Rachmaninov : une Première mal aimée

Cet été j’ai pas mal voyagé et donc écouté beaucoup de musique. Une programmation aléatoire m’a fait entendre deux versions de la Première symphonie de Rachmaninov et m’a, du même coup, rappelé une promesse que je m’étais faite d’établir quelques discographies des oeuvres du compositeur russe, né il y a 150 ans et mort il y a 70 ans.

Les heureux Parisiens auront la chance de pouvoir l’entendre fin octobre à la Philharmonie avec l’orchestre « rachmaninovien » par excellence, celui que dirigea le compositeur lui-même et avec lequel il enregistra plusieurs de ses oeuvres, l’orchestre de Philadelphie et son actuel chef Yannick Nezet-Seguin

En attendant, revue de quelques versions -de ma discothèque- pas toujours les plus connues :

  1. Lorin Maazel, Orchestre philharmonique de Berlin (DG)

Une fois de plus, ce n’est pas spontanément qu’on associe Rachmaninov à un chef comme Lorin Maazel. Et pourtant sa gravure des trois symphonies avec Berlin est plus qu’intéressante, elle a été heureusement rééditée dans le coffret presque complet des enregistrements DGG du chef américain disparu en 2014.

2. Walter Weller, Orchestre de la Suisse Romande (Decca)

A l’occasion du décès du violoniste et chef viennois Walter Weller (1939-2015) en juin 2015, j’avais écrit ceci :

« Quelques années plus tôt, j’avais acheté au marché aux puces de St Ouen un coffret de 3 33 tours des Symphonies de Rachmaninov et j’avais été fasciné par la 1ere symphonie (plus, à l’époque, que par les 2e ou 3emes) et par la beauté de la version de….Walter Weller et de l’Orchestre de la Suisse Romande, une captation Decca réalisée en 1971 au Victoria Hall de Genève.

Je me dis que jamais plus je n’aurais l’opportunité d’entendre « en vrai » l’oeuvre et les interprètes de ce disque, si je ne demandais pas à Walter Weller de reprendre cette 1ere symphonie de Rachmaninov vingt ans après cet enregistrement. Il fut d’abord très surpris de ma demande – peut-être n’avait il jamais plus redonné l’oeuvre en concert depuis l’enregistrement ?!, moi-même j’ai dû attendre 2007 et l’enthousiasme de Patrick Davin pour la reprogrammer à Liège ! –

Inutile de dire que ce concert genevois de Walter Weller m’est resté en mémoire (d’autant plus que le Berg donné en première partie avait pour soliste un Pierre Amoyal au sommet de ses moyens).

3. Vladimir Ashkenazy, Concertgebouw Amsterdam (Decca)

Autant je suis loin d’être convaincu par le pianiste Ashkenazy – qui a beaucoup, trop, enregistré – autant je lui reconnais pas mal de belles réussites comme chef d’orchestre, en particulier dans l’oeuvre symphonique de Rachmaninov, où il bénéficie de surcroît du somptueux Concertgebouw d’Amsterdam

4. Charles Dutoit, orchestre de Philadelphie (Decca/Newton)

Ce n’est pas – et de loin – la part la plus connue de la discographie du chef suisse, et pourtant la quasi-intégrale symphonique Rachmaninov que Charles Dutoit a enregistrée l’a été à Philadelphie et compte pour moi parmi les plus inspirées.

5. Zoltan Kocsis, Orchestre national de Hongrie (Budapest Music Center)

Lorsque j’avais rendu hommage à Zoltan Kocsis, le grand pianiste hongrois disparu en novembre 2016, j’avais évoqué, trop brièvement, son activité de chef d’orchestre. La dernière fois que je m’étais rendu à Budapest (et que j’avais encore trouvé un magasin de disques !) j’avais pu acheter ce CD, comportant… la Première symphonie de Rachmaninov !

Je n’ai malheureusement pas trouvé de vidéo de cet enregistrement… mais je le recommande très chaudement. Comme on a toujours chaleureusement recommandé Kocsis dans les concertos de Rachmaninov…

6. Mikhail Pletnev, Orchestre national de Russie (DGG)

Le pianiste Mikhail Pletnev est, de mon point de vue, aussi génial au clavier que sur le podium du chef. Il ne laisse personne indifférent, et c’est pour cela qu’on l’admire.

Il a aussi gravé les trois symphonies de Rachmaninov, et ses partis-pris dans la 1ere peuvent déconcerter autant que passionner l’auditeur.

Pour ne pas encourir le reproche que d’aucuns de mes lecteurs ne manqueraient pas de me faire, je précise que les versions que j’ai retenues ici n’excluent pas évidemment les références que sont Ormandy, Jansons, Svetlanov, et qui demeurent chères à mes oreilles !

L’été 23 (XII) : le Carnaval d’Ansermet

Dernier volet de cette brève série d’été de quelques trésors discographiques, un extrait étonnant du précieux coffret enfin paru au printemps dernier, la totalité des enregistrements stéréo du chef suisse Ernest Ansermet (1883-1969) rassemblée par Decca

En 1910, Michel Fokine imagine de chorégraphier le Carnaval de Schumann, en confiant l’orchestration de ces 22 pièces pour piano à différents compositeurs russes.

