/conductor)
Chamber Orchestra of Europe
Mozart: Piano Concerto No. 24 in C minor, K491
Alicia de Larrocha (piano)
Chamber Orchestra of Europe
Mozart: Piano Concerto No. 25 in C major, K503
Alicia de Larrocha (piano)
London Philharmonic Orchestra
Mozart: Piano Concerto No. 26 in D major, K537 ‘Coronation’
Alicia de Larrocha (piano)
Chamber Orchestra of Europe
Mozart: Piano Concerto No. 27 in B flat major, K595
Alicia de Larrocha (piano)
London Philharmonic Orchestra
Mozart: Concerto for 2 Pianos and Orchestra No. 10 in E flat, K365
Daniel Barenboim (piano), Sir Georg Solti (piano/conductor)
English Chamber Orchestra
Mozart: Concerto for Three Pianos & Orchestra, K242
András Schiff (piano), Daniel Barenboim (piano), Sir Georg Solti (piano/conductor)
English Chamber Orchestra
Haydn: Symphonies Nos. 93 – 104 (the London Symphonies)
London Philharmonic Orchestra
Beethoven: Symphony No. 4 in B flat major, Op. 60
London Philharmonic Orchestra
Beethoven: Violin Concerto in D major, Op. 61
Mischa Elman (violin)
London Philharmonic Orchestra
Mendelssohn: Symphony No. 3 in A minor, Op. 56 ‘Scottish’
London Symphony Orchestra
Mahler: Symphony No. 1 in D major ‘Titan’
London Symphony Orchestra
Mahler: Symphony No. 2 ‘Resurrection’
London Symphony Orchestra, Heather Harper, Helen Watts
Mahler: Symphony No. 3
London Symphony Orchestra, Helen Watts
Mahler: Symphony No. 9
London Symphony Orchestra
Liszt: Les Préludes, symphonic poem No. 3, S97
London Philharmonic Orchestra
Liszt: Prometheus, symphonic poem No. 5, S99
London Philharmonic Orchestra
Liszt: Festklänge, symphonic poem No. 7, S101
London Philharmonic Orchestra
Liszt: Wandererfantasie (Schubert), S366
Jorge Bolet (piano)
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Symphony No. 1 in A flat major, Op. 55
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Symphony No. 2 in E flat major, Op. 63
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Violin Concerto in B minor, Op. 61
Kyung Wha Chung (violin)
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Falstaff – Symphonic Study in C minor, Op. 68
London Philharmonic Orchestra
Elgar: In the South (Alassio), Op. 50
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Cockaigne Overture, Op. 40 ‘In London Town’
London Philharmonic Orchestra
Elgar: Pomp and Circumstance Marches Nos. 1-5, Op. 39
Holst: The Planets, Op. 32
London Philharmonic Orchestra
Walton: Belshazzar’s Feast
London Philharmonic Orchestra
Walton: Coronation Te Deum
London Philharmonic Orchestra
Bartók: Piano Concertos Nos. 1, 2 & 3
Vladimir Ashkenazy (piano)
London Philharmonic Orchestra
Bartók: Violin Concerto No. 2, Sz 112
Kyung Wha Chung (violin)
London Philharmonic Orchestra
Bartók: Music for Strings, Percussion & Celesta, BB 114, Sz. 106
London Philharmonic Orchestra
Bartók: Music for Strings, Percussion & Celesta, BB 114, Sz. 106
London Symphony Orchestra
Bartók: Dance Suite, BB 86, Sz. 77
London Philharmonic Orchestra
Bartók: Dance Suite, BB 86, Sz. 77
London Symphony Orchestra
Bartók: Concerto for Orchestra, BB 123, Sz.116
London Symphony Orchestra
Bartók: The Miraculous Mandarin, Op. 19, Sz. 73 (suite)
London Symphony Orchestra
Bartók: Duke Bluebeard’s Castle, Sz. 48, Op. 11
London Philharmonic Orchestra, Sylvia Sass, Kolos Kovats
Kodály: Háry János Suite
London Philharmonic Orchestra
Kodály: Psalmus hungaricus, Op. 13
London Philharmonic Orchestra
Kodály: Dances of Galanta
Kodály: Variations on a Hungarian Folksong ‘The Peacock’
London Philharmonic Orchestra
Rachmaninov: Piano Concerto No. 2 in C minor, Op. 18
Julius Katchen (piano)
London Symphony Orchestra
Stravinsky: Oedipus Rex
London Philharmonic Orchestra
Gounod: Faust – Ballet Music
Royal Opera House Covent Garden
Offenbach/Rosenthal: Gaîté Parisienne
Royal Opera House Covent Garden
Rossini: L’Italiana in Algeri Overture
London Philharmonic Orchestra
Rossini: Il barbiere di Siviglia Overture
London Philharmonic Orchestra
Verdi: La forza del destino Overture
London Philharmonic Orchestra
Suppe: Leichte Kavallerie Overture
London Philharmonic Orchestra
Suppe: Dichter und Bauer Overture
London Philharmonic Orchestra
Suppe: Ein Morgen, ein Mittag, ein Abend in Wien Overture
London Philharmonic Orchestra
Suppe: Pique Dame Overture
London Philharmonic Orchestra
Verdi: La forza del destino Overture
Verdi: La traviata: Prelude to Act 1
Offenbach: Barcarolle (from Les Contes d’Hoffmann )
Royal Opera House Covent Garden
Verdi: La traviata: Prelude to Act 3
Rossini: Semiramide Overture
Royal Opera House Covent Garden
Ponchielli: Dance of the Hours (from La Gioconda)
Royal Opera House Covent Garden
Rossini: L’Italiana in Algeri Overture
Royal Opera House Covent Garden
Glinka: Ruslan & Lyudmila Overture
London Symphony Orchestra
Mussorgsky: Khovanshchina – Introduction
London Symphony Orchestra
Mussorgsky: A Night on the Bare Mountain
London Symphony Orchestra
Borodin: Prince Igor Overture
London Symphony Orchestra
Borodin: Prince Igor: Polovtsian Dances
London Symphony Orchestra
On garde pour la fin ce que je considère depuis toujours comme ma version de chevet du Deuxième concerto de Rachmaninov. Julius Katchen et Solti c’est une assurance anti-guimauve et la garantie d’une virtuosité assumée.
