Le chant merveilleux de Marianne

Après le show de Yuja W. lundi (lire Le phénomène Yuja) j’avais plusieurs raisons de revenir ce jeudi au Festival Radio France à Montpellier. Une œuvre qu’on ne vient jamais écouter d’une oreille distraite. Un chef dont j’avais chroniqué, il y a exactement deux ans pour Bachtrack les premiers pas à la tête de l’orchestre dont il est désormais le directeur musical – le Capitole de Toulouse – et parmi les deux chanteuses solistes que requiert la 2e symphonie de Mahler, une artiste que j’aime profondément, Marianne Crebassa.

Marianne était de la première édition du Festival dont j’ai eu la responsabilité – en 2015 elle ressuscitait Fantasio d’Offenbach- et de la dernière en 2022, un récital admirable et les sublimes Sea Pictures d’Elgar qu’elle chantait lors d’un concert resté fixé dans toutes les mémoires (lire Tempête en mer)

C’est tout le mystère d’une voix et tout l’art d’une grande chanteuse que de vous saisir aux tripes, au coeur, à tout ce qu’il y a de plus intime en soi. Kathleen Ferrier, Maureen Forrester ont été mes premiers éveils à ce qu’on appelle commodément la voix de « contralto ». Marianne Crebassa est sur la même liste. Et depuis dix ans que je la suis – lire ma dernière chronique à son propos sur Bachtrack (Marianne Crebassa bouleverse l’Opéra-Comique), je la retrouve plus belle encore, d’un métal vocal qui me renverse et m’étonne. Dans la 2e symphonie de Mahler, plongée au coeur de l’orchestre, son chant n’a pas fini de me hanter.

Il faut évidemment réécouter tout le concert dirigé par Tarmo Peltokoski à la tête de « son » orchestre du Capitole de Toulouse et du fabuleux choeur basque Orfeo Donostiarra (France Musique). Mention pour François-Xavier Szymczak qui présentait le concert : c’est toujours parfait !

Comme j’étais venu au concert, dégagé de toute responsabilité et de toute obligation, je ne vais pas ici faire la critique de ce que j’ai entendu. Je n’ai pas tout aimé – mais est-ce possible dans une oeuvre aussi considérable ? – j’ai toujours admiré ce que fait ce chef de 25 ans (!!) et je sais qu’avec le temps et la liberté que donne l’expérience, ses interprétations de Mahler seront de celles qui s’impriment durablement dans la mémoire.

Et toujours mes humeurs et bonheurs sur mes brèves de blog

Le retour à Schubert

Mon week-end a été largement nourri d’écoutes de Schubert – en dehors des funérailles papales (voir brevesdeblog : Pauvre François)

D’abord parce que j’ai reçu trois CD sortis il y a cinq ans : je connaissais des disques d’Andrea Lucchesini, qui enregistra pour EMI dans sa jeunesse Beethoven, Liszt ou Chopin, mais je n’avais pas prêté attention à ces Schubert.

J’y retrouve tout ce que j’attends dans ces dernières sonates de Schubert, en particulier la D 960 (lire Quand ça se termine mal pour Schubert)

Pure merveille que ce finale de la dernière sonate, qui respire, écoute, s’ouvre à la poésie de l’infini :

Et cet adagio si simple, si pur, de la D 959 ! On n’en sort pas indemne.

Réécouter Böhm

J’avais oublié de réécouter la Neuvième symphonie de Schubert telle que l’a dirigée Karl Böhm à Dresde le 12 janvier 1979. Prodigieux non ?

Samuel Hasselhorn

Voici plusieurs mois que je lis des choses très flatteuses sur le baryton allemand Samuel Hasselhorn, sans que j’aie eu la possibilité de l’entendre en concert. Ce qu’écrit Sylvain Fort dans Diapason à propos de son dernier disque m’a convaincu de rattraper mes retards d’écoute.

J’ai toujours cru que l’interprétation de « Die junge Nonne » par Kathleen Ferrier était indépassable. Celle de Samuel Hasselhorn la rejoint dans mon panthéon personnel. Les deux Alleluia qui concluent ce Lied me laissent toujours sans mots…

Tristes constats et Renaissance

J’ai, depuis quelques jours, l’humeur morose, à l’image du ciel pourri de ce début d’été. Ce n’est pas pourtant pas mon habitude, surtout à l’approche d’une échéance électorale qui devrait raviver mon goût pour la politique. J’ai commencé un texte, je n’en trouve pas l’issue, je ne sais pas si je l’achèverai avant le 30 juin.

