Winter comes slowly

En ce dimanche gris et brumeux de début de l’hiver, c’est à Purcell et sa merveilleuse Fairy Queen que je pense aussitôt : Now winter comes slowly

C’est une des nombreuses musiques que l’hiver a inspirées à des compositeurs de tous horizons. A peu près chaque année, j’ai consacré un billet à cette saison (Rêves d’hiver) qui n’est pas toujours synonyme de réjouissances et de fête.

J’ai piqué au hasard dans ma discothèque quelques tubes et quelques raretés.

  • L’inverno (L’hiver) de Vivaldi, et une version – la première que j’ai acquise – celle de Felix Ayo avec I Musici qui n’a pas pris une ride

De ce cycle de douze pièces pour piano (une par mois) de Tchaikovski, que j’aime jouer (uniquement pour moi !) et qui était longtemps resté l’apanage de quelques pianistes russes, comme Sviatoslav Richter, il y a depuis quelques mois une épidémie de parutions…

Je laisse aux critiques spécialisés le soin de les départager. Je livre ici une version qui m’est chère, celle de Brigitte Engerer

C’est à Paris qu’en 1929, le compositeur et chef d’orchestre originaire de Saint-Pétersbourg, réalise le premier enregistrement de son ballet Les Saisons, une des rares oeuvres qui émerge encore d’un corpus symphonique abondant, mais pas toujours inspiré. C’est à Neuilly qu’il décèdera le 21 mars 1936.

Les Russes n’ont pas le monopole de l’évocation de l’hiver. J’aime beaucoup la première symphonie de Roussel, qui reste dans une veine « impressionniste » qui disparaîtra dans les symphonies n°3 et 4.

Deux versions très réussies, qu’on n’a pas envie de départager :

  • Schubert, Der Winterabend

Quand on évoque Schubert, on pense évidemment à son cycle de mélodies Winterreise / Le Voyage d’hiver (1827). Le Lied Der Winterabend lui est postérieur d’un an.

  • Wagner, Die Walküre / La Walkyrie acte I, air de Siegmund « Winterstürme wichen den Wonnemond »

Dans le 1er acte de la Walkyrie, Siegmund chasse le souvenir des « tempêtes hivernales ».

  • Josef Strauss, Winterlust

Et puisqu’on y sera bientôt, anticipons les joies de l’hiver à Vienne avec le frère cadet de Johann Strauss

  • Richard Strauss, Winterweihe (1900)

Cette mélodie de Richard Strauss sur un poème de Carl Friedrich Henckell est une promesse autant qu’une invitation, et résonne presque comme un chant de Noël.

In diesen Wintertagen,
Nun sich das Licht verhüllt,
Laß uns im Herzen tragen, 
Einander traulich sagen,
Was uns mit innerm Licht erfüllt.

Was milde Glut entzündet,
Soll brennen fort und fort, 
Was Seelen zart verbündet
Und Geisterbrücken gründet,
Sei unser leises Losungswort.

Das Rad der Zeit mag rollen,
Wir greifen kaum hinein,
Dem Schein der Welt verschollen, 
Auf unserm Eiland wollen
Wir Tag und Nacht der sel’gen Liebe weih’n
.

En ces jours d’hiver, Maintenant que la lumière est voilée, Portons dans nos cœurs, Confions-nous intimement, Que ce qui nous emplit de lumière intérieure. ce qui allume une douce braise brûlera sans fin, ce qui unit tendrement les âmes et bâtit des ponts spirituels, soit notre mot d’ordre silencieux. La roue du temps peut tourner, Nous la touchons à peine, Perdus dans l’illusion du monde, Sur notre île, nous voulons consacrer jour et nuit à l’amour béni (Libre traduction JPR)

Et toujours humeurs et bonheurs à lire dans mes brèves de blog

Jupiter

Les symphonies de Mozart ne sont quasiment plus au répertoire des orchestres symphoniques traditionnels. C’est dire si, comme je l’ai écrit pour Bachtrack, la présence de la 41e symphonie dite « Jupiter » de Mozart au programme de l’Orchestre national de France dirigé par Simone Young le 19 juin dernier faisait figure d’événement.

La conception de Simone Young, ici à Munich en 2018, n’a pas foncièrement changé. C’est l’illustration même de ce que je décris dans mon article : Soir de fête pour Simone Young et l’Orchestre national

Je crois me souvenir que la dernière fois que j’ai entendu la Jupiter en concert, c’était à Liège avec Louis Langrée en janvier 2006 ! Je me rappelle surtout une séance pédagogique où il avait réparti le public de la Salle Philharmonique en cinq groupes suivant chacun l’une des cinq « phrases » fuguées par Mozart dans le dernier mouvement. On peut voir quelques extraits du grand festival Mozart dans ce film à 26′

L’ultime chef-d’oeuvre symphonique de Mozart a évidemment bénéficié d’un grand nombre d’enregistrements. J’en ai distingué quelques-uns dans ma discothèque, parfois surprenants ou inattendus

Les grands classiques

Josef Krips, Amsterdam (1971)

