Il y a une quinzaine de jours, on se désolait qu’un artiste comme Peter Rösel n’ait pas attiré plus de monde à la salle Gaveau (L’évidence de la simplicité) et on soulignait le courage qu’il fallait à un organisateur privé, en l’occurrence Yves Riesel, pour programmer à Paris une série de récitals avec de grands pianistes qui, pour de bonnes ou surtout mauvaises raisons, ne sont pas sous les feux des projecteurs.
Il y a deux jours, Yves Riesel annonçait, sans donner de raisons, que le récital du pianiste russe Evgueni Sudbin prévu ce 27 novembre, était purement et simplement annulé. Hier matin on lisait dans Le Figaro ce papier de Christian Merlin
On peut imaginer à quel déchaînement de « commentaires » se sont livrés les vrais et faux amis d’Yves Riesel sur Facebook.
D’abord un mot sur le pianiste que le public parisien n’aura pas la chance d’entendre. Je l’avais, pour ma part, découvert à New York, il y a plus d’une dizaine d’années, dans le cadre du festival Mostly Mozart qu’anime le chef français Louis Langrée. J’avais beaucoup aimé un artiste impérial dans son jeu, mais si modeste et élégant dans son allure.
Les Parisiens n’entendront donc pas ce musicien si raffiné, libre, dégagé des contingences d’une technique infaillible. L’éditeur BIS lui fait une confiance absolue, de longue date. Et la critique lui fait fête à chaque nouvelle parution.
Mais cela ne suffit manifestement pas à attirer l’attention d’un public que je crois moins blasé qu’on ne le dit. Certes quand je voyais l’autre soir les auditeurs s’agglutiner dans la Philharmonie de Paris, pour écouter un pianiste célèbre, mais usé (Maurizio Pollini). je mesure le défi que doit relever une organisation indépendante, défi parfois impossible comme en témoigne cette annulation.
Et pourtant, c’est grâce à des amoureux de musique, audacieux, intrépides, enthousiastes, on les nommait jadis imprésarios, aujourd’hui agents, organisateurs, animateurs de festivals, que des musiciens de talent peuvent toucher, conquérir de nouveaux publics, développer leur carrière, prendre leur essor.
Le Monde rendait compte, le 22 novembre, d’un concert de Michel Dalberto, à Lyon, et évoquait en ces termes le succès d’une entreprise née il y a quinze ans :
« En quinze ans, Jérôme Chabannes, fondateur et directeur artistique de la saison de concerts « Piano à Lyon », a fait de la capitale des Gaules un haut lieu du piano en France. Chaque année, la Salle Molière, écrin de 586 places à l’acoustique idéale, se fait repaire de talents, accueillant en récital ou en musique de chambre la fine fleur du clavier international. Un mérite d’autant plus grand que la manifestation, dont le taux de financement par la billetterie atteint les 70 %, n’a jamais obtenu de subventions publiques » (Marie-Aude Roux, Le Monde, 22/11/19).
Le dernier double album de Michel Dalberto a été enregistré à Lyon.
On partage tout à fait l’état des lieux quant aux concerts parisiens: faible curiosité du public intriquée avec une originalité très limitée des programmes mais le français est-il musicien ?
Ok sur 2-3 jours type folles journées nantaises mais ensuite .. à plus long terme ?
Certes la philharmonie de Paris a réussi son pari de renouveler son auditoire avec des prix très attractifs mais sans doute au dépens des autres salles plus centrales ( TCE ; Gaveau ) et quid de la Seine musicale très excentrée voire de Radio France mal desservi par les transports en commun ?
La programmation de RF est très discutable et on rève d’une série de concerts consacré à la symphonie française alors que Gatti puis Krivine nous proposent des intégrales Tchaikowski puis Brahms .Depuis combien d’années a-t-on entendu les symphonies de Roussel, Chausson, Ropartz ou Dukas ? Il est temps de réévaluer Jolivet ou Nigg ; récemment une série consacrée au groupe des six par le philharmonique. Ce n’est qu’un début et continuons le combat !!!