Encore un centenaire à commémorer cette année, celui de la mort d’Erik Satie le 1er juillet 1925. Comme pour Fauré récemment (lire La naissance de Fauré), je préfère célébrer la naissance du compositeur le 17 mai 1866 à Honfleur, où je me trouvais encore le dimanche de Pâques (voir brèves de blog du 20.04.2025).
Le moins qu’on puisse dire d’Erik Satie – et c’est une banalité de le faire – c’est qu’il cultivait à tous égards son originalité, d’abord dans sa musique. Bertrand Chamayou en parle d’excellence sur France Musique
J’aime beaucoup l’anthologie qu’a laissée Daniel Varsano (1953-1988)
En dehors du piano, qu’il faut explorer au-delà des pièces les plus célèbres, Satie lègue des oeuvres pour la voix et l’orchestre qui restent singulières dans le paysage musical de l’époque
Avouons qu’on n’attend pas Elly Ameling aussi parfaite dans cette valse chantée :
Merveilleux Manuel Rosenthal à la tête de l’Orchestre national dans la version de référence de Parade, le ballet composé sur un argument de Cocteau, avec des décors de Picasso, créé en 1917 au Châtelet
Sept ans plus tard, c’est Picabia qui recherche sciemment à provoquer le scandale avec son spectacle Relâche, sur une musique de Satie.
Michel Plasson a réalisé à Toulouse une superbe anthologie de l’oeuvre orchestrale de Satie
Pour resituer Erik Satie dans son temps, le coffret de 13 CD publié par Sony en 2014 est une aubaine (détails à voir ici)
Le plus savoureux reste ces Mémoires d’un amnésique :
Si je voulais résumer cette semaine en partie parisienne, je le ferais d’une formule : deux concerts, deux expositions, une déception.
Mercredi ce fut d’abord balade dans Paris sous le premier soleil de printemps. Un régal (voir l’album Paris 2 avril 2025). Et le soir au théâtre des Champs-Elysées un grand moment de musique avec deux frères hollandais repérés lors d’un 1er janvier à La Haye et invités à jouer à la Salle Philharmonique de Liège à l’automne 2009, Arthur et Lucas Jussen. Jeanine Roze leur avait fait faire leurs débuts parisiens en mars 2023, près de quinze ans après leur premier récital hors des Pays-Bas. Du piano 5 étoiles comme je l’ai écrit pour Bachtrack: Le sacre des frères Jussen au théâtre des Champs-Elysées
C’est le bis qu’ils ont joué après l’ovation monstre qui a salué leur Sacre du printemps.
Léger & Co.
L’après-midi même j’avais visité l’exposition qui vaut mieux que son titre jeu de mots, au musée du Luxembourg, rue de Vaugirard.
Je ne suis pas fou de ce genre d’expo-concept, mais je dois reconnaître que j’ignorais les fils qui reliaient Fernand Léger à certains de ses contemporains ou de ses successeurs (si tant est que le concept de successeur ait une quelconque validité s’agissant d’artistes peintres). Par exemple entre ce tableau de Fernand Léger et cette sculpture d’Yves Klein : le bleu sans doute !
En revanche, la déception est venue de l’expo Disco, organisée à grand renfort de communication – visites impossibles le week-end en raison de l’affluence ! – à la Philharmonie de Paris.
On a eu pitié du personnel de surveillance qui doit se taper une ambiance boîte de nuit autour d’une fausse piste de danse. Pour le reste, peu de documents vraiment informatifs ou exclusifs, des photos, des vidéos vues cent fois dans des documentaires ou sur les réseaux sociaux. Rien ou presque du règne du disco en France (une série de photos, cf. ci-dessus, prises au Palace). Quelques tenues de scène de Sheila, Dalida ou Patrick Juvet. Rien sur les boîtes de nuit à la mode à la fin des années 70/80 telles que je les ai connues (lire Mes années disco). On peut voir quelques photos sur mon album Expo Disco / Philharmonie.
Si la situation prêtait à sourire, je me suis demandé en voyant deux ou trois photos d’eux dans l’expo si le président américain – que je me refuse à citer – savait que ce sont deux Français Henri Belolo et Jacques Morali qui ont créé, en 1978, son groupe fétiche les Village People…
En sortant de la Philharmonie, le contraste avec cet enclos était saisissant.
Ce jeudi soir, j’étais de retour cette fois dans la salle de concert de la Cité de la Musique.
Je suis en train de terminer mon papier pour Bachtrack, mais puisque le concert a été filmé (et diffusé en direct par France Musique), je le livre ici sans commentaire. Mais je peux déjà dire que je ne suis pas sorti indemne de cette Voix humaine.
Il y a un mois j’avais beaucoup aimé son film L’Innocent. Louis Garrel est de retour, et pas dans n’importe quel rôle, dans le film de Valeria Bruni-Tedeschi, Les Amandiers, il y incarne Patrice Chéreau, qui fut le directeur de ce théâtre, devenu mythique, de Nanterre.
J’ai beaucoup aimé, l’histoire, la réalisation, les acteurs et actrices. Comme le journaliste qui interroge ici Valeria Bruni-Tedeschi :
« Patrice Chéreau est le plus vivant de tous les morts«
Ce film montre avec tant de justesse les élans, les espoirs, les douleurs de cette bande de jeunes apprentis acteurs, n’évite aucun des chocs de l’époque, la drogue, le SIDA. On a plus d’une fois été ému, sinon bouleversé. Les interprètes sont tous formidables, y compris les filles et fils de…Mention particulière pour celle qui est censée représenter VBT, Nadia Tereszkiewicz, et peut-être surtout Sofiane Bennacer, dans sa descente aux enfers. Je n’ai pas arrêté de penser à Patrick Dewaere… Evidemment Louis Garrel est plus Chéreau que nature jusque dans les attitudes, les tics, le langage ! Ne pas oublier celui qui fut son adjoint comme directeur de l’école de théâtre des Amandiers, Pierre Romans, ici incarné par Micha Lescot, emporté par le SIDA à 39 ans.
Allez voir ce film, vraiment !
Presque centenaire
Il y a fort à parier que, si Renaud Machart n’avait pas contribué à le faire connaître en France, notamment en traduisant l’un de ses Diaries, le nom de Ned Rorem (1923-2022) serait resté quasi inconnu.
« Un matin de mai 1949, un jeune Américain à la beauté ravageuse débarque au Havre. Comme beaucoup de jeunes gens de sa génération venus d’outre-Atlantique, le compositeur et écrivain Ned Rorem ne compte passer en France que quelques mois. Il y restera jusqu’en 1955. Ce sont ces années que retracent ce Journal parisien, un texte fameux aux Etats-Unis, qui, depuis sa parution, en 1966, n’avait jamais été encore traduit en français. Le Journal parisien fit scandale par la liberté de ton de son auteur, son insolence et sa cruauté, et par des indiscrétions qui ne furent pas appréciées de tous. Ned Rorem fait très vite la connaissance de Marie Laure de Noailles, qui deviendra sa plus sure alliée et sa plus chère amie à Paris. Elle le prendra sous son aile et le présentera au Tout-Paris artistique. Eberlué et crâne, séduit mais méfiant, le jeune compositeur fréquente Francis Poulenc, Salvador Dali, Georges Auric, Henri Sauguet, Jean Cocteau, Julien Green, Pablo Picasso, Julius Katchen, Paul Eluard, Pierre Boulez, Alice Toklas et la colonie américaine de Paris. Des années partagées entre le travail, la boisson, la rencontre de jeunes hommes ; la France, le Maroc (mais aussi l’Angleterre et l’Allemagne d’après guerre) ; l’amour, le désespoir. Le tout noté au fil d’une plume d’une redoutable précision de trait » (Présentation de l’éditeur)
Le compositeur américain est mort à New York ce samedi à l’âge respectable de 99 ans.
