Martha A.

Un vieux fond d’éducation m’empêcherait normalement de citer l’âge d’une dame, a fortiori de lui souhaiter son anniversaire. Mais comme elle défie les années et qu’à 75 ans aujourd’hui, elle reste d’une éternelle jeunesse, j’y vais aussi de mon compliment à Martha Argerich. 

Tout a été dit, écrit sur cette musicienne hors norme, cette pianiste phénoménale, cette personnalité singulière. J’ai eu la chance de la rencontrer à plusieurs reprises, de l’entendre plus souvent encore (La reine et le géant). Elle fait partie de ma vie. Je lui souhaite un bel anniversaire et lui exprime une infinie gratitude pour tout ce qu’elle nous apporte.

https://www.youtube.com/watch?v=MkrwU5Pd93c

Ces jours-ci a lieu, à Lugano, la dernière édition d’un festival unique, conçu avec, pour et par Martha Argerich (La fin d’une belle aventure). On se consolera, un peu, en réécoutant les beaux échos de ce « projet », publiés année après année, et riches de formidables rencontres, moments inédits, découvertes musicales.

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Nathalie et ses guides

Ce vendredi l’actualité c’était Paris sous l’eau et ses photos spectaculaires.

C’était aussi cette délicieuse soirée dans ce lieu si improbable et si chaleureux qu’est le Théâtre des Bouffes du Nord, autour de Gilbert Bécaud et de ses auteurs.

IMG_3402C’est l’homme de tous les talents, pianiste, chef, compositeur, arrangeur, Bruno Fontaine, qui en a eu l’idée avec le concours de la SACEM.

IMG_3403C’est d’abord cette actrice magnifique, qu’on ne peut qu’aimer profondément, inconditionnellement, Sandrine Bonnaire, silhouette légère dans une légère robe rouge, qui dit sans fard ni artifice des textes de Bécaud ou de ses célèbres paroliers Pierre Delanoë, Louis Amade, Aznavour.., c’est Bruno Fontaine qui connaît tout son piano classique qui parsème ses interventions, ses arrangements, de discrètes allusions à Chopin, Bach, Debussy et tant d’autres, ce sont des chanteurs qu’on n’attendait pas forcément dans Bécaud.

J’avais complètement perdu de vue Jean Guidoni, la silhouette s’est appesantie, la voix s’est arrondie, on pense parfois à Nougaro, et on est heureux de le retrouver. Arthur H nous émeut plus qu’on ne l’aurait imaginé avec Nathalie

Je découvre un beau personnage, Ben Mazué, qui se coule à merveille dans Les marchés de Provence et Quand tu danses.

J’apprécie l’énergie de Clarika, mais moins ses poses et une voix souvent fâchée avec la justesse. Bruno Fontaine, Christophe Willemme à la basse et Daniel Ciampolini à la batterie nous offrent un plein de nostalgie avec un Dimanche à Orly instrumental.

Et puis, une fois encore sans aucune objectivité, on cède à la voix, à la lumineuse présence d’Isabelle Georges – qui a eu une permission de sortie d’un soir du Théâtre La Bruyère (Parlez moi d’amour) -. Elle chante Je t’attends, L’absent et conclut la ronde avec l’une des plus belles chansons de son propre spectacle (Amour Amor) C’est merveilleux l’amour.

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Inattendus

Ces deux derniers jours auront été pour moi l’occasion de rencontres et de situations plutôt inattendues.

Comme nombre d’automobilistes distraits ou peu attentifs aux changements de limites de vitesse sur des tronçons qu’on croit connaître par coeur, j’ai dû récupérer les points perdus de mon permis de conduire, au cours de l’un « stage de sensibilisation à la sécurité routière » (sic). Deux jours pleins dans une salle de classe.