Souvent réédité le bloc des symphonies 21 à 41 enregistrées par le chef viennois Josef Krips à Amsterdam au début des années 70, garde son statut de référence, même si les réussites y sont très inégales. Mais la 41e symphonie a fière allure

L’autre inévitable est Karl Böhm, auteur de la première intégrale des symphonies de Mozart, très inégale elle aussi, mais on retrouve bien dans la 41e symphonie ce mélange d’apparente rigueur et d’élan qui a souvent caractérisé l’art de ce chef

Karl Böhm, Berlin (1962)

Pour des raisons commerciales probablement, on a confié peu de Mozart à Eugen Jochum, qui pourtant dans Haydn, Mozart, Beethoven, était en terrain de connaissance et de liberté

Eugen Jochum à Boston (1973)

James Levine a gravé une autre intégrale des symphonies de Mozart à Vienne.

La 41e commence à 28′

Autre intégrale remarquable, globalement la plus réussie, celle de Charles Mackerras avec l’orchestre de chambre de Prague (il a réengistré les six dernières symphonies avec le Scottish chamber orchestra). C’est pour moi la plus recommandable globalement.

Les inattendus

On n’attend pas vraiment Zubin Mehta dans ce répertoire. Pourtant, formé à Vienne auprès des meilleurs, le chef indien se coule sans peine dans la peau du chef mozartien…

Zubin Mehta à Vienne

Autre chef inattendu dans ce répertoire, et surtout le seul à avoir officiellement enregistré la 41e symphonie, alors âgé de 28 ans, avec l’Orchestre national de l’époque. Et ça sonne vraiment bien…

Lorin Maazel avec l’ONF (1958)

Quelques mois avant sa mort, le chef américain se retrouve invité (à grands frais certainement) en Galice en 2012.

Lorin Maazel en Galice (2012)

Sur YouTube, on trouve dette étonnante captation d’un concert où le vieux chef soviétique Evgueny Svetlanov épouse la grandeur du compositeur, donnant une version fascinante.

Evgueni Svetlanov à Moscou (1992)

Yehudi Menuhin, Sinfonia Varsovia

Pour rappel, Yehudi Menuhin était aussi un excellent chef d’orchestre (lire Le chef oublié) et Hugues Mousseau dans Diapason avait justement distingué sa version de la Jupiter de Mozart

La nouvelle génération

Maxim Emelyanychev, Il Pomo d’Oro

J’écrivais, il y a trois ans, après les deux concerts finaux du Festival Radio France : « Maxim Emelyanychev réinvente tout ce qu’il dirige, sans céder aux excès de certains de ses contemporains plus médiatisés« . Je me réjouis infiniment de retrouver le jeune chef russe, actuel chef principal du Scottish Chamber Orchestra, à la tête de l’Orchestre national de France ce jeudi au Théâtre des Champs-Elysées.

Il a commencé un projet Mozart enthousiasmant :

Julien Chauvin et le Concert de la Loge

J’ai le même enthousiasme pour le parcours de Julien Chauvin et son Concert de la Loge. Je me rappelle la jubilation éprouvée avec le Don Giovanni « implacable et génial » donné à l’Athénée en novembre 2024, qui vient d’être distingué par le Prix 2025 du syndicat de la critique Théâtre, Musique et Danse.

Plus radicales certes, mais passionnantes, les démarches de Mathieu Herzog et Riccardo Minasi

Mathieu Herzog, Appassionato

Riccardo Minasi, Resonanz

PS Je précise, une fois de plus, à l’intention de certains lecteurs – qui ne manquent jamais une occasion de me reprocher mes choix, mes oublis, voire mon ignorance – que, dans ce type d’articles, je n’ai, d’abord, aucune prétention ni volonté d’exhaustivité, et que je fais un choix tout à fait subjectif. En plus de celles déjà citées, je n’ignore pas les versions d’Abbado, Barbirolli, Barenboim, Beecham, Bernstein, Blech, Blomstedt, Boult, Brüggen, Davis, Dorati, Adam Fischer, Fricsay, Gardiner, Giulini, Glover, Harnoncourt, Hogwood, Jacobs, Jordan, Karajan, Keilberth, Klemperer, Koopman, Krivine, Kubelik, Leibowitz, Leinsdorf, Manacorda, Marriner, Monteux, Munch, Muti, Oistrakh, Pinnock, Reiner, Rhorer, Sawallisch, Schmidt-Isserstedt, Schuricht, Solti, Suitner, Tate,Tennstedt, Vegh, Walter… pour ne citer que celles que j’ai dans ma discothèque !!

Et toujours mes brèves de blog !

La Mer et les chefs

J’aurais préféré écrire une meilleure critique sur le concert auquel j’ai assisté jeudi dernier (le jour où on annonçait le nom du successeur de Louis Langrée à CincinnatiUne semaine pas très ordinaire). A lire sur Bachtrack : La Mer trop calme du National avec Cristian Măcelaru à Radio France.