Quelques repères discographiques pour se faire au moins une petite idée de ce que Ned Rorem a représenté dans la musique du XXème siècle.
Les larmes de Leila K.
Il serait sans doute resté inconnu du grand public, si l’excellente Leila Kaddour – qui présente le journal télévisé de France 2 le samedi et le dimanche midi – n’avait pu retenir son émotion en annonçant sa mort.
Je ne connaissais pas personnellement, je n’ai jamais eu l’occasion de travailler avec lui, mais la brutale disparition de Pascal Josèphe, à 68 ans, a rappelé l’importance de celles et ceux qui, dans l’ombre, font vivre la télévision, et c’est tout aussi vrai pour la radio, les médias en général, les structures culturelles. Il y a ceux qui sont dans la lumière – Pascal Josèphe l’avait tenté, en se présentant à la présidence de France Télévisions en 2015 – et ceux, il en était, qui créent, donnent leur chance, promeuvent, innovent. C’est pour cela que sa mort bouleverse autant de monde…
C’était annoncé depuis l’été (lire Igor Markevitch et la zarzuela), attendu avec impatience. Deux coffrets reprenant les disques gravés par Igor Markevitch (1912-1983) pour Philips et pour Deutsche Grammophon.
C’est peu dire qu’on est comblé par le travail, une fois de plus remarquable, que le responsable de la collection Eloquence, Cyrus Meher-Homji a effectué d’abord pour rassembler l’intégralité des enregistrements réalisés par le chef d’origine russe pour le label hollandais Philips, et restaurer (« remasteriser » dit-on maintenant) les bandes d’origine, le plus spectaculaire étant la véritable résurrection des captations moscovites de 1962 (cf.ci-dessous)
Le « nettoyage » des bandes a aussi pour effet secondaire de rendre plus audibles les sonorités parfois crues de certaines phalanges – on a tant perdu l’habitude des saveurs parfois acidulées des bois français dans l’orchestre Lamoureux du début des années 60 ! – et, pour ce qui est des troupes espagnoles, chanteurs et orchestre, de défauts d’intonation et de justesse qui ne doivent pas cependant nous faire regretter de disposer enfin de ce patrimoine inattendu de la part de Markevitch.
CD 1 FRANZ JOSEPH HAYDN (1732–1809) 1–4 Symphony No. 103 in E flat major, H.I:103 ‘Drum Roll’* 5–8 Symphony No. 104 in D major, H.I:104 ‘London’* Orchestre des Concerts Lamoureux
CARL MARIA VON WEBER (1786–1826) 9 Preciosa – Overture, Op. 78, J.279 Orquesta Sinfónica de la RTV Española
*FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 2 WOLFGANG AMADEUS MOZART (1756–1791) 1–3 Piano Concerto No. 20 in D minor, KV 466 4–6 Piano Concerto No. 24 in C minor, KV 491 Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 3 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–4 Symphony No. 1 in C major, Op. 21* 5–8 Symphony No. 5 in C minor, Op. 67* 9–12 Symphony No. 8 in F major, Op. 93* Orchestre des Concerts Lamoureux *FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 4 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–4 Symphony No. 9 in D minor, Op. 125 ‘Choral’* Hilde Gueden, soprano Aafje Heynis, contralto Fritz Uhl, tenor Heinz Rehfuss, baritone Oratorienchor Karlsruhe Orchestre des Concerts Lamoureux
*FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 5 LUDWIG VAN BEETHOVEN (1770–1827) 1–3 Piano Concerto No. 3 in C minor, Op. 37 FRÉDÉRIC CHOPIN (1810–1849) 4–6 Piano Concerto No. 2 in F minor, Op. 21 Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 6 ALBAN BERG (1885–1935) 1–2 Violin Concerto ‘To the Memory of an Angel’ Arthur Grumiaux, violin Concertgebouworkest
ZOLTÁN KODÁLY (1882–1967) 5 Psalmus Hungaricus, Op. 13 Irina Arkhipova, contralto (Alto Rhapsody) Róbert Ilosfalvy, tenor (Psalmus Hungaricus) Russian State Academy Choir USSR State Symphony Orchestra
CD 7 GEORGES BIZET (1838–1875) 1–5 Carmen – Suite No. 1 6–10 Carmen – Suite No. 2 11–14 L’Arlésienne – Suite No. 1 15–17 L’Arlésienne – Suite No. 2 Orchestre des Concerts Lamoureux
CD 8 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 1 in G minor, Op. 13, TH.24 ‘Winter Daydreams’ 5–8 Symphony No. 2 in C minor, Op. 17, TH.25 ‘Little Russian’ London Symphony Orchestra
CD 9 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–5 Symphony No. 3 in D major, Op. 29, TH.26 ‘Polish’ London Symphony Orchestra 6 Francesca da Rimini, Op. 32, TH.46 New Philharmonia Orchestra
CD 10 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 4 in F minor, Op. 36, TH.27 5 Hamlet, Op. 67 London Symphony Orchestra New Philharmonia Orchestra
CD 11 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 5 in E minor, Op. 64, TH.29 London Symphony Orchestra
CD 12 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Symphony No. 6 in B minor, Op. 74, TH.30 ‘Pathétique’ London Symphony Orchestra
CD 13 PYOTR ILYICH TCHAIKOVSKY (1840–1893) 1–4 Manfred Symphony, Op. 58, TH.28 London Symphony Orchestra
CD 14 NIKOLAI RIMSKY-KORSAKOV (1844–1908) 1–5 Capriccio Espagnol, Op. 34 6–9 Scheherazade, Op. 35 Erich Gruenberg, soloviolin London Symphony Orchestra
NIKOLAI RIMSKY-KORSAKOV (1844–1908) 2 Russian Easter Festival, Overture, Op. 36
ALEXANDER BORODIN (1833–1887) 3 Polovtsian Dances (from Prince Igor) Netherlands Radio Chorus (Borodin) Concertgebouworkest
CD 16 IGOR STRAVINSKY (1882–1971) 1–10 Apollon musagète (1947 version) 11–14 Suite No. 1 for Small Orchestra 15–18 Suite No. 2 for Small Orchestra 19–22 Four Norwegian Moods 23 Circus Polka for a Young Elephant London Symphony Orchestra
