Le 16 juin 2024, l’annonce de sa mort nous avait sidérés. Jodie Devos nous quittait, à 35 ans, au terme d’une brève et fulgurante maladie (lire Jodie dans les étoiles)
Où qu’elle soit, où que tu soies Jodie, tu es pour nous et pour toujours la reine des fées…
Avec Sonya c’est une amitié de plus de dix ans, à Montpellier en 2016 Iris de Mascagni, en 2017 Siberia de Giordano, un projet annulé en 2020 pour cause de Covid, et en 2021 une folle soirée de clôture du Festival. Toujours avec son mari, le chef d’orchestre Domingo Hindoyan qui était un habitué de Liège avant d’en devenir un de Montpellier. C’était une fête heureuse ininterrompue…
Et toujours impressions et réflexions sur mes brèves de blog
Il y a une bonne quinzaine d’années que je connais l’actuel chef de l’orchestre de Liverpool, que je l’avais invité à plusieurs reprises (à l’instigation d’un impresario – Pedro Kranz – aujourd’hui disparu en qui j’avais grande confiance) à diriger l’Orchestre philharmonique royal de Liège (lire Hindoyan dirige à Liège). Pour ma première édition en 2015 comme directeur du Festival Radio France à Montpellier, c’est tout de suite à lui que j’avais pensé pour le concert d’ouverture avec un programme particulièrement festif avec l’orchestre de Montpellier. Les musiciens comme le public se rappellent encore un fameux Boléro !
Et puis il y eut en 2016 Iris de Mascagni, en 2017 Siberia de Giordano, avec Sonya Yoncheva, et en 2021 une glorieuse soirée de clôture avec ce couple aussi heureux sur la scène que dans la vie.
Ecoutez ce que disait Christian Merlin, mon cher confère du Figaro, à propos du travail du chef et de la chanteuse, alors qu’on prévoyait de donner avec eux, en juillet 2020, Fedora de Giordano. Projet évidemment abandonné pour cause de pandémie…
Ici à Bordeaux, après une superbe représentation du Démon de Rubinstein dirigée par un autre ami cher, Paul Daniel (à droite) et avant un concert que devait diriger Domingo Hindoyan (à gauche) en janvier 2020.
Soirée de clôture du festival Radio France 2021 : la fête retrouvée après la longue parenthèse de la pandémie, avec Sonya Yoncheva et Domingo Hindoyan.
Oui ou non
Je me pose toujours la question de la pertinence pour un chef d’orchestre d’aller au bout de ses limites. Pour un Bernard Haitink qui, à 90 ans, un an avant sa mort, a mis fin à sa carrière, après quelques concerts où il n’était déjà plus que l’ombre de ce qu’il avait été, on a le contre-exemple éloquent de Charles Dutoit, 88 ans depuis le 7 octobre, qui ne ralentit ni ses voyages (on se demande quels pays il lui reste à visiter dans le monde !), ni ses concerts. Dans le nouveau numéro de Classica, Olivier Bellamy livre une interview-fleuve, qui aurait mérité un meilleur découpage et un vrai travail de décryptage d’un entretien où tout se mêle et s’emmêle parfois : Charles Dutoit est bavard et il a tant à dire d’une vie foisonnante. A lire tout de même !
En revanche, quel intérêt y a-t-il pour le public, ses admirateurs, et le grand musicien qu’il a été, de documenter l’inexorable décrépitude de Daniel Barenboim ? Je trouve presque indécent d’assister à cette déchéance. La critique n’ose pas écrire ce qui pourtant saute aux oreilles des derniers disques de Barenboim chef : qu’on ne devrait même pas les publier. Dernier triste exemple en date : la Symphonie de Franck avec l’orchestre philharmonique de Berlin ! Emouvant diront certains, infiniment triste diront tous les autres…
Barenboim avait gravé il y a presque cinquante ans une magnifique version de la dite symphonie avec l’Orchestre de Paris au tout début de son mandat. En rester à ce souvenir lumineux !