La formule est schématique, mais elle traduit bien l’impression de statisme qu’on a éprouvée à l’écoute d’une interprétation qui ne manquait pas de qualités. Le National et son chef avaient déjà donné le triptyque debussyste en 2022 comme en témoigne cette captation :

J’ai pensé que c’était l’occasion de faire le point non pas sur la discographie de l’oeuvre – des centaines de versions ! – mais d’une part en comparant l’Orchestre national de France à lui-même sous les différentes baguettes qui l’ont dirigé, d’autre part en tirant de ma discothèque des versions qui m’accompagnent depuis longtemps

La Mer et le National

La fausse symphonie de Debussy est bien évidemment l’un des piliers du répertoire de l’orchestre radiophonique qui célèbre ses 90 ans d’existence cette année. Ce qui est doublement fascinant, c’est d’une part la constance dans les couleurs si françaises de « notre » Orchestre national, et d’autre part la marque qu’y impriment les différents directeurs musicaux, leurs tempéraments, et quelques invités prestigieux :

2018 : Emmanuel Krivine (2017-2020)

2012 Daniele Gatti (2008-2014)

Evgueni Svetlanov (1998) au festival Radio France Montpellier

1984 : Seiji Ozawa

1974 : Jean Martinon (1968-1973)

1956 : Charles Munch (1962-1967)

Je n’ai pas trouvé d’enregistrement disponible de La Mer sous la direction de Lorin Maazel et Charles Dutoit qui se sont succédé à la tête de l’Orchestre National entre 1977 et 2001.

Les chefs de La Mer

Souvent les versions citées comme des « références » perdent de leur superbe au fil des années et de l’accroissement de la discographie d’une oeuvre. En l’occurrence, pour La Mer de Debussy, ces fameuses références demeurent inchangées, voire insurpassées.

Ernest Ansermet (1883-1969)

On ne sait pas toujours que le chef suisse, fondateur de l’Orchestre de la Suisse romande, a non seulement connu Debussy, mais le jeune homme qu’il était alors s’était même permis de suggérer au compositeur quelques corrections dans sa partition ! Le lien entre Ansermet et Debussy était tel que le programme inaugural de l’orchestre genevois était tout entier dédié à Debussy

J’ai beau la connaître par coeur, la version d’Ansermet de La Mer me paraît indépassable. Quand je dis à propos du dernier concert du National que les tempi sont trop lents, ce n’est pas seulement affaire de métronome, mais aussi et surtout de mouvement. Et Ansermet savait de qui et de quoi il parlait !

Pierre Boulez (1925-2016)

Avec d’autres moyens, et un luxe orchestral supérieur, qu’Ansermet, Pierre Boulez réalise avec Cleveland, deux fois pour Sony et DG, une version passionnante.

Herbert von Karajan (1908-1989)

Les deux seules fois où j’ai eu le privilège d’entendre Karajan en concert, en 1974 à Lucerne et en 1985 à Genève, La Mer était au programme. C’est dire si le chef autrichien aimait l’oeuvre. Il en a laissé pas moins de trois versions officielles au disque.

Ma liste n’est évidemment pas exhaustive, mais il y a ici pour l’amateur quelques heures passionnantes d’écoute en perspective !

Trouvailles et retrouvailles

Juste pour mémoire les suites de ma visite à Louis Langrée à Cincinnati : l’entretien que le chef français, directeur de l’Opéra Comique depuis deux ans, m’avait accordé est maintenant publié sur Bachtrack : « Le chef providentiel n’existe pas ».

J’invite, en particulier, à lire ce que Louis Langrée dit de la vie musicale américaine et du poids de la cancel culture qui a conduit, par exemple, les responsables du Lincoln Center de New York à supprimer Mozart de leur vocabulaire, parce que le nom même est jugé élitiste !! Heureusement la contamination reste limitée en Europe, et le travail exemplaire que font les équipes de l’Opéra Comique est de nature à nous rassurer !

(Louis Langrée dans son bureau de directeur général à l’Opéra Comique devant une affiche-programme de 1950)

L’actualité du chef est aussi ce nouveau disque dont le soliste est Alexandre Tharaud. Pour ne blesser personne, je me contenterai de remarquer que Louis Langrée trouve, dans Ravel et plus encore dans Falla, des couleurs admirables grâce à un Orchestre national en grande forme. Bravo pour le couplage inédit au disque !

Solti suite et fin

Il y a deux ans, j’avais reçu juste avant un séjour involontaire à l’hôpital, le deuxième des coffrets que Decca a consacrés à son chef star, Georg Solti (1912-1997) : Solti à Londres. Après un premier fort volume regroupant les enregistrements faits à Chicago durant un quart de siècle. Cette fois la boucle est bouclée avec un troisième coffret regroupant tout ce que le chef britannique a enregistré ailleurs qu’à Londres ou Chicago, pour la plupart à Vienne. Et ce sont, pour moi, de loin les meilleurs disques de Solti.

