Les raretés de l’été (V) : Béatrice Uria-Monzon et Montpellier

Un triste hasard a voulu qu’on apprenne le décès, à 61 ans, de la cantatrice Béatrice Uria-Monzon le jour de la clôture de la 40e édition du Festival Radio France Occitanie Montpellier. Et que le titre de cette rubrique porte particulièrement bien son nom, puisqu’il rend un double hommage à l’artiste disparue et à un festival qui l’accueillit jadis pour ce qui a longtemps fait son originalité absolue – la recréation d’un opéra oublié.

C’est en effet en 2006 que le Festival, alors animé par son fondateur René Koering (à qui j’eus l’honneur et le bonheur de succéder de 2014 à 2022), recréa, avec une distribution de grand luxe, l’opéra mal-aimé de LaloFiesque – qui fut en effet un fiasco. Béatrice Uria-Monzon y chantait aux côtés de Roberto Alagna.

Ils se retrouveront deux ans plus tard à Orange pour une Carmen restée dans toutes les mémoires, que France 4 rediffuse ce mardi 22 juillet.

Si, heureusement, l’inoubliable Carmen qu’a été Béatrice Uria-Monzon sur toutes les scènes du monde a été largement documentée, on ne peut que regretter la rareté de la présence discographique de la chanteuse. Heureusement que des chefs comme les fidèles Jean-Claude Casadesus et Michel Plasson l’ont invitée pour les raretés que sont les cantates de Berlioz ou Ravel, ou l’oratorio Rédemption de César Franck.

Les plus chanceux peuvent essayer de trouver la seule Carmen au disque de Béatrice Uria Monzon, dirigée par Alain Lombard.

Rendez-vous, en tout cas, ce mardi 22 juillet pour une soirée bienvenue d’hommage à une belle personnalité sur France 4

Montpellier

« Depuis 2023, le Festival de Radio France Occitanie Montpellier présente un visage différent. La programmation demeure de grande qualité, les concerts du soir au Corum en constituent toujours la colonne vertébrale, mais le choix des œuvres paraît moins aventureux. Le souvenir de soirées montpelliéraines durant lesquelles nous découvrîmes de véritables raretés, qui justifiaient le déplacement, même de loin, et contribuaient à sa réputation, reste bien présent, non sans nostalgie » (Sébastien Foucart, ConcertoNet, 17 juillet 2025).

Je ne me livrerai pas – je m’y suis toujours refusé dans toutes les fonctions que j’ai occupées – à des comparaisons oiseuses, à des regrets aigris (« c’était mieux avant »!). Le Festival Radio France n’est plus en 2025 ce qu’il était à sa création en 1985. Il a failli, plus d’une fois, perdre l’un de ses piliers fondateurs, Radio France. Aujourd’hui le service public est plus présent que jamais, avec les moyens dont il dispose et qui sont chaque année plus « contraints » – pour reprendre le terme consacré par l’administration de l’Etat. De cela on doit se réjouir.

Mais pour reprendre la dernière décennie, il est vrai, comme le note Sébastien Foucart, qu’on est venu au festival, parfois de très loin, pour des résurrections d’ouvrages rares (17 opéras de 2015 à 2022) parmi lesquels Fantasio d’Offenbach (2015) avec Marianne Crébassa, Iris de Mascagni (2016) et Siberia de Giordano (2017) avec Sonya Yoncheva, Kassya de Delibes (2018) avec Véronique Gens, l’immense Fervaal de d’Indy (2019) avec Michael Spyres et en 2022 la version originale d’Hamlet pour ténor avec John Osborn et l’inoubliable Ophélie de la si regrettée Jodie Devos.

Le projet d’édition discographique de Fervaal n’ayant pas abouti, on peut heureusement retrouver l’écho de sa diffusion sur France Musique sur YouTube

Heureusement en effet, France Musique conserve une mine de trésors captés au Festival depuis 1985 (il y a eu beaucoup de rediffusions cet été). Pourquoi pas une chaîne thématique numérique de plus avec ces formidables archives ? Suggestion à Laurent Frisch et Marc Voinchet !

C’était le premier concert de « ma » programmation, le 10 juillet 2015

Avec un chef que je suis très heureux d’avoir invité plusieurs fois à Montpellier, Domingo Hindoyan, qui fait aujourd’hui l’une des plus intéressantes carrières qui soient, à Liverpool d’abord, et bientôt à l’opéra de Los Angeles. Je découvre dans le tout dernier numéro de BBC Music Magazine, un article dont le ton et le titre sont sans équivoque : Tchaikovsky 6 with passion and power

Et toujours mes humeurs et réactions à l’actualité sur mes brèves de blog

2890 jours : ils ont fait Montpellier (III) 17 opéras

Dès sa fondation en 1985, le Festival Radio France Occitanie Montpellier s’est singularisé dans le paysage musical international par la programmation d’ouvrages lyriques rares, voire inédits, de redécouvertes considérables. C’est une politique que j’ai résolument poursuivie, de 2014 à 2022, durant mon mandat de directeur du festival (lire 2890 jours), même si la pandémie d’une part, les réductions budgétaires d’autre part, nous ont obligé à réduire la voilure.

