La naissance de Fauré

Gabriel Fauré est né le 12 mai 1845, il y a donc 180 ans, à Pamiers (Ariège).

La statue de Gabriel Fauré, due au sculpteur Sébastien Langloÿs, inaugurée il y a six mois à Pamiers

On a beaucoup parlé de Fauré, l’an dernier (voir Le vrai Fauré), parce que c’était le centenaire de sa mort. La vie culturelle, musicale, les sorties de disques, les expositions, tout est désormais rythmé par les anniversaires (lire Du bon usage des anniversaires).

Aujourd’hui personne ne parlera de Fauré, le jour de sa naissance, puisqu’on semble avoir épuisé le sujet pour le centenaire de sa mort. Et, à vrai dire, on s’en fiche…

Je veux juste en profiter pour ressortir de ma discothèque quelques raretés, oeuvres ou interprètes.

Nathalie et Catherine

L’un des plus beaux disques de mélodies de Fauré rassemblant Nathalie Stutzmann (60 ans depuis quelques jours !) et la très regrettée Catherine Collard

Le bouquet de mélodies gravées par Victoria de Los Angeles m’émeut toujours

C’est par Yves Montand qu’adolescent j’ai découvert Les Berceaux de Fauré !

J’avais déjà écrit ici mon admiration pour le pianiste américain Grant Johannesen (1921-2005) et son interprétation de la Ballade pour piano et orchestre

J’ai consacré pas mal d’articles à l’oeuvre pour piano de Fauré.

Juste cette pépite, cet Impromptu n°2 capté au festival de Montreux en 1988. Quatre ans plus tard pour les 90 ans d’Hugues Cuénod, Nikita Magaloff qui devait disparaître quelques temps après, en donna une version inoubliable, d’une beauté crépusculaire.

Masques et bergamasques est une pièce tardive de Fauré, elle résiste aux baguettes qui n’en saisissent pas l’esprit, mais évidemment pas à Armin Jordan, qui l’a enregistrée avec l’Orchestre de chambre de Lausanne. Merci à l’OSR et à la télévision suisse de nous restituer cette vision de concert

Pénélope oubliée

On ne peut pas dire que l’unique opéra de Fauré, Pénélope, créé en 1913 à Monte Carlo, encombre les programmes d’opéra ni les discothèques.

C’est dire si la version de Charles Dutoit, avec son fabuleux cast, est précieuse.

Fauré à Bâle

Il faut saluer le travail que fait le chef britannique Ivor Bolton sur la musique française depuis qu’il préside aux destinées de l’Orchestre symphonique de Bâle (Basler Sinfonie-Orchester), avec notamment ce très beau disque :

Et toujours les échos de mon week-end à Athènes et autres impressions : brèves de blog

Un vrai festival

Qu’est-ce que ça fait du bien d’assister à un vrai festival, de partager débats, discussions, moments de musique et d’amitié qui réchauffent le coeur autant que les oreilles ! C’est ce qui m’est arrivé le week-end dernier au Printemps des Arts de Monte-Carlo, et dont j’ai essayé de rendre compte pour Bachtrack.:

Le Bruckner « objectif » de Jukka Pekka Saraste

Venise et Vienne à Monte Carlo

« Un mot d’abord d’un festival qui porte bien et haut son nom, qui n’est pas juste une addition de grands noms et de tubes du classique, qui rempliraient à coup sûr le Forum Grimaldi ou l’Auditorium Rainier III, mais un patchwork astucieux de rencontres d’avant (les before) ou d’après (les after) concert, de soirées de musique de chambre, de récitals, de concerts symphoniques, et à l’intérieur de ces formats habituels, des surprises, des aventures, et toujours ce lien entre un directeur artistique, le compositeur Bruno Mantovani, aussi savant que pédagogue, et le public qui boit ses paroles introductives, rit à ses souvenirs croustillants ou admire sa capacité d’expliquer simplement des concepts bien complexes. » (Extrait de Venise et Vienne au Printemps des Arts de Monte Carlo @JPR)

Ne pas prendre le public pour des c…

En réalité, il n’y a pas de mystère. Un bon festival, une bonne saison de concerts (ou d’opéra) c’est d’abord un(e) bon(ne) « patron(ne)  » qui a des envies, des idées, des intuitions, si possible une grande culture, et qui n’oublie pas qu’il fait partie lui aussi, lui d’abord, du public auquel il s’adresse.