Je viens de sortir de l’hôpital où j’avais été admis en urgence vendredi dernier (Des Champs-Elysées à l’hôpital) Je veux porter témoignage de ce moment qui aurait pu connaître une issue moins heureuse.
Ce n’est pas la première fois que je fais l’expérience de l’hôpital, même si je n’en suis pas un hôte fréquent. Les deux ou trois interventions que j’y ai subies dans le passé avaient été programmées, préparées.
C’est une autre affaire que d’être envoyé en urgence dans l’hôpital le plus proche de mon domicile une veille de week-end, sans l’avoir évidemment ni prévu ni voulu.
Récit.
L’alerte
J’ai commencé par nier l’évidence. Ces douleurs thoraciques dès mardi soir, puis répétées à intervalles irréguliers, sans rapport apparent avec un effort physique, je savais, depuis la mort brutale de mon père il y a bientôt cinquante ans et d’autres membres de ma famille et d’amis, que c’était le signe d’un risque, d’un risque fatal. Mais j’ai nié, je suis allé deux soirs de suite à l’opéra et au concert. Lorsque la douleur est revenue vendredi après-midi après une réunion écourtée en visio-conférence, je me suis résolu à faire le geste qui sauve : appeler le 15.
Une voix de femme, calme, posée, précise qui me répond quasiment dans l’instant : elle prend note, m’interroge, me fait attendre quelques secondes et m’annonce que les pompiers et le SAMU vont me rejoindre chez moi. J’éprouve de la gêne, déranger tout ce monde pour ce qui n’est peut-être pas grand chose. Mais si on me les envoie, c’est peut-être sérieux. Arrivent d’abord trois jeunes pompiers de la caserne de L’Isle Adam. Ils suivent un protocole précis, mais ils ne sont pas médecins et doivent attendre le SMUR qui n’arrivera qu’après de longues minutes. Ils m’interrogent, et soudain je craque – l’espace de quelques secondes remontent à la surface de ma mémoire les souvenirs tragiques de ces brutales disparitions familiales- Vais-je à mon tour y passer? Je n’ai pourtant pas le sentiment d’une fin imminente. L’équipe du SMUR – 3 personnes – procède à un électrocardiogramme, à la prise de tension, et d’un regard vers les trois pompiers, je comprends qu’on va m’emmener. Vite réfléchir, prendre le juste nécessaire si je dois rester la nuit à l’hôpital.
Je n’ai pas le droit d’aller à pied jusqu’au camion des pompiers, le trajet dans l’ambulance bien inconfortable me paraît bien long, je connais par coeur les routes alentour. Le pompier resté auprès de moi me rassure, je suis étrangement calme, ma tension est redescendue à un niveau tout à fait normal.
Les urgences
L’arrivée aux urgences de Pontoise se fait un peu comme dans les films ou les reportages « vus à la télé ». Il y a un peu d’encombrement à l’entrée, les trois pompiers sont toujours auprès de moi, plaisantant sur les bouchons du week-end ! Si j’étais une urgence absolue, ils m’auraient conduit directement dans le service de cardiologie.
Une première infirmière – dans ce qui ressemble à un garage – prend connaissance de mon « dossier ». Les trois pompiers de L’Isle Adam prennent congé, je leur souhaite un bon week-end et les remercie pour leur empathie.