Carnaval Op. 9 ~ Ballet pour orchestre

Préambule (orch. Arenski)

Pierrot (orch. Glazounov)

Arlequin (orch. Klenovski)

Valse noble (orch. Petrov)

Eusebius (orch. Glazounov)

Florestan (orch. Rimski-Korsakov)

Coquette (orch. Kalafati)

Réplique (orch. Kalafati)

Papillons (orch. Tcherepnine)

A.S.C.H – S.C.H.A. Lettres dansantes (orch. Liadov)

Chiarina (orch. Kalafati)

Chopin (orch. Glazounov)

Estrella (orch. Winkler)

Reconnaissance (orch. Jāzeps Vītols, en allemand Joseph Wihtol)

Pantalon et Colombine (orch. Arenski)

Valse allemande (orch. Liadov)

Paganini (orch. Liadov)

Aveu (orch. Sokolov)

Promenade (orch. Klenovski)

Pause (orch. Glazounov & Kalafati)

Marche des Compagnons de David contre les Philistins (orch. Glazunov & Kalafati)

En 1913 les Ballets russes redonnent le Carnaval au théâtre des Champs-Élysées *

A noter pour les curieux que dans le coffret Warner, paru il y a quelques mois, consacré aux Ballets russes, on trouve ce même Carnaval orchestré dans l’interprétation idiomatique du chef britannique Robert Irving (1913-1991)

*Après la publication de ce billet j’ai reçu de mon ami François Hudry, le biographe et spécialiste incontesté d’Ernest Ansermet le message suivant : « à propos du Carnaval de Schumann, petite précision, Ansermet n’a collaboré aux Ballets Russes qu’à partir de 1915 pour la tournée aux USA. Le Carnaval a été créé le 4 juin 1910, à l’Opéra Garnier, sous la direction de Gabriel Pierné. Il sera repris, mais au TCE, en juin 1913 pour la 8e saison des Ballets russes sous la direction de Pierre Monteux »

Chefs pères et fils

Sujet attendu en ce jour de fête des pères, les dynasties de chefs d’orchestre.

Oleg et Igor

Commençons par le moins évident de ces couples père-fils, parce qu’ils ne portent pas le même patronyme. Prénoms d’origine russe, mais l’un, né en 1958, s’appelle Caetani, l’autre (1912-1983) s’appelle… Markevitch. J’ignore pourquoi Oleg a choisi le patronyme de sa mère italienne, peut-être pour échapper à l’ombre tutélaire du père… (allô Doktor Freud ?).

L’examen de sa discographie prouve au moins qu’il n’a pas cherché, volontairement ou non, à se mettre dans les pas de son père.

Pour ce qui est de la discographie d’Igor Markevitch, je renvoie aux articles que je lui avais consacrés : Markevitch chez DG, Markevitch chez Philips.

De profil, le fils ne peut pas renier le père !

Arvid et Mariss

La célébrité internationale du regretté Mariss Jansons (1943-2019) a éclipsé celle, cantonnée à l’Europe orientale, de son père Arvīds (1914-1984). Mais la carrière du fils s’est très tôt inscrite dans le droit fil de celle du père, puisque l’un et l’autre ont tour à tour secondé le grand Evgueni Mravinski à l’orchestre philharmonique de Leningrad.

On trouve sur le Net plusieurs enregistrements « live » d’Arvid Jansons

Quelle émotion de retrouver ce concert de gala enregistré dans la grande salle de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg, dirigé par Mariss Jansons quelques mois avant sa mort (on aperçoit dans la loge de côté Yuri Temirkanov, patron de l’orchestre depuis 1988).

Michel et Emmanuel

Ce n’est pas faire injure au fils que de dire qu’il est loin d’avoir la notoriété du père. Emmanuel Plasson, né en 1965, poursuit pourtant une belle carrière surtout dans les fosses d’opéra, et parmi les plus illustres

Il faut dire que son père Michel Plasson – 90 ans le 2 octobre prochain ! – a plié le match en matière de discographie, notamment dans le répertoire français dont il s’est fait le héraut, inspiré et talentueux.

En 2019, l’opéra royal de Wallonie à Liège avait eu l’excellente idée de l’inviter à diriger Les pêcheurs de perles de Bizet. C’est un régal d’entendre le vieux chef parler comme il le fait de la musique française :

Tout mélomane doit avoir dans sa discothèque les deux magnifiques coffrets qui illustrent la carrière de l’ancien patron du Capitole de Toulouse. Reconnaissance aussi à Alain Lanceron, aujourd’hui patron de Warner/Erato qui a produit l’essentiel de ces enregistrements indispensables.

Armin et Philippe

Je ne vais pas m’étendre sur les Jordan père et fils. J’ai à peu près tout dit, tout écrit, sur l’un – Armin (1932-2006) et l’autre – Philippe – né en 1974. Si Armin est mon père en musique, Philippe est comme mon petit frère.

(à la remise de la Légion d’honneur à Philippe Jordan in extremis au ministère de la Culture la veille du second tour de l’élection présidentielle en mai 2022)

Il ne faut pas comparer Armin et Philippe, même si à l’évidence les dons du père ont perfusé chez le fils. Je les aime et les admire profondément pour ce qu’ils sont, de belles personnalités.