Je m’étais préparé à une plongée dans l’ennui. Et ce fut le contraire qui survint, du fait de la composition de notre groupe de « stagiaires » – 15 hommes, une femme, de tous âges, conditions et origines -, de l’humour et du savoir-faire des « animateurs » aussi. Assis entre un jeune chef d’entreprise coiffé en permanence d’une kippa, à la tchatche contagieuse, et une sublime jeune femme, que peu avaient reconnue comme la réalisatrice de Polisse et Mon Roi, j’ai finalement aimé ce condensé d’humanité, le fonctionnement du groupe, les réactions, les emballements, la diversité des points de vue. Je n’ai pas appris grand chose qui change la nature de ma conduite automobile (je fais attention aux limitations !), mais j’ai adoré ces moments finalement rares d’échange avec des personnes qu’on n’aurait jamais l’occasion de côtoyer autrement.

Ce café pris avec Gutemberg – c’est son prénom ! – qui rit lui-même de s’être fait prendre à 2 heures du matin à dépasser le 30 km/h prescrit au centre de Paris… par des policiers qui  partagent la même salle de gym que lui, ou cet autre avec un trentenaire qui semble revenu de tout, révolté par l’injustice de notre société. Et la majorité du groupe qui trouve injuste de perdre des points pour d’infimes excès, ou l’usage d’un téléphone nécessaire à leur métier (comment fait celui qui vient dépanner des gens coincés dans un ascenseur s’il ne peut répondre à l’appel au secours sur son téléphone ?), le retraité au fort accent de titi parigot qui, deux jours durant, ne cessera de râler contre le système français, les incohérences de la politique de sécurité routière, ou cet autre qui fait un stage pour la 4ème année consécutive parce qu’il n’arrive décidément pas à respecter les limitations de vitesse. Quant à M. la seule femme du groupe, au début taiseuse et comme repliée sur elle-même, elle finira par apostropher les quelques machos de l’équipe (« normal que les femmes aient moins d’accidents, elles n’aiment pas les grosses voitures »!), par leur rappeler que le droit, la morale, et la philosophie ne sont pas nécessairement synonymes. Et le tout s’achèvera dans de grands éclats de rires. M. a en tout cas de la matière pour un nouveau scénario…

La journée d’hier s’achevait par un concert attendu, lui, depuis longtemps par ses fans : Jonas Kaufmann chantait les Wesendonck-Lieder de Wagner au Théâtre des Champs-Elysées, avec l’Orchestre National de France dirigé par Daniele Gatti. Le ténor était bien là, mais on peut bien avouer qu’on est resté sur sa faim. Même si les instants de pure grâce n’ont pas manqué dans cet admirable cycle qu’on est plus souvent accoutumé à entendre chanté par une voix de femme. Mais les meilleurs ont aussi leurs faiblesses et leurs fatigues. Par chance il existe un très beau disque de ce cycle :

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https://www.youtube.com/watch?v=PJMG8alloJk

Musiciens du dimanche et des autres jours

Avant mon récent voyage, je n’étais allé qu’une seule fois en Chine, à Pékin. Pour le passage de l’an 2005. Il faisait très beau et très froid. J’avais déjà observé qu’en dépit de la température polaire, les jardins et les parcs étaient le terrain de jeu de dizaines de groupes de gymnastique, de tai shi, de chanteurs, de danseurs.

Le phénomène s’est encore amplifié, et ce qu’on a vu à Pékin (dans l’enceinte du Temple du Ciel) comme dans les jardins de Shanghai semble attester de la vivacité de ces traditions. Même si les jeunes n’y participent guère. Où et comment s’amusent-ils ? Je n’ai pas de réponse…

IMG_2451IMG_2452(Pékin, temple du Ciel)

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À Shanghai, le fait que le dimanche 1er mai et le lundi 2 mai étaient fériés cette année a sans doute amplifié (Premier mai en rouge) le phénomène.

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(Le monde en images : Shanghai)

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Dernière vue de Shanghai la nuit du Bund vers Pudong.

Le Voyage d’Orient

Je ne veux pas évoquer de nouveau ici le voyage qui m’a conduit en Chine et en Inde. Pour les images personnelles de ce périple : https://lemondenimages.me.