Lors d’une de mes premières présentations de saison à Liège, j’avais eu cette formule, qui avait surpris la presse : « Je ne programme que ce que j’ai envie d’entendre » Au-delà de la formule elliptique, je voulais évidemment dire qu’on ne peut rien faire sans la passion, le désir de convaincre, mais surtout cette irrépressible envie de partager avec le plus grand nombre les merveilles – artistes et/ou partitions – qu’on aime, qu’on a découverts.

Quand j’évoquais avec Bruno Mantovani sa programmation à Monte Carlo, en louant son audace, son courage même, sa réplique a fusé : « Il faut arrêter de prendre le public pour des cons« . Du Mantovani tout craché, tel que je l’aime et le pratique (pas assez souvent à mon gré) depuis des années. J’ai ici même théorisé – ou plus modestement rapporté mon expérience personnelle – sur « le grand public« . Je n’ai pas une ligne à changer à cet article d’il y a bientôt dix ans. J’ajoute, dans le cas de l’ami Mantovani, une sorte de gourmandise (pas seulement celle du gastronome !), d’exubérance absolument contagieuses, que ses origines catalanes n’expliquent pas totalement.

Porter la musique partout où elle peut aller

Lorsque j’ai dû composer ma première édition en 2015 comme directeur du festival de Radio France, fondé il y quarante ans par Georges Frêche (maire de Montpellier), Jean-Noël Jeanneney (PDG de Radio France) et René Koering, j’ai immédiatement pensé célébrer « 30 ans d’amour« , d’audace, de premières, de découvertes d’un festival unique en son genre. Et c’est la même idée qui a présidé à toutes les éditions qui ont suivi jusqu’en 2022. Comme l’attestent ces quelques bandes-annonces

En 2021, après l’épreuve du COVID, nous avions affirmé : Chaque concert est une fête

En réalité, ce n’est pas seulement le slogan d’un festival. C’est l’essence même du concert.

Heureusement, il y a plein de festivals en France qui se sont régénérés ces dernières années, grâce à des musiciens et des animateurs gourmands, créatifs, attentifs précisément à offrir au public l’aventure de la découverte, je pense – liste absolument pas exhaustive – à Colmar, Beaune, La Chaise-Dieu

Pour les à-côté de mon séjour à Monaco : brevesdeblog

Haydn encore

A chaque fois que j’évoque le compositeur né en 1732 à Rohrau, mort à Vienne en 1809, le père du quatuor et de la symphonie, Joseph Haydn, je m’amuse au souvenir de certains hommes (et femmes) de radio s’escrimant à écorcher ce nom. Dans un article – souvent consulté – Comment prononcer les noms de musiciens ?, j’expliquais : le grand Josef Haydn n’a pas non plus été mieux servi des décennies durant. Il est si simple de dire : Haille-deunn, mais plus fun sans doute d’ânonner un improbable : Aïn-d !.

Toujours revenir à Haydn, père nourricier. Comme je le fais dans ma discothèque, et m’apercevant qu’ici j’ai été plutôt discret sur des parutions que j’admire et j’écoute souvent.

Ainsi je suis passé un peu vite sur une intégrale dont je découvre chaque jour les pépites, l’inspiration, la qualité de la réalisation : Thomas Fey, Johannes Klumpp et les Heidelberger Sinfoniker sont peut-être de parfaits inconnus de ce côté-ci du Rhin. Leurs symphonies de Haydn méritent beaucoup plus qu’un coup d’oreille distrait :

Il faudra qu’un jour je me fasse ma propre tribune d’écoute comparée de cette prodigieuse Symphonie n°39 en sol mineur (la même tonalité que les 25 et 40 de Mozart) que j’avais découverte au concert grâce à Armin Jordan dirigeant l’Orchestre de la Suisse romande, puis réentendue le 13 mars 2008 avec le chef le moins attendu dans ce répertoire, avec un orchestre tout aussi inattendu : Riccardo Muti et l’orchestre national de France ! Une version qui fait partie des trésors rassemblés dans un coffret exceptionnel – célébrant les 80 ans de l’Orchestre – que j’avais eu le bonheur de publier il y a exactement dix ans… et qui est toujours disponible !

Les sonates de Bavouzet

J’avais entendu le merveilleux Jean-Efflam Bavouzet en décembre 2021 au Théâtre des Champs-Élysées jouer un concerto pour clavier de Haydn, j’avais alors rappelé l’un de ses tout premiers disques consacrés au compositeur viennois, tandis qu’il continuait d’enregistrer l’intégrale de ses sonates.