J’éprouve toujours une immense fierté d’avoir pu convier Armin Jordan à diriger chaque année, de 2001 à sa mort en 2006, l’Orchestre philharmonique royal de Liège. Comme en témoigne cette formidable Péri de Dukas, captée en 2005.

Philippe est à l’acmé de sa carrière, à Vienne ou à Paris, il emporte toujours l’enthousiasme.

Erich et Carlos

Dans la famille Kleiber, le génie est généreux. Si le fils, Carlos (1930-2004), nous est resté plus proche, parce qu’on a tant de fabuleux souvenirs de ses concerts, de ses disques, on ne peut oublier que le père Erich (1890-1956) fut l’un des plus grands chefs du XXème siècle.

Sa version des Noces de Figaro de Mozart n’a jamais quitté les premiers rayons de ma discothèque, des disques de légende. Quelle distribution !

Sur Carlos Kleiber – lire Carlos le Grand – les qualificatifs manquent : je peux voir et revoir, sans jamais me lasser, les captations vidéo qui ont heureusement été réalisées de nombre de ses concerts et de quelques opéras.

Cette galerie de portraits ne serait pas complète sans les familles Jarvi et Sanderling : dans les deux cas le père a engendré plusieurs fils chefs !

Kurt, Thomas, Stefan et Michael

Je pense ne pas être démenti si j’affirme que la famille Sanderling est unique en son genre : le père Kurt (1912-2011) a donné naissance à trois chefs, Thomas (1942), Stefan (1964) et Michael (1967). J’ai eu l’immense privilège de les voir diriger tous les quatre, et d’inviter Thomas et Stefan à Liège.

Je suis inconditionnel de Kurt Sanderling, dont il existe heureusement nombre de témoignages enregistrés, de disques qu’on chérit comme des trésors. Je me rappellerai jusqu’à la fin de mes jours les deux Neuvième – Mahler et Beethoven – que Sanderling avait dirigées à la tête de l’Orchestre de la Suisse romande au début des années 90.

Même s’il a souvent dirigé les mêmes répertoires que son père, Thomas Sanderling se distingue, dans sa discographie, par des choix plutôt originaux, comme une très belle intégrale des symphonies de Magnard

A Liège, Thomas Sanderling avait dirigé un beau Requiem allemand de Brahms.

J’ai invité plusieurs fois le cadet, Stefan, avec les Liégeois : Beaux souvenirs de programmes originaux (deux symphonies de Haydn encadrant le 4ème concerto de Rachmaninov joué par Michel Dalberto, une Huitième de Chostakovitch suffocante…).

Stefan Sanderling a été, de 1996 à 2004, chef de l’Orchestre de Bretagne, avec lequel il a enregistré du répertoire français plutôt méconnu

Quant au petit dernier – last but non least – Michael Sanderling, il a redonné un lustre remarquable au plus ancien orchestre professionnel de Suisse, celui de Lucerne.

Neeme, Paavo et Kristjan

Je renvoie à l’un des articles que j’ai déjà consacrés à la famille JärviOpening nights : c’était à l’ouverture du festival Radio France 2019.

Ansermet enfin

On savait par son biographe, l’ami François Hudry, que Decca avait prévu d’honorer le chef suisse Ernest Ansermet (1883-1969) par une monumentale réédition de son legs discographique à l’occasion des 50 ans de sa mort en 2019. Puis silence radio (lire mon billet de décembre 2021 Disques fantômes). Sur la foi d’une nouvelle date de parution annoncée pour avril 2022, j’avais commandé le premier et plus important coffret de cette édition – Ernest Ansermet, the Stéréo Years – chez l’éditeur allemand jpc.de. C’est finalement un an après la date annoncée que j’ai reçu le précieux coffret.

On n’a pas à regretter le retard pris sur la date initiale de publication, tant l’objet qui nous est livré est à tous égards remarquable.

A la différence d’autres éditeurs (Sony, Decca pour le récent Dorati/Detroit), on a ici des minutages très généreux… et des pochettes d’origine. Sur chaque pochette, figurent tous les détails qu’un mélomane curieux est en droit d’attendre, les interprètes bien sûr, les minutages, les dates et lieux précis d’enregistrement.. et de première publication, les équipes de prise de son, etc… Dans le livret quadrilingue (français, anglais, allemand, japonais), d’excellents, quoique trop brefs à notre goût, textes de François Hudry et Jon Tolansky. Et le tableau extrêmement détaillé de tous les enregistrements réalisés par Ansermet, de leurs dates de publication, etc. Un coffret « mono » doit suivre.