On me conduit ensuite sur une chaise roulante dans un couloir où se trouvent entre dix et quinze patients, plus ou moins atteints pour autant que je puisse en juger. Je ne sais pas combien de temps je vais attendre là, je n’éprouve ni stress ni crainte. Une autre infirmière vient assez vite m’expliquer qu’elle va me faire une prise de sang pour mesurer le taux de troponine, qui doit indiquer le degré de souffrance du muscle cardiaque. Il doit être 18 h, elle me prévient que ce type d’examens peut durer jusqu’à six heures. Au bout d’une heure et demie sur ma chaise dans le couloir, on me conduit dans un box fermé – les places sont chères –
Un médecin arrive, quinquagénaire rassurant mais direct. Les premiers résultats de la prise de sang ne sont pas bons, il prononce le mot que je redoutais : infarctus. J’appelle mes proches, je vais rester à l’hôpital ce soir. Il faut attendre les résultats complets de la mesure de la troponine. Le médecin me parle de coronarographie. Une infirmière vient me demander de me déshabiller, elle place tous mes effets dans un sac blanc qu’on place sous mon lit/brancard. J’ai un peu perdu la notion de l’heure. Je suis serein.
L’opération
On m’emmène par des couloirs qui me semblent interminables jusque dans un bloc opératoire, où je suis accueilli par trois ou quatre personnes, infirmières, chirurgiens j’imagine. Très souriants, bienveillants, sympathiques, ils m’expliquent ce qui va se passer : une coronarographie. Il y a une suspicion d’artère coronaire bouchée (pour ne pas le dire comme ça, ils parlent entre eux de 99 % !). J’apprécie qu’on ne prenne pas le patient que je suis pour un débile, et qu’on m’explique tranquillement toutes les étapes de l’intervention. On va faire passer un tuyau dans mon bras droit sous anesthésie locale, et en fonction de l’exploration de mes artères, on utilisera le même vecteur pour poser un stent.
L’un des intervenants, que je prends pour être le cardiologue/chirurgien, me demande ma profession. À l’évocation de Montpellier, il me dit avoir été timbalier de l’Orchestre français des jeunes à l’époque en résidence à Montpellier, en 1991 ou 1992, sous la direction de Marek Janowski ! Le monde est petit. Je lui demande pourquoi il n’a pas poursuivi dans cette voie, et le remercie en même temps d’être là aujourd’hui pour m’opérer !
Sans que cela soit douloureux je sens bien qu’il se passe des choses dans mon bras droit, une chaleur inhabituelle. Mais l’artère est trop petite, trop étroite pour poursuivre dans ce bras. Un coup pour rien donc, ils vont essayer de passer par le bras gauche. Cette fois ça marche. Mêmes sensations que le bras droit, je suis quand même impressionné et admiratif de la technique utilisée pour introduire ce qui va reconfigurer mon artère bouchée. L’équipe me promet de me montrer le film de l’intervention une fois celle-ci terminée.
On a beau avoir vu sujets et reportages à la télé, quoique je ne sois pas un adepte des magazines santé, c’est évidemment étrange d’être cette fois l’objet et le sujet d’une intervention qui est une pratique courante.
Un peu avant 22 h, j’envoie à mes proches un selfie de sortie de salle d’opération. On me conduit dans l’unité de soins intensifs de cardiologie, où je suis formidablement accueilli par les infirmières de nuit. Elles me demandent si j’ai dîné, m’apportent un plateau léger, je n’ai pas très faim à vrai dire. Je suis branché de partout, la porte de la chambre est grande ouverte. Plusieurs fois dans la nuit j’aurai la visite des infirmières, d’une interne qui me dit que si tout se passe bien, je devrais sortir en milieu de semaine suivante. Petite alerte au cours de la nuit, augmentation inopinée du rythme cardiaque. Normal mais à surveiller.
L’hôpital public
Les nuits et les jours qui vont suivre seront rythmés par toutes sortes d’examens répétitifs : prises de sang, électrocardiogrammes, tension artérielle. On me donnera à avaler quantité de pilules, dont on prend soin de m’expliquer la nécessité. On m’interroge quasiment toutes les heures sur la persistance de douleurs. Non je n’éprouve rien, mais il paraît que c’est fréquent de continuer à ressentir les mêmes douleurs, comme des sortes de courbatures.
Je commence à recevoir des visites de mes proches (pas plus de deux par jour, mais je pensais qu’elles ne seraient pas possibles dans une unité de soins intensifs).
Et surtout je mesure la fabuleuse disponibilité, la chaleur humaine, de toutes celles et tous ceux qui s’affairent autour de moi. Les couloirs sont parfois bruyants, samedi soir on fête un départ. Les boules Quiès seront précieuses pour ma tranquillité entre deux interventions des infirmières.
Une chose est d’entendre parler, de voir des reportages sur ces « soignants » qui sont en première ligne depuis bientôt deux ans dans la crise sanitaire. Une autre est de vivre au coeur du système, de partager la réalité de leur travail. Et d’admirer, en dépit de toutes les difficultés, de tous les problèmes, la qualité exceptionnelle de l’hôpital public en France. La revalorisation des salaires et des carrières a commencé, elle doit continuer. Même si aucune des personnes que j’ai croisées pendant ce séjour à l’hôpital n’a choisi ce métier pour le salaire !