En 2022, le pianiste français était l’avocat le plus convaincant du piano de Haydn

Revenir aux quatuors de Haydn est toujours une hygiène de l’esprit, quelque chose comme une source vive, à laquelle il y a nécessité de s’abreuver régulièrement. Dans ce répertoire, le quatuor Amadeus est le maître.

Et pour finir, la cerise sur le gâteau : Martha Argerich inégalable dans le concerto en ré Majeur et dans son finale all’ungarese, en deux versions, l’une où elle dirige du clavier le London sinfonietta, l’autre où le vénérable Jörg Faerber la laisse cavaler en liberté.

Rachel et Zémire

Rachel Yakar (1936-2023)

Je ne l’ai pas connue personnellement, je ne me souviens pas de l’avoir entendue en concert, et pourtant c’est l’une des musiciennes que j’admire depuis longtemps.

La chanteuse Rachel Yakar est morte ce 24 juin. Personne ne lui a rendu plus bel hommage qu’Ivan Alexandre dans Diapason :

Chérie des pionniers « baroques », mozartienne de style et de cœur, la soprano lyonnaise fut aussi la voix intime de Strauss, Debussy ou Messiaen. Carrière éclatante d’une artiste sans fard.

La maturité venue, son aigu ardent quasi sans vibrato, son style direct et son profil altier lui ouvrirent le royaume des sorcières. Médée de Clérambault pour Reinhard Goebel, Armide de Lully pour Philippe Herreweghe, Circé de Leclair pour John Eliot Gardiner, Melissa de Handel pour Roger Norrington : cris et chuchotements à la demande générale. Quelle ironie ! Sorcière, Rachel ? La plus tendre, la plus maternelle des sopranos. La plus aimée des collègues. La plus courue des professeurs. Un ange sur la terre.

Née à Lyon mardi 3 mars 1936, tentée par le dessin et la peinture puis absorbée par la musique, Rachel Yakar étudie dans les années 1950 au Conservatoire de Paris et, comme Régine Crespin ou Nadine Denize, fréquente le 5, quai Voltaire, où Germaine Lubin rentrée d’exil forme une génération fastueuse. « Lubin n’était pas la femme à poigne qu’on prétendait. Exigeante, oui, mais généreuse et attentionnée. » Bonne école.

Presque aussitôt après ses débuts à Strasbourg, elle passe la frontière et intègre en 1964 – à l’instant où Carlos Kleiber s’en va ! – la troupe du Deutsche Oper am Rhein. Entre Duisbourg et Düsseldorf elle sera deux décennies durant Gilda de Rigoletto comme Antonia des Contes d’Hoffmann, Liù de Turandotcomme Mimi de La Bohème, la Comtesse de Figaro comme la Maréchale du Chevalier à la rose, Marguerite de Faust comme Anne du Rake’s Progress… rôles qu’elle reprendra partout en Europe. Notamment à Munich (Don Giovanni, titre de ses débuts à Glyndebourne en 1977) ou au palais Garnier qui la découvre en 1970 – Gilda de Verdi puis Micaëla de Bizet.

Sculptrice du verbe, dessinatrice du chant, mélodiste et bête de scène, elle marque à cette époque des rôles délicats : la tragique Jenufa, la virtuose Celia de Lucio Silla, la malheureuse Elvira de Don Giovanni, la périlleuse Fiordiligi (premier Mozart / Da Ponte enregistré avec « instruments historiques », au festival de Drottningholm), Mélisande dont elle incarne l’idéal à la fin des années 1970 et qu’elle immortalise sous la baguette d’Armin Jordan (Erato), Madame Lidoine des Carmélites… tout en se distinguant loin du théâtre avec Michel Corboz (Messe en si mineur de Bach en 1979 et Paulus de Mendelssohn sept ans plus tard, joyaux purs et simples) ou dans les mélodies de Fauré, Duparc, Poulenc, Messiaen (Harawi absolu).