CD 17 IGOR STRAVINSKY (1882–1971) 1–24 L’Histoire du Soldat Jean Cocteau, Jean-Marie Fertey, Peter Ustinov, narrators Manoug Parikian, violin Joachim Gut, double bass Ulysse Delécluse, clarinet · Henri Helaerts, bassoon Maurice André, trumpet · Roland Schnorkh, trombone Charles Peschier, percussion
25–27 Symphonie de Psaumes Boys’ and Male Voices of the Russian State Academic Choir Russian State Academy Orchestra
CD 18 MODEST MUSSORGSKY (1839–1881) Orch. Markevitch 1 Cradle Song 2 The Magpie 3 Night 4 Where art thou, little star? 5 The Ragamuffin 6 On The Dnieper Galina Vishnevskaya, soprano
NIKOLAI TCHEREPNIN (1873–1945) 7–13 Tàti-Tàti* Olga Rostropovich, piano
LEOPOLD MOZART (1719–1787) 14–16 Toy Symphony (Cassation in G major for Orchestra and Toys)°
GEORGES BIZET (1838–1875) 17–21 Jeux d’enfants – Petite Suite, Op. 22° Children’s Ensemble of the Moscow School of Music (Toy Symphony) USSR State Symphony Orchestra
*FIRST CD RELEASE ON DECCA °FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 19 GIUSEPPE VERDI (1813–1901) 1 La forza del destino – Sinfonia 2 Macbeth – Ballet Music (Act III) 3 La traviata – Prelude (Act I) 4 Luisa Miller – Overture 5 Aida – Overture 6 Giovanna d’Arco – Overture 7 La traviata – Prelude (Act III) 8 I vespri siciliani – Overture New Philharmonia Orchestra
Messa da Requiem* beginning 9–10 Requiem et Kyrie
CD 20 GIUSEPPE VERDI (1813–1901) 1–19 Messa da Requiem* conclusion Galina Vishnevskaya, soprano Nina Isakova, mezzo-soprano Vladimir Ivanovsky, tenor Ivan Petrov, bass Russian State Academy Choir Moscow Philharmonic Orchestra
*FIRST STEREO CD RELEASE ON CD
CD 21 FEDERICO MOMPOU (1893–1987) 1–8 Los Improperios Peter Christoph Runge, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
TOMÁS LUIS DE VICTORIA (c. 1548–1611) 9 Ave Maria 10 Vexilla regis Escolania de nuestra Señora del Buen Retiro César Sanchez, Maestro de la Escolanía Coro de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
PADRE JAIME FERRER (1762–1824) 11–16 Lamentación 1a Ángeles Chamorro, soprano Norma Lerer, contralto Julian Molina, tenor Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española
CD 22 TOMÁS LUIS DE VICTORIA (c. 1548–1611) 1–8 Magnificat primi toni Coro de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
ÓSCAR ESPLÁ Y TRIAY (1886–1976) 9–12 De Profundis Ángeles Chamorro, soprano Ines Rivadeneyra, mezzo-soprano Carlo del Monte, tenor Antonio Blancas, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
ERNESTO HALFFTER (1905–1989) 13 Canticum in P.P. Johannem XXIII*
IGNACIO RAMONEDA (1735–1781) 14 Veni Creator* Ángeles Chamorro, soprano Antonio Blancas, baritone Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
*FIRST CD RELEASE ON DECCA
CD 23 MANUEL DE FALLA (1876–1946) 1–7 Siete Canciones populares españolas* Orchestrated by Igor Markevitch
ISAAC ALBÉNIZ (1860–1909) 8 Catalonia°
ERNESTO HALFFTER (1905–1989) 9 Fanfare (a la memoria de Enrique Granados)*
ENRIQUE GRANADOS (1867–1916) 10 Spanish Dance, Op. 37 No. 9 ‘Romantica’° 11 Spanish Dance, Op. 37 No. 4 ‘Villanesca’° 12 Intermezzo (from Goyescas)° 13 Zapateado (from Six Pieces on Spanish Folksongs)° 14 Spanish Dance, Op. 37 No. 8 ‘Asturiana’° Ángeles Chamorro, soprano (Falla) Orquesta Sinfónica de la RTV Española
*FIRST CD RELEASE ON DECCA °FIRST INTERNATIONAL CD RELEASE ON DECCA
CD 24 MANUEL DE FALLA (1876–1946) 1–3 Noches en los jardines de España Clara Haskil, piano Orchestre des Concerts Lamoureux
4–16 El amor brujo
EMMANUEL CHABRIER (1841–1894) 17 España – rapsodie pour orchestre
MAURICE RAVEL (1875–1937) 18 Boléro Ines Rivadeneyra, contralto (El amor brujo) Orquesta Sinfónica de la RTV Española
CD 25 ANTOLOGIA DE LA ZARZUELA* GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 1–3 La Tempranica (excerpts)
GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 6 El baile de Luis Alonso: Intermedio
VICENTELLEÓ BALBASTRE (1870–1922) 7 La corte de Faraón: Son las mujeres de Babilonia – ¡Ay ba!
PABLOLUNA (1879–1942) 8–10 El Niño Judio (excerpts)
TOMÁSBRETÓN (1850–1923) 11–13 La Verbena de la Paloma (excerpts) Ángeles Chamorro, Alicia de la Victoria, sopranos · Norma Lerer, contralto Angel Custodio, Gregorio Gil, Carlo del Monte, tenors Rafael Enderis, baritone Julio Catania, Jesus Coiras, José Granados, Antonio Lagar, José Le Matt, basses Coro y Orquesta Sinfónica de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
CD 26 MANUEL PENELLA (1880–1939) 1 El Gato Montés: Pasadoble
FRANCISCOALONSO (1887–1948) 2 La Calesera: Dice el Rey que le debe guardar
RUPERTO CHAPÍ Y LORENTE (1851–1909) 3–4 La Revoltosa (excerpts)
FEDERICO CHUECA (1846–1908) 5 Agua, Azucarillos y Aguardiente: Vivimos en la Ronda de Embajadores
GERÓNIMO GIMÉNEZ (1854–1923) 6 La Tempranica: Zapateado 7 La boda de Luis Alonso: Intermedio
RUPERTO CHAPÍ Y LORENTE (1851–1909) 8 El tambor de Granaderos: Preludio
FRANCISCO ASENJOBARBIERI (1823–1894) 9–11 El barberillo de Lavapiés (excerpts)
RUPERTO CHAPI Y LORENTE (1851–1909) 12 El Rey que Rabio: Coro de doctores
MANUEL FERNANDEZ-CABALLERO (1835–1906) 14 Gigantes y Cabezudos: Jota Ángeles Chamorro, Alicia de la Victoria, sopranos · Norma Lerer, contralto Carlo del Monte, José Antonio Viñe, tenors · Antonio Lagar, bass Orquesta Sinfónica y Coros de la RTV Española Alberto Blancafort, chorus master
IGOR MARKEVITCH *FIRST COMPLETE RELEASE ON CD OF ‘ANTOLOGIA DE LA ZARZUELA’
STEREO RECORDINGS
On attend maintenant avec autant d’impatience le coffret Eloquence Deutsche Grammophon !
J’ai lancé, le 5 mars dernier, ce qui va ressembler à une série : Petits et grands arrangements, en commençant par les Anglais (et sans aucune ambition d’exhaustivité !).