Dès sa fondation en 1985, le Festival Radio France Occitanie Montpellier s’est singularisé dans le paysage musical international par la programmation d’ouvrages lyriques rares, voire inédits, de redécouvertes considérables. C’est une politique que j’ai résolument poursuivie, de 2014 à 2022, durant mon mandat de directeur du festival (lire 2890 jours), même si la pandémie d’une part, les réductions budgétaires d’autre part, nous ont obligé à réduire la voilure.
Il n’empêche que la liste des oeuvres jouées durant 8 éditions, et des interprètes engagés à cette fin, ne laisse pas d’impressionner.
2015 : Bodin de Boismortier, Offenbach, Lalo
(L’affiche du Festival 2015 avait été créée par l’artiste Gérard Matharan disparu en avril 2022)
L’Opéra de Versailles reprenait cette fin janvier le spectacle inauguré en 2015 à Montpellier – Don Quichotte chez la Duchesse – dirigé par Hervé Niquet et mis en scène par Gilbert et Corinne Bénizio (ex- Shirley et Dino)
(De gauche à droite : Corinne Bénizio, Jany Macaby, Hervé Niquet, Gilles Bénizio, JPR)
Jacques Offenbach : Fantasio
Ce fut l’événement du Festival 2015, une authentique redécouverte d’un ouvrage oublié d’Offenbach, qui a depuis fait les beaux soirs de l’Opéra-Comique (lire Brillante résurrection de Fantasio)
Edouard Lalo : La Jacquerie
2016 : Rameau, Offenbach, Aboulker, Mascagni
Jean-Philippe Rameau : Zoroastre
Pietro Mascagni : Iris
Isabelle Aboulker : Marco Polo et la Princesse de Chine
Jacques Offenbach : Ba-Ta-Clan
Il faut préciser ici que cette pochade avait été programmée avant les attentats du 13 novembre 2015 dans la salle de spectacle – le Bataclan – qui tire son nom de l’ouvrage d’Offenbach, et que ce concert a été dédié à toutes les victimes du terrorisme.
2017 : Bellini, Giordanoet le mélange Niquet
2018 : Offenbach, Destouches, Delibes
2019 Pomme d’Api et Fervaal
Jacques Offenbach : Pomme d’Api
L’événement de ce festival 2019 c’est la restitution intégrale d’une partition devenue mythique à force de ne jamais avoir été jouée, a fortiori représentée, Fervaal de Vincent d’Indy.
Vincent d’ Indy, Fervaal Op. 40
Opéra en 3 actes et un prologue sur un livret du compositeur d’après le poème « Axel » d’Esaias Tégner.
Michael Spyres (ténor), Fervaal Gaëlle Arquez (mezzo-soprano), Guilhen Jean-Sébastien Bou (baryton), Arfagard Elisabeth Jansson (mezzo-soprano), Kaito Nicolas Legoux (basse), Grympuig Eric Huchet (ténor), Lennsmor Kaëlig Boché (ténor), Edwig Camille Tresmontant (ténor) 4ème Paysan, 1er Paysan sarrazin, Chennos François Piolino (ténor), Ilbert Rémy Mathieu (ténor), Ferkemnat, Moussah Matthieu Lécroart (baryton), Geywihr, 5ème Paysan Eric Martin-Bonnet (basse), Penwald, Buduann Pierre Doyen (baryton), le Messager, 3ème Paysan, 2ème Paysan sarrazin Jérôme Boutillier (baryton), 1er Paysan, Gwellkingubar Anas Seguin (basse), Berddret Guilhem Worms (baryton-basse), Helwrig François Rougier (ténor), 2ème Paysan, Le Berger, Le Barde
Choeur de la Radio Lettone Choeur de l’Opéra national de Montpellier Occitanie Orchestre national de Montpellier Occitanie Michael Schonwandt, direction
Il y avait un projet d’édition de cette soirée en CD, qui n’a jamais abouti pour des raisons non artistiques… Mais les amateurs peuvent retrouver l’intégralité de la soirée du 24 juillet 2019 sur YouTube
2021 Pas deBacchus mais une création
Nous avions prévu, d’abord en 2020, puis en 2021, de redonner vie à un opéra de Massenet, Bacchus. Projet annulé en 2020 pour cause de pandémie.. et en 2021 pour cause de conséquences de la pandémie ! Trois ans après, tout le monde semble avoir oublié que si les festivals ont pu reprendre leur activité, c’était au prix de restrictions toujours en vigueur en matière de nombre de spectateurs, et bien sûr de distanciation sur scène, aussi bien en répétition qu’en concert. Or Bacchus exigeait un nombre important d’interprètes et surtout plusieurs formations additionnelles en coulisses. Nous avons dû très vite nous résoudre à annuler l’opération, au grand dam du chef, des musiciens et des chanteurs qui avaient travaillé sur cette partition reconstituée pour l’occasion.
