Un début de mois c’est pour moi la lecture des mensuels de musique classique, ceux auxquels je continue d’être abonné à l’édition papier (BBC Music, Diapason, Classica). Dans chacun d’eux, en général, une discographie comparée, et souvent pour le lecteur, irritation ou frustration, parce qu’évidemment en cette matière il y a autant de critiques avertis que de lecteurs, comme il y autant de sélectionneurs que de spectateurs de matches de ligue 1 de football !
Chostakovitch, les oubliés

Diapason consacre tout un dossier à Chostakovitch, dont on commémorera le 9 août le cinquantenaire de la disparition. Il n’y a jamais besoin de prétexte pour évoquer le plus grand compositeur russe du XXe siècle (oui je sais, on va me rétorquer « Et Prokofiev alors? »). Ceux qui suivent depuis longtemps, c’est mon cas, l’auteur de ce dossier, Patrick Szersnovicz, connaissent ses dilections discographiques, son admiration sans réserve pour certains chefs d’orchestre (Karajan par exemple), mais sans dévoiler ses préconisations pour les symphonies de Chostakovitch, on peut regretter l’étroitesse de ses choix. Jamais un chef aussi important que Kirill Kondrachine (le créateur de la 4e symphonie notamment) n’est cité, aucun Russe en dehors de Mravinski et encore parcimonieusement. Mais c’est sa liberté.

Hautement recommandable aussi ce coffret patchwork à petit prix :

Les Anglais aiment les Français

Dans le numéro de février du concurrent de Gramophone, BBC Music Magazine, tout un papier consacré au « Lighter side of Ludwig » van Beethoven, en l’occurrence à sa 4e symphonie. Passionnante analyse, comme très souvent. Et des recommandations discographiques qui peuvent surprendre.
En numéro 1, la version de Hans Schmidt-Isserstedt à Vienne (dans le cadre d’une intégrale souvent louée).
Et la surprise vient du numéro 2, devant plusieurs illustres versions « authentiquement informées », Emmanuel Krivine et la Chambre Philharmonique ! Des disques qui manquaient à ma discothèque, sans doute disparus au cours d’un déménagement, et que j’ai retrouvés tout récemment d’occasion.

Depuis son retrait de la direction de l’Orchestre national de France, Emmanuel Krivine se fait discret, beaucoup trop discret.
Dans leurs discographies comparées, les rédacteurs de BBC Music Magazine indiquent toujours une version to avoid/à éviter. Ici la dernière version de Karajan avec Berlin pour DGG au début de l’ère digitale « en pilotage automatique »
Il aurait fallu tout de même ajouter que la version de 1962 est au contraire un concentré d’énergie.

Les Anglais toujours
Un passage chez Melomania et ce sont encore quelques trouvailles… venues d’Outre Manche

Rien d’inédit ni d’inconnu mais le vieux chef anglais surprend toujours en concert. On pourrait s’amuser à le comparer à lui-même…
Falling in love with Joan