En France aussi, les compositeurs « arrangeurs » sont légion, en particulier au XXème siècle. Ils sont plus ou moins célèbres.
Gaîté parisienne
Le plus connu d’entre eux, grâce à l’oeuvre qu’il a laissée (et qui a fait sa fortune !), est sans doute Manuel Rosenthal (1904-2003) avec sa Gaîté parisienne, flamboyant « arrangement » d’airs d’Offenbach. J’ai raconté dans quelles circonstances j’avais rencontré le chef d’orchestre/compositeur (Anniversaires : privé/public), en 2000. Parmi de multiples souvenirs qu’il évoquait sans se faire prier, il me raconta pourquoi et comment il avait accepté d’écrire en 1938 cette partition à l’intention des Ballets russes de Monte Carlo, lointain successeur des Ballets russes de Diaghilev qui s’étaient installés à Paris en 1909. C’est à un autre chef, Roger Désormière (1898-1963), qui avait été le dernier directeur musical des Ballets russes de 1925 à 1929, qu’on avait proposé cette « Offenbachiade« . Désormière avait refusé, Rosenthal avait accepté non sans hésitations.
Bien lui en prit, puisque c’est aujourd’hui un tube, dont les plus grands chefs se sont emparés, comme un emblème de « l’esprit français » ! Un peu caricatural tout ça, mais une partition brillante, l’un de ces « showpieces » qui fait rutiler les orchestres.
Toutes les versions ne retiennent pas l’intégralité de cette Gaîté parisienne.
Le compositeur a lui-même gravé deux versions de son oeuvre, deux fois d’ailleurs avec le même orchestre, celui qui avait créé l’oeuvre, Monte Carlo. Pour idiomatiques qu’elles soient, on hésite à les recommander comme références, la phalange monégasque montrant ses limites, et supportant difficilement la comparaison avec les formations berlinoises, londoniennes ou américaines.
La liste des chefs et des orchestres qui se sont frottés à cette Gaîté parisienne est assez impressionnante. Mais c’est peu dire que tous n’ont pas été également inspirés, confondant rutilance et vulgarité dans le traitement de l’orchestre, élégance et racolage dans l’énoncé des mélodies, légèreté et lourdeur dans la conduite rythmique. Parmi les beaux ratages il me faut malheureusement nommer des chefs que j’admire infiniment par ailleurs :
Inattendus dans cette liste, mais beaucoup plus convaincants que leurs illustres collègues américains, Felix Slatkin et Arthur Fiedler :
Autre inattendu dans la série, et récidiviste de surcroît, Georg Solti ! Les alanguissements, les lourdeurs, pas vraiment pour lui, ça court la poste et ça manque souvent d’un peu de charme, de tendresse. L’avantage de cette version gravée à Londres en 1958 c’est qu’elle reprend la totalité des numéros.
On découvre même Solti en concert sur cette vidéo :
Mais tout bien écouté, la palme revient incontestablement à Karajan, le chic, le charme, l’esprit, et la perfection de la réalisation orchestrale.
J’ai du mal à départager les versions berlinoise (1971) et londonienne (1958).
Si je devais n’en retenir qu’une, ce serait peut-être le Philharmonia…
Le beau Danube parisien
Où l’on retrouve Roger Désormière…
Au printemps 1924, le comte Étienne de Beaumont organise les Soirées de Paris (titre-hommage à Apollinaire) au Théâtre de la Cigale à Montmartre, soirées artistiques et de ballet avec Léonide Massine en danseur-étoile et chorégraphe et Roger Désormière en directeur musical et chef d’orchestre. Les compositeurs sont Erik Satie, Darius Milhaud… Henri Sauguet réinterprète Olvier Métra… les costumes et les décors sont de Pablo Picasso et Georges Braque… Jean Cocteau livre sa propre vision de Roméo et Juliette. Pour cette musique, c’est Auric qui est pressenti, Poulenc devant donner sa propre version des valses de Vienne. Mais Diaghilev va mettre son veto à leur participation, c’est donc Désormière qui va composer ces deux dernières musiques, l’hommage à Vienne devenant le Beau Danube…
Et cette œuvre de circonstance va être souvent reprise et grande source de royalties…
Malgré ce succès, Désormière n’enregistrera jamais cette musique sur disque lui-même.
Selon le même principe que plus tard Rosenthal avec Offenbach, Désormière procède par collage de thèmes empruntés à des oeuvres plus ou moins connues de Johann Strauss. Mais quelque chose ne fonctionne pas, le charme n’opère pas. Ce Beau Danube sent l’exercice de style, rapidement troussé. D’ailleurs, à la différence de Gaîté parisienne, l’oeuvre n’a quasiment pas survécu à la Seconde Guerre mondiale. Elle a été peu enregistrée. Je reparlerai dans une autre billet d’arrangements beaucoup plus réussis d’oeuvres de Strauss.
Un seul disque réunit les deux oeuvres, Gaîté parisienne d’Offenbach/Rosenthal et Le Beau Danube de Strauss/Désormière. A la tête de l’orchestre de la radio de Berlin, un expert, le chef américain Paul Strauss (1922-2007), qui commença sa carrière en dirigeant nombre de ballets à … Monte Carlo, Londres, Berlin – j’ai eu la chance de connaître à la fin de sa vie celui qui fut de 1967 à 1977 le patron, redouté et admiré, de l’Orchestre philharmonique royal de Liège.
Le chapitre des « arrangeurs » français est très loin d’être clos. A moins qu’il faille plutôt ouvrir un nouveau chapitre « orchestrateurs », où on retrouvera d’illustres figures comme Ravel, Caplet, Büsser…
Voilà des semaines que je n’ai rien dit ici de mes lectures. Six livres achetés ou reçus ces dernières semaines, cadeaux ou non. Sur la musique et la politique, deux de mes passions avouées.
Cocteau l’insupportable
Ce n’est pas le premier ouvrage sur ce que, par facilité, on a appelé Le Groupe des Six, mais c’est assurément le plus savoureux.
Le Groupe des Six ? Voilà les musiciens qui ont occupé le devant de la scène artistique parisienne dans l’immédiat après-Première Guerre mondiale. Parrainés par Erik Satie et soutenus par Jean Cocteau, à la fois leur imprésario et leur éminence grise, les Six furent les porte-drapeaux de l’Esprit Nouveau qui soufflait alors sur Paris. Voix intermittentes du néoclassicisme hexagonal pour les uns, simples farceurs embobinant dans leurs canulars un public crédule et une critique complaisante pour les autres, ils ont marqué comme peu cette période d’effervescence, où tout semblait possible. Les Six, donc : Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre
C’est ainsi qu’Actes Sud présente le dernier opus de Pierre Brévignon.