Le rétablissement
Je vais devoir réduire mon activité ces prochaines semaines, ralentir le rythme, suivre une « rééducation » (le muscle cardiaque se « rééduque »). En profiter pour lire, écouter, voir tout ce que j’ai en retard.
Ecouter par exemple le coffret reçu la veille de mon départ inopiné à l’hôpital
L’intégrale de tous les enregistrements symphoniques réalisés à Londres entre 1949 et les années 1990, avec le London Symphony, le London Philharmonie ou l’orchestre de Covent Garden, par Georg Solti, comme ce 2ème concerto de Rachmaninov électrisant capté en 1958 avec le formidable Julius Katchen
C’est à l’hôpital que j’ai mis la dernière main à un article commencé il y a une dizaine de jours… sur une série de requiems ! Merci à Forumopera de le publier aujourd’hui : Requiems royaux.
Un coffret vraiment exceptionnel à tous points de vue !
Et puis je dois confesser que je me suis amusé comme un fou à regarder une série (sur Nexflix) qui n’a pas peu contribué à ma bonne humeur ces derniers jours : The Windsor’s. C’est le pendant parodique, formidablement irrévérencieux de The Crown.
La famille royale britannique en prend pour son grade. Personne n’est épargné, sauf la reine qu’on ne voit ni n’entend jamais. Mention spéciale pour celles qui incarnent Sarah Ferguson (Fergie) et ses filles Eugenie et Beatrice. C’est souvent too much… mais c’est pour ça qu’on aime !
J’ai commencé cette série consacrée à Camille Saint-Saëns – dont on commémore le centenaire de la mort – par ses symphonies : Saint-Saëns #100 Les Symphonies, à l’occasion de la publication d’une formidable intégrale due à Jean-Jacques Kantorow et à l’Orchestre philharmonique royal de Liège.
Le grand violoniste et chef d’orchestre était jeudi soir à l’Auditorium de Radio France pour écouter un pianiste qu’il connaît bien, son propre fils, Alexandre, dans le 5ème concerto pour piano, dit « L’Egyptien », de Saint-Saëns.
L’Orchestre national de France était dirigé par Kazuki Yamada, qui remplaçait Cristian Macelaru empêché.
Je ne dirais pas mieux qu’Alain Lompech, présent quelques rangs derrière moi, qui écrit ceci sur Bachtrack : Et « L’Egyptien » de Saint-Saëns ? Alexandre Kantorow en aura été le patron. Son piano est d’une précision aussi hallucinante qu’elle est au service d’un propos plein d’esprit et pur de toute volonté de paraître. Son jeu est tout de grâce et d’élégance, d’une telle variété d’attaques et de nuances et d’une telle puissance de pensée que l’orchestre et le chef sont à son écoute. La façon virevoltante dont il joue les traits les plus véloces, tout comme sa façon de prendre un tempo un peu rapide dans le fameux thème andalou du deuxième mouvement sont irrésistibles au moins autant que sa virtuosité incandescente et joueuse dans la toccata conclusive. Triomphe. Il revient jouer la Première Ballade de Brahms avec le son transparent et timbré du jeune Horowitz ou mieux encore de Michelangeli en public dont le clavier donnait l’impression de faire 20 centimètres de profondeur, comme celui de Kantorow ce soir ! Triomphe encore. Tiens ? Il revient avec son iPad pour un second bis, ce qui est rare après un concerto. Et là – le traître ! –, joue la Cancion n° 6 de Mompou. Trois accords : les lunettes s’embuent. On est au-delà de l’exprimable, dans des sphères de la conscience de chacun auxquelles seuls quelques rares élus se connectent. Kantorow est l’un d’eux«
On peut (on doit !) réécouter Alexandre Kantorow sur francemusique.fr (à partir de 18’30 »)
Et bien sûr acquérir la nouvelle référence discographique des trois derniers concertos, enregistrée il ya deux ans, par le père et le fils :
Intégrales
Jadis rares, les intégrales des 5 concertos pour piano de Saint-Saëns se sont multipliées ces dernières années, intégrales inégales, pas toujours bien enregistrées (Ciccolini/Baudo, Entremont/Plasson). Trois me semblent sortir du lot :
Souvent citée la pianiste française Jeanne-Marie Darré (1904-1999) reste une référence avec cette intégrale réalisée avec Louis Fourestier et l’orchestre national entre 1955 et 1957. Ou quand chic et virtuosité font bon ménage !
Autre intégrale sortie vainqueur d’une écoute comparée (dans Disques en lice, la « tribune » de la Radio suisse romande), Jean-Philippe Collard et André Previn dirigeant le Royal Philharmonic de Londres
Moins connue peut-être, mais passionnante, la vision du pianiste anglais Stephen Hough accompagné par Sakari Oramo et l’orchestre de Birmingham (Hyperion)
L’esprit de Saint-Saëns
Je pourrais citer bien d’autres versions intéressantes. Quelques-uns de mes choix de coeur.