Je connaissais déjà la quasi totalité de ces enregistrements, et en admirais de longue date les prises de son, presque toutes réalisées au Victoria Hall de Genève, par les ingénieurs de Decca de la grande époque. De ce que j’ai pu entendre de ce nouveau coffret, les remastérisations sont impressionnantes, en ce qu’elles gomment les défauts des premières prises stéréo, sans altérer – au contraire – leur parfait équilibre. Et quand Decca annonce toutes les captations stéréo cela comprend aussi des enregistrements qu’on ne connaissait pas en CD, comme une 1ère et une 8ème symphonies de Beethoven captées en mai 1956 (sept ans avant l’intégrale des symphonies)

En terres germaniques

Quant au contenu, il permettra, on l’espère, d’élargir la perception qu’on a de ce grand chef, une fois pour toutes catalogué comme spécialiste de la musique française. On aime tellement enfermer les musiciens dans des cases…

Qu’on écoute seulement ce qu’Ansermet fait de la demi-douzaine de cantates de Bach qu’il a gravées, des symphonies parisiennes de Haydn (la première intégrale en stéréo !), bien sûr des symphonies de Brahms et Beethoven, si proches de conception de son contemporain Monteux

Les Weber, Mendelssohn, Schumann (magnifique 2ème symphonie) ne manquent ni d’élan ni de saveur.

Maître de ballet

Qui pourrait oublier qu’Ansermet a été, de 1915 à 1923, le chef des Ballets Russes, qu’il a, à ce titre, créé les partitions du Tricorne de Manuel de Falla, de Noces de Stravinsky, qu’il a étroitement connu ceux dont il dirigeait les oeuvres ! Ses enregistrements des trois grands ballets de Tchaikovski, de Coppélia de Delibes, de Glazounov, évidemment de Stravinsky (malgré la brouille qui les a séparés après la guerre, Ansermet refusant de jouer les partitions « révisées » par Stravinsky, qui, ce faisant, régénérait le compteur de ses droits d’auteur!). Dans Tchaikovski en particulier, les tempi d’Ansermet peuvent parfois surprendre, on ne doit jamais oublier que lui savait ce qu’était qu’accompagner des danseurs !

Une curiosité sans limite

On ne peut résumer ici ce que fut l’incroyable carrière du chef suisse, fondateur en 1918 de l’Orchestre de la Suisse Romande qu’il dirigea jusqu’en 1967, ni l’étendue de ses curiosités et de ses répertoires. Mais on en trouve, dans ce coffret, l’éclatant témoignage.

De Sibelius, il a laissé deux symphonies, dont une surprenante Quatrième :

En septembre 1968 pour l’un de ses tout derniers enregistrements, il grave la 3ème symphonie d’Albéric Magnard.

Il n’oublie jamais ses contemporains suisses, Honegger bien sûr (c’est Ansermet qui crée le poème symphonique Pacific 2.3.1, Frank Martin

On l’a bien compris, ce coffret est une malle aux trésors, qu’on n’a pas fini de redécouvrir.

Prokofiev en boîte

Puisqu’il a été décidé que Serge Prokofiev, mort il y a 70 ans, méritait la une des deux magazines français de musique classique (lire Les deux Serge et Prokofiev etc.), réjouissons-nous de voir paraître un copieux coffret de 36 CD chez Warner.

Simple recyclage d’enregistrements déjà bien connus ? Pour partie oui, mais avec pas mal de redécouvertes. Et surtout un choix éditorial qui, dans un catalogue aussi vaste que celui des labels désormais regroupés sous la houlette de Warner (EMI, Erato, Teldec, etc.), prend des partis, retient telle version plutôt que telle autre.

Le piano

Ainsi, pour reprendre dans l’ordre de présentation des CD, dans les sonates pour piano, on retrouve partiellement la formidable intégrale de Vladimir Ovchinnikov, mais aussi l’énorme surprise qu’est la réédition de la 2ème sonate par le tout jeune Rafael Orozco.

Nikolai Luganski joue la 6ème sonate, et c’est, comme une forme d’hommage au pianiste franco-américain trop tôt disparu, à Nicholas Angelich que revient la 8ème sonate (comme son formidable cycle des Visions fugitives)

Les cinq concertos pour piano se partagent entre Andrei Gavrilov / Simon Rattle (1), le récent Beatrice Rana / Antonio Pappano (2), trois versions et non des moindres pour le 3ème, l’historique version du compositeur lui-même secondé par Piero Coppola et le LSO en 1932, Martha Argerich/Charles Dutoit et Alexis Weissenberg/Seiji Ozawa, Michel Béroff/Kurt Masur (4) et Richter/Maazel (5).

Le violon

C’est sans doute dans le chapitre « violon » et musique de chambre qu’il y a le moins de surprises : pour les deux sonates les inusables Repin et Berezovsky, pour les deux concertos les Oistrakh multi-réédités (j’aurais préféré les versions, pour moi insurpassées, de Nathan Milstein avec Giulini (1) et Frühbeck de Burgos (2)), mais aussi les moins connus Perlman avec l’apport de Rojdestvenski au podium.

Pierre et le Loup

Pour ce coffret, Warner avait l’embarras du choix dans les versions du conte musical Pierre et le Loup. Il y a pas moins de 6 versions, en français ,anglais, allemand, japonais, espagnol et néerlandais ! Avec d’illustres narrateurs : une version longtemps introuvable en allemand de Romy Schneider, à l’époque des Sissi, en espagnol avec Miguel Bosé, et en français c’est Claude Piéplu qui est annoncé sur la pochette… et c’est Peter Ustinov qu’on entend aux côtés d’Igor Markevitch et de l’Orchestre de Paris (1969). Le même Peter Ustinov, enregistré plusieurs années auparavant, est également présent dans la version anglaise avec Karajan et le Philharmonia (chef et orchestre qui manquent singulièrement de poésie !)