Brévignon règle son compte à un personnage que je ne suis jamais parvenu à lire, ni donc à apprécier, l’ineffable Jean Cocteau. J’ai l’âge d’avoir connu des gens qui ont connu, approché – parfois de très près – celui qui s’est toujours piqué d’être l’ami des grands de ce monde, voire leur inspirateur ou leur impresario. Ainsi Le Groupe des Six serait une invention de Cocteau… une de plus ! Invention, dans toutes les acceptions du terme ! :
« De son propre aveu, Cocteau s’est toujours rêvé Paganini du violon d’Ingres. Parmi ses nombreux dons, le plus remarquable était d’imprimer sa marque dans tous les domaines où il s’aventurait, unifiés sous le même label de « poésie » (de roman, de théâtre, de journalisme, graphique, critique, cinématographique)… Son sens de la publicité et sa prolixité lui valaient autant d’admirateurs que d’adversaires, la frontière entre les deux étant souvent fluctuante comme purent l’expérimenter un Gide, un Picasso, un Stravinsky ou un Mauriac/…../ Ce désir de se trouver au coeur du mouvement et de la vie des arts constitue l’impetus coctaldien par excellence. Cocteau se défendra souvent de courir après l’avant-garde…. Si quelque chose de neuf doit voir le jour sur la scène artistique, il faut qu’il ait un rôle à y jouer. Quitte à s’y inviter par effraction. »
S’agissant de la seule femme membre du Groupe des Six, on doit à la vérité philologique de préciser que Germaine Tailleferre est née Marcelle Taillefesse!
Le directeur artistique du Festival de Nohant, écrivain, philosophe et critique Jean-Yves Clément n’en est pas à son coup d’essai sur Chopin. Depuis cet essai paru au printemps, il a même récidivé avec ce Voyage de Majorque qui se présente comme un « faux journal » de Chopin et de son séjour dans l’île espagnole (voir Chez George et Frédéric)
L’auteur nous invite à réentendre Chopin hors des clichés répandus, à partir de sa musique seule, encore insuffisamment comprise dans sa singularité et ses audaces. Il brosse un portrait inédit de l’âme divisée du compositeur: » Chez Chopin, seule la musique répond à la musique. Son oeuvre, à proprement parler, ne figure rien. Ni l’amour, ni la nature, ni l’humanité. Seul le vase clos et infini de la musique. » Indépendante de sa vie même, l’oeuvre de Chopin se dérobe, par sa nature, aux circonstances qui la voient naître. Elle s’affirme ainsi comme l’expression la plus affirmée de la solitude absolue du créateur. Elle révèle la dualité de son être comme de son expression – de son génie même : français et polonais, classique et romantique, révolutionnaire et conservateur, sociable et renfermé, mondain et secret… Toute sa vie, le musicien restera un exilé du monde. Chaque chapitre du livre s’appuie sur les oeuvres les plus importantes de Chopin, liées aux périodes essentielles de son existence, de la Pologne à Nohant, en passant par Majorque et Paris, comme autant de cheminements significatifs de son évolution. (Présentation de l’éditeur)
C’est à une discussion sur Facebook à propos du pianiste Youri Egorov (La nostalgie des météores) que je dois d’avoir découvert (et acheté par correspondance) un ouvrage atypique, curieux mélange de journal intime, autobiographie, manifeste politique. Qui constitue surtout un passionnant témoignage sur la vie musicale du temps de l’ex-URSS. Celui du pianiste Andrei Gavrilov, né en 1955 à Moscou.
« Scènes de la vie d’un artiste » c’est bien de cela qu’il s’agit, sans ordre apparent. On peut prendre un chapitre au hasard, puis un autre, sans risquer de perdre le fil d’un récit qui n’en a pas. Quelque chose me dit que c’est l’auteur lui-même qui a écrit cette « présentation de l’éditeur » (précisons d’emblée que la traduction française est souvent approximative)
En 1974, à l’âge de 18 ans il remporte le cinquième Concours Tchaïkovski. La même année il fait ses débuts sur la scène internationale par un triomphe au fameux Festival de Salzbourg où il remplace Sviatoslav Richter malade. Depuis lors, il a connu une impressionnante carrière internationale et s’est produit avec les plus grands orchestres du monde. Persécuté par le KGB depuis 1979, Andrei Gavrilov échappe à quatre tentatives d’assassinat. En 1984 il parvient à fuir l’URSS, il s’établit d’abord en Angleterre, puis en Allemagne, et définitivement en Suisse en 2001. Nous publions dans ce livre les souvenirs des incroyables événements qui se sont produits au cours de sa vie entre 1973 et 1985. L’artiste partage avec nous ses analyses philosophiques sur les principaux problèmes du monde moderne qui ne se limitent pas au totalitarisme et à la décadence de notre culture. C’est un regard perçant de l’homme à travers la musique. On y trouve également de nombreuses anecdotes sur les grandes célébrités internationales, comme Malkovich, Richter, Rostropovitch et beaucoup d’autres. Gavrilov se penche sur son passé et nous livre avec bonheur et amertume un regard inédit sur la fin de l’Union sovietique, à travers un récit où la caricature la plus grotesque se mêle étroitement à la tragédie et aux épreuves que traverse un jeune homme sincère et un artiste de génie. Ce livre hors norme et bouleveversant est un témoignage historique de première importance.«
Ce qui retient d’abord l’attention c’est l’amitié qui a lié le jeune pianiste de 23 ans à son glorieux aîné de quarante ans, Sviatoslav Richter, Fira dans l’intimité. A en juger par la violence de certains commentaires de la discussion sur Facebook (cf. supra), on ne touche pas impunément à une statue comme Richter.
« En 1978 Richter et moi avons eu un véritable coup de foudre. Ce ne fut pas une année ordinaire, mais la lune de miel de notre amitié. Se fréquenter était pour nous fascinant et captivant. Lorsqu’on se voyait, nous sautions tous les deux de joie comme des singes (sic) ».
Parmi mille anecdotes et aventures racontées ici, on relève un projet étonnant, qui a débouché sur une série d’enregistrements (en partie réalisés à la Grange de Meslay si je ne me trompe) : une intégrale des Suites pour clavier de Haendel au piano, partagée entre Richter et Gavrilov.
De Gaulle intime
Sur De Gaulle on a tout dit, tout écrit, mais pas forcément tout montré. Le cinquantenaire de sa mort (lire Le chêne abattu) a donné lieu à d’opportunes publications, comme cet ouvrage de Raphaëlle Bacqué, qui permet d’accéder à quantité de manuscrits, brouillons, notes écrites ou annotées par celui qui fut président de la République de 1959 à 1969. J’ai toujours été fasciné par le contraste entre la taille imposante du personnage (1m96) et son écriture très penchée.
L’homme qui lit
L’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron, remercié en juin dernier, m’a toujours paru sympathique, avec ce quelque chose de décalé dans l’allure, dans l’expression, une sorte de distinction assez british. Et dans la gestion des débuts de la crise du Covid, un sang-froid, une maîtrise, qui contrastaient heureusement avec les emballements – pour user d’un euphémisme – d’autres responsables publics. Pour autant je n’avais rien lu de lui ni sur lui. Ce n’est que récemment que j’ai découvert ce livre, paru en juillet 2017 : un essai politique de plus ? Réponse de l’auteur :
« Lorsque je regarde ma bibliothèque, je vois ce que j’ai appris et une bonne partie de ce que j’aime. Ces livres m’ont construit. Des romans, des essais, des manuels, des bandes dessinées, le tout mélangé, muri ou oublié, redécouvert et discuté. Une bibliothèque est comme le « lieu de mémoire » de notre existence. Elle nous chuchote d’anciennes joies, murmure nos lacunes et trahit des promesses de lecture. Les livres relient les hommes. Derrière ce qui ressemble à une formule, il y a une réalité, particulièrement évidente dans mon histoire familiale, dans ma vie. Dans ma relation avec mon père mais aussi dans le parcours de mon grand-père, dans la vie de ceux qui m’entourent et qui comptent pour moi. »
On a la certitude en le lisant que nul n’a tenu la plume à sa place. L’homme sait lire; et écrire. Bien écrire.
