Les audaces de Marianne

J’assistais vendredi soir à la première parisienne du dernier ouvrage lyrique de George Benjamin et Martin Crimp – Picture a Day like this -, à l’Opéra-Comique, un an après sa création au festival d’Aix-en-Provence.

J’en ai rendu compte pour Bachtrack : Marianne Crebassa bouleverse l’Opéra-Comique dans Picture a Day like this.

Discrètement assise à la corbeille de l’Opéra Comique, une spectatrice attentive – ma chère Felicity Lott (Voisine)

Comme je l’écris dans mon article, deux souvenirs m’ont envahi : celui de la création, à laquelle j’avais assisté, en 2012, de Written on Skin à Aix-en-Provence, qui m’avait durablement bouleversé

et, plus récemment, le 21 juillet 2022 à Montpellier, la formidable interprétation des Sea Pictures d’Elgar que Marianne Crebassa chantait pour la première fois.

J’ai d’autant plus de raisons de me rappeler cette soirée, que ce fut la dernière où je vis et entendis notre si regrettée Jodie Devos (lire Jodie dans les étoiles) chanter, malgré quelques péripéties, dans la Première symphonie de Vaughan Williams.

Ce soir-là, Marianne Crebassa nous avait tous convaincus que ce répertoire britannique peut être chanté par d’autres que par les Britanniques. J’ignorais alors qu’elle serait choisie pour créer le quatrième ouvrage lyrique de George Benjamin en juillet 2023 !

J’ai eu la chance de pouvoir inviter Marianne, née à Béziers, restée si attachée à sa région natale, plusieurs fois durant mon mandat de directeur du Festival Radio France de Montpellier.

En 2015, elle « ressuscitait » Fantasio d’Offenbach sous la houlette de Friedemann Layer (1941-2019), en 2018 elle s’associait à Fazil Say pour un récital magnifique, la pandémie et les restrictions sanitaires avaient reporté à 2022 des projets déjà envisagés pour 2020 puis 2021.

J’admire profondément d’abord la personne Marianne Crebassa, qu’on ne peut dissocier de l’artiste hors norme qu’elle est devenue. Elle aurait pu se laisser entraîner sur la voie toute tracée de la « jeune mezzo-soprano française qui monte », de festival en festival, de rôle en rôle dé plus en plus lourd. Il faut réécouter ce qu’elle déclarait au micro de France Musique le 23 octobre dernier. On ne lui souhaite pas une belle carrière, mais une vie de femme, de mère et d’artiste réussie dans toute sa plénitude. :

Paradis perdu et retrouvé

Les responsables de Forumopera – le « magazine du monde lyrique » – ont eu l’imprudente (!) idée de me proposer de participer à leur aventure. Mon premier papier sur un tout récent disque vient d’y paraître. J’ai failli renoncer à l’écrire, je m’en suis ouvert à CdR qui est finalement passé outre mes réticences. Je préfère, sur ce blog, comme sur les réseaux sociaux, évoquer mes enthousiasmes que mes déceptions, mais dans le cas de ce disque, je ne pouvais décemment pas écrire le contraire de ce que j’avais entendu.

Oui la diction est plus que problématique, quelle que soit la langue. Et l’absence de caractérisation des mélodies choisies.

Lecteur je t’en fais juge ici – ce que je ne pouvais pas faire dans mon article (Un Paradis jamais atteint).

Trois extraits, l’un en allemand – un air normalement confié au baryton – du Paradis et la Péri de Schumann, les deux autres en français – la Chanson d’Ève de Fauré, et Bonjour toi, colombe verte de Messiaen.

La comparaison avec son compatriote Christian Gerhaher est terrible pour la chanteuse allemande…

 

Elly Ameling (1937) est néerlandaise, le français n’est pas sa langue maternelle, et pourtant… on partage avec bonheur ce « matin du monde » (ces diphtongues – in -on -an si difficiles à attraper quand on n’est pas francophone!)

 

Contraste saisissant avec Rachel Yakar, accompagnée par Madame Messiaen, Yvonne Loriod !

Inutile d’en rajouter. Anna Prohaska a d’autres talents, sur scène notamment, son projet était ambitieux et intelligent, le résultat n’est pas à la hauteur de nos attentes.

Pour qui voudrait retrouver ces grandes interprètes, françaises ou étrangères, qui ont su nous mener vers les paradis de la mélodie française, ces quelques piliers impérissables de ma discothèque.

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Suggestion/supplique à Warner : rééditer au plus vite ce double album de la merveilleuse Rachel Yakar

A propos de Susan Grahamlire Le français chanté

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Doit-on redire ici l’admiration, l’affection qu’on éprouve pour la plus française des chanteuses britanniques, notre chère Felicity Lott ?

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Regret que ce beau disque gravé par Françoise Pollet et Armin Jordan n’ait pas été réédité dans le coffret consacré au chef suisse disparu en 2006 !

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Irma Kolassi (1918-2012) a pour longtemps fixé une sorte d’idéal dans nos mémoires.

Superbe réédition, en 4 CD, il y a quelques mois de quelques indispensables de toute discothèque

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Et puis comment oublierais-je Jessye Norman (lire Les chemins de l’amourdisparue en septembre dernier ? Même, surtout quand elle est un peu too much…  

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Le Paradis avec elle, je prends !