Les Ballets

C’est sans doute le point faible de ce coffret. En dehors des versions archi classiques d’André Previn de Roméo et Juliette et Cendrillon et du bien médiocre Fils prodigue de Lawrence Foster, rien dans les autres ballets et musiques de scène de Prokofiev à se mettre dans l’oreille ! En revanche une belle surprise avec les trois suites de Roméo et Juliette, dues à Armin Jordan et l’orchestre de la Suisse romande, passées sous les radars à leur sortie.

Rien de neuf non plus côté musiques de films ou assimilées : l’Alexandre Nevski d’André Previn manquant vraiment de « russité », l’impressionnant Ivan le Terrible de Riccardo Muti.

Les opéras

A l’instigation de Claude Samuel, les forces musicales de Radio France – Choeur et Orchestre National – avaient prêté leur concours à un très coûteux pour les finances d’Erato : le monumental Guerre et Paix sous la conduite passionnée de Mstislav Rostropovitch. L’Amour des trois oranges réunit la fine fleur du chant français sous la houlette nettement moins fervente de Kent Nagano.

Les symphonies

C’est toujours Rostropovitch et le National qu’on retrouve pour la plupart des symphonies (notamment pour les deux versions de 4ème), Previn conduisant les 1 et 7. On aurait pu imaginer un choix un peu plus vaste, notamment pour la 5ème symphonie…

Le livret du coffret est réduit au minimum, pas de détails sur les CD, les dates d’enregistrement etc… (tout cela c’est sur chaque pochette, écrit en minuscules minuscules !). Un bon texte de Loic Chahine en trois langues.

Précision : j’achète tous les disques et coffrets que je commente et présente dans mon blog. Je n’ai jamais demandé ni reçu ce qu’on appelle dans le jargon professionnel des « services de presse » (gratuits).

César Franck #200

C’est aujourd’hui le bicentenaire de la naissance, le 10 décembre 1822 à Liège, de César Auguste Franck.

En dehors de sa ville natale, et de quelques concerts parisiens, on ne peut pas dire que cet anniversaire ait bénéficié de grandes célébrations. Pas très vendeur sans doute le père Franck.

Après le point fait sur la discographie – lire Ave César -, mes choix purement subjectifs, et quelques pépites bien cachées ou oubliées.

Symphonie

L’unique symphonie, en ré mineur, de César Franck, achevée en 1888 et créée le 17 février 1889, bénéficie d’une discographie pléthorique. J’ai déjà ici souvent exprimé mes préférences, corroborées par la critique.

Je ne peux évidemment pas revoir, sans une profonde émotion, ces deux vidéos pourtant si différentes : l’Orchestre national de France exalté par le geste conquérant de Leonard Bernstein, l’Orchestre de la Suisse romande et Armin Jordan si authentiques.

J’ai fait le compte, j’en ai 43 versions dans ma discothèque (en CD) sans compter les téléchargées. Dont les trois enregistrées par Carlo-Maria Giulini, à Londres, à Berlin et à Vienne. On admire immensément ce chef, mais sa lecture hiératique, chargée d’intentions, statufie un peu plus le père Franck !

La sonate pour violon

Définitivement le duo Christian Ferras – Pierre Barbizet dans leurs deux versions EMI (1958) et DG (1965)

Psyché avec ou sans choeur

Déjà écrit (Ave Cesar), pour ceux qui voudraient sortir de la Symphonie, la trop justement méconnue symphonie qui ne dit pas son nom, le « poème symphonique avec choeur » Psyché.

Malheureusement pas grand chose à tirer ni à entendre de la toute récente et bien banale version des Liégeois dirigés par leur actuel chef, mais tout à redécouvrir grâce à la réédition d’un enregistrement de 1976 avec le même orchestre de Liège et son chef de l’époque, l’Américain Paul Strauss, pour la version complète avec choeur :

Et pour la version sans choeur, un enregistrement que j’écoutais hier dans un taxi – c’est rare un taxi branché sur France Musique ! – et qui m’enthousiasmait sans que je parvienne à le reconnaître. Lorsque j’entendis, à la fin de l’extrait, « désannoncer » Armin Jordan et l’orchestre symphonique de Bâle. (et pas, comme je l’entendis jadis sur cette même chaîne, l’orchestre Basler !!), je n’en fus pas surpris. Comme dans la symphonie, Armin Jordan est un chef qui a tout saisi du caractère de la musique de Franck, né au carrefour des cultures germanique et latine.

Le chasseur maudit

Sans doute l’oeuvre la plus « romantique » de César Franck, un poème symphonique d’une quinzaine de minutes où rodent les ombres de Berlioz, de Weber et du premier Wagner.

Michel Plasson et « son » Capitole de Toulouse en donnent une vision frémissante :

Piano et orchestre

Franck a écrit plusieurs pièces pour piano et orchestre, un concerto notamment (on les retrouve dans le coffret anniversaire OPRL/Fuga Libera. Seules restent jouées les Variations symphoniques – en réalité un concerto bref en trois parties – et Les Djinns.