Pour le 2ème concerto
Artur Rubinstein avait tout compris de l’esprit du 2ème concerto. Ma version de chevet.
Peut-on trouver plus émouvant que cette ultime captation d’une oeuvre que le pianiste a jouée durant toute sa carrière, ici au soir de sa vie avec André Previn au pupitre de l’orchestre symphonique de Londres ?
Autre version sortie largement en tête d’une Table d’écoute sur Musiq3 (RTBF), le tout premier disque de concertos de Benjamin Grosvenor. Le tout jeune pianiste anglais y fait preuve d’une inventivité, d’un esprit ludique, qui nous fait redécouvrir littéralement une oeuvre qu’on croyait bien connaître.
Pour les 2 et 5
Je n’oublie pas l’excellent Bertrand Chamayou, plusieurs fois entendu au concert – l’Egyptien au Festival Radio France à Montpellier en 2016, en 2017 à Paris avec Emmanuel Krivine…
Rareté
On ne peut pas dire que le Quatrième concerto de Saint-Saëns soit souvent à l’affiche du concert. Je ne l’ai personnellement jamais entendu « live » ! C’est dire si la version qu’en ont laissée Robert Casadesus et Leonard Bernstein est précieuse
C’était annoncé depuis l’été (lire Igor Markevitch et la zarzuela), attendu avec impatience. Deux coffrets reprenant les disques gravés par Igor Markevitch (1912-1983) pour Philips et pour Deutsche Grammophon.
C’est peu dire qu’on est comblé par le travail, une fois de plus remarquable, que le responsable de la collection Eloquence, Cyrus Meher-Homji a effectué d’abord pour rassembler l’intégralité des enregistrements réalisés par le chef d’origine russe pour le label hollandais Philips, et restaurer (« remasteriser » dit-on maintenant) les bandes d’origine, le plus spectaculaire étant la véritable résurrection des captations moscovites de 1962 (cf.ci-dessous)
Le « nettoyage » des bandes a aussi pour effet secondaire de rendre plus audibles les sonorités parfois crues de certaines phalanges – on a tant perdu l’habitude des saveurs parfois acidulées des bois français dans l’orchestre Lamoureux du début des années 60 ! – et, pour ce qui est des troupes espagnoles, chanteurs et orchestre, de défauts d’intonation et de justesse qui ne doivent pas cependant nous faire regretter de disposer enfin de ce patrimoine inattendu de la part de Markevitch.
CD 1 FRANZ JOSEPH HAYDN (1732–1809) 1–4 Symphony No. 103 in E flat major, H.I:103 ‘Drum Roll’* 5–8 Symphony No. 104 in D major, H.I:104 ‘London’* Orchestre des Concerts Lamoureux
CARL MARIA VON WEBER (1786–1826) 9 Preciosa – Overture, Op. 78, J.279 Orquesta Sinfónica de la RTV Española
*FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 2 WOLFGANG AMADEUS MOZART (1756–1791) 1–3 Piano Concerto No. 20 in D minor, KV 466 4–6 Piano Concerto No. 24 in C minor, KV 491 Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 3 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–4 Symphony No. 1 in C major, Op. 21* 5–8 Symphony No. 5 in C minor, Op. 67* 9–12 Symphony No. 8 in F major, Op. 93* Orchestre des Concerts Lamoureux *FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 4 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–4 Symphony No. 9 in D minor, Op. 125 ‘Choral’* Hilde Gueden, soprano Aafje Heynis, contralto Fritz Uhl, tenor Heinz Rehfuss, baritone Oratorienchor Karlsruhe Orchestre des Concerts Lamoureux
*FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 5 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–3 Piano Concerto No. 3 in C minor, Op. 37 FRÉDÉRIC CHOPIN (1810–1849) 4–6 Piano Concerto No. 2 in F minor, Op. 21 Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 6 ALBAN BERG (1885–1935) 1–2 Violin Concerto ‘To the Memory of an Angel’ Arthur Grumiaux, violin Concertgebouworkest
ZOLTÁN KODÁLY (1882–1967) 5 Psalmus Hungaricus, Op. 13 Irina Arkhipova, contralto (Alto Rhapsody) Róbert Ilosfalvy, tenor (Psalmus Hungaricus) Russian State Academy Choir USSR State Symphony Orchestra
CD 7 GEORGES BIZET (1838–1875) 1–5 Carmen – Suite No. 1 6–10 Carmen – Suite No. 2 11–14 L’Arlésienne – Suite No. 1 15–17 L’Arlésienne – Suite No. 2 Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 8 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 1 in G minor, Op. 13, TH.24 ‘Winter Daydreams’ 5–8 Symphony No. 2 in C minor, Op. 17, TH.25 ‘Little Russian’ London Symphony Orchestra