Tristes constats

Quand une figure aussi reconnue du monde de la culture, Ariane Mnouchkine, fait un redoutable constat devant la montée inexorable de l’extrême droite :

« Je nous pense, en partie, responsables, nous, gens de gauche, nous, gens de culture. On a lâché le peuple, on n’a pas voulu écouter les peurs, les angoisses. Quand les gens disaient ce qu’ils voyaient, on leur disait qu’ils se trompaient, qu’ils ne voyaient pas ce qu’ils voyaient. Ce n’était qu’un sentiment trompeur, leur disait-on. Puis, comme ils insistaient, on leur a dit qu’ils étaient des imbéciles, puis, comme ils insistaient de plus belle, on les a traités de salauds ». Elle continue :  « pas certaine qu’une prise de parole collective des artistes soit utile ou productive », car « une partie de nos concitoyens en ont marre de nous : marre de notre impuissance, de nos peurs, de notre narcissisme, de notre sectarisme, de nos dénis ».

Une longue interview croisée dans Le Monde d’Eric Ruf, l’administrateur de la Comédie-Française, et de Tiago Rodriguez, le directeur du Festival d’Avignon, ne dit pas autre chose : « La culture n’a plus aucun poids dans le débat politique »

Je m’effare moi-même en relisant un billet écrit le 25 mars 2017 : L’Absente.

Ils sont partis avant nous

Nous restons sidérés par la disparition, si jeune, de Jodie Devos (voir Jodie dans les étoiles), pointant l’injustice d’une maladie, le cancer, qui l’a emportée en quelques mois.

(Le 15 juillet 2022 à Montpellier Jodie Devos chantait Ophélie dans Hamlet d’Ambroise Thomas avec le ténor John Osborn (Hamlet) et le chef Michael Schonwandt)

Elle n’est pas malheureusement pas la seule chanteuse à avoir subi le même sort. Il y a vingt ans, la soprano britannique Susan Chilcott mourait à tout juste 40 ans.

Qui a pu oublier la destinée tragique de la contralto Kathleen Ferrier, morte elle aussi à 40 ans ?

À chaque fois que je pleure une disparition, je me récite le sublime poème de Friedrich Rückert que Mahler a mis en musique dans ses Kindertotenlieder, et j’écoute Kathleen Ferrier…

Oft denk' ich, sie sind nur ausgegangen,
Bald werden sie wieder nach Hause gelangen,
Der Tag ist schön, o sei nicht bang,
Sie machen nur einen weiten Gang.

Ja wohl, sie sind nur ausgegangen,
Und werden jetzt nach Haus gelangen,
O, sei nicht bang, der Tag ist schön,
Sie machen den Gang zu jenen Höh'n.

Sie sind uns nur voraus gegangen,
Und werden nicht hier nach Haus verlangen,
Wir holen sie ein auf jenen Höh'n
Im Sonnenschein, der Tag is schön

Souvent je pense qu’ils sont seulement partis se promener,
Bientôt ils seront de retour à la maison.
C’est une belle journée, Ô n’aie pas peur,
Ils ne font qu’une longue promenade.

Mais oui, ils sont seulement partis se promener,
Et ils vont maintenant rentrer à la maison.
Ô, n’aie pas peur, c’est une belle journée,
Ils sont seulement partis se promener vers ces hauteurs.

Ils sont seulement partis avant nous,
Et ne demanderont plus à rentrer à la maison,
Nous les retrouverons sur ces hauteurs,
Dans la lumière du soleil, la journée est belle sur ces sommets.

Eric Tappy

La disparition le 11 juin dernier du magnifique ténor suisse Eric Tappy (1931-2024) a été éclipsée par celle de Jodie Devos. Diapason lui rend l’hommage qui lui est dû. Je l’avais moi-même évoqué lors de la disparition de Rachel Yakar (lire Rachel et Zémire).

Les voici l’une et l’autre dans un extrait d’un Couronnement de Poppée mythique, dirigé par Nikolaus Harnoncourt.

Renaissance

Voulant échapper à ces tristes torpeurs, j’ai profité de la visite d’un ami étranger à Paris, pour visiter – c’était le dernier jour ! – une magnifique exposition L’invention de la Renaissance à la Bibliothèque Nationale de France dans ses locaux historiques de la rue de Richelieu.