J’ai longtemps été rebuté par le début empesé, lourd, de beaucoup de versions des Variations symphoniques, malgré l’excellence des pianistes et des chefs. Et à chaque fois je reviens à mon tout premier disque, inégalé, inégalable : Artur Rubinstein en 1957 et un chef Alfred Wallenstein qui ne se croit pas obligé d’embrumer Franck.

Pour le reste, je renvoie à l’esquisse de discographie déjà dressée dans Ave Cesar.

Petit cadeau pour cet anniversaire, une version vraiment inattendue de l’une des mélodies (genre qu’il a peu cultivé) de Franck, son Nocturne :

Les morts et les jours

Octobre n’est pas fini et on pleure déjà trop de morts.

Lari et France Musique

Le 28 septembre, sur Facebook, j’écrivais : J’apprends par ma chère Arièle Butaux le décès hier après-midi de notre ami Michel Larigaudrie.

De lui, nous qui avons eu la chance de le côtoyer à Radio France, à France Musique, nous pouvons dire : nous l’avons tant aimé.

Jusqu’au bout, dans sa retraite toulonnaise, il est resté un citoyen engagé, exigeant (à l’égard notamment de ses jeunes collègues du service public), révolté souvent par les injustices du monde, plein d’affection et d’attentions pour ses proches et ceux qu’il aimait.

Adieu Lari !

Ces dernières années, Michel Larigaudrie, Lari pour les intimes et comme il signait ses messages, ne manquait pas une occasion de me rappeler les jours heureux, les siens, les miens, de France Musique, m’envoyant les photos qu’il avait prises en maintes circonstances, documentant ainsi précieusement des émissions, des rencontres, qui n’auraient, sinon, pas laissé de traces autres que sonores.

Lire Fortes têtes, Les politiques au micro.

Michael Ponti l’intrépide

Michael Ponti (1937-2022), j’en ai entendu parler pour la première fois à Genève. C’était son partenaire de musique de chambre, Robert Zimansky, à l’époque violon solo de l’Orchestre de la Suisse romande, qui s’était étonné auprès de moi que ce pianiste à la virtuosité exceptionnelle ne soit jamais invité par l’OSR ! Je ne l’ai jamais entendu en concert, surtout depuis qu’à la fin des années 90 un accident vasculaire l’avait contraint à réduire considérablement son activité. Il est mort le 17 octobre dernier en Allemagne où il vivait.

Mais il laisse un nombre impressionnant d’enregistrements d’oeuvres concertantes, qu’il fut parfois le seul, souvent le premier, à graver. On conseille en particulier ce coffret qui regroupe notamment tous les disques enregistrés pour le label américain Vox :

Jean Teulé le dégingandé

Je ne le croiserai plus dans les rues du Marais, où il avait ses pénates. C’est bête de mourir d’une intoxication alimentaire. C’est ce qui est arrivé à Jean Theulé, 69 ans.

Je n’étais pas ce qu’on peut appeler un « fidèle lecteur », plutôt occasionnel. Je vais rattraper mon retard.

Philippe Aïche, le dernier violon

Je me demandais pourquoi, depuis un bon moment, je ne voyais plus Philippe Aïche à la première chaise – c’est ainsi qu’on nomme la place à laquelle est assis le premier violon, le Konzertmeister, d’un orchestre – de l’Orchestre de Paris. Christian Merlin en révèle la triste raison ce matin dans Le Figaro. Une tumeur au cerveau et la disparition annoncée hier, à 59 ans, d’un musicien, entré en 1985 à l’orchestre, qui récolte l’hommage unanime de toute la profession. Encore une mort injuste.

Philippe Aïche, David Gaillard, répètent la Symphonie concertante de Mozart avec l’orchestre de Paris dirigé par Gianandrea Noseda.

J’ai plein de souvenirs évidemment de Philippe Aïche, mais un tout particulier, lorsqu’il créa, en 1997 je crois, le 2ème concerto pour violon d’Eric Tanguy.

Condoléances à sa famille et ses collègues de l’Orchestre de Paris.

Pauvre hommage

Voici bientôt un an que Nelson Freire a quitté cette vie (voir L’admirable Nelson). Decca annonce des inédits à paraître ces jours-ci.

J’aurais aimé dire du bien d’un livre qui était attendu par tous les admirateurs et les amis du pianiste brésilien – et ils sont nombreux -. Je regrette presque de l’avoir acheté.
Voici comment l’éditeur le présente :

« Doté de fabuleux moyens, le Brésilien Nelson Freire est depuis son plus jeune âge l’un des plus grands pianistes au monde. Sa carrière a pourtant mis du temps à se hisser à la hauteur de son talent. Hypersensibilité maladive, caractère indocile et une sorte de malédiction l’ont maintenu à part, jusqu’à l’apothéose des dernières années.

Son jeu noble, puissant, sensuel et coloré a fini par lui valoir l’amour du public en plus de l’admiration des musiciens. Très proche de Martha Argerich, avec laquelle il a formé un duo de légende, il reste un interprète miraculeux de Chopin, Schumann, Brahms, Debussy ou Villa-Lobos.