Il n’empêche que la liste des oeuvres jouées durant 8 éditions, et des interprètes engagés à cette fin, ne laisse pas d’impressionner.

2015 : Bodin de Boismortier, Offenbach, Lalo

(L’affiche du Festival 2015 avait été créée par l’artiste Gérard Matharan disparu en avril 2022)

Joseph Bodin de Boismortier : Don Quichotte chez la Duchesse

L’Opéra de Versailles reprenait cette fin janvier le spectacle inauguré en 2015 à MontpellierDon Quichotte chez la Duchesse – dirigé par Hervé Niquet et mis en scène par Gilbert et Corinne Bénizio (ex- Shirley et Dino)

(De gauche à droite : Corinne Bénizio, Jany Macaby, Hervé Niquet, Gilles Bénizio, JPR)

Jacques Offenbach : Fantasio

Ce fut l’événement du Festival 2015, une authentique redécouverte d’un ouvrage oublié d’Offenbach, qui a depuis fait les beaux soirs de l’Opéra-Comique (lire Brillante résurrection de Fantasio)

Edouard Lalo : La Jacquerie

2016 : Rameau, Offenbach, Aboulker, Mascagni

Jean-Philippe Rameau : Zoroastre

Pietro Mascagni : Iris

Isabelle Aboulker : Marco Polo et la Princesse de Chine

Jacques Offenbach : Ba-Ta-Clan

Il faut préciser ici que cette pochade avait été programmée avant les attentats du 13 novembre 2015 dans la salle de spectacle – le Bataclan – qui tire son nom de l’ouvrage d’Offenbach, et que ce concert a été dédié à toutes les victimes du terrorisme.

2017 : Bellini, Giordano et le mélange Niquet

2018 : Offenbach, Destouches, Delibes


2019 Pomme d’Api et Fervaal

Jacques Offenbach : Pomme d’Api

L’événement de ce festival 2019 c’est la restitution intégrale d’une partition devenue mythique à force de ne jamais avoir été jouée, a fortiori représentée, Fervaal de Vincent d’Indy.

Vincent d’ Indy, Fervaal Op. 40 

Opéra en 3 actes et un prologue sur un livret du compositeur d’après le poème « Axel » d’Esaias Tégner.

Michael Spyres (ténor), Fervaal
Gaëlle Arquez (mezzo-soprano), Guilhen
Jean-Sébastien Bou (baryton), Arfagard
Elisabeth Jansson (mezzo-soprano), Kaito
Nicolas Legoux (basse), Grympuig
Eric Huchet (ténor), Lennsmor
Kaëlig Boché (ténor), Edwig
Camille Tresmontant (ténor) 4ème Paysan, 1er Paysan sarrazin, Chennos
François Piolino (ténor), Ilbert
Rémy Mathieu (ténor), Ferkemnat, Moussah
Matthieu Lécroart (baryton), Geywihr, 5ème Paysan
Eric Martin-Bonnet (basse), Penwald, Buduann
Pierre Doyen (baryton), le Messager, 3ème Paysan, 2ème Paysan sarrazin
Jérôme Boutillier (baryton), 1er Paysan, Gwellkingubar
Anas Seguin (basse), Berddret
Guilhem Worms (baryton-basse), Helwrig
François Rougier (ténor), 2ème Paysan, Le Berger, Le Barde

Choeur de la Radio Lettone
Choeur de l’Opéra national de Montpellier Occitanie
Orchestre national de Montpellier Occitanie
Michael Schonwandt, direction

Il y avait un projet d’édition de cette soirée en CD, qui n’a jamais abouti pour des raisons non artistiques… Mais les amateurs peuvent retrouver l’intégralité de la soirée du 24 juillet 2019 sur YouTube

2021 Pas de Bacchus mais une création

Nous avions prévu, d’abord en 2020, puis en 2021, de redonner vie à un opéra de Massenet, Bacchus. Projet annulé en 2020 pour cause de pandémie.. et en 2021 pour cause de conséquences de la pandémie ! Trois ans après, tout le monde semble avoir oublié que si les festivals ont pu reprendre leur activité, c’était au prix de restrictions toujours en vigueur en matière de nombre de spectateurs, et bien sûr de distanciation sur scène, aussi bien en répétition qu’en concert. Or Bacchus exigeait un nombre important d’interprètes et surtout plusieurs formations additionnelles en coulisses. Nous avons dû très vite nous résoudre à annuler l’opération, au grand dam du chef, des musiciens et des chanteurs qui avaient travaillé sur cette partition reconstituée pour l’occasion.

Mais en co-production avec l’Opéra de Montpellier, ce fut la création de l’opéra de Philip Venables Denis et Katya.

(De droite à gauche : Philip Venables, Ted Huffmann, Jakub Jozef Orlinski et JPR)

2022 Hamlet d’Ambroise Thomas

En 2022, un seul opéra, mais pas le moindre, pour illustrer la thématique « so British » de cette édition : Hamlet d’Ambroise Thomas, mais pas dans la version baryton, la plus jouée, dans celle où le rôle-titre est chanté par un ténor. Et quel ténor en ce 15 juillet 2022 avec John Osborn !