Il s’agit du Voyage d’Orient qui est proposé en juillet prochain à Montpellier et dans toute la grande région Languedoc Roussillon Midi Pyrénées (vivement un nom plus court !). Et de la joie éprouvée à découvrir une brochure qui résulte de mois de travail pour toute une formidable équipe, de relectures et d’arbitrages. Et finalement les félicitations des premiers lecteurs (« ça donne envie », « c’est clair et lisible »)

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On peut perfectionner à l’infini tous les modes virtuels de communication – et le Festival est plutôt en pointe de ce point de vue – réseaux sociaux, application, site – il n’en reste pas moins que le papier, l’écrit, la qualité d’une brochure, d’un programme, sont irremplaçables. Je suis fier de ce beau travail, qui laisse présager une édition 2016 très riche d’émotions et de rencontres humaines et musicales.

http://www.festivalradiofrancemontpellier.com / @FestivalRFMLR / #FestivalRF16 / #LeVoyagedOrient.

 

Les premiers jours de Pékin

En 1900, les membres de la société secrète chinoise du Yihetuan,  » Poings de justice et de concorde « , surnommés  » Boxers « , se soulèvent contre la présence étrangère, envahissent les missions catholiques, assiègent les légations étrangères et tuent des prêtres. Les puissances coloniales, présentes en Chine depuis la guerre de l’Opium de 1840, réagissent aussitôt, obligeant l’impératrice douairière Cixi à s’enfuir de Pékin. Voyageur sans pareil autour du monde, Pierre Loti (1850-1923), marin en mission, est témoin de cette répression. Il traverse les campagnes pour se rendre à Pékin où il fait deux séjours en 1900 et en 1901. Au sein de cette  » Babel inouïe « , il en profite pour découvrir une partie de la Chine jusque-là inconnue de l’Occident. Pour la première fois, ces lieux sacrés, temples, palais, jardins somptueux et énigmatiques, dévoilent leurs secrets. Entre l’horreur de la guerre et la splendeur de l’architecture chinoise, Pierre Loti contemple et admire des trésors longtemps ignorés : le temple du Ciel, la Cité interdite, le temple des Lamas, les fabuleux tombeaux des empereurs de Chine… et constate qu’une civilisation disparaît sous ses yeux.

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J’étais déjà venu à Pékin pour un court séjour à la toute fin 2004, et j’avais découvert émerveillé, sous un soleil éclatant et par une température de -10°, une ville qui n’était pas encore ce qu’elle se préparait à devenir pour les Jeux Olympiques de 2008, immense, inhumaine, polluée, avec des gratte-ciel à perte de vue.

Première étape de la tournée de l’Orchestre de la Suisse romande que j’accompagne, Pékin en ce mois d’avril 2016 ressemble à celle que Pierre Loti décrivait il y a plus d’un siècle : des trésors de moins en moins cachés, abîmés par l’invasion de la publicité, un tourisme de masse où la brutalité, le sans-gêne font la loi, le vrai sentiment qu’une civilisation millénaire disparaît définitivement sous nos yeux.

Le paradoxe c’est que la ville n’est pas plus accueillante qu’auparavant au visiteur, au touriste étranger. Dans les hôtels, les lieux touristiques, il est encore difficile de trouver un locuteur anglais, aucun taxi ne comprend un traître mot de la langue de Shakespeare, on se demande même parfois si certains lisent le chinois ! Et l’amabilité, la serviabilité sont des notions encore imaginaires. Quel contraste saisissant avec le Japon, et les souvenirs que j’ai d’une visite à Tokyo à l’été 2013 !

Attendons de voir demain comment le public, les mélomanes pékinois, reçoivent le concert que l’OSR leur propose avec Osmo Vänskä et Renaud Capuçon. On aura peut-être d’heureuses surprises…

Tout juste arrivés hier, nous en avons profité avec une amie journaliste qui ne connaissait pas l’endroit, pour aller au Temple du Ciel, au sud de la Cité interdite et de la célèbre place Tiananmen (que les Chinois orthographient plutôt Qianmen)

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(Ravissant panneau vidéo de publicité au pied de l’enceinte du jardin du temple du Ciel !)