Les chauvins y retrouvent le seul disque enregistré avec l’Orchestre de Paris – dont Solti fut brièvement le « conseiller musical », des poèmes symphoniques de Liszt… et les 2e et 5e symphonies de Tchaikovski avec l’ancêtre de l’Orchestre de Paris, la société des Concerts du Conservatoire.

Je ne résiste pas au plaisir de citer encore la version la plus hallucinée des célèbres ouvertures de Suppé, captées en 1957 avec des Wiener Philharmoniker complètement survoltés : ici une Cavalerie légère au triple galop !

Braderie russe

Sur le site allemand jpc.de, je trouve régulièrement, à tout petit prix soldé, des disques dont j’ignorais même l’existence, parce qu’ils n’ont jamais ou très inégalement été distribués en Europe occidentale, publiés par le label Melodia, jadis le seul et unique éditeur officiel de l’URSS. Je viens de recevoir – et d’écouter – quatre albums assez incroyables.

D’abord Evgueni Svetlanov (1928-2002) dont on sait qu’il ne limitait pas son horizon à la seule musique russe, dont il a pourtant enregistré une quasi-intégrale symphonique. Ici c’est Ravel, et beaucoup moins attendu, le grand oratorio d’Elgar, The Dream of Gerontius. Grandiose vraiment !

Autres surprises, un double album consacré à Wagner (édité en 2013 à l’occasion du bicentenaire de sa naissance) et un époustouflant « live » de 1965 où Charles Munch dirige l’orchestre de Svetlanov (le symphonique d’URSS) dans une Mer de Debussy absolument déchaînée (au même programme: la 2e symphonie d’Honegger, la suite de Dardanus de Rameau et la 2e suite de Bacchus et Ariane de Roussel)

(Debussy, la Mer extrait, Charles Munch, Orchestre symphonique de l’URSS, Moscou 1965)

Le bonheur de Mahler

Passant avant-hier chez le libraire de la rue de Bretagne à Paris, je tombe sur un livre de poche au rayon « Musique ». Jamais entendu parler du bouquin à sa sortie en 2021, encore moins de son auteur, Évelyne Bloch-Dano.

«  »On ne connaît pas Natalie Bauer-Lechner. Et pour cause : le nom de cette talentueuse altiste a été effacé par l’entourage de Mahler. Avant-gardiste, membre d’un quatuor de femmes réputé, c’est aussi elle qui, la première, a cru en Gustav Mahler. Jusqu’au mariage du compositeur, elle fut sa confidente, la première lectrice de ses compositions… son âme sœur, dans une Vienne aux codes étouffants, ivre d’art et de musique. Évelyne Bloch-Dano nous emmène à la rencontre de trois personnages, un génie, une artiste et une ville, dans une époque euphorique et impitoyable que balaya la Première Guerre mondiale. Le récit d’une intimité hors normes qui a le souffle d’un roman ». (Présentation de l’éditeur)

Un feuilletage rapide donne l’impression d’un ouvrage sérieux, même si écrit comme une biographie romancée. En tout cas, l’idée n’est pas mauvaise de raconter Mahler par le biais de cette amitié particulière avec une authentique féministe, la musicienne Natalie Bauer-Lechner

Rachmaninov : une Première mal aimée

Cet été j’ai pas mal voyagé et donc écouté beaucoup de musique. Une programmation aléatoire m’a fait entendre deux versions de la Première symphonie de Rachmaninov et m’a, du même coup, rappelé une promesse que je m’étais faite d’établir quelques discographies des oeuvres du compositeur russe, né il y a 150 ans et mort il y a 70 ans.

Les heureux Parisiens auront la chance de pouvoir l’entendre fin octobre à la Philharmonie avec l’orchestre « rachmaninovien » par excellence, celui que dirigea le compositeur lui-même et avec lequel il enregistra plusieurs de ses oeuvres, l’orchestre de Philadelphie et son actuel chef Yannick Nezet-Seguin

En attendant, revue de quelques versions -de ma discothèque- pas toujours les plus connues :

  1. Lorin Maazel, Orchestre philharmonique de Berlin (DG)

Une fois de plus, ce n’est pas spontanément qu’on associe Rachmaninov à un chef comme Lorin Maazel. Et pourtant sa gravure des trois symphonies avec Berlin est plus qu’intéressante, elle a été heureusement rééditée dans le coffret presque complet des enregistrements DGG du chef américain disparu en 2014.

2. Walter Weller, Orchestre de la Suisse Romande (Decca)

A l’occasion du décès du violoniste et chef viennois Walter Weller (1939-2015) en juin 2015, j’avais écrit ceci :

« Quelques années plus tôt, j’avais acheté au marché aux puces de St Ouen un coffret de 3 33 tours des Symphonies de Rachmaninov et j’avais été fasciné par la 1ere symphonie (plus, à l’époque, que par les 2e ou 3emes) et par la beauté de la version de….Walter Weller et de l’Orchestre de la Suisse Romande, une captation Decca réalisée en 1971 au Victoria Hall de Genève.