Prochain « épisode » : les chanteurs, chanteuses, en concert ou en récital !

Naissance d’un théâtre

Méprise

Il y a trois mois, j’évoquais ici même, avec enthousiasme, la réédition des Mémoires de l’un des plus grands musiciens du XXème siècle, le chef d’orchestre Désiré-Emile Inghelbrechtdes Mémoires publiés en 1947 sous le titre Mouvement Contraire, Souvenirs d’un musicien.

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Avant-hier je découvrais, par hasard, sur Facebook que l’éditeur de ce magnifique ouvrage me prenait à partie en des termes peu amènes :

« Content de lire (avec retard) cette chronique du blog du directeur bien connu du Festival de Radio France sur les souvenirs d’Inghelbrecht, mais gageons que l’illustre Monsieur Rousseau n’a pas ouvert le livre publié par la Coopérative : sinon il se serait aperçu que la 4e de couverture du livre ne dit pas que D.E. Inghelbrecht est le « plus grand chef d’orchestre français de sa génération », ce qui serait évidemment faux (d’Ansermet à Désormières, c’est une génération fabuleuse), mais « l’un des plus grands », ce qui est en revanche incontestable. La phrase pour laquelle il nous traite de « présomptueux » ne figurait que sur notre site internet… (et nous l’avons rectifiée depuis). Il trouve la couverture moche, c’est son droit, mais sans doute n’a-t-il pas reconnu le conservatoire de Paris longuement évoqué dans le livre, avec sa porte battante qui faillit tuer Ambroise Thomas. Mais tout en décalquant quelques phrases de notre argumentaire sur notre site, il ne dit pas que ce volume, par rapport à l’édition originale (celle qu’il possède, c’est certain), est enrichi de plus de 35 photos et documents qui ne s’y trouvaient pas (Inghelbrecht se plaignait que son éditeur trop économe lui ait refusé beaucoup d’illustrations), ni que nous avons établi la discographie d’Inghelbrecht la plus complète à ce jour, avec quelques références qui ne se trouvent même pas à la Bibliothèque nationale.
Bref, le livre ne risque guère de se vendre, dit-il, et il est bien placé pour le savoir : il ne l’a jamais eu entre les mains. Contrairement à ce qu’il annonçait, il n’est d’ailleurs pas revenu sur ce livre. »

Nous nous sommes, depuis, expliqués sur ce réseau social. Evidemment, contrairement à ce qu’écrivait M. Masson, j’ai acheté ce livre, chez un de mes libraires parisiens – car j’achète toujours mes livres chez un libraire, et je ne demande jamais de « service de presse » ! – j’en ai déjà lu maints chapitres, mais j’ai, je le concède, failli à la promesse que j’avais faite à la fin de mon article du 15 décembre dernier : « Je reviendrai sur plusieurs chapitres de ces Mémoires « à l’envers », et des pages savoureuses, par exemple sur le concert inaugural du Théâtre des Champs-Elysées, sa première rencontre avec Debussy, ses démêlés à l’Opéra-Comique, etc. ».

D’allure assyrienne

Le chapitre XV de Mouvement contraire est sobrement intitulé 1912-1913 Le Théâtre des Champs-Elysées.

D’abord cette description savoureuse de l’un des personnages les plus importants de la vie parisienne du tournant du siècle Gabriel Astruc (1864-1938)

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« De forte corpulence et d’allure assyrienne, Astruc était généralement vêtu avec l’élégance qu’on nommait alors celle du boulevardier. À la belle saison, il coiffait hardiment le chapeau melon ou le haut-de-forme gris des turfistes. Son goût inné des bijoux se révélait à la perle de sa cravate, aux lourdes bagues gemmées qu’il portait au petit doigt velu de chacune de ses mains, aux émeraudes de ses manchettes et à l’épaisse gourmette d’or qui entourait son poignet droit. Sa boutonnière était invariablement ornée d’un oeillet pourpre qu’il abandonna dès qu’il put le remplacer par un ruban de la Légion d’honneur, longuement convoité.

Journaliste, chroniqueur parlementaire de 1885 à 1895, Gabriel Astruc a fondé en 1897 une société d’éditions musicales, d’abord chez son beau-père Wilhelm Enoch, puis à son propre compte. Comme éditeur, il publie notamment Shéhérazade et le Quatuor de Maurice Ravel, avant de céder ces deux œuvres aux éditions musicales Durand en 

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Concert inaugural

Inghelbrecht avait eu une première collaboration avec Astruc en 1906. Le chef d’orchestre reconnaît que la cordialité de ses relations avec l’intrépide impresario n’était pas étrangère au fait qu’il était le gendre d’un vieil ami d’Astruc, le peintre, sculpteur, affichiste suisse Théophile Steinlen (Colette Steinlein, après ce premier mariage de 1910 à 1920 avec Inghel, épousera en secondes noces un autre chef d’orchestre Roger Désormière !).