Quelques silhouettes de Wagner (Freia à Bayreuth dans le Ring selon Boulez & Chéreau) lui font vite comprendre que la clameur n’est pas son fort. C’est au contraire par les champs baroques qu’elle devient semeuse. Poppée pour l’éternité dans le cycle Monteverdi que le Dr Drese, alors patron de l’Opéra de Zurich, confie au duo Harnoncourt-Ponnelle. Ce 8 janvier 1977, la scène où, quittant le lit de Néron (Eric Tappy), elle tisse fil à fil une toile sans issue, comble d’érotisme et de pureté, sonne la fin des à-peu-près. L’art des Anciens a trouvé sa muse. Nikolaus Harnoncourt ne la lâche plus (lien réciproque : elle adore ce maître de l’infime détail qui laisse au chant toute latitude) ; Gustav Leonhardt lui fait enregistrer Campra, Grétry, Rameau (Pigmalion, autre bijou) ; elle est des premières Indes galantes au disque (Emilie avec Jean-Claude Malgoire), du premier opéra de Handel sur instruments d’époque (Admeto par Alan Curtis), d’Hippolyte & Aricie à Aix (fière rivale de Jessye Norman), de Scylla & Glaucus à Lyon… jusqu’aux adieux à la scène dans sa ville natale : Clymène de Phaëton avec Marc Minkowski et Karine Saporta pour l’inauguration de l’Opéra Nouvel en 1993.

C’était il y a trente ans. Pour quelques saisons encore elle enseignait au Conservatoire de Paris. Peu à peu retirée à Loix dans l’Île de Ré, elle ne se voulait plus Mademoiselle Yakar mais Madame Lecocq, épouse qu’on dirait aujourd’hui fusionnelle du ténor Michel Lecocq. Joyeuse et intarissable quand il s’agissait de parler musique, elle souffrait depuis longtemps quand ses grands yeux noirs se sont fermés au matin du 24 juin. Condoléances muettes à Michel qui ne doit plus savoir où regarder, à leurs proches, et à vous qui savez quelle fontaine d’amour vient de disparaître. Un amour qui s’entend et qui – disques, bandes, DVD, mémoires (dûment consignés pour sa famille) – n’est pas près de finir. (Ivan A.Alexandre, Diapason)

J’ai heureusement nombre des enregistrements auxquels elle a participé, dont ceux-ci que je chéris particulièrement, comme cet inoubliable Pelléas et Mélisande dirigé par Armin Jordan (lire Etat de grâce)

Ou ce Scylla et Glaucus de Leclair récemment réédité dans le coffret Warner de John Eliot Gardiner (lire Les Pâques de Gardiner)

Rachel Yakar a souvent chanté – et enregistré – avec Michel Corboz, tous enregistrements heureusement réédités (lire Ferveurs)

C’est peut-être dans l’art de la mélodie que Rachel Yakar me touche le plus. On espère que Warner lui consacrera l’hommage qui est lui dû…

Zémire et Azor à l’Opéra Comique

J’avais deux raisons d’être à l’Opéra Comique ce lundi soir : le souvenir d’un bicentenaire qui m’avait coûté pas mal d’efforts en 2013, Louis Langrée à la manoeuvre. Je voulais vérifier ce que je pensais de Grétry – dont on avait – plutôt mal -célébré les 200 ans de la mort dans sa ville natale, Liège – et d’une oeuvre dont je ne connaissais que quelques extraits, Zémire et Azor.

A Paris, la rue Grétry débouche sur la place Boieldieu où se dresse l’Opéra Comique.

Il est des soirs où l’on se félicite en secret de ne pas devoir écrire de critique. J’aurais sans doute écrit – mais moins bien que lui – quelque chose comme le papier d’Emmanuel Dupuy dans Diapason : À l’Opéra Comique, un trop sage Zémire et Azor. Mais je n’aurais pas pu dire que Grétry ne m’a jamais passionné, quelques efforts que j’aie faits en 2013, pour essayer de comprendre son succès.

Il a fallu toute la conviction, la subtilité de la direction de Louis Langrée, pour donner un peu de relief à des airs et des situations bien conventionnels, à quelques passages d’orchestre plus relevés. Et ce n’est pas l’absence de mise en scène de Michel Fau qui nous aura fait changer d’avis.

Le seul avantage est que le spectacle n’est pas long, et que Louis Langrée parvient à nous faire croire qu’il s’agit d’un chef-d’oeuvre.

Indémodables

J’avais un peu de temps mercredi dernier avant – non pas la demi-finale ! – la Lakmé proposée en version de concert au Théâtre des Champs-Elysées (compte-rendu à lire sur Bachtrack : Sabine Devieilhe à son acmé) et je me suis rappelé que l’ancien siège de la maison Saint Laurent devenu musée Yves Saint Laurent était situé tout près, au 5 avenue Marceau.