Le lion de Belfort
Dans un tout autre genre, mais d’une plume tout aussi alerte, quoique plus traditionnelle, les Mémoires de Jean-Pierre Chevènement se dégustent à petites lampées mais avec gourmandise. L’ancien ministre de Mitterrand a un art du récit, de la mise en scène des événements auxquels il participe ou qu’il engendre, doublé d’un talent d’écrivain, qui ont peu d’équivalents dans le monde politique actuel.
L’avantage d’un tel ouvrage, c’est qu’à 80 ans, le fondateur du CERES n’a plus rien à prouver, plus personne à convaincre ou à flatter, encore moins à combattre. Sans s’interdire quelques belles formules, quelques bons mots, les portraits que JPC dresse de ses contemporains, de ceux avec qui il a travaillé, qu’il a côtoyés ou combattus, la relation qu’il fait de son action et de celle des gouvernements et assemblées auxquels il a participé, ne sont suspects d’aucune exagération, d’aucune omission. Le pavé fourmille de détails, mais aucun n’est négligeable.
Un peu de nostalgie étreint le lecteur quand il referme l’ouvrage. Qui, aujourd’hui, dans le monde politique français en activité, a l’envergure, la densité, la culture, d’un Chevènement ?
C’est un personnage que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître mais que les plus de soixante ont au moins entendu une fois dans leur vie sur les ondes de la Radio romande, de France Musique ou France Culture.
Une sorte de Léon Zitrone suisse, l’embonpoint – bien dissimulé – en moins !
Antoine Livio est mort, à 63 ans, le 27 janvier 2001 – le jour de la naissance de Mozart – dans une chambre d’hôtel à Salzbourg, ça ne s’invente pas !
(Antoine Livio à droite sur la photo : je n’ai trouvé aucune autre photo de lui sur le Web, la notice Wikipedia qui lui est consacrée ne comportant qu’une photo de… sa tombe au cimetière du Père-Lachaise à Paris !)
Antoine fut, en quelque sorte, mon parrain de radio. J’allais commencer le 1er septembre 1986 mon nouveau poste à la Radio suisse romande. On m’avait auparavant invité à quelques concerts du festival (classique) de Montreux, pour me présenter aux personnalités locales.
A peine étais-je entré dans le hall de la salle de concerts – qui n’était pas encore le magnifique auditorium Stravinsky, inauguré en 1993 – que mon nouveau « patron », Pierre-Yves Tribolet, hélait un homme en smoking engagé d’une voix très sonore dans une conversation animée. Je vis l’homme en question d’abord dérangé par cette interpellation – qui osait ainsi l’interrompre ? – puis soudain tout miel lorsque PYT lui présenta son nouveau jeune collègue (moi !). Comme tout bon gazetier, il fit semblant d’avoir déjà entendu mon nom et de connaître mon pedigree, et me couvrit d’éloges un peu trop bruyants pour être honnêtes !
A l’entracte du concert, je recroisai Antoine Livio – à moins qu’il ne l’ait fait un peu exprès ! – qui s’enquit, encore plus miel qu’avant le concert, de ce que j’avais pensé de la première partie. En l’occurrence, Charles Dutoit dirigeait l’orchestre des jeunes de la Communauté européenne, et au programme de cette première partie de concert figuraient l’Ouverture tragique de Brahms et des extraits du Des KnabenWunderhorn de Mahlerchantés par Anne-Sofie von Otter.
Je répondis…ce que je pensais, sans périphrase : J’avais trouvé que l’Ouverture tragique manquait d’élan, de ligne, et m’avait ennuyé. Alors que la prestation d’Anne-Sofie von Otter m’avait ébloui.
J’eus vite compris l’erreur de ma franchise. Antoine Livio me tança du haut de toute son importance. Son ami (d’enfance ?), le grand Charles Dutoitavait au contraire magnifiquement dirigé Brahms. Il ne pouvait en être autrement puisque c’était l’ami d’Antoine Livio!
Je compris ce soir-là l’élasticité du concept de critique impartiale !
Deux ou trois jours plus tard, débarquant au siège genevois de la Radio suisse romande – où j’allais travailler durant sept ans – je fus accueilli par le patron de la chaîne Espace 2, mon nouveau « chef » PYT, par un pot de bienvenue qui commença par un grand éclat de rire général.
« Je vous présente le promeneur solitaire qui a tapé dans l’œil d’Antoine Livio l’autre soir à Montreux! »
Apparemment toute la petite assistance avait entendu le billet de Livio dans l’émission du matin…sauf moi !
Ce cher Antoine rendant compte de ses soirées montreusiennes – plus chroniqueur mondain que journaliste musical – posant comme principe qu’un concert dirigé par son ami Charles Dutoit ne pouvait être qu’une parfaite réussite, ne pouvait manquer de relever la faute de goût de ce « jeune homme romantique (sic) errant comme un promeneur solitaire (re-sic) dans les couloirs du palais des congrès de Montreux » qui s’était permis d’émettre des doutes sur ce qu’il avait entendu. Erreur de jeunesse qui ne manquerait pas d’être corrigée si le jeune homme s’inspirait de l’expérience de son aîné, c’est en substance ainsi que se terminait le billet matinal d’Antoine Livio !
J’aurais plus tard à « gérer » Antoine Livio dans mes fonctions à la Radio suisse romande comme à France Musique, dans un contexte – déjà ! – de restrictions budgétaires. Antoine avait longtemps convaincu les responsables de la Radio suisse que sa présence s’imposait à Paris et en tous lieux où il se passait quelque chose d’important. La RSR avait même un « bureau » à Paris, qu’il avait quasiment fait sien. Il habitait d’ailleurs plus volontiers Paris que Lausanne. C’est à Paris qu’il se vantait d’avoir fait partie du cercle des intimes de Jean Cocteau, c’est à Paris qu’il avait ses amitiés et menait grand train. Peu à peu, on lui fit savoir, ici et là, que les temps avaient changé, que les chaînes n’avaient plus les moyens de l’envoyer en missions prolongées et coûteuses.
Et puis le style Livio, flamboyant, vachard, très parisien (jamais une once d’accent romand !), avait cessé de plaire. On avait bien vite oublié les audaces dont l’homme de radio qu’il était viscéralement était capable, comme celui d’arrêter un grand chef entrant en scène pour lui soutirer quelques mots en direct. De « combler » sans notes de très longues minutes d’interruption de liaison ou d’arrivée tardive des artistes sur scène. Souvent d’enregistrer en catimini, au mépris de toutes les interdictions, les grands moments des opéras ou concerts auxquels il assistait. Antoine ne doutait de rien, et surtout pas de lui-même.