Dieu sait que je ne suis pas un inconditionnel de celle que ses fans appelaient » la stupenda« , mais quand Joan Sutherland s’amuse, ça vaut le coup d’oreille, surtout dans des viennoiseries chantées en anglais !
PS Deux enregistrements à rajouter à cette liste, et beaucoup d’émotion. A lire sur brevesdeblog
Bonjour
Vous avez vous aussi de gros partis pris sur les critiques, vos confrères ! Je réagis à vos commentaires sur les choix de Patrick Szersnovicz, que je lis depuis tout petit (déjà dans la revue Harmonie qu’achetait jadis mon papa). Ses analyses des œuvres dans le dictionnaire Larousse de la musique sont fabuleuses ! Je dois aussi avoir un parti pris…
Kondrachine n’est pas vraiment oublié puisqu’il en parle très souvent ailleurs que dans ce dernier numéro, ici dans le cadre de l’intégrale : « Un parfait premier choix (Haitink) que l’on pourra compléter par l’intégrale majeure de Kiril Kondrachine (Melodiya, 10 CD), en dépit de ses infimes faiblesses orchestrales et de prises de son guère optimales. » (2014)
https://www.diapasonmag.fr/a-la-une/chostakovitch-en-disques-les-symphonies-11603.html
Kondrachine est l’intégrale qu’il recommande juste après Haitink qui a pour avantage une meilleure prise de son. C’est dire que la version de Kondrachine est essentielle pour lui. Mais peux-t-on aujourd’hui recommander des prises de son médiocres comme premiers choix ? J’en doute pour cette musique. D’autant plus qu’il y a pléthore de versions sorties depuis cette époque même si beaucoup sont peu recommandables par rapport à Kondrachine.
Ce qui est sûr, c’est que si l’on veut écouter la 8ieme symphonie par Mravinsky, il faut fuir la version de 1961 Praga, pourtant labélisée en haute définition (sic) et écoutée récemment. Le son est épouvantable. Il faut se rabattre sur celle de 1982 sortie chez Philips et qu’on retrouve dans le coffret Alto (le fait de corriger l’erreur sur la hauteur a un impact minime). Les deux versions sont au même niveau musicalement parlant mais Szersnovicz aurait dû préciser 1982, version recommandée partout ! Elle est aussi sacrée Best Recording Ever par Dave Hurwitz, un critique qui compte beaucoup.
Concernant « son admiration sans réserve pour certains chefs d’orchestre (Karajan par exemple) », on pourrait ajouter Boulez. Mais, c’est loin d’être sans réserve !
Ce qui est sûr, c’est que la seule symphonie de Chostakovitch enregistrée et dirigée très souvent en concert (17 fois) par Karajan, la dixième, fait consensus international, interprétation qui a enthousiasmé par Chostakovitch qui l’a écouté sous sa direction à Moscou en 1969 ! Il est donc normal qu’elle soit recommandée par Szersnovicz qui privilégie ici la version de 1966 parmi au moins 4 disponibles (2 en live) à ma connaissance.
De mon point de vue personnel, à sa liste, manquent les versions de Neeme Järvi des 4 et 8ième, chaudement recommandées par Szersnovicz ailleurs ! En plus du chef, l’orchestre, le Scottish National Orchestra et la prise de son Chandos sont transcendantaux ! Je dois écouter au maximum 10 fois par an du Chostakovitch et j’y reviens souvent, c’est dire…
Ils ne sont pas si nombreux les critiques qui comptent, et qui m’énervent aussi ! C’est un métier difficile : suite au post récent, je comptais faire ma liste préférentielle de la 39ième de Haydn en expliquant rapidement la raison de mon classement. 10×4 mouvements, c’est démentiellement compliqué de faire une note moyenne (le dernier de la liste a un des meilleurs menuets mais les pires mouvements extrêmes, à moins d’aimer Vivaldi…). Sans commentaire donc, voici ma liste, les quatre premières étant au-dessus du lot :
1 Trevor Pinnock The English Concert
2 Derek Solomons L’Estro Armonico
3 Adam Fischer Austro-Hungarian Haydn Orchestra
4 Christopher Hogwood The Academy of Ancient Music (oui, il est très bon ici car souvent mauvaise presse)
5 Helmut Muller-Bruhl Cologne Chamber Orchestra
6 Antal Dorati Philharmonia Hungarica (pénalisé par la prise de son)
7 Ricardo Muti National de France
8 Thomas Fey Heidelberger Sinfoniker
9 Frans Bruggen Orchestra of the age of enlighthtement
10 Giovanni Antonini Il Giardino Armonica
S’il vous semble manquer des versions essentielles, merci de préciser votre « propre tribune d’écoute comparée de cette prodigieuse Symphonie » pour que j’y tende une oreille car, c’est certain, elle est absolument géniale !
Cordialement