Je me dis que jamais plus je n’aurais l’opportunité d’entendre « en vrai » l’oeuvre et les interprètes de ce disque, si je ne demandais pas à Walter Weller de reprendre cette 1ere symphonie de Rachmaninov vingt ans après cet enregistrement. Il fut d’abord très surpris de ma demande – peut-être n’avait il jamais plus redonné l’oeuvre en concert depuis l’enregistrement ?!, moi-même j’ai dû attendre 2007 et l’enthousiasme de Patrick Davin pour la reprogrammer à Liège ! –

Inutile de dire que ce concert genevois de Walter Weller m’est resté en mémoire (d’autant plus que le Berg donné en première partie avait pour soliste un Pierre Amoyal au sommet de ses moyens).

3. Vladimir Ashkenazy, Concertgebouw Amsterdam (Decca)

Autant je suis loin d’être convaincu par le pianiste Ashkenazy – qui a beaucoup, trop, enregistré – autant je lui reconnais pas mal de belles réussites comme chef d’orchestre, en particulier dans l’oeuvre symphonique de Rachmaninov, où il bénéficie de surcroît du somptueux Concertgebouw d’Amsterdam

4. Charles Dutoit, orchestre de Philadelphie (Decca/Newton)

Ce n’est pas – et de loin – la part la plus connue de la discographie du chef suisse, et pourtant la quasi-intégrale symphonique Rachmaninov que Charles Dutoit a enregistrée l’a été à Philadelphie et compte pour moi parmi les plus inspirées.

5. Zoltan Kocsis, Orchestre national de Hongrie (Budapest Music Center)

Lorsque j’avais rendu hommage à Zoltan Kocsis, le grand pianiste hongrois disparu en novembre 2016, j’avais évoqué, trop brièvement, son activité de chef d’orchestre. La dernière fois que je m’étais rendu à Budapest (et que j’avais encore trouvé un magasin de disques !) j’avais pu acheter ce CD, comportant… la Première symphonie de Rachmaninov !

Je n’ai malheureusement pas trouvé de vidéo de cet enregistrement… mais je le recommande très chaudement. Comme on a toujours chaleureusement recommandé Kocsis dans les concertos de Rachmaninov…

6. Mikhail Pletnev, Orchestre national de Russie (DGG)

Le pianiste Mikhail Pletnev est, de mon point de vue, aussi génial au clavier que sur le podium du chef. Il ne laisse personne indifférent, et c’est pour cela qu’on l’admire.

Il a aussi gravé les trois symphonies de Rachmaninov, et ses partis-pris dans la 1ere peuvent déconcerter autant que passionner l’auditeur.

Pour ne pas encourir le reproche que d’aucuns de mes lecteurs ne manqueraient pas de me faire, je précise que les versions que j’ai retenues ici n’excluent pas évidemment les références que sont Ormandy, Jansons, Svetlanov, et qui demeurent chères à mes oreilles !

Retour à Colmar

Ce fut un beau, un très beau week-end ! Je n’avais plus que de vagues souvenirs du chef-lieu du Haut-Rhin, mais déjà sous une chaleur étouffante : ce devait être il y a trente ans Evgueni Svetlanov et son orchestre russe dans la Sixième de Mahler. Et la découverte du polyptyque de Mathias Grünewald au musée Unterlinden (lire Mathis le peintre).

Le Koifhus, l’ancienne Douane

La fameuse Maison des Têtes

Inutile de dire que dans une aussi jolie ville, la gastronomie est reine. Tradition germanique, bien pratique quand on va au concert, les restaurants servent dès 19 h. On veut citer ici deux établissements où la chaleur de l’accueil, la diligence du service ont précédé et prolongé le bonheur de l’assiette :

La Maison Rouge et un sublime pâté en croute

et – un dimanche soir – À l’échevin, le restaurant de l’hôtel Le Maréchal, un petit menu qui porte bien son nom « Ballade en Alsace » avec un « consommé de choucroute en montgolfière, kassler, foie gras et truffes »… à tomber ! Le tout à des prix plus que raisonnables !

Un nouveau festival

Quand j’ai vu le programme que l’ami Alain Altinoglu, qui en est le nouveau directeur artistique, avait concocté pour le vénérable Festival de Colmar, en particulier ce qui se passait samedi et dimanche, je me suis dit que l’occasion était toute trouvée pour un retour en Alsace, surtout si Bachtrack m’y envoyait en mission ! Deux concerts de l’orchestre du Capitole de Toulouse sous la baguette du nouveau prodige de la direction, Tarmo Peltokoski, tout fraichement désigné par le maire de Toulouse pour prendre la direction musicale de l’ensemble au 1er septembre 2014. Et pas n’importe quels programmes !

« Ces deux concerts marquent, en tout cas, le début d’une belle relation entre un déjà très grand chef et un orchestre prêt à le suivre sur les sommets de l’excellence. » C’est la conclusion de mon article sur Bachtrack : A Colmar le début d’une belle histoire entre Tarmo Peltokoski et l’ONCT

Preuve en quelques images de ce que j’ai écrit à propos d’une mémorable Quatrième symphonie de Bruckner, c’était samedi soir :

Il y a des soirs où l’on est heureux de s’attarder après le concert, de saluer et de féliciter les musiciens..

