L’Opéra de Lyon ne redoute pas l’originalité. Il y a un peu plus d’un an déjà, on avait beaucoup aimé Une Nuit à Venise, qui n’est pas l’opérette la plus fréquente sur les scènes françaises.
Cette semaine, on a vu une rareté absolue, puisque c’était la création française du Cercle de craie (Der Kreidekreis) – 85 ans après sa création à Zurich ! – de Zemlinsky.
Ce n’est pas l’interview absconse – tutoiement de rigueur – du metteur en scène Richard Brunel, distribuée avec le programme de salle, qui éclairera la lanterne du spectateur. Pas sûr non plus que la « modernisation » du contexte soit plus éclairante…
On partage le point de vue du critique de Diapason : La première française du Cercle de craie
Dans un décor tout blanc, le metteur en scène modernise la fable, pour nous dire sans doute qu’elle est de tout temps et de tout pays, sans craindre d’en souligner la cruauté – en montrant par exemple une exécution par voie létale. Bannissant les changements d’atmosphère, cette esthétique minimaliste ne rend que partiellement justice à la structure dramatique d’un ouvrage long (sept tableaux clairement différenciés), la direction d’acteurs s’en tenant, pour sa part, à un premier degré loyal, mais sans grande originalité.
C’est musicalement que l’ouvrage se singularise par rapport à la production lyrique de Zemlinsky. En ce début des années 30, le beau-frère de Schoenberg cherche manifestement à faire autre chose que Der Zwerg/Le Nain (1922) ou Eine florentinische Tragödie / Une tragédie florentine (1917), les deux ouvrages qui sont régulièrement représentés. Economie de moyens, orchestre chambriste jouant sur les timbres plus que sur le volume, Sprechgesang. Difficulté évidente pour le spectateur non germanophone.
Et pourtant l’opéra de Lyon fait salle comble en ce soir de deuxième, et le public ne retient pas ses applaudissements à l’égard d’une distribution sans faille, où s’est distinguée la jeune soprano belge Ilse Eerens, qu’on se rappelle avoir conviée presque à ses débuts avec l’Orchestre philharmonique de Liège il y a quelques années… Le monde est petit !
Reste le problème Zemlinsky. Un compositeur de l’entre-deux, qui, comme beaucoup de ses contemporains, est resté dans l’ombre des géants qui avaient pour noms Richard Strauss, Mahler, Schoenberg, Berg ou Webern. Heureusement la postérité… et la curiosité de certains programmateurs et musicologues (même s’il manque toujours un ouvrage de référence en français sur Zemlinsky !), ont réévalué cette génération oubliée, les Zemlinsky, Schreker, Korngold, et consorts.
La discographie de Zemlinsky est longtemps restée étique, et limitée à la seule Symphonie lyrique. Elle reflète mieux aujourd’hui la belle diversité d’une oeuvre toujours inspirée.
J’ai du mal à départager deux versions de référence de la Symphonie lyrique, Maazel et Jordan.
Merci JP Rousseau pour vos blogs toujours inspirés et bien documentés.
Petite remarque toutefois concernant la forme de ce dernier blog (Le Cercle de Craie). Vous citez la critique de Diapason: « en montrant par exemple une exécution par voie létale ». Létal signifie « qui apporte ou qui conduit à la mort ». Il s’agit donc d’un pur pléonasme. Le critique de Diapason a-t-il voulu parler de la « mort par injection »? N’ayant pas assisté à la représentation, je formule là une simple hypothèse. Bien à vous
Gabriel Beretvas, Paris 75015 >
Merci pour vos aimables commentaires, j’en suis touché ! Quant au critique de Diapason il n’a fait qu’user d’une expression tellement fréquente dans les médias que plus personne n’y voit un pléonasme…