En octobre 2021, sa mort soudaine a plongé le monde musical dans la sidération. Après une enquête minutieuse, Olivier Bellamy retrace son fascinant parcours et lève le voile sur l’un des secrets les mieux gardés du piano« 

Les raisons de ma colère ? Je n’ai rien appris que je ne connusse déjà (et qui était déjà écrit dans le bouquin que le même auteur a consacré à Martha Argerich). Mais quand on a eu la chance d’approcher des êtres comme Nelson Freire, de partager parfois leur amitié, on ne se répand pas en anecdotes douteuses, en détails intimes, qui n’apportent rien à la connaissance de l’artiste et s’apparentent à une violation de la vie privée d’un mort et de ses proches. Je dois être trop old school..

Disques fantômes

Ceux qui me suivent savent que je reste attaché au disque « physique », même si je suis abonné à un site – très bien fait – de téléchargement essentiellement classique. Je rationalise ma discothèque en me séparant de CD isolés – sauf lorsqu’ils présentent un intérêt documentaire particulier – au profit de coffrets récapitulatifs (cf. La quarantaine rugissante, Réévaluation).

Mais on observe depuis quelques mois un phénomène très particulier : des coffrets annoncés… qui ne paraissent jamais.

Jessye et soeur Anne

Ainsi on avait repéré, et commandé, il y a plusieurs mois, ce coffret très attendu, l’intégrale des récitals « studio » de Jessye Norman, disparue le 30 septembre 2019.

Tel la Soeur Anne de Barbe-Bleue de Charles Perrault, on n’a jamais rien vu venir. la Fnac annonce fièrement une livraison sous quelques jours… tandis que d’autres sites plus sérieux (?) évoquent une parution le 31 décembre… 2022 ! Chiche ! mais on doute franchement que le produit même ait été fabriqué ou soit même en cours de fabrication…

Ansermet ou l’Arlésienne

En novembre 2018, à l’occasion du centenaire de la fondation de l’Orchestre de la Suisse romande, j’annonçais une monumentale édition Decca du considérable legs discographique d’Ernest Ansermet. Prévue pour commémorer les cinquante ans de la mort du fondateur de l’orchestre, disparu en février 1969. Depuis lors, plus de nouvelles.

Entre temps Scribendum (voir Krips le Viennois) semble avoir comblé la « défaillance » de Decca, en rééditant les enregistrements libres de droits (avant 1963)

Mais, tout espoir n’étant pas perdu, j’ai trouvé sur un site allemand – jpc.de – l’annonce d’un coffret Ernest Ansermet : The Stereo years (Decca Edition) avec une date précise de parution : 18 février 2022.

A côté de ces coffrets fantômes, on peut s’interroger sur la pertinence de certaines rééditions, destinées paraît-il au marché japonais. Il y a quelques mois, une intégrale vraiment intégrale du vénérable Jean-François Paillard (1928-2013) dont on ne peut pas nier le rôle dans la redécouverte de certains répertoires baroques, mais dont on a peine à mesurer l’intérêt discographique.

Le coffret en question est déjà devenu « collector »…

Tout aussi inutile un coffret aperçu l’autre jour dans une Fnac, l’intégrale des enregistrements du flûtiste Jean-Pierre Rampal (1922-2000) pour Sony, autrement dit les dernières années de sa carrière.

Oui Rampal a été une légende, et son premier éditeur Erato n’a pas manqué de lui rendre hommage, en rééditant abondamment des enregistrements remarquables et remarqués.

Mais Rampal, comme aujourd’hui James Galway, 82 ans, n’aurait peut-être pas dû user et abuser de sa notoriété. J’ai des souvenirs pas très brillants de Rampal (avec Stern et Rostropovitch) au festival d’Evian, dans les années 80. Il donnait encore le change, mais la gloire était déjà bien fanée.

Stephen Sondheim : Send in the clowns

Grâce à Jean-Luc Choplin, le public français a pu découvrir le génie de Stephen Sondheim, qui vient de disparaître à 91 ans. Le théâtre du Châtelet à Paris a programmé nombre d’ouvrages de celui qu’on a qualifié hâtivement de « roi de Broadway », de « star de la comédie musicale ». Pour l’immense majorité, son nom reste lié à West Side Story, le célébrissime ouvrage de Leonard Bernstein, dont Sondheim a écrit les lyrics – à l’opéra on parlerait de livret – autrement dit les paroles des chansons. Stephen Sondheim était un authentique grand compositeur et son oeuvre n’est pas systématiquement souriante, joyeuse, dansante.

En 2013, Renaud Machart publiait, dans la collection Actes Sud/Classica, le seul essai en français consacré à Stephen Sondheim :

“Il ne manque rien au compositeur de Broadway Stephen Sondheim, sinon la canonisation”, a-t-il été écrit à propos de celui qui est en effet une légende vivante dans les pays anglo-saxons et le dieu de nombreux amateurs de comédie musicale. Il manque cependant encore à Sondheim une vraie reconnaissance en France, où ses comédies musicales sont depuis quelques années seulement à l’affiche, notamment du Théâtre du Châtelet à Paris. Cet essai, le premier consacré en français au compositeur et «lyricist» américain, parcourt en détail son oeuvre considérable.

J’ai eu la chance de voir au Châtelet tous les spectacles de Sondheim programmés durant la décennie 2010, et plusieurs à Londres.