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Drôle de prénom

Il est mort il y a exactement 80 ans, le 18 avril 1936. J’ai toujours trouvé qu’il avait un prénom amusant à l’oreille d’un francophone et plutôt inadapté à sa fonction de compositeur : Ottorino Respighi.

Le plus surprenant c’est que le plus grand compositeur italien du début du XXème siècle, le contemporain de Ravel, Roussel, Szymanowski et bien d’autres, reste méconnu, en tous cas une grande partie de son oeuvre, même si le déficit discographique se comble peu à peu  (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ottorino_Respighi).

Respighi est d’abord un fabuleux maître de l’orchestre, à l’instar de Rimski-Korsakov (auprès de qui il a étudié) et Ravel. Il l’a prouvé dans ses propres compositions, mais aussi en réalisant nombre d’orchestrations scintillantes de « danses et airs antiques », de pièces de Rossini (qui ont donné les ballets Rossiniana et La boutique fantasque). Ses ouvrages lyriques restent en grande partie à redécouvrir.

Je ne serai pas très objectif en recommandant très vivement les disques réalisés par John Neschling avec l’Orchestre philharmonique royal de Liège (pour BIS), deux sont déjà parus, deux autres déjà enregistrés. La critique a salué unaniment ce qui, on l’espère, constituera une intégrale symphonique (Neschling avait auparavant enregistré la trilogie romaine avec Sao Paulo)

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Le Festival de Radio France et Montpellier avait ressuscité l’un des opéras de Respighi en 2004

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Pour ce qui est des trois oeuvres les plus célèbres, Les Pins de Rome, Les Fontaines de Rome, Fêtes romaines, les très bonnes versions sont légion. Cette prise de concert à Osaka en 1984 rappelle que Karajan était à son affaire :

https://www.youtube.com/watch?v=jYHDr2epOTg

Mais la très bonne surprise, inespérée tant elle paraissait improbable, est la réédition d’une version devenue mythique à force d’être introuvable, dans une splendide prise de son, celle d’un élève de Respighi, le chef italien Antonio Pedrotti (1901-1975) à la tête de l’orchestre philharmonique tchèque (Supraphon). Un indispensable de toute discothèque.

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Tripatouillage royal

Depuis que les Harnoncourt, Leonhardt, Brüggen nous ont appris à revenir aux sources de la musique, à une approche « historiquement informée » du répertoire du passé, on s’est fait à l’idée d’une certaine authenticité, voire d’une certaine pureté originelle de ces grandes partitions baroques ou classiques. Ne lit-on pas couramment que ces grands interprètes défricheurs ont débarrassé ces oeuvres de leurs « scories », qu’ils les ont nettoyées de l’empois de la tradition ?

Et puis voilà qu’hier on découvrait – dois-je rappeler ici que je ne suis pas musicologue, ni spécialiste ? on ne m’en voudra pas, je l’espère, d’une certaine naïveté ! – qu’on se moquait bien du respect des partitions originales, quand il s’agissait en fonction des circonstances, de transformer, ajouter, retrancher, adapter au goût du jour, ces mêmes partitions. On a donc entendu, à l’Opéra royal du château de Versailles, une version très particulière de l’opéra de Lully, Persée.

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Benoît Dratwicki n’eût pas donné quelques explications au début du concert, il est bien probable que l’essentiel de l’assistance très versaillaise n’eût pas remarqué ni la mention version 1770, ni que le surintendant de la musique de Louis XIV, le grand Jean-Baptiste Lully, était mort de sa belle mort en 1687, soit 83 ans plus tôt !