Rachmaninov soviétique

J’avais vu passer cette Rachmaninoff Collection éditée par la firme Melodia – producteur exclusif de disques du temps de l’Union soviétique – pour le 145ème (sic) anniversaire de la naissance de Serge Rachmaninov, en 2018 donc. Je ne m’y étais pas attardé en raison d’un prix prohibitif – entre 300 et 400 € selon les fournisseurs – et du peu d’informations qu’on avait du contenu du coffret.

Il y a quelques jours, parcourant la colonne des « bonnes affaires » ou « offres spéciales » du site allemand jpc.de– où j’ai fait nombre de belles trouvailles – je suis tombé sur une offre, cette fois irrésistible, 130 € pour une véritable malle aux trésors (33 CD et un vinyle) : Sergej Rachmaninoff – Die Melodiya-Edition. Les frais de port sont très peu élevés, et pour les non-germanophones, le site peut aussi être consulté en anglais.

Comme pour les coffrets précédents consacrés à Sviatoslav Richter, Emile Guilels ou Evgueni Svetlanov, la présentation est très soignée, avec un livret quadrilingue, et sur chaque pochette cartonnée en trois volets toutes les précisions nécessaires (toujours en quatre langues) sur les interprètes, les dates et lieux d’enregistrement.

Inutile de dire qu’on va de surprise en émerveillement, parce qu’aux références déjà connues et éditées en Occident s’ajoutent nombre d’enregistrements d’interprètes moins connus, mais tout aussi passionnants, qui témoignent de l’art de plusieurs générations de musiciens de l’ère soviétique abordant un compositeur d’abord honni, puisque ayant fui la mère patrie sans jamais y être revenu.

Tous les détails de ce coffret à voir ici : Rachmaninoff Collection tracklist

De précieux documents connus (Rachmaninov lui-même au piano, Horowitz) et d’autres que je découvre comme ce prélude op.23/5 joué en 1924 par…Prokofiev (YouTube cite une autre date, 1919, pour un enregistrement sur rouleau, miraculeusement restitué)

Celui qui fut, dans sa jeunesse, un virtuose célèbre en URSS, Victor Eresco, 80 ans, vit, semble-t-il, une retraite paisible en Bourgogne, où il est installé depuis plusieurs années !

Nombre de représentants de la grande école de piano russe – si tant est que le terme ait un sens – moins connus que les figures de proue, figurent dans ce coffret. On y retrouve aussi des interprètes devenus mondialement célèbres, comme Nikolai Luganski :

Et bien sûr des versions maintes fois célébrées – Svetlanov dans la 2ème symphonie ou L’île des morts – Kondrachine dans les Danses symphoniques, la version qui trône au sommet de la discographie, la plus désespérée, la plus tragique.

Hamlet & Co.

#FestivalRF22 #SoBritish

Hamlet à Montpellier

C’était hier la soirée d’ouverture du Festival Radio France, édition 2022 « So British ». Avec l’opéra d’Ambroise Thomas, Hamlet, dans sa version initiale, reconstituée, pour ténor. Un triomphe on peut le dire.

De gauche à droite : Philippe Talbot, Jodie Devos, Michael Schonwandt, John Osborn, Clémentine Margaine

Richard Martet, dans Opera Magazine, écrit :

« Une « prima donna » est née ! Nous avons toujours senti, chez Jodie Devos, l’étoffe d’une cantatrice d’exception. Elle a littéralement explosé hier, vendredi 15 juillet, dans une somptueuse version de concert d’Hamlet d’Ambroise Thomas, au Festival Radio France Occitanie Montpellier. L’excellente chanteuse que nous connaissons, au timbre frais et à la technique ébouriffante, est passée au niveau supérieur. La voix a gagné en rondeur et en puissance, sans rien perdre de ses qualités virtuoses, trouvant un terrain d’épanouissement idéal dans la redoutable scène de folie d’Ophélie, à l’acte IV. Variant les climats et les couleurs à l’infini, alternant longues phrases rêveuses et véhémentes cascades de vocalises, avec une netteté de diction jamais prise en défaut, la soprano belge a été saluée par une ovation aussi spectaculaire que méritée. Et quelle poésie, quelle émotion dans le passage qui suit, quand Ophélie, accompagnée par le chœur (Montpellier et Toulouse réunis) à bouche fermée, s’enfonce lentement dans le lac ! L’intensité de l’incarnation est telle qu’on en oublie complètement qu’il s’agit d’une version de concert. Jodie Devos a, de plus, la chance d’être remarquablement dirigée (Michael Schønwandt, à la tête de l’Orchestre National Montpellier Occitanie) et entourée : John Osborn en Hamlet (l’opéra est donné dans sa version avec un ténor dans le rôle-titre), Clémentine Margaine en Gertrude (impressionnante), Philippe Talbot en Laërte, Jérôme Varnier en Spectre…« 