C’est au jeune Désiré-Emile que Gabriel Astruc confie la lourde mission de recruter l’orchestre et les choeurs du futur théâtre des Champs-Elysées:

« Jusqu’ici, pour les Grandes Saisons, il était fait appel aux choristes et aux musiciens d’une grande association parisienne. Cette collaboration ne pouvait plus être envisagée désormais, le nouveau théâtre lyrique devant s’assurer, aussi bien que l’Opéra et l’Opéra-Comique, de l’exclusivité de son personnel…. »

La suite mérite une lecture attentive… et instructive. Les démêlés, les négociations du chef « recruteur » avec les syndicats, les représentants des musiciens, les questions de cumul, d’exclusivité, de salaires…en 1913, tels qu’Inghelbrecht les relate, sont encore d’une étonnante actualité ! Comme si rien n’avait changé en un siècle…

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« C’est par miracle que l’on put être prêt quand même à la date fixée pour le concert inaugural – le 2 avril 1913 – à l’occasion duquel Astruc n’avait pas craint de réunir – pour deux heures – dans une apparente union sacrée, les plus illustres musiciens d’alors. Saint-Saëns, Fauré, d’Indy, Debussy et Dukas se succédèrent au pupitre, tandis que m’était échu de diriger l’Ode à la Musique de Chabrier et le Scherzo de Lalo. »

De Compiègne à Bordeaux : Raretés lyriques

On est habitué aux raretés au Festival Radio France Occitanie Montpellier, c’est même la marque de fabrique de la manifestation qui fêtera son 35ème anniversaire (et sa 36ème édition !) du 10 au 30 juillet prochains (cf. Fervaal de D’Indy le 24 juillet 2019)

C’est nettement moins souvent le cas – euphémisme ! – dans la programmation des saisons d’opéra. Pourtant, entre dimanche dernier et hier soir, j’ai été gâté : une création à Compiègne, une première française (?) à Bordeaux.

Connesson à Compiègne

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« Vivre d’amour et d’eau fraîche, c’est une chose. Ç’en est une autre de mourir d’amour et d’eaux thermales… Né de la rencontre du romancier Olivier Bleys et du compositeur Guillaume Connesson, cet opéra-comique contemporain mêle les joies de la répartie, les plaisirs d’une enquête policière, le souffle du thriller, et les vertiges de l’amour au-delà de la mort. Une œuvre moderne à l’ancienne, menée avec finesse, humour, et parfumée de quelques gouttes de fantasmagorie. »

C’est en ces termes que l’Athénée-Théâtre Louis Jouvet annonce les représentations des Bains Macabres de Guillaume Connesson qui, à partir de ce vendredi, prennent le relais de celles qui ont été données au théâtre impérial de Compiègne le week-end passé.

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Evidemment, on était intrigué par ce que ce diable de Guillaume Connesson (lire Les nouveaux modernes) tout juste quinquagénaire, à l’éternelle allure de gendre idéal, allait nous réserver dans un genre qu’il aborde pour la première fois.

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On se dit d’emblée, dans ce théâtre de Compiègne qui sonne si idéalement bien, qu’il n’y aura pas tromperie sur la qualité de la musique. Les ombres de Poulenc, Fauré, Messager, ces couleurs, alliages instrumentaux et transparences qui ne sont qu’à la musique française, Connesson en fait son miel, et délivre une partition qui tient en haleine tout au long d’une action – un livret du Québecois Laurent Siaud – qui eût gagné à plus de concision, de folie et de rebondissements. On n’est pas loin de partager l’avis de Benoît Fauchet qui assistait à cette création pour Diapason (lire : Guillaume Connesson plonge dans les eaux anciennes de l’opéra-comique.)

Belle distribution, les excellents musiciens de l’orchestre Les Frivolités parisiennesdirection au cordeau d’Arie van Beek.

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Le Démon à Bordeaux

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Pour une rareté, c’en est une que celle qu’affiche le Grand Théâtre de Bordeaux jusqu’au 9 février : Le Démon, opéra en trois actes d’Anton Rubinsteincomposé en 1871 et créé en janvier 1875 au théâtre Marinski de Saint-Pétersbourg, à partir du poème éponyme de Lermontov

Survolant le Caucase, le Démon tombe amoureux de Tamara, une jeune Géorgienne qui attend le retour de son fiancé. L’esprit du mal fait tomber ce dernier dans une embuscade, où il perd la vie. Le Pervers poursuit ensuite la jeune fille, qui court s’enfermer dans un monastère. Le Démon parvient à la convaincre qu’il renoncera au mal pour elle. Tamara meurt lorsque le Démon l’embrasse. Un ange enlève la jeune fille à ce moment. Le Démon continue à rôder, « seul et sans espoir« , dans l’univers.

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Pour la première hier soir (et la deuxième représentation demain), le titulaire du rôle-titre, le baryton-basse français Nicolas Cavallier s’était fait porter pâle – une mauvaise angine – C’est un tout jeune chanteur russe, Alexei Isaiev, qui l’a remplacé au pied levé, et avec quelle grâce, quelle musicalité !