Saint Laurent en or

Emotion certaine quand on pénètre dans l’hôtel particulier, somme toute de taille plutôt modeste, où le couturier s’installa dès 1974.

L’exposition Gold – à voir jusqu’au 14 mai 2023 – explore « les touches d’or qui ont traversé la création du couturier ».

Musée Yves Saint Laurent Paris / Exposition « Gold »

Outre les nombreux modèles exposés, les photos, documents, lettres, dessins, on a la chance de pénétrer dans ce qui fut le mythique « studio » du couturier, reconstitué en l’état.


On n’apprend rien de neuf sur Yves Saint Laurent et Pierre Bergé avec le livre que vient de publier Christophe Girard, longtemps adjoint à la Culture à la Mairie de Paris, auprès de Bertrand Delanoé puis dAnne Hidalgo.

L’intérêt de l’ouvrage réside dans le témoignage de celui qui fut d’abord le secrétaire général puis le directeur général adjoint de la maison Saint-Laurent et les nombreux documents – photos, écrits, lettres – qui donnent une idée plus précise du génie créatif du couturier, du rôle de Pierre Bergé… et des relations chaotiques du « couple ». Pas indispensable mais recommandable !

Belle époque ?

La nostalgie est toujours ce qu’elle était : c’était il y a un siècle et on l’appelle la « belle époque ». Sans doute a-t-on idéalisé l’entre-deux-guerres et son foisonnement créatif.

Deux bons guides – et deux idées de cadeaux ! – pour mieux connaître cette période :

 » Ma passion pour le début du XXe siècle s’est éveillée très jeune en écoutant Debussy et Duke Ellington, en regardant Claude Monet et Raoul Dufy, en lisant Alphonse Allais et Maurice Leblanc, puis Apollinaire et les surréalistes… 
C’est donc tout naturellement que je me suis plongé dans ce dictionnaire où j’ai voulu souligner la continuité entre Belle Époque et Années folles, telles deux  » mi-temps  » séparées par le gouffre terrible de la grande guerre. Malgré tout ce qui les oppose, les années 1920 seront, par maints aspects, l’accomplissement de cet esprit moderne qui germait en 1900. On y retrouve souvent les mêmes protagonistes à deux âges de leur vie, tels Guitry, Colette, Ravel, Stravinski, Picasso… 
Face à un sujet immense, j’ai privilégié la France comme théâtre emblématique de ce temps où Paris fut le cœur battant du monde artistique. Sans négliger pour autant les riches échanges qui se développèrent avec New York, Vienne, Londres, où se produisaient des évolutions comparables, j’ai tenu à remettre à l’honneur une certaine légèreté française. Enfin, même si la civilisation toute entière est présente avec ses hommes politiques, ses scientifiques, ses expositions universelles ou ses villégiatures, ce sont d’abord les arts qui figurent au cœur de ce panorama : poésie, théâtre, peinture, une place privilégiée revenant par goût personnel à la musique. 
Portraits, bons mots, petite et grande histoire se mêlent dans ces pages consacrées à des personnages, mais aussi à des lieux comme le Moulin Rouge et le Chat Noir, à des genres oubliés comme le café-concert, sans oublier les décors des brasseries, gares et jardins publics… Tout ce qui fait que la Belle Époque et les Années Folles sont toujours parmi nous et continuent à faire rêver aux quatre coins du mond
e. » (Benoit Duteurtre)

Félicitons Benjamin Levy et sa belle équipe de jeunes – ou moins jeunes – chanteurs de réhabiliter un répertoire qui n’était plus guère fréquenté

Frédéric le grand

Il n’y a pas de hasard, juste les coïncidences du cœur.

Je reçois ce matin ce beau coffret, commandé il y a plusieurs semaines :

Et c’est ce mercredi que Frédéric Lodéon fête ses 70 ans, que France Musique lui a consacré une journée spéciale.

À mon tour de souhaiter un joyeux anniversaire à l’ami Frédéric !

Et de nous réjouir de retrouver enfin rassemblés ces formidables enregistrements du jeune Lodéon. Je pensais les avoir tous, j’en découvre que j’ignorais.