Michael Schonwandt me confiait avant le concert combien l’incarnation d’Hamlet par un ténor changeait la couleur, la teneur du drame, et plusieurs des comparses des deux rôles principaux disaient après coup qu’ils préféraient presque cette version à l’habituelle avec baryton dans le rôle-titre. Evidemment Jodie Devos a vraiment triomphé pour sa première Ophélie sur scène – je n’oublie ni Natalie Dessay, jadis à Covent Garden, ni Sabine Devieilhe naguère à l’Opéra Comique, toutes deux sous la direction de Louis Langrée – mais la grâce, le fruité de la voix de la jeune cantatrice belge, en ont fait hier soir une Ophélie de rêve. John Osborn, d’abord par sa diction parfaite, sa prononciation et sa compréhension intime de la langue française, autant dans les élans héroïques que dans les confidences brisées, nous a infiniment touchés. Comme le souligne Opéra Magazine, tous les comparses, à commencer par Clémentine Margaine, les choeurs de l’opéra de Montpellier et du Capitole de Toulouse, l’opulent Orchestre de Montpellier, la direction généreuse et inspirée de Schonwandt, ont fait de cette soirée d’ouverture du festival un événement, bientôt diffusé sur France Musique.

D’autres Hamlet

Shakespeare et son prince du Danemark ont finalement peu inspiré les compositeurs d’opéra. En revanche, musiques de scène ou poèmes symphoniques n’ont pas manqué, même si aucune n’a jamais atteint la célébrité des nombreux Roméo et Juliette mis en musique.

Liszt

Liszt très impressionné par une représentation de Hamlet à Weimar en 1856, écrit un poème symphonique d’une vingtaine de minutes qui « résume » le drame shakespearien. Ici dans une version d’une grande densité, l’Orchestre national de France, enregistré au Théâtre des Champs-Elysées, est dirigé par Daniele Gatti, dont on a appris récemment la nomination à la tête de la Staatskapelle de Dresde.

Tchaikovski

Tchaikovski écrit en 1888 une « ouverture fantaisie » éponyme. De loin moins célèbre qu’une autre « ouverture fantaisie » intitulée.. Roméo et Juliette !

Emotion que de retrouver cette captation dirigée par le grand Evgueni Svetlanov :

Prokofiev une musique de scène

Prokofiev écrit lui une musique de scène à la demande du metteur en scène Sergei Radlov, qui est créée en mai 1938.

Très belle version discographique due au regretté Mikhail Jurowski (1945-2022) :

Chostakovitch

Le jeune Chostakovitch a précédé Prokofiev : c’est un jeune homme de 25 ans qui écrit lui aussi une musique de scène en 1931.

Plusieurs versions russes recommandables, mais la plus étonnante est sans doute celle d’Arthur Fiedler à la tête de ses Boston Pops !

La mer qu’on voit danser

#FestivalRF22 #SoBritish

Je l’évoquais avant-hier (A Sea Symphony) ce mois de juillet s’annonce très British du côté de Montpellier.

L’une des oeuvres que l’on y a programmées m’est très chère depuis des lustres, depuis que j’ai découvert la mythique version au disque des Sea Pictures d’Edward Elgar, ce cycle de cinq mélodies écrites pour contralto et orchestre et créées en 1899 : Janet Baker et John Barbirolli (le grand chef est né la même année que les Sea Pictures !)

C’est pour sortir de cette idée idiote, de ce cliché, selon lesquels la musique anglaise ne serait l’apanage que des Anglais que nous avons proposé à l’une des plus belles et chaudes voix françaises du moment, Marianne Crebassa, de chanter ces Sea Pictures le 21 juillet prochain à Montpellier. Elle-même nous avouait ne pas connaître ce cycle mais n’a pas hésité une seconde, une fois lue et entendue cette partition, à répondre à notre invitation.

Il est vrai que dans la discographie de l’oeuvre, les chanteuses anglophones se taillent la part du lion: Yvonne Minton, Alice Coote, Della Jones, etc…

C’est encore un chef anglais – Paul Daniel – mais avec un orchestre français – Bordeaux – qui a signé avec une chanteuse canadienne – Marie-Nicole Lemieux – l’une des plus récentes et belles versions discographiques :

Mais j’ai aussi dans ma discothèque dans un gros coffret consacré à Evgueni Svetlanov, une version très surprenante de ces Marines (c’est le titre français validé par Elgar lui-même !), chantée… en russe par Larissa Avdieyeva !

Une idée pour Warner (qui édite Marianne Crebassa) : un « live » des Sea Pictures ? Puisque le concert du 21 juillet est bien entendu capté et diffusé par France Musique

Régime de fête (II) : Rêves d’hiver

Rien de nouveau sous le pâle soleil de ce matin : c’est le premier jour de l’hiver !

Il y a un an, j’avais consacré un long article à la Première symphonie de Tchaikovski. Je le reproduis ici, et l’actualise à la fin, en évoquant des versions ou rééditions récentes, qui surprennent… ou déçoivent !