Mais en co-production avec l’Opéra de Montpellier, ce fut la création de l’opéra de Philip VenablesDenis et Katya.
(De droite à gauche : Philip Venables, Ted Huffmann, Jakub Jozef Orlinski et JPR)
2022 Hamlet d’Ambroise Thomas
En 2022, un seul opéra, mais pas le moindre, pour illustrer la thématique « so British » de cette édition : Hamlet d’Ambroise Thomas, mais pas dans la version baryton, la plus jouée, dans celle où le rôle-titre est chanté par un ténor. Et quel ténor en ce 15 juillet 2022 avec John Osborn !
Prochain « épisode » : les chanteurs, chanteuses, en concert ou en récital !
Il est des jours où l’exercice du blog est singulièrement difficile, quand le drame percute une actualité joyeuse. Hier ce fut le grand écart entre Liège et Montpellier.
Lorsque j’ai reçu une alerte en fin de matinée sur l’attentat de Liège, je ne savais pas où il s’était produit, mais j’ai tout de suite pensé à ce 13 décembre 2011 de très sinistre mémoire, 5 morts et plusieurs dizaines de blessés, sur la place Saint-Lambert au coeur de la Cité ardente. Et puis, au cours de l’après-midi, j’ai regardé les premières images, de lieux si familiers, au croisement du boulevard d’Avroy, de la rue des Augustins, du boulevard Piercot. J’y suis passé au moins quatre fois par jour pendant plus de dix ans, faisant le trajet de mon domicile à mon bureau. La Salle Philharmonique, siège de l’Orchestre philharmonique royal de Liège, est à moins de 50 mètres de l’Athénée (lycée) Léonie de Waha.
C’est devant ce lycée qui porte le nom d’une grande féministe belge, Léonie de Waha, que deux policières ont été sauvagement assassinées, c’est sur la façade de ce superbe édifice moderniste, dû à l’architecte Jean Moutschen, inauguré en 1938, restauré au cours de la dernière décennie, qu’on trouve ce bas-relief de Louis Dupont… « L’insouciance de la jeunesse« …
On n’ose imaginer ce qui se serait produit si de courageux employés de l’Athénée n’avaient eu le réflexe de fermer les accès à l’établissement et de faire sortir les enfants par l’arrière.
Finalement, j’aurais pu dire ce qu’une jeune fille répondait hier aux caméras qui l’interrogeaient sur les lieux du crime : « Je passe ici tous les jours, je n’arrive pas à croire que cette horreur a eu lieu ici ».
À Montpellier, ce mardi avait des couleurs plus ensoleillées : la présentation du Festival Radio Franceau Gazette Café, avec un invité de luxe, Paul Meyer, qui nous a offert deux premières mondiales. On y reviendra demain…
Et le soir un récital, à l’opéra Berlioz, de ma très chère Sonya Yoncheva (et de son petit frère Marin Yonchev), magnifiquement accompagnés par Daniel Oren et un orchestre de Montpellier en grande forme.
Une généreuse soirée tout Verdi, que les Parisiens peuvent retrouver ce vendredi au Théâtre des Champs-Elysées.
Un regret : « l’oubli » – ce ne peut qu’être que cela ! – dans la « bio » de la cantatrice publiée dans le programme distribué aux spectateurs de la participation de Sonya Yoncheva à deux soirées inoubliables du Festival Radio France – Iris de Mascagni en 2016, et Siberiade Giordano en 2017. Avec le même orchestre de Montpellier. Le public avait rectifié de lui-même…