Le moment n’est plus à regretter que Frédéric ait lâché trop tôt son violoncelle, il est resté le musicien enthousiaste, le passeur de musique qui a donné envie à des millions d’auditeurs de France Inter puis de France Musique et de téléspectateurs sur France 3 et lors des Victoires de la musique classique. Tous ceux-là vont pouvoir maintenant découvrir ou redécouvrir l’archet vibrant, la chaleur du violoncelle de Frédéric Lodéon, le plus souvent entouré de ses amis ! Quelle bande magnifique, la si regrettée Daria Hovora, Pierre Amoyal, Augustin Dumay, Jean-Philippe Collard…

Et cerise sur le gâteau : c’est Frédéric Lodéon lui-même qui signe le texte du livret à la première personne. C’est évidemment passionnant d’abord parce qu’il décrit les coulisses de cette série d’enregistrements, le choix des répertoires et des partenaires, il présente ainsi chaque disque – on l’imagine le faisant à la radio ! –

Détails du coffret :

Strauss, R: Cello Sonata in F major, Op. 6

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Prokofiev: Cello Sonata in C major, Op. 119

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Haydn: Cello Concerto No. 2 in D major, Hob. VIIb:2 (Op. 101)

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Bournemouth Sinfonietta Orchestra
  • Theodor Guschlbauer

Haydn: Cello Concerto No. 1 in C major, Hob. VIIb:1

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Bournemouth Sinfonietta Orchestra
  • Theodor Guschlbauer

Mendelssohn: Cello Sonata No. 1 in B flat major, Op. 45

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Mendelssohn: Cello Sonata No. 2 in D major, Op. 58

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Boccherini: Cello Concerto No. 9 in B flat major, G482

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Bournemouth Sinfonietta Orchestra
  • Theodor Guschlbauer

Boccherini: Cello Concerto No. 10 in D major, G483

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Bournemouth Sinfonietta Orchestra
  • Theodor Guschlbauer

Mendelssohn: Piano Trio No. 1 in D minor, Op. 49

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Anne Queffélec (piano)

Mendelssohn: Piano Trio No. 2 in C minor, Op. 66

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Anne Queffélec (piano)

Schumann: Fantasiestücke, Op. 73

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Schumann: Adagio and Allegro in A flat major, Op. 70

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Schumann: Stücke im Volkston (5), Op. 102

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Schumann: Träumerei (from Kinderszenen, Op. 15)

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Brahms: Clarinet Trio in A minor, Op. 114

  • Frédéric Lodéon (cello), Michel Portal (clarinet), Michel Dalberto (piano)

Fauré: Cello Sonata No. 1 in D minor, Op. 109

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Cello Sonata No. 2 in G minor, Op. 117

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Sicilienne, Op. 78

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Élégie in C minor, Op. 24

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Romance in A major for cello & piano, Op. 69

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Papillon, Op. 77

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Sérénade, Op. 98

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Fauré: Piano Trio in D minor, Op. 120

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano), Augustin Dumay (violin)

Fauré: Piano Quartet No. 1 in C minor Op. 15

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano), Augustin Dumay (violin), Bruno Pasquier (viola)

Beethoven: Triple Concerto for Piano, Violin, and Cello in C major, Op. 56

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Anne Queffélec (piano)
  • Orchestre National de l‘Opéra de Monte-Carlo
  • Armin Jordan

Ravel: Piano Trio in A minor

  • Frédéric Lodéon (cello), Augustin Dumay (violin), Jean-Philippe Collard (piano)

Auric: Imaginées II

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Philippe Collard (piano)

Schumann: Piano Trio No. 1 in D minor, Op. 63

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean Moullière (violin), Jean Hubeau (piano)

Schumann: Piano Trio No. 2 in F major, Op. 80

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean Moullière (violin), Jean Hubeau (piano)

Schumann: Piano Trio No. 3 in G minor, Op. 110

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean Moullière (violin), Jean Hubeau (piano)

Schumann: Fantasiestücke in A minor for Piano Trio, Op. 88

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean Moullière (violin), Jean Hubeau (piano)

Schumann: Cello Concerto in A minor, Op. 129

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Nouvel Orchestre Philharmonique
  • Theodor Guschlbauer

Lalo: Cello Concerto in D minor

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Philharmonia Orchestra
  • Charles Dutoit

Caplet: Epiphanie

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Philharmonia Orchestra
  • Charles Dutoit

Indy: Concerto for Flute, Cello, Piano and Strings

  • Frédéric Lodéon (cello), Jean-Pierre Rampal (flute), François-René Duchâble (piano)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Boccherini: Cello Concerto No. 3 in G major, G480