206A71F4-4777-4531-BF21-42CE947471F8Avec dans la voix des couleurs qui rappelaient celles du regretté Dmitri Hvorostovsky – disparu il y a deux ans, vaincu par le cancer – qui chantait ici dans une version de concert ce Démon qu’il incarnait à la perfection.

La mise en scène de ce Démon bordelais est due au directeur du théâtre Helikon de Moscou, Dmitri Bertman. On s’attendait à vrai dire à autre chose que cette vision très datée, très sixties.

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C’est sur le plateau et dans la fosse qu’il faut chercher le succès de cette première : surprise de retrouver en Tamara la formidable Evgenia Muraveva qu’on avait tellement aimée dans La Ville morte de Korngold à Toulouse en décembre 2018. A l’exception du prince Dougal à la voix ingrate et fruste du ténor Alexei Dolgov, tout le reste de la distribution est à louer. De même que les choeurs qui ont fort à faire dans cette partition foisonnante.

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Il fallait un chef de l’envergure de Paul Daniel, le toujours inspiré directeur musical de l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine, pour traduire le foisonnement d’une musique puissamment romantique, sans verser dans Wagner, manier un orchestre mis à rude contribution par le compositeur, tant les changements de décor sonore, d’atmosphère, sont fréquents. Bien sûr on entend souvent Tchaikovski (dont Anton Rubinstein a été le professeur !) et, comme chez tous les Russes, un substrat populaire (certes moins évident que chez Borodine ou Rimski-Korsakov) qui transparaît dans les pages chorales.

On se réjouit de pouvoir écouter bientôt l’ouvrage sur France Musique et on ne peut que recommander à ceux qui le peuvent de se rendre au Grand Théâtre de Bordeaux !

IMG_8841(Domingo Hindoyan, JPR, Paul Daniel)

A l’issue de la représentation, le bonheur de retrouver un autre chef ami, présent à Bordeaux ce jeudi soir pour diriger un programme Schubert/Strauss avec l’ONBA, Domingo Hindoyanqui sera le 17 juillet à Montpellier, pour diriger son épouse, Sonya Yoncheva, dans Fedora de Giordano, dans le cadre du Festival Radio France 2020 (#FestivalRF20)

 

 

Madame Butterfly à Montpellier

En moins de deux semaines, j’aurais pu assister à trois représentations différentes de Madama Butterfly, l’opéra de PucciniÀ Paris (dans l’inépuisable mise en scène de Bob Wilson, déjà vue au moins deux fois), à Liège et à Montpellier.

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C’est à Montpellier, dans une salle qui m’est familière – l’Opéra Berlioz – où ont lieu les soirées du Festival Radio France, que j’ai assisté à la première des trois représentations de Madame Butterfly proposées par l’Opéra-Orchestre National de Montpellier Occitanie

J’ai beaucoup aimé ce que j’ai vu et entendu mercredi soir.

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On aurait pu imaginer une direction plus investie, plus chatoyante, tant la musique sublime de Puccini y invite, mais les forces musicales de Montpellier, orchestre et choeurs, ont, quelques semaines après l’éblouissant Fervaal dans le cadre du Festival Radio Francefait une nouvelle démonstration de leurs qualités d’ensemble.

IMG_6185(Noëlle Geny et le choeur de l’Opéra national de Montpellier)

Mise en scène juste, épurée, sensible de Ted Huffman

Distribution, comme toujours à Montpellier, à peu près parfaite : les chanteurs ont la voix et le physique de leurs rôles (ce qui n’était pas tout à fait le cas lors d’un récent Don Giovanni).

Karah Son est une Butterfly bouleversante, voix d’airain qui sait user de ses fragilités, le Pinkerton du jeune ténor chilien Jonathan Tetelman a toutes les séductions, la voix n’est pas très puissante, mais le timbre est solaire et la prestance admirable. Mêmes compliments pour le Sharpless d’Armando Noguera, qu’on a déjà entendu sur d’autres scènes, et la Suzuki ombrageuse de Fleur Barronet tous les autres rôles.

Pour ceux qui le peuvent, précipitez vous ce soir ou dimanche après-midi au Corum de Montpellier. Et pour tous les autres, l’indépassable version Freni-Pavarotti-Karajan !

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Berlioz à Versailles

On avait quitté un ténor épuisé mais rayonnant après avoir chanté l’inchantable rôle de Fervaal de Vincent d’Indy le 24 juillet dernier à Montpellier (#FestivalRF19)

IMG_4454On était impatient de retrouver Michael Spyres dans le Benvenuto Cellini de Berlioz ce dimanche à l’Opéra royal de Versailles.

D’abord on n’est jamais déçu quand on vient à Versailles, tant la programmation de Laurent Brunner est captivante. Et les lieux inspirants.