Je m’autorise à reproduire ici l’hommage qui lui avait été rendu par l’un des médias auxquels il contribuait, au lendemain de sa disparition. Les surlignages sont les miens.
« Même s’il a beaucoup écrit, notamment pour Altamusica, Antoine Livio était avant tout un homme de radio, mieux, il était une radio à lui seul, et qui a conversé dix minutes avec lui ne saurait le démentir : Antoine avait toujours une anecdocte, un bon mot (voire une vacherie) sur tous les sujets touchant de près ou de loin les arts de la scène.
Et pour cause, il avait vu et entendu plus de spectacles que n’importe lequel de ses confrères, avait rencontré tout ce que la planète compte d’artistes de renom ou de sans grade, et avait d’ailleurs contribué à en révéler un bon nombre. Antoine ne voulait jamais manquer une création en France ou en Suisse et n’aurait pas raté pour un empire une saison à Salzbourg ou à Bayreuth, ses deux Mecques.
Né dans une famille de mélomanes avec une mère pianiste, sa propre carrière avec cet instrument fut contrariée par un accident malheureux aux tendons. Privé de clavier, Antoine Livio entra à Radio-Lausannepour s’occuper de danse, la musique étant la chasse gardée d’Henri Jaton, un cacique indéboulonnable. Il produisit alors sa première émission, baptisée « Plein Feu sur la Danse ». Maurice Béjart, Roland Petit et Zizi Jeanmaire étaient dans sa première émission.
Débute alors une longue carrière radiophonique, principalement à la Radio Suisse Romande, tout en collaborant à l’émission « Panorama » de France Culture. La voix d’Antoine Livio était aussi familière aux auditeurs de France Musique(s), où il participa notamment à « Table d’écoute », sur le modèle du « Masque et la Plume » de France Inter, tout en alimentant chaque été les programmes de la chaîne d’innombrables reportages depuis Salzbourg ou Bayreuth.
En marge de la radio, Antoine Livio a été le critique chorégraphique puis musical de La Tribune de Lausanne pendant vingt-deux ans, tout en collaborant à d’autres périodiques, tels La Liberté de Fribourg ou Le Journal de Genève.
Sa méthode ? L’enthousiasme. Au risque, parfois, d’éveiller la suspicion de la profession. « Plutôt que de dire du mal des gens dont nous n’aimions pas le travail, j’ai fait le contraire : ne parler que de ceux qui ont du talent ! Ainsi ai-je pu aider quelques artistes débutant dans leur carrière et je ne le regrette pas. »
Dans un entretien à La Lettre du Musicien paru en février 2000, Antoine Livio avait donné sa définition de la critique : « une courroie de transmission entre les artistes et le public ». Antoine Livio estimait que cette fonction, bien que battue en brèche par les « papiers promotionnels », méritait encore toute sa place ; mieux, il militait pour que la critique soit reconnue comme un métier à part entière : c’est à son initiative que fut créée la Presse Musicale Internationale (PMI), qui chaque année décerne un Grand Prix à un interprète ou à un compositeur.
Antoine Livio fut aussi l’auteur de plusieurs ouvrages, tels Béjart (Editions L’Age d’Homme, 1965) et Conversations avec Marcel Landowski (Editions Denoël, 1999). Il nourrissait encore de nombreux autres projets de livres, notamment pour le compte de La Librairie Séguier mais on ne s’inquiète pas pour lui : en ce moment, il est probablement parti en quête d’un entretien impossible entre Richard Strauss et Wolfgang Amadeus. »
Aussi étrange que cela puisse paraître, c’est la première fois, dans l’histoire du musée montpelliérain, qu’une grande exposition est consacrée à Picasso, comme l’ont rappelé Michel Hilaire, le directeur du Musée Fabre, et Laurent Le Bon, le président haut en couleurs du Musée Picasso de Paris. Ce n’est évidemment pas dans la cohue d’un vernissage qu’on peut apprécier la qualité des oeuvres rassemblées et leur mise en espace. On y reviendra au calme…
C’est d’ailleurs à Liège que j’ai pu voir les esquisses de Picasso pour ces décors du Tricorne, dans la grande exposition parrainée par Anne Sinclair à l’automne 2016 pour l’inauguration de La Boverie.
Je ne surprendrai personne en disant que la version du créateur de l’oeuvre est depuis toujours une référence, et occupe une place à part dans ma discothèque. J’attends avec impatience ce que les Liégeois nous offriront dans un mois.
La collaboration de Picasso avec les Ballets russes ne s’est pas limitée au Tricorne, comme le rappelle une exposition au MUCEM de Marseille, qu’il faut se dépêcher d’aller voir (elle se termine le 24 juin).
En 1917, c’est le scandale Paradede Satie. Collaboration renouvelée en 1924 pour Mercure.
Un an après le Tricorne, toujours dans l’incroyable floraison créatrice des Ballets russes, Ansermet retrouve Picasso pour la création le 15 mai 1920, à l’Opéra de Paris, de Pulcinella de Stravinsky
Un an plus tard, au théâtre de la Gaité lyrique à Paris, l’Espagne natale du peintre et du compositeur du Tricorne revient en force avec Cuadro Flamenco, une suite de danses populaires andalouses arrangée par Manuel de Falla
Le sujet Picasso et la musique ne s’arrête évidemment pas à ces collaborations remarquées à l’époque trépidante des Ballets russes. Je ne sais combien de toiles la musique et les musiciens ont inspirées à Picasso…
(Picasso, Trois musiciens, 1921)
Le label Naïve avait réalisé, il y a une dizaine d’années, une intelligente compilation des musiques qui ont inspiré et nourri le peintre.
Enregistrement cette semaine dans la grande nef du Musée d’Orsay d’une soirée qui sera diffusée pendant les fêtes de fin d’année sur France 3, et parmi les nombreux participants Felicity Lott. Une amie de presque trente ans, qui est aussi ma voisine lorsqu’elle est parisienne. C’était en décembre 1988, j’étais chargé de l’organisation de certains concerts de l’Orchestre de la Suisse Romande, deux soirées avaient été prévues, d’abord à Bienne, puis à Genève. Au programme un chef d’oeuvre trop rare dans les salles de concert : Les Illuminations de Benjamin Britten sur des textes de Rimbaud.
C’était aussi la première rencontre de Felicity avec Armin Jordan, qui aurait pu tourner court. Souvenir d’un verre pris après le concert à Bienne, elle très british d’allure et de maintien, Armin un peu provoc comme à son habitude, des blagues qui tombaient un peu à plat. Mais après ce qu’ils venaient de donner sur le plan musical, j’étais persuadé que la relation artistique et amicale allait prospérer… La suite m’a amplement donné raison.