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre de Lausanne
  • Armin Jordan

Boccherini: Cello Concerto No. 2 in D major G479

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre de Lausanne
  • Armin Jordan

Chopin: Grand Duo for Cello and Piano (on themes from Meyerbeer’s Robert le Diable)

  • Frédéric Lodéon (cello), François-René Duchâble (piano)

Chopin: Cello Sonata in G minor, Op. 65

  • Frédéric Lodéon (cello), François-René Duchâble (piano)

Chopin: Introduction and Polonaise Brillante in C, Op. 3

  • Frédéric Lodéon (cello), François-René Duchâble (piano)

Schubert: Piano Trio No. 2 in E flat major, D929

  • Frédéric Lodéon (cello), Augustin Dumay (violin), Jean-Philippe Collard (piano)

Vivaldi: Cello Concerto in A minor, RV420

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Vivaldi: Cello Concerto in C major, RV 400

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Vivaldi: Cello Concerto in B minor, RV424

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Vivaldi: Cello Concerto in G major, RV413

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Vivaldi: Cello Concerto in C minor, RV401

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre de Chambre Jean-Francois Paillard
  • Jean-Francois Paillard

Schubert: Sonata in A minor ‘Arpeggione’, D821

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Shostakovich: Cello Sonata in D minor, Op. 40

  • Frédéric Lodéon (cello), Daria Hovora (piano)

Tchaikovsky: Piano Trio in A minor, Op. 50 ‘In Memory of a Great Artist’

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Pascal Rogé (piano)

Saint-Saëns: Cello Concerto No. 1 in A minor, Op. 33

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
  • Armin Jordan

Tchaikovsky: Variations on a Rococo Theme, Op. 33

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
  • Armin Jordan

Fauré: Élégie in C minor, Op. 24

  • Frédéric Lodéon (cello)
  • Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
  • Armin Jordan

Duport: Concerto for cello and orchestra No. 2

  • Frédéric Lodéon (cello), Ensemble Orchestral de Paris (chamber ensemble)
  • Jean-Pierre Wallez

Duport: Concerto for cello and orchestra No. 5

  • Frédéric Lodéon (cello), Ensemble Orchestral de Paris (chamber ensemble)
  • Jean-Pierre Wallez

Duport: Cello Duo No. 2 in D Minor

  • Frédéric Lodéon (cello), Xavier Gagnepain (cello)

Duport: Cello Duo No. 3 in G Major

  • Frédéric Lodéon (cello), Xavier Gagnepain (cello)

Schubert: Piano Trio No. 1 in B flat major, D898

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Jean-Philippe Collard (piano)

Schubert: Piano Trio movement in B flat major, D28

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Jean-Philippe Collard (piano)

Schubert: Notturno in E flat major for piano trio, D897 (Op. post.148)

  • Frédéric Lodéon (cello), Pierre Amoyal (violin), Jean-Philippe Collard (piano)

Petits et grands arrangements (II) : les Français

J’ai lancé, le 5 mars dernier, ce qui va ressembler à une série : Petits et grands arrangements, en commençant par les Anglais (et sans aucune ambition d’exhaustivité !).

En France aussi, les compositeurs « arrangeurs » sont légion, en particulier au XXème siècle. Ils sont plus ou moins célèbres.

Gaîté parisienne

Le plus connu d’entre eux, grâce à l’oeuvre qu’il a laissée (et qui a fait sa fortune !), est sans doute Manuel Rosenthal (1904-2003) avec sa Gaîté parisienne, flamboyant « arrangement » d’airs d’Offenbach. J’ai raconté dans quelles circonstances j’avais rencontré le chef d’orchestre/compositeur (Anniversaires : privé/public), en 2000. Parmi de multiples souvenirs qu’il évoquait sans se faire prier, il me raconta pourquoi et comment il avait accepté d’écrire en 1938 cette partition à l’intention des Ballets russes de Monte Carlo, lointain successeur des Ballets russes de Diaghilev qui s’étaient installés à Paris en 1909. C’est à un autre chef, Roger Désormière (1898-1963), qui avait été le dernier directeur musical des Ballets russes de 1925 à 1929, qu’on avait proposé cette « Offenbachiade« . Désormière avait refusé, Rosenthal avait accepté non sans hésitations.