CD 9 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–5 Symphony No. 3 in D major, Op. 29, TH.26 ‘Polish’ London Symphony Orchestra 6 Francesca da Rimini, Op. 32, TH.46 New Philharmonia Orchestra
CD 10 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 4 in F minor, Op. 36, TH.27 5 Hamlet, Op. 67 London Symphony Orchestra New Philharmonia Orchestra
CD 11 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 5 in E minor, Op. 64, TH.29 London Symphony Orchestra
CD 12 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 6 in B minor, Op. 74, TH.30 ‘Pathétique’ London Symphony Orchestra
CD 13 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Manfred Symphony, Op. 58, TH.28 London Symphony Orchestra
CD 14 NIKOLAI RIMSKY-KORSAKOV (1844–1908) 1–5 Capriccio Espagnol, Op. 34 6–9 Scheherazade, Op. 35 Erich Gruenberg, soloviolin London Symphony Orchestra
NIKOLAI RIMSKY-KORSAKOV (1844–1908) 2 Russian Easter Festival, Overture, Op. 36
ALEXANDER BORODIN (1833–1887) 3 Polovtsian Dances (from Prince Igor) Netherlands Radio Chorus (Borodin) Concertgebouworkest
CD 16 IGOR STRAVINSKY (1882–1971) 1–10 Apollon musagète (1947 version) 11–14 Suite No. 1 for Small Orchestra 15–18 Suite No. 2 for Small Orchestra 19–22 Four Norwegian Moods 23 Circus Polka for a Young Elephant London Symphony Orchestra
CD 17 IGOR STRAVINSKY (1882–1971) 1–24 L’Histoire du Soldat Jean Cocteau, Jean-Marie Fertey, Peter Ustinov, narrators Manoug Parikian, violin Joachim Gut, double bass Ulysse Delécluse, clarinet · Henri Helaerts, bassoon Maurice André, trumpet · Roland Schnorkh, trombone Charles Peschier, percussion
25–27 Symphonie de Psaumes Boys’ and Male Voices of the Russian State Academic Choir Russian State Academy Orchestra
CD 18 MODEST MUSSORGSKY (1839–1881) Orch. Markevitch 1 Cradle Song 2 The Magpie 3 Night 4 Where art thou, little star? 5 The Ragamuffin 6 On The Dnieper Galina Vishnevskaya, soprano
NIKOLAI TCHEREPNIN (1873–1945) 7–13 Tàti-Tàti* Olga Rostropovich, piano
LEOPOLD MOZART (1719–1787) 14–16 Toy Symphony (Cassation in G major for Orchestra and Toys)°
GEORGES BIZET (1838–1875) 17–21 Jeux d’enfants – Petite Suite, Op. 22° Children’s Ensemble of the Moscow School of Music (Toy Symphony) USSR State Symphony Orchestra
*FIRST CD RELEASE ON DECCA °FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 19 GIUSEPPE VERDI (1813–1901) 1 La forza del destino – Sinfonia 2 Macbeth – Ballet Music (Act III) 3 La traviata – Prelude (Act I) 4 Luisa Miller – Overture 5 Aida – Overture 6 Giovanna d’Arco – Overture 7 La traviata – Prelude (Act III) 8 I vespri siciliani – Overture New Philharmonia Orchestra
Messa da Requiem* beginning 9–10 Requiem et Kyrie
CD 20 GIUSEPPE VERDI (1813–1901) 1–19 Messa da Requiem* conclusion Galina Vishnevskaya, soprano Nina Isakova, mezzo-soprano Vladimir Ivanovsky, tenor Ivan Petrov, bass Russian State Academy Choir Moscow Philharmonic Orchestra
*FIRST STEREO CD RELEASE ON CD
CD 21 FEDERICO MOMPOU (1893–1987) 1–8 Los Improperios Peter Christoph Runge, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
TOMÁS LUIS DE VICTORIA (c. 1548–1611) 9 Ave Maria 10 Vexilla regis Escolania de nuestra Señora del Buen Retiro César Sanchez, Maestro de la Escolanía Coro de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
PADRE JAIME FERRER (1762–1824) 11–16 Lamentación 1a Ángeles Chamorro, soprano Norma Lerer, contralto Julian Molina, tenor Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española
CD 22 TOMÁS LUIS DE VICTORIA (c. 1548–1611) 1–8 Magnificat primi toni Coro de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
ÓSCAR ESPLÁ Y TRIAY (1886–1976) 9–12 De Profundis Ángeles Chamorro, soprano Ines Rivadeneyra, mezzo-soprano Carlo del Monte, tenor Antonio Blancas, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
ERNESTO HALFFTER (1905–1989) 13 Canticum in P.P. Johannem XXIII*
IGNACIO RAMONEDA (1735–1781) 14 Veni Creator* Ángeles Chamorro, soprano Antonio Blancas, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
*FIRST CD RELEASE ON DECCA