Le dernier en date, à une date absolument tragique, le 22 mars 2016 : Une tragédie, une Passion : deux anniversaires

En 2010, A Little Night Music avec rien moins que Leslie Caron, une autre légende, Greta Scacchi, Lambert Wilson

En 2011, Sweeney Todd :

En 2013 Sunday in the park with George

Et bien entendu la reprise du spectacle original de 1957 de West Side Story pour le cinquantenaire de l’ouvrage en 2007.

Je n’ai jamais eu la chance de rencontrer personnellement Stephen Sondheim, ni de lui exprimer mon admiration et ma gratitude. Ni de lui dire que, sans le savoir, il a beaucoup compté pour moi. En 1989 ou 1990, le grand clarinettiste, mon ami Paul Meyer, était venu jouer au Victoria Hall de Genève, avec l’Orchestre de la Suisse romande dirigé par Günther Herbig, le premier concerto de Weber. En bis, il avait joué une pièce qui m’avait bouleversé, et que – je n’ai pas honte à l’avouer – j’entendais pour la première fois : Send in the clowns. En mars 2001, j’avais invité Paul – dans le concerto de Mozart cette fois – pour le premier concert d’abonnement de Louis Langrée à Liège. De nouveau, il avait bissé avec Send in the clowns. Plus tard, j’avais conseillé au nouveau clarinette solo de l’Orchestre philharmonique royal de Liège de s’emparer de ce bis. Et, en juillet 2019, lorsque Jean-Luc Votano avait donné la première française du concerto pour clarinette de Magnus Lindberg à Montpellier, il avait malicieusement glissé dans sa cadence du concerto une citation de… Send in the clowns (ce qui n’avait pas manqué d’amuser le compositeur présent dans la salle !).

Maintenant que Stephen Sondheiml a rejoint les étoiles, écoutons Benny Goodman lui chanter cette petite musique de nuit

Un goût de trop peu

Deux livres sur ma table, dont je vais achever la lecture ce week-end.

L’un qui fait l’actualité, une sorte de carnet de bord de celui qui a dirigé l’Opéra Comique ces dernières années, et qui vient de prendre la direction de la Philharmonie de Paris, Olivier Mantei

J’ai assez dit ici tout le bien que je pensais de la politique artistique conduite à l’Opéra Comique, sous la houlette de Jerôme Deschamps puis d’Olivier Mantei, notamment lors de la nomination de Louis Langrée, pour avoir le droit de regretter le trop peu de cet excellent petit bouquin. On voudrait tellement en savoir plus, mais la prudence ou la réserve inhérentes aux fonctions passée et actuelle de l’auteur sont certainement la cause de la relative brièveté de l’essai. J’invite à lire la critique qu’en a faite Christophe Rizoud pour Forumopera : Une mise au point.

Sans langue de bois

J’ignorais que quelqu’un qui a beaucoup compté dans mes débuts de ma vie professionnelle dans la musique – à qui j’ai fait récemment allusion dans mon papier sur Julia VaradyRon Golan (1924-2004) eût publié ses Mémoires

J’ai trouvé ce bouquin d’occasion sur… Amazon !

Voici ce qu’en dit l’éditeur (l’ouvrage est paru en 2004)

Essai autobiographique d’un altiste réputé ? Recueil de considérations sur la vie, les avatars, les coulisses d’un grand orchestre, émaillé d’anecdotes savoureuses ? Galerie de portraits de musiciens fameux du demi-siècle dernier ? Réflexions sur l’avenir de la musique symphonique ? Ces Mémoires d’une personnalité qui a marqué la vie musicale de Genève pendant près de 50 ans sont tout cela à la fois. En racontant le parcours d’un musicien fuyant seul à quinze ans l’Allemagne nazie pour se former dans ce qui était alors la Palestine sous mandat et aboutir à Genève, Ron Golan a su replacer les péripéties individuelles dans la vie collective – celle de la musique et celle de son temps. Il a voulu, au-delà de sa personne, témoigner en faveur de la musique et de ceux qui la servent, à Genève et dans le monde. Autant qu’une émouvante analyse des événements et des personnes qui ont formé et influencé un musicien de premier ordre, cet ouvrage apporte – dans une forme et un style qui allient humour et gravité, modestie et convictions – une contribution irremplaçable à l’histoire de la musique en Suisse. (Présentation de l’éditeur).

J’ai déjà parcouru quelques chapitres de ces mémoires, notamment ceux qui ont trait à quelques-unes des aventures que j’ai partagées avec Ron Golan (qu’entre nous, notamment avec Armin Jordan, nous appelions « Henri »> Henri Golan !!) Ici aussi j’ai eu un goût de trop peu… Quand on a connu certains faits, certains épisodes, surtout lorsqu’ils mêlent de grands artistes, on est toujours en attente de plus de détails, plus d’anecdotes.

Je reviendrai sur cet ouvrage, notamment sur ce qui y est dit d’une période « légendaire » – qui ne le fut pas tant que ça – des dernières années de « règne » d’Ernest Ansermet à la tête de l’Orchestre de la Suisse romande qu’il avait fondé en 1918.

Le tout dernier enregistrement qu’Ernest Ansermet réalisa pour Decca en 1968 fut la Troisième symphonie de Magnard.