L’affiche de ce dimanche était de surcroît l’une des plus prometteuses qui se puissent imaginer. John Eliot Gardiner (qu’on avait entendu l’an passé au festival Berlioz.. mais diriger des cantates de Bach – Les Nuits de la Côte) à la tête de ses ensembles, le Choeur Monteverdi et l’Orchestre Révolutionnaire et Romantique. Et une distribution de haut vol, quoique inégale :

Michael Spyres Benvenuto Cellini
Sophia Burgos Teresa
Maurizio Muraro Giacomo Balducci
Lionel Lhote Fieramosca
Tareq Nazmi Pope Clement
Adèle Charvet Ascanio
Vincent Delhoume Francesco
Ashley Riches Bernardino
Duncan Meadows Perseus

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Je laisse aux spécialistes le soin de critiquer les performances vocales des uns et des autres. J’ai pour ma part retrouvé la flamboyance de Michael Spyres, et distingué les prestations d’Adèle Charvet (elle aussi présente à Montpellier en juillet dernier… comme chaque année ou presque !), ou Lionel Lhote, mais plus que tout la direction magistrale de Gardiner et l’exceptionnelle cohésion de ses troupes. Le Choeur Monteverdi est soumis à rude épreuve tout au long de l’ouvrage par l’écriture virtuose de Berlioz d’abord et la redoutable précision de la baguette du chef britannique.

On est d’autant plus impatient de voir le DVD qui sera publié de cette représentation.

En attendant, on peut, on doit même écouter cette déjà riche collection d’enregistrements berlioziens de John Eliot Gardiner

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Les hasards du placement m’avaient fait asseoir à côté d’un voisin, que je n’ai reconnu qu’à la fin du concert, le chanteur Pascal Bertin qui a annoncé il y a quelques jours qu’il cessait de chanter pour se consacrer à d’autres activités, comme la direction artistique du festival de Pontoise. Ce qu’il dit de la musique et de son festival ne peut que nous inviter à partager quelques belles prochaines soirées. Une interview à lire ici.

Des souvenirs et des hommes

Je viens de mettre la dernière main au communiqué de presse qui relate le bilan de la 35ème édition du Festival Radio France Occitanie Montpellier : 101.400 spectateurs pour 153 événements, soit une augmentation de près de 9% par rapport à 2018.

Des chiffres, il faut des chiffres, on donne des chiffres !

Mais aucun chiffre ne restituera jamais la densité des souvenirs, des émotions, des rencontres, des découvertes qu’a permis le festival. Ni le bonheur d’auditeurs/spectateurs qui, cette année plus que lors d’éditions précédentes, m’ont dit leur surprise, leur enthousiasme, d’avoir pu entendre des oeuvres, des artistes qui leur étaient complètement inconnus, de pénétrer des univers musicaux qui leur étaient étrangers.

Le 19 juillet, j’avais une excellente raison de demander à Emmanuel Krivine de diriger Die Seejungfrau (La petite sirène) de Zemlinsky : c’est très exactement dix-neuf ans plus tôt (en juillet 2000) que j’avais découvert le capiteux triptyque symphonique du beau-frère de Schoenberg, à Montpellier… sous la baguette d’Emmanuel Krivine qui prenait alors congé de l’Orchestre National de Lyon qu’il avait victorieusement conduit depuis 1987. J’avais scellé les prémices de la relation à venir entre le chef français et l’Orchestre national de France avec cette même oeuvre en octobre 2015 (Capiteux)Je voulais raviver ces deux souvenirs. Le résultat fut au-delà de mes espérances.

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Emmanuel Krivine passe pour être d’un abord difficile, compliqué dans  ses relations de  travail.  Je n’ai jamais directement travaillé avec lui, bien qu’il m’eût proposé de le faire dès 1987 (j’avais refusé sa proposition, j’étais arrivé depuis peu à la Radio Suisse romande et ne m’en voyais pas partir aussi vite), mais je n’ai jamais éprouvé de difficulté avec lui, au contraire !

IMG_4475Santtu-Matias Rouvali, Jean-Luc Votano et Magnus Lindberg après un fabuleux concert le 25 juillet

IMG_4436Magnus Lindberg attentif et bienveillant

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Les spectateurs de l’Opéra Berlioz, les auditeurs de France Musique, et la presse internationale venue en nombre, ne s’y sont pas trompés : Fervaal de Vincent d’Indy constituait, ce 24 juillet, l’événement lyrique de l’été : Le Figaro : Fervaal ressuscité à Montpellier et le héros de la soirée était l’époustouflant Michael Spyres.  Un concert à réécouter sur France Musique !

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Extraordinaire ambiance mardi 23 juillet avec l’Australian Youth Orchestra (AYO), dont c’était l’unique étape en France d’une belle tournée européenne : le pianiste Jan Liesecki (qui était déjà venu, quasiment en culottes courtes, jouer au Festival en récital !)   jouait le 2ème concerto de Rachmaninov et Krzysztof Urbanski donnait l’une des plus belles 10ème symphonie de Chostakovitch qu’il m’ait été donné d’entendre.

En présence du très médiatique ambassadeur d’Australie en France, Brenden Berne (à qui je trouve une étonnante ressemblance avec Philippe Jordan !)

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Le festival ce sont aussi des dizaines de concerts dans des dizaines de lieux magnifiques de la région, et des publics toujours plus nombreux et curieux.