CD 23 MANUEL DE FALLA (1876–1946) 1–7 Siete Canciones populares españolas* Orchestrated by Igor Markevitch
ISAAC ALBÉNIZ (1860–1909) 8 Catalonia°
ERNESTO HALFFTER (1905–1989) 9 Fanfare (a la memoria de Enrique Granados)*
ENRIQUE GRANADOS (1867–1916) 10 Spanish Dance, Op. 37 No. 9 ‘Romantica’° 11 Spanish Dance, Op. 37 No. 4 ‘Villanesca’° 12 Intermezzo (from Goyescas)° 13 Zapateado (from Six Pieces on Spanish Folksongs)° 14 Spanish Dance, Op. 37 No. 8 ‘Asturiana’° Ángeles Chamorro, soprano (Falla) Orquesta Sinfónica de la RTV Española
*FIRST CD RELEASE ON DECCA °FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 24 MANUEL DE FALLA (1876–1946) 1–3 Noches en los jardines de España Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
4–16 El amor brujo
EMMANUEL CHABRIER (1841–1894) 17 España – rapsodie pour orchestre
MAURICE RAVEL (1875–1937) 18 Boléro Ines Rivadeneyra, contralto (El amor brujo) Orquesta Sinfónica de la RTV Española
CD 25 ANTOLOGIA DE LA ZARZUELA* GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 1–3 La Tempranica (excerpts)
GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 6 El baile de Luis Alonso: Intermedio
VICENTELLEÓ BALBASTRE (1870–1922) 7 La corte de Faraón: Son las mujeres de Babilonia – ¡Ay ba!
PABLOLUNA (1879–1942) 8–10 El Niño Judio (excerpts)
TOMÁSBRETÓN (1850–1923) 11–13 La Verbena de la Paloma (excerpts) Ángeles Chamorro, Alicia de la Victoria, sopranos · Norma Lerer, contralto Angel Custodio, Gregorio Gil, Carlo del Monte, tenors Rafael Enderis, baritone Julio Catania, Jesus Coiras, José Granados, Antonio Lagar, José Le Matt, basses Coro y Orquesta Sinfónica de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
CD 26 MANUEL PENELLA (1880–1939) 1 El Gato Montés: Pasadoble
FRANCISCOALONSO (1887–1948) 2 La Calesera: Dice el Rey que le debe guardar
RUPERTO CHAPÍ Y LORENTE (1851–1909) 3–4 La Revoltosa (excerpts)
FEDERICO CHUECA (1846–1908) 5 Agua, Azucarillos y Aguardiente: Vivimos en la Ronda de Embajadores
GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 6 La Tempranica: Zapateado 7 La boda de Luis Alonso: Intermedio
RUPERTO CHAPÍ Y LORENTE (1851–1909) 8 El tambor de Granaderos: Preludio
FRANCISCO ASENJOBARBIERI (1823–1894) 9–11 El barberillo de Lavapiés (excerpts)
RUPERTO CHAPI Y LORENTE (1851–1909) 12 El Rey que Rabio: Coro de doctores
MANUEL FERNANDEZ-CABALLERO (1835–1906) 14 Gigantes y Cabezudos: Jota Ángeles Chamorro, Alicia de la Victoria, sopranos · Norma Lerer, contralto Carlo del Monte, José Antonio Viñe, tenors · Antonio Lagar, bass Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
IGOR MARKEVITCH *FIRST COMPLETE RELEASE ON CD OF ‘ANTOLOGIA DE LA ZARZUELA’
STEREO RECORDINGS
On attend maintenant avec autant d’impatience le coffret Eloquence Deutsche Grammophon !
« C’est comme une sorte de petit frère de Leonard Bernstein, génie et notoriété en moins, mais bien des similitudes de parcours et de carrière (le piano, le jazz, la comédie musicale, la direction d’orchestre)
C’est ainsi que je décrivais, quelques mois avant sa mort, André Previn, né Andreas Ludwig Priwin le 6 avril 1929 à Berlin, mort à New York juste avant son 90ème anniversaire le 28 février 2019.
Dans le même billet – Génération Bernstein – paru le 1er décembre 2018 à l’occasion de l’édition par Sony d’un coffret récapitulant les enregistrements du chef américain pour RCA – je décrivais le parcours d’André Previn :
...La famille, les parents Charlotte et Jack et le petit Andreas, fuient le nazisme, émigrent en 1939, s’installent à Los Angeles, où le grand oncle Charles Previncompose pour les studios Universal après avoir travaillé comme arrangeur pour près d’une centaine de productions à Broadway.
Dans cet environnement, le jeune André, naturalisé Américain en 1943, entame un parcours qui va beaucoup ressembler à celui de son aîné. Il écrit et arrange des musiques pour Hollywood, il profite de son service militaire (en 1951-52) à San Francisco pour prendre des leçons privées de direction d’orchestre auprès de Pierre Monteux, le grand chef français (lui aussi naturalisé Américain en 1942), patron de l’Orchestre symphonique de San Francisco depuis 1935.