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Car, contrairement à l’idée qu’on peut s’en faire aujourd’hui, aucune oeuvre, surtout donnée avec succès, n’était considérée comme intouchable. « Le patrimoine …est maintenu au goût du jour par des retouches musicales et poétiques de plus en plus importantes… Dès le milieu des années 1700, l’habitude est prise de retrancher ou d’ajouter des airs, après 1750 ces remaniements deviennent beaucoup plus systématiques, au point que certains auteurs y consacrent une bonne partie de leur temps et perçoivent une rémunération spécifique pour « mettre à jour les opéras anciens » (Benoît Dratwicki).

Le Persée représenté, pour l’inauguration de l’Opéra royal en 1770, à l’occasion du mariage du futur Louis XVI et de l’archiduchesse Marie-Antoinette d’Autriche, n’a plus grand chose à voir avec celui de la création en 1682. Dès 1768, Antoine Dauvergne, Bernard de Bury, François Rebel, tous musiciens appointés à la Cour, ont entrepris de profonds remaniements, tandis que le secrétaire de l’Académie royale de Musique, Nicolas Joliveau « adapte » le livret original de Quinault.

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IMG_2367Bref, on a entendu hier une sorte d’OVNI musical, comme un remix de Lully, Rameau, Gluck, Haydn. Tout cela n’était pas pour déplaire au maître d’oeuvre de cette résurrection – qui fera l’objet d’un CD chez Alpha – l’éternel curieux et gourmand Hervé Niquet, et à sa fantastique équipe – choeur et orchestre – du Concert spirituel , rejointe par 11 jeunes solistes caméléons capables de se prêter à toutes les variations stylistiques d’une partition aussi composite (http://www.chateauversailles-spectacles.fr/spectacles/2016/lully-persee-version-1770).

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Camélia ou la discorde

Je dois bien avouer que je connais très peu de sa vie et de son oeuvre. Sa présence et son chant lors de l’hommage national aux victimes des attentats de novembre 2015 m’avaient touché :

Le microcosme de la musique classique s’enflamme depuis quelques heures : Camélia Jordana a été nommée, au titre des personnalités qualifiées, au conseil d’administration de l’Ensemble Intercontemporain (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ensemble_intercontemporain).

Extraits choisis des échanges et commentaires sur Facebook :

« Suite au post publié hier sur mon mur à propos de la nomination au conseil d’administration de l’Ensemble Intercontemporain fondé en 1976 par Pierre Boulez qui exécrait la muzak à deux temps, de la chanteuse de variétés héroïne de « Nouvelle Star » Camélia Jordana, mon ami M.D.  a écrit à la Communication de l’EIC pour avoir la réponse à ce qui apparaissait comme un mauvais poisson d’avril avec retard à l’allumage dans cet aréopage du conseil d’administration des musiques contemporaines. 
« Cher Monsieur, Le conseil de l’Ensemble intercontemporain est composé, entre autres, de personnalités nommées par le ou la Ministre chargé(e) de la Culture, pour une durée de trois ans.
Camelia Jordana et Catherine Tasca ont été nommées lors du dernier renouvellement du conseil au début de l’année 2016.
Cordialement »
A quoi M.D. a répondu : 
« Merci pour votre réponse. C’est juste sidérant ! Mais où sommes-nous, sur quelle planète, dans quel monde ? Ubu à la culture. Ce Gouvernement nous aura tout fait. » 

Commentaire : Parce que vous pensez qu’Henri Loyrette et Brigitte Lefevre ont plus à dire sur la musique du XXe siècle et la création contemporaine, sur la place de l’Intercontemporain dans la vie musicale français et internationale que cette jeune chanteuse de variétés ? Non ! Mais ils ont l’honorabilité de leurs précédentes fonctions comme sauf conduit… et je sens poindre un peu de mépris social et culturel dans vos propos… avez-vous râlé quand Lefevre a été nommée présidente de l’Orchestre de chambre de Paris ? Non… et pourtant elle ne connait rien à rien sur le plan professionnel de ce qu’elle préside…. Avez-vous pesté quand Loyrette a été nommé ? Non…. et pourtant son domaine c’est les arts plastiques…. Ils sont incompétents tout comme elle mais ils ont le vernis… de l’honorabilité qui fait défaut à Camélia Jordan… Râler ? Oui ! et pas qu’un peu ! Mais… il faut râler de façon circonstanciée sans donner l’impression du mépris social et culturel.