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Comme je l’ai déjà raconté souvent ici (L’air du Nord : Magnus Lindbergtout est affaire d’amitié, d’enthousiasme, d’envie, de désir, de curiosité. J’ajoute un élément, pour moi, déterminant : la simplicité, qui est la marque des plus grands. Rien d’affecté, d’artificiel, dans le comportement de ces fantastiques artistes. Presque timides sous les félicitations, mais intensément chaleureux lors des retrouvailles (L’arrivée de l’orchestre de Tampere)

Lorsque viendra le temps de se rappeler les moments-clé de cette aventure, les rencontres humaines seront au moins aussi fortes que les émotions musicales.

Le Nord toujours

Quelques images de ces derniers jours au Festival Radio France (#FestivalRF19)

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Le samedi 13 juillet, le violoniste italien, Vikram Sedona19 ans, joue Bach devant une salle comble de spectateurs/auditeurs de 3 mois à 80 ans, attentive et silencieuse, fascinée par le son de ce seul violon, à Saint-Bauzille de Montmel (1000 habitants)

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Le même soir, l’Orchestre du Capitole de Toulouse est à la salle Berlioz de Montpellier sous la direction de Tugan Sokhiev. Bertrand Chamayou et David Guerrier sont les solistes particulièrement inspirés du 1er concerto pour piano et trompette de Chostakovitch.

IMG_4105Le lendemain, 14 juillet, journée particulièrement riche ! Trois récitals de piano (ci-dessus Lukas Krupinski),

91P2Gr81nxL._SL1500_un programme autour du Stabat Mater de Haydn avec le Concert de la Loge et Julien Chauvin à l’Opéra Comédie, et le soir, au Domaine d’O, le premier d’une belle série de concerts de Jazz, avec l’Amazing Keystone Big Band et Celia Kameni.

IMG_4122Discussion avec David Ehnco (à droite) et Pascal Rozat (à gauche), programmateur des soirées Jazz du Festival Radio France.

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Le lundi 15 juillet, dès potron-minet, rendez-vous dans les studios de France Bleu Hérault pour la matinale de France Musique animée par Clément Rochefort.

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Le soir même, une venue très attendue, Gidon Kremer, Tatiana Grindenko et la Kremerata Baltica.

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Emotion palpable, silence absolu, un auditoire bouleversé, comme le soir de la création en 1977, par Tabula Rasa d’Arvo Pärt. Un concert à réécouter ici : Kremerata Baltica

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Le lendemain, tout le monde attendait le retour d’Evgueni Kissin après dix ans d’absence de Montpellier.

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Et hier soir, Hervé Niquet reprenait, pour le public du Festival Radio France et surtout les auditeurs de France Musique, le programme qu’il avait déjà conduit chez Berlioz à La Côte Saint-André (voir Les Nuits de la Côte). 

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Et puis, les hasards d’un déjeuner en terrasse me font rencontrer un personnage très attendu de ce Festival, le ténor Michael SpyresIl est bien arrivé à Montpellier et s’apprête à chanter le rôle-titre de Fervaal de Vincent d’Indyune bagatelle !

 

 

Le postillon de Paris

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L’Opéra Comique à Paris s’est durablement abonné au succès. Après Hamlet, La Nonne sanglanteLe Comte Ory, Le Timbre d’argentFantasio pour s’en tenir aux plus récents ouvrages qu’on y a vus, Olivier Mantei renouvelle l’exploit avec ce Postillon de Lonjumeau d’Adolphe Adam à l’affiche de la salle Favart.

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« Comme toujours, la postérité est capricieuse. Du vaste corpus d’Adolphe Adam (1803-1856) qu’a-t-on retenu? Le ballet Giselle (que Tchaïkovski citait toujours en exemple) et le cantique Minuit, chrétiens. C’est bien peu, si l’on songe que son œuvre compte une cinquantaine d’opéras, une quinzaine de ballets, des opérettes, des vaudevilles, des cantates, et même une messe pour le retour des cendres de Napoléon aux Invalides!…/À tort ou à raison, le rouleau compresseur de la mémoire a rempli son office et Adam est passé à la trappe. Seul Le Postillon de Lonjumeau éveille encore les souvenirs des passionnés de musique française. Créé en 1836, cet opéra-comique obtint un succès instantané et fulgurant, et fit aussitôt le tour des scènes d’Europe. Omniprésent à Paris, il disparut pourtant de la Salle Favart en 1894, pour n’y jamais revenir/…/Le Postillon, c’est d’abord une histoire d’opéra. Fieffé chanteur, Chapelou n’est que postillon à Lonjumeau. Le jour de ses noces, il entonne son air fétiche, dans lequel il atteint un éclatant contre-ré. Il est aussitôt débauché par un membre de la cour, qui l’invite à rencontrer le roi. Et voilà notre Chapelou qui laisse en plan mariage et jeune épouse, pour aller chanter devant le souverain… Il ne retrouvera sa femme délaissée que… dix ans plus tard, devenu une étoile de l’opéra. Celle-ci va mettre en place un stratagème pour le confondre, et se venger » (Le Figaro, 29 mars 2019)

Excellente surprise lundi soir ! D’abord l’ouvrage – qu’on connaissait un peu par le disque – se laisse écouter avec bonheur, le compositeur de Giselle est un mélodiste et un orchestrateur astucieux et. cultivé, il connaît son XVIIIème siècle ! Quelques longueurs parfois, une sorte de leitmotiv (le début de l’air le plus célèbre Ah mes amis…), mais dans la fosse et sur scène une équipe qui enlève le morceau avec un charme et un chic fous.