La grande salle ovale de lecture était comble ce dimanche matin : des bacheliers qui préparaient l’épreuve de philo ?

La galerie Mazarin

(Copie du portrait de Pétrarque peint par Andrea del Castagno au musée des Offices à Florence)

(Copie du portrait de Virgile conservé au Musée du Louvre)

Le nombre et la beauté des livres et des manuscrits exposés fait regretter que cette exposition ne dure pas plus longtemps. On a surtout envie de lire et relire les grandes figures de la Renaissance, en premier lieu Pétrarque.

La Commedia, Dante Alighieri (1481)

Triomphes de Pétrarque (1503)

Apollon et Daphnis, Pérugin (1490)

Vendredi saint

Voilà des lustres que je ne célèbre plus la Semaine sainte – depuis mon enfance et mon adolescence poitevine (lire Retour à Poitiers) sans doute – et voici que, séjournant en terre musulmane durant le ramadan, j’éprouve le besoin de retrouver au moins certaines émotions musicales liées notamment à la Passion.

Comme celle que me procura l’un de mes premiers disques (La découverte de la musique), un double album Kathleen Ferrier :

Est-ce la raison pour laquelle j’ai toujours préféré la Passion selon Saint-Jean à la Saint-Matthieu ? Et que je garde toujours aussi vif dans ma mémoire le souvenir d’un concert du si regretté Michel Corboz et de ses forces lausannoises ?

Quoique le choeur introductif de la Passion selon Saint-Matthieu selon Otto Klemperer (Eloge de la grandeur) me bouleverse à chaque écoute :

Est-on si loin de Bach avec cette musique du Vendredi Saint de Parsifal de Wagner, dans cette version si chère à mes oreilles, Rudolf Kempe dirigeant l’orchestre philharmonique de Vienne ?

Et puis il y a une oeuvre, découverte récemment, à l’occasion d’un CD dont j’avais fait la critique pour Forumopera : Miroir de peine du compositeur néerlandais Henrik Andriessen (1892-1981). Voici en substance ce que j’écrivais : « Est-on plus heureux à l’écoute du cycle de cinq brèves mélodies qui ouvre le disque ? La notice – indigente – du livret n’en dit quasiment rien, et ne livre aucun des cinq poèmes, hormis les titres – Agonie au jardin, Flagellation, Couronnement d’épines, Portement de croix, Crucifixion – qui évoquent la Passion du Christ. Pas un mot de l’écrivain Henri Ghéon, étrange personnage resté dans la – petite – histoire de la littérature française pour avoir été l’ami « intime » de Gide, catholique fervent et fervent promoteur de l’homosexualité (auteur de la Vie secrète de Guillaume Arnoult, qui inspirera le Corydonde Gide) On sait seulement que ce Miroir de peine est écrit par Henrik Andriessen en 1923 pour voix aiguë et orgue, puis orchestré en 1933. Les influences de Diepenbrock, Caplet ou Pierné y sont audibles« .

Entre-temps j’ai trouvé une très belle version, remarquablement chantée par Roberta Alexander de ce Miroir de peine, qui décrit la Passion du Christ :

Une mort anonyme

Samedi après-midi. Les gros titres des journaux de la mi-journée, des histoires tragiques : les victimes de l’incendie de la tour Grenfell de Londres, la visite de réconfort de la reine d’Angleterre et de son petit-fils le prince William, les rebondissements dans l’affaire du petit Grégory (interviews nauséabondes de la famille).

Et juste en face de chez moi, une voiture de gendarmerie stationnée depuis le début de la matinée. Devant le garage d’une belle maison aux volets rouges.

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Une terrasse/jardin en surplomb de la rue, de belles roses anciennes. L’apparence d’une demeure entretenue.

Depuis quelque temps, la maison semblait endormie. Non qu’elle fût jamais animée. Mais  depuis que je m’étais installé dans la mienne en face, j’avais pris l’habitude d’apercevoir une silhouette féminine sans âge, cheveux gris filasse, à la fenêtre du premier étage, toujours ouverte en toute saison. Parfois, dans une robe de chambre défraîchie, vieux rouge comme les volets de la maison, toujours la même, je la voyais parcourir la terrasse et la surprenais à m’épier. Mais dès que je me manifestais, par un salut même à distance, elle tournait la tête et les talons.