Bien lui en prit, puisque c’est aujourd’hui un tube, dont les plus grands chefs se sont emparés, comme un emblème de « l’esprit français » ! Un peu caricatural tout ça, mais une partition brillante, l’un de ces « showpieces » qui fait rutiler les orchestres.

Toutes les versions ne retiennent pas l’intégralité de cette Gaîté parisienne.

Le compositeur a lui-même gravé deux versions de son oeuvre, deux fois d’ailleurs avec le même orchestre, celui qui avait créé l’oeuvre, Monte Carlo. Pour idiomatiques qu’elles soient, on hésite à les recommander comme références, la phalange monégasque montrant ses limites, et supportant difficilement la comparaison avec les formations berlinoises, londoniennes ou américaines.

La liste des chefs et des orchestres qui se sont frottés à cette Gaîté parisienne est assez impressionnante. Mais c’est peu dire que tous n’ont pas été également inspirés, confondant rutilance et vulgarité dans le traitement de l’orchestre, élégance et racolage dans l’énoncé des mélodies, légèreté et lourdeur dans la conduite rythmique. Parmi les beaux ratages il me faut malheureusement nommer des chefs que j’admire infiniment par ailleurs :

Inattendus dans cette liste, mais beaucoup plus convaincants que leurs illustres collègues américains, Felix Slatkin et Arthur Fiedler :

Autre inattendu dans la série, et récidiviste de surcroît, Georg Solti ! Les alanguissements, les lourdeurs, pas vraiment pour lui, ça court la poste et ça manque souvent d’un peu de charme, de tendresse. L’avantage de cette version gravée à Londres en 1958 c’est qu’elle reprend la totalité des numéros.

On découvre même Solti en concert sur cette vidéo :

Mais tout bien écouté, la palme revient incontestablement à Karajan, le chic, le charme, l’esprit, et la perfection de la réalisation orchestrale.

J’ai du mal à départager les versions berlinoise (1971) et londonienne (1958).

Si je devais n’en retenir qu’une, ce serait peut-être le Philharmonia…

Le beau Danube parisien

Où l’on retrouve Roger Désormière

Au printemps 1924, le comte Étienne de Beaumont organise les Soirées de Paris (titre-hommage à Apollinaire) au Théâtre de la Cigale à Montmartre, soirées artistiques et de ballet avec Léonide Massine en danseur-étoile et chorégraphe et Roger Désormière en directeur musical et chef d’orchestre. Les compositeurs sont Erik Satie, Darius Milhaud… Henri Sauguet réinterprète Olvier Métra… les costumes et les décors sont de Pablo Picasso et Georges Braque… Jean Cocteau livre sa propre vision de Roméo et Juliette. Pour cette musique, c’est Auric qui est pressenti, Poulenc devant donner sa propre version des valses de Vienne. Mais Diaghilev va mettre son veto à leur participation, c’est donc Désormière qui va composer ces deux dernières musiques, l’hommage à Vienne devenant le Beau Danube

Et cette œuvre de circonstance va être souvent reprise et grande source de royalties

Malgré ce succès, Désormière n’enregistrera jamais cette musique sur disque lui-même.

Selon le même principe que plus tard Rosenthal avec Offenbach, Désormière procède par collage de thèmes empruntés à des oeuvres plus ou moins connues de Johann Strauss. Mais quelque chose ne fonctionne pas, le charme n’opère pas. Ce Beau Danube sent l’exercice de style, rapidement troussé. D’ailleurs, à la différence de Gaîté parisienne, l’oeuvre n’a quasiment pas survécu à la Seconde Guerre mondiale. Elle a été peu enregistrée. Je reparlerai dans une autre billet d’arrangements beaucoup plus réussis d’oeuvres de Strauss.

Un seul disque réunit les deux oeuvres, Gaîté parisienne d’Offenbach/Rosenthal et Le Beau Danube de Strauss/Désormière. A la tête de l’orchestre de la radio de Berlin, un expert, le chef américain Paul Strauss (1922-2007), qui commença sa carrière en dirigeant nombre de ballets à … Monte Carlo, Londres, Berlin – j’ai eu la chance de connaître à la fin de sa vie celui qui fut de 1967 à 1977 le patron, redouté et admiré, de l’Orchestre philharmonique royal de Liège.

Le chapitre des « arrangeurs » français est très loin d’être clos. A moins qu’il faille plutôt ouvrir un nouveau chapitre « orchestrateurs », où on retrouvera d’illustres figures comme Ravel, Caplet, Büsser…