Les rêves d’hiver de Tchaikovski

Comme je l’ai raconté dans le premier billet de cette série – La découverte de la musique (I) – j’ai, adolescent, en grande partie constitué ma discothèque classique grâce à une filiale de la puissante coopérative suisse MigrosEx Libris, qui était à la fois un club et une chaîne de magasins culturels. C’est grâce à Ex Libris que j’ai eu ma première version d’une oeuvre qui a toujours puissamment résonné en moi (Musiques climatiques) : la première symphonie « Rêves d’hiver » de Tchaikovski

Cette symphonie, commencée au printemps 1866, est sans doute celle qui va donner le plus de mal à son auteur, qui traverse de graves crises nerveuses : «  Mes nerfs sont à nouveau complètement détraqués. Les raisons en sont les suivantes : 

1) les difficultés dans la composition de la symphonie ;

2) Rubinstein et Tarnovski, remarquant à quel point je suis susceptible, passent leur temps à me faire enrager ;

3) la pensée omniprésente que je mourrai bientôt sans avoir eu le temps d’achever ma symphonie.

J’attends l’été et Kamenka comme une terre promise. Depuis hier, je ne prends plus de vodka, de vin ni de thé fort. Je hais l’humanité et voudrais me retirer dans un désert. J’ai déjà pris mon billet de diligence pour le 22 mai… »

Il faudra à Tchaikovski surmonter les refus, les sarcasmes, pour enfin atteindre le succès, deux ans plus tard, lorsque sa symphonie est créée par son dédicataire, Nikolai Rubinstein, le 15 février 1868, à Moscou, lors d’un concert de la Société musicale russe. Ce n’est pourtant que, quinze ans plus tard, le 1er décembre 1883, qu’on pourra la réentendre à Moscou et lire dans Les Nouvelles russes cette critique qui résume bien l’oeuvre : « C’est une symphonie authentiquement russe. Dans chaque mesure, on sent qu’elle n’a pu être écrite que par un Russe« . Tchaikovski lui-même écrit à Nadiejda von Meck: « Même si elle demeure à bien des égards d’une immaturité évidente, elle a pourtant au bout du compte plus de substance et s’avère bien plus réussie que beaucoup de mes œuvres ultérieures« .

C’est donc avec Lorin Maazel – lire Un Américain de Paris – et l’Orchestre philharmonique de Vienne (ah ces couleurs du hautbois solo, des cors !) que je découvre ces Rêves d’hiver, une version qui ne m’a jamais quitté et que je place toujours en tête de ma discographie personnelle de l’oeuvre.

Quelques mois plus tard, je découvrirai l’un des premiers disques du jeune Michael Tilson Thomas 

Et lorsque Karajan, qui a si souvent enregistré les trois dernières symphonies, grave les trois premières pour Deutsche Grammophon, cela donne une Rêves d’hiver intensément lyrique, tragique parfois, comme dans le mouvement lent, d’une abyssale nostalgie

Au moment de clore ce billet, j’ai une pensée toute particulière pour Patrick Davin, tragiquement disparu au début de l’automne (Un ami disparaît) qui avait magnifiquement dirigé, à ma demande, cette symphonie qu’il ne connaissait pas, à la tête de l’Orchestre philharmonique royal de Liège.

(Billet paru le 24 décembre 2020 : La découverte de la musique : Les rêves d’hiver de Tchaikovski)

A aimer.. ou à fuir

Aux versions citées dans cet article, je voudrais en rajouter quelques-unes, à conseiller.. ou à fuir !

Markevitch et Marriner à Londres

La réédition unanimement saluée dans la collection Eloquence des disques enregistrés par Igor Markevitch pour Philips (voir Igor Markevitch la collection Philips) comprend l’intégrale des symphonies de Tchaikovski réalisée à Londres au début des années 60, intégrale inégale dont se distingue une première symphonie idéale d’allure, d’atmosphère juvénile.

Une autre surprise de ma discothèque, vraiment passée sous le radar de la critique, est une intégrale des symphonies de Tchaikovski dirigée par Neville Marriner – qui l’eût cru ? Ses « rêves d’hiver » bien peu « tranquilles » captent notre attention

Désolé pour eux !

Le grand Bernstein a laissé plusieurs enregistrements des dernières symphonies de Tchaikovski. C’est peu dire qu’il a raté les premières : où sont les grands paysages enneigés dans ce premier mouvement qui commence de manière si scolaire, et se poursuit dans une instabilité rythmique bien peu contrôlée ?

Beaucoup plus surprenant le prosaïsme de chefs qui sont nés dans ces contrées, comme Valery Gergiev capté ici avec son orchestre du Marinski à la salle Pleyel à Paris.

Le grand Svetlanov n’est guère plus inspiré par la poésie de ces paysages d’hiver.

On n’est guère plus convaincu par une Première symphonie bien sérieuse et terre-à-terre captée à Zurich – la dernière intégrale en date des symphonies de Tchaikovski.

Même Mariss Jansons – dans une intégrale pourtant souvent célébrée – reste dans un entre-deux, loin des emballements poétiques de Tilson Thomas ou Markevitch.