 Autre commentaire : Tout est dans le symbole. Il n’y a aucun mépris dans les jugements négatifs sur cette nomination. B. Lefèvre est une autorité culturelle par le seul fait qu’elle a dirigé la danse à l’Opéra. Loyrette dirige un des plus grands musées du monde. Ça ne leur donne peut-etre pas de spécialité pointue sur la musique contemporaine mais enfin ils ont une compétence avérée en gestion d’institutions culturelles de haut niveau. Je n’ai rien contre cette toute jeune femme de 24 ans mais enfin ses seuls titres de « gloire » tiennent en deux ou trois chansonnettes bébêtes. A ce compte-là, pourquoi pas Didier Super (« arrête de t’la péter ») à l’Orchestre de Paris? Aurait-on imaginé, en d’autres temps que Sheila ou Mireille Mathieu entrent au CA du Domaine Musical ou Bach – pas Johann Sebastian mais celui de « l’ami Bidasse » aux Concerts Lamoureux?
Quelques remarques générales : d’abord préciser que, pour la jeune chanteuse, comme pour tous les membres de ce type de conseil d’administration, l’activité est bénévole et ne donne lieu à aucune rémunération. Ensuite rappeler qu’un C.A. n’a aucun rôle dans la direction artistique, la programmation, le projet culturel de l’organisme en question.
Souligner enfin que la moyenne d’âge de ces conseils d’administration n’est pas des plus basses, et qu’on y retrouve souvent les mêmes figures, certes expérimentées et blanchies sous le harnais. L’idée de rajeunir un peu ces cénacles n’est pas en soi contestable, on a bien compris que le doute porte sur le choix des personnes…
Oserai-je dire que je suis plus amusé (par le choix et la polémique qui s’en est suivie) que scandalisé…?

La grande pâque russe

Je me rappelle avoir dû corriger un texte de programme de concert d’une prestigieuse salle parisienne qui mentionnait « La grande Pâques russe » (sic). Le rédacteur me soutenait que Pâques n’avait qu’une orthographe, celle que les catholiques ont adoptée pour la fête religieuse célébrée ce dimanche (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pâques).

En l’occurrence, il s’agit bien du poème symphonique de Rimski-Korsakov, intitulé : Светлый праздник. La première édition (1890) chez Bélaieff précise, en français : La Grande Pâque Russe. Ouverture sur des thèmes de l’Église russe pour grand orchestre.

C’est une musique de concert, évidemment pas de liturgie. Mais Rimski-Korsakov sait magnifier la tradition chorale ancestrale de l’église orthodoxe russe.  Comme l’ont fait nombre de compositeurs, moins connus dans nos contrées, qui se sont voués à l’art choral comme Sviridov, Bortnianski ou Chesnokov :

En 2011, les fêtes de Pâques catholique et orthodoxe coïncidaient, et j’étais alors en voyage en Russie, dans ce qu’on appelle l’anneau d’or, les villes historiques (Souzdal, Vladimir, Rostov le Haut, Iaroslavl, Kostroma, etc.). J’avais eu la chance d’assister, par hasard, à la célébration pascale dans la cathédrale de Iaroslavl, en présence de plusieurs hauts dignitaires de l’Eglise orthodoxe de Russie.

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Le surlendemain j’étais à Zagorsk (aujourd’hui Sergiev Possad), visitant la Laure de la Trinité Saint-Serge qui est pour les Russes orthodoxes ce que Saint-Pierre de Rome est aux catholiques.

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Et j’ai pu saisir quelques images, qui disent la ferveur intacte de ceux qui n’ont jamais cessé de croire, même pendant le glacis soviétique.