Comme chef d’orchestre, André Previn prend un premier poste en 1967 à l’orchestre symphonique de Houston (où il succède à John Barbirolli), mais c’est avec l’orchestre symphonique de Londres (1969-1979) qu’il va connaître une fructueuse décennie – avec un nombre impressionnant d’enregistrements (pour EMI ou RCA). Suivront des périodes de moindre envergure à Pittsburgh, à Los Angeles, de nouveau à Londres (avec le Royal Philharmonic)
Comme Bernstein, Previn, pendant ses années londoniennes, se fait pédagogue télévisuel. Comme Bernstein, Previn est multi-cartes, c’est un compositeur prolifique et tous terrains, mais ce n’est pas diminuer ses mérites que de reconnaître qu’aucune de ses oeuvres, que ce soit dans le classique, le jazz ou la comédie musicale, n’a jamais atteint la notoriété, ni l’originalité de celles de son aîné.
Quant au chef d’orchestre Previn, les réussites sont très inégales selon les répertoires. Dans les classiques viennois, Haydn, Beethoven on ne sort jamais d’une honnête neutralité, comme si le chef évitait de prendre un parti interprétatif. C’est plus intéressant dans Richard Strauss, où l’Américain Previn semble prendre plaisir à faire rutiler ses orchestres (notamment les Wiener Philharmoniker). Mais c’est aussi la plus calamiteuse version de La Chauve Souris de Johann Strauss, un beau ratage (la comparaison avec Carlos Kleiber est édifiante !)
Sortir des clichés
Ecrivant cela, j’en rajoutais peut-être, sûrement, dans les clichés qu’on véhiculait sur cet artiste, sans vraiment prêter attention à une discographie sans doute trop abondante, trop dispersée.
Au moment de sa mort, Louis Langrée – qui sait quelque chose des Etats-Unis (directeur du Mostly Mozart festival de New York depuis 2003, directeur musical de l’orchestre de Cincinnati depuis 2013) – avait, à très juste titre, rectifié cette image déformée d’André Previn. Il m’avait rappelé combien les origines berlinoises, européennes, de Previn avaient été importantes, essentielles même, dans son parcours de musicien, l’amour qu’il portait au répertoire classique, qu’ils n’étaient pas si nombreux que cela de cette génération à savoir défendre et promouvoir aux Etats-Unis.
Entre temps j’ai découvert ce documentaire, très émouvant, dont le titre est le parfait résumé de la vie et de l’art d’André Previn
Deux ans après la disparition du chef, Warner édite un coffret de 96 CD, qui rend peut-être mieux justice à son art que le précédent : André Previn, l’intégrale Warner
Dans ce coffret, il y a bien sûr du connu (les ballets de Tchaikovski, de Prokofiev), des collaborations – que j’avais oubliées – avec de grands solistes – Ithzak Perlman, Janet Baker, Kathleen Battle, des Rachmaninov nostalgiques, des Chostakovitch plus lyriques qu’incisifs, quelques incursions réussies dans la musique française – belles ouvertures de Berlioz, quelques Ravel dont L’Enfant et les sortilèges bien connu – des classiques, Haydn, Beethoven, un peu trop respectueux, qui manquent d’arêtes et de fulgurances.
Et beaucoup de perles rares, qui restituent la dimension qu’évoquait Louis Langrée. Le détail des 96 CD est à découvrir ici : Bestofclassic
Christa Ludwig est morte trois ans après un 90ème anniversaire qui lui avait été fêté partout et par tous.
« Christa Ludwigfête aujourd’hui ses 90 ans, en pleine santé, sans rien avoir perdu de son humour et de son franc-parler, comme en témoigne l’interview qu’elle a donnée au Monde : Je suis une vache sacrée.
Au milieu de tous les hommages qui lui ont été ou seront rendus (notamment par France Musique), juste un souvenir, celui d’une très belle journée de radio, en juin 1998, sur France Musique précisément… pour les 70 ans de la chanteuse allemande. Un bonheur de tous les instants, la dernière sortie publique de Rolf Liebermann, déjà très fatigué, mais qui avait tenu à venir témoigner son affection et son admiration à sa chère Christa. La présence évidemment du second mari de Christa Ludwig, Paul-Emile Deiber. Et dans ma discothèque, une précieuse dédicace signée sur le livret d’un « live » auquel la chanteuse tient particulièrement.
Tant de souvenirs non de la scène mais grâce au disque et au DVD.
Au moment de son départ, trois moments parmi tant de miraculeux illuminent notre gratitude envers une si belle et grande interprète :
Mahler : Ich bin der Welt abhanden gekommen / Philharmonia Orchestra / dir. Otto Klemperer
Mahler : Das Lied von der Erde, Der Abschied (L’adieu) / Berliner Philharmoniker / dir. Herbert von Karajan
Et parce que Christa Ludwig c’était aussi cette Old Lady du Candide de Bernstein :