A commencer par le ténor, lui aussi abonné à l’Opéra Comique, l’irremplaçable Michael Spyres*, compose un personnage haut en couleur, chante avec grâce en un français exemplaire (Ph.Venturini, Les Echos), pousse sans difficulté ses contre-ut et contre-ré, et garde en permanence une qualité d’émission et de chaleur de la voix, qui me font souvent penser à son illustre aîné, Nicolai Gedda(1925-2017)

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https://www.youtube.com/watch?v=Hueuxv3lb2U

Mais pour moi la révélation de la soirée a été la jeune soprano canadienne Florie Valiquette qui endosse avec allure et grâce le double rôle Madeleine-Latour, le vrai caractère fort de la pièce (Les Echos). Franck Leguérinel campe un marquis de Corcy torve et ridicule à souhait.

Michel Fau se régale (en impayable suivante travestie de Madame de Latour) et règle à la perfection la mécanique d’une intrigue invraisemblable. Et Sébastien Rouland mène joyeusement d’impeccables musiciens, les membres du choeur Accentus et l’orchestre de l’opéra de Rouen. Décors somptueux d’Emmanuel Charles et costumes à l’avenant de Christian Lacroix !

Encore quatre représentations à l’Opéra Comique ! 

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*Michael Spyres crée l’événement le 24 juillet prochain en s’attaquant au rôle présumé inchantable de Fervaal.

L’opéra de Vincent d’Indy est donné en version de concert dans le cadre du Festival Radio France Occitanie Montpellier (réservations : lefestival.eu)

 

 

 

Berlioz versus Stravinsky

Les Troyens c’est probablement l’ouvrage – un opéra en 5 actes ! – qui conforte ceux qui aiment autant que ceux qui détestent Berlioz. Les premiers y voient et y entendent les trouvailles géniales, l’absence de limites à une inventivité phosphorescente, les seconds y trouvent des longueurs loin d’être toujours « divines », les élucubrations d’un personnage mégalomane.

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Le spectacle qu’on a vu à l’opéra Bastille mercredi – devant un impressionnant parterre de directeurs d’opéras ! – n’aura sûrement pas fait changer d’avis les détracteurs du compositeur natif de La Côte Saint-André… mais pas non plus convaincu – c’est un euphémisme – ses admirateurs. On a connu metteur en scène plus inspiré (Dmitri Tcherniakov), fosse et plateau plus enthousiasmants. Occasion manquée. J’en reste au souvenir ébloui du spectacle vu à Amsterdam en 2010.

Consolons-nous si besoin avec quelques perles du coffret Berlioz (Berlioz Complete workscomme ce magnifique Nocturne à deux voix (jadis paru sous étiquette DGG)

Coffret Berlioz qui comprend la fantastique intégrale des Troyens captée à Strasbourg en novembre 2017 !

Signalons aux fans du ténor Michael Spyres – j’en suis ! – qu’il chantera le rôle-titre de Fervaal de Vincent d’Indy – en version de concert – le 24 juillet prochain à Montpellier dans le cadre du Festival Radio France !

Hier soir, à Radio France, célébration du talent et de la jeunesse : un violoncelliste de 20 ans devenu star mondiale par la grâce d’un mariage princier, un chef qui le toise du haut de ses…32 ans (!!) qu’on découvre à chaque concert, depuis 2014, plus pertinent, insolemment doué, charismatique – si le mot n’est pas trop galvaudé .

51600587_10156314440032602_7981583776243253248_nSheku Kanneh-Mason jouait le concerto d’Elgar et Santtu-Matias Rouvali dirigeait l’orchestre philharmonique de Radio France, en état de grâce, dans Debussy (Prélude à l’après-midi d’un faune, avec la flûte enchantée de Magali Mosnier) et Stravinsky (phénoménal Petrouchka). Rouvali avait déjà offert au public de Montpellier, en juillet 2018, un Sacre du printemps idiomatique, narratif, légendaire. Il renouvelle l’exploit avec Petrouchka, et quelle maîtrise exceptionnelle d’une partition qui reste, cent huit ans après sa création, d’une complexité intimidante pour les interprètes !

Un concert à écouter absolument sur francemusique.fr

Mon métier comporte son lot de contraintes, de déceptions, de désagréments, mais je les oublie vite quand j’ai la chance de rencontrer des artistes comme ces deux-là. Si simples, modestes, très conscients des risques d’une notoriété trop vite acquise, si profondément musiciens. Longue et belle vie à Sheku ! Quant à Santtu-Matias Rouvali, le prochain rendez-vous est déjà pris : il vient avec « son » orchestre philharmonique de Tampere à Montpellier pour deux concerts en juillet 2019 (#FestivalRF19) !

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