Au début de l’année 2000, récemment nommé à la direction de l’Orchestre Philharmonique de Liège, je m’étais rendu à Genève pour un double événement : un Pelléas et Mélisande au Grand Théâtre, réunissant un plateau de rêve, la toute jeune et déjà fabuleuse Alexia Cousin, Simon Kennlyside, José Van Dam et à la baguette mon futur directeur musical, Louis Langrée, et le lendemain au Victoria Hall La Voix humainede Poulenc avec Dame Felicity et Armin Jordan. À peine arrivé à Genève, je reçois un message très alarmant, Armin Jordan est au plus mal, je fonce à l’hôpital, on ne me laisse passer que parce que j’affirme que je suis de sa famille et j’accède à une salle de soins intensifs, ou plutôt palliatifs, où je découvre mon cher Armin tubé de partout, mais d’excellente humeur et absolument pas mourant. Certes il n’est pas en état de diriger le lendemain… et c’est Louis Langrée qui fera le concert. Felicity Lott est à son acmé dans ce monologue un peu daté de Cocteau et Poulenc.
Elle a aimé travailler avec Langrée. Je pense déjà au programme qui devrait ouvrir le mandat de Louis Langrée à Liège et Bruxelles en septembre 2001 : le Poème de l’amour et de la merde Chausson et Shéhérazade de Ravel. Felicity est libre et enthousiaste. Quelques jours plus tard, son agent m’appelle, très ennuyé : Deutsche Grammophon a prévu un enregistrement du Rosenkavalier à Dresde avec Giuseppe Sinopoli à la même période, Felicity ne peut pas refuser pareille proposition, elle qui a été une Maréchale inoubliable sur toutes les grandes scènes du monde. Finalement l’enregistrement ne se fera jamais, Sinopoli meurt d’une crise cardiaque le 20 avril 2001. Mais trop tard pour reprogrammer la chanteuse à Liège en septembre. On ouvrira donc la première saison Langrée/Liège avec… Alexia Cousin, et Felicity Lott nous récompensera de deux soirées mémorables de Nouvel An en janvier 2002. Avec tout ce répertoire dans lequel la plus française des cantatrices britanniques a triomphé notamment sur la scène du Châtelet avec Offenbach. https://www.youtube.com/watch?v=15hb8MxFQG8
Nous nous rappelions l’autre soir cette semaine de l’hiver 2002 à Liège. Et une équipée baroque dans les rues commerçantes de la Cité ardente : Dame Felicity devait être reçue à son retour à Londres par l’Ambassadeur de France dans la capitale britannique pour être décorée de la Légion d’Honneur, et il lui fallait une tenue en rapport avec la solennité de la circonstance ! Nous finîmes par trouver une belle boutique de la rue du Pot d’Or, où l’apparition de la chanteuse ne passa pas inaperçue. Après bien des essayages et des hésitations, Felicity choisit plusieurs ensembles griffés de couturiers français…
Je ne parlerai pas des dizaines de représentations, de récitals, de soirées partagées avec cette grande dame. Une amitié précieuse.
Je suis allé dîner avant-hier dans un établissement mythique de Paris, et le seul fait que je l’indique sur Facebook a suscité nombre de commentaires passionnés. Qu’en est-il donc de ce fameux Boeuf sur le toit(situé rue du Colisée, entre le Rond Point des Champs-Elysées et Saint-Philippe du Roule) ?
Quelques points d’histoire d’abord sur le lieu : Le Boeuf sur le toit c’est d’abord un cabaret inauguré le 10 janvier 1922 par Louis Moysès, au 21 rue Boissy d’Anglas, dans le 8e arrondissement toujours mais beaucoup plus près de la rue Royale et de la place de la Concorde. Le cabaret va déménager plusieurs fois dans la même rue, puis en 1928 se poser rue de Penthièvre et en 1936 nettement plus loin rue Pierre Ier de Serbie. Ce n’est qu’en 1941 que cela devient un restaurant, de grandes dimensions, en s’installant au 54 rue du Colisée…
Ainsi lorsqu’on fait croire aux clients de ce restaurant, qu’ils marchent sur les pas de toute l’intelligentsia des années 20, de Jean Wiener et Clément Doucet….on les abuse quelque peu, même si la décoration est faite de reproductions de dessins de Cocteau ou Picabia ! L’établissement a d’ailleurs été entièrement restauré ces derniers mois, on a conservé évidemment le cadre et la structure, mais on regrette la patine des ans. Et autant l’assiette que le service sont un peu décevants…
Alors le rapport avec ce qui est resté sans doute l’oeuvre la plus célèbre de Darius Milhaud ?
En 1919 à son retour du Brésil (Milhaud était le secrétaire de l’ambassadeur de France à Rio, un certain Paul Claudel * !), où il avait été impressionné par le folklore et une chanson populaire de l’époque, O Boi no Telhado, le compositeur propose cette mélodie à Cocteau, qui participe aux réunions du Groupe des Six* (jusqu’à s’être attribué la paternité de sa création !), pour le projet de ballet-concert que celui-ci envisage de réaliser avec ces amis pour prolonger le succès de Parade. Le ballet adopte le titre Le Boeuf sur le toit, traduction littérale du nom de la chanson brésilienne. À partir de février 1921, on peut entendre Milhaud en interpréter, en compagnie de Georges Auric et Artur Rubinstein une version à six mains à La Gaya, un bar situé au 17 rue Duphot appartenant à Louis Moysès . La présence de Cocteau et de son cercle rend La Gaya très populaire et, lorsque Moysès transfère, en décembre 1921, son bar au 28 rue Boissy d’Anglas, il le renomme Le Bœuf sur le toit, sans doute pour s’assurer que Milhaud, Cocteau et leurs amis vont l’y suivre. Le Bœuf était né. Cet établissement est devenu, au fil du temps, une telle icône culturelle que la croyance commune à Paris, fut que c’était Milhaud qui avait nommé son ballet-comédie d’après le bar, alors que c’était le contraire !
L’oeuvre elle-même a connu plusieurs avatars : d’abord écrite pour violon et piano (1919) et sous-titrée Cinéma Fantaisie, Milhaud la destinait à l’accompagnement d’un film muet de Charlie Chaplin. Mais c’est bien comme Comédie-Ballet qu’elle est créée, à l’instigation de JeanCocteau, à la Comédie des Champs-Elysées le 21 février 1920.
C’est évidemment dans l’insurpassable version qu’en a laissée Leonard Bernstein avec l’Orchestre National de France qu’on doit écouter ce Boeuf sur le toit,mais on ne doit pas manquer la rare version que Gidon Kremer a enregistrée de la première mouture de l’oeuvre.
Enfin pour se replonger dans l’atmosphère unique de ces années folles, les souvenirs de MauriceSachs sont irremplaçables.
* Je ne peux m’empêcher de citer cette réplique de Sacha Guitry au sortir de la création de la très longue pièce de ClaudelLe Soulier de satin :« Heureusement qu’il n’y avait pas la paire ! »
* Le Groupe des Sixrassemble, de 1916 à 1923, six jeunes compositeurs qui se retrouvent le samedi : Darius Milhaud, Germaine Taiileferre, Arthur Honegger, Louis Durey, Francis Poulenc et Georges Auric. C’est le compositeur et critique Henri Collet qui, dans un article de Comoedia,donne son nom à ce groupe informel, en référence au Groupe des Cinqcompositeurs russes (Borodine, Rimski-Korsakov, Cui, Balakirev et Moussorgski).