Elle paraissait vieille, très vieille, comme fatiguée de la vie, recluse, repliée dans sa solitude. Je me faisais tout un cinéma de cette mystérieuse voisine. Ne dit-on pas que, dans mon village, de vieilles actrices finissent leurs jours dans l’oubli ? À cinquante mètres de la maison natale d’Yvonne Printempsà quelques encablures du petit cimetière de Valmondois où reposent d’anciennes gloires du music hall et de la télévision comme Pierre Sabbagh et Catherine Langeais, c’était plausible.

Mû par un étrange pressentiment, je  me décidai tôt ce matin à appeler la gendarmerie. S’il était arrivé quelque chose à ma voisine ? à moins qu’elle ne soit partie en voyage ? ou qu’elle ait été hospitalisée ? Mais je ne pouvais pas rester plus longtemps spectateur de cette maison close, inanimée.

La gendarmerie prit mon message très au sérieux, puisque quelques minutes après mon appel, deux jeunes pandores et une gendarmette sonnaient chez moi, enquêtant immédiatement dans le voisinage et les commerces locaux. Personne ne connaissait l’habitante de la maison. La boîte aux lettres débordait. Le téléphone fixe ne répondait pas. Pas de téléphone portable. Les pompiers furent appelés à la rescousse, pour accéder à la terrasse et procéder à l’ouverture des portes et fenêtres de la maison.

Le temps soudain parut s’étirer. Comme dans un film d’Hitchcock. De là où j’étais, je ne pouvais qu’apercevoir des ombres, parfois un casque de pompier, des mains gantées aussi. Je ne voulais pas non plus jouer les voyeurs « comme à la télé », mais je parvenais mal à me concentrer sur mes travaux de jardinage.

Midi sonnait lorsque les pompiers redescendirent, repliant leurs échelles, remisant leurs casques, et prirent congé de leurs collègues gendarmes. Un peu d’effervescence autour, quelques rares voisins étonnés par la présence de la maréchaussée (« Il y a eu des cambriolages dans le coin ? »).

De nouveau la gendarmette du groupe sonna à mon portail. Pour relever mon identité, mes coordonnées, puisqu’on aurait certainement besoin de m’entendre. Il était bien arrivé quelque chose à ma voisine inconnue, elle avait été trouvée morte au pied de son lit. Une jeune femme médecin-légiste arrivée en début d’après-midi devait déterminer les circonstances et la date du décès, mais, même exprimés avec pudeur, les mots des jeunes gendarmes disaient éloquemment le choc éprouvé devant le spectacle macabre qui s’était offert à leur vue lorsqu’ils avaient pénétré quelques heures plus tôt derrière les volets rouges.

Un café serré pour les réconforter, et leur permettre de tenir le coup pour les heures à venir : la découverte d’un cadavre, toutes les formalités qui s’ensuivent, l’enquête etc.

Et voilà comment une femme, moins vieille que je ne croyais, 75 ans, veuve depuis dix ans, sans enfants, sans amis, brouillée semble-t-il avec un frère vivant loin d’ici, meurt dans l’anonymat, la solitude, le silence, à quelques mètres de voisins qu’elle ne fréquentait pas et qui respectaient (?) ou n’osaient franchir cette distance. Une mort comme des milliers d’autres. La mort de ma voisine inconnue…

 

La découverte de la musique (II) : France-Allemagne

L’année de mes 15 ans, je m’en fus passer une partie de l’été chez mon « correspondant » allemand, Henning, dans le village de Drevenack, près de Wesel dans la région occidentale de la Ruhr, non loin de la frontière néerlandaise. Souvenir d’un très agréable séjour, et utile à mon éducation musicale.

Les parents devaient être au moins un peu mélomanes, puisque la maison familiale était équipée d’une chaîne stéréo Dual (à l’époque une marque célèbre et bien cotée), que j’eus tôt fait de m’approprier entre deux excursions, courses à vélo et autres activités vacancières. J’y découvris d’abord deux albums achetés en solde dans je ne sais plus quelle boutique locale : un double 33 tours rouge grenat consacré à Kathleen Ferrier, et un disque RCA du 2ème concerto de Brahms joué par Sviatoslav Richter avec l’orchestre symphonique de Chicago dirigé par Erich Leinsdorf.

Certe version miraculeuse, hors du monde, de ce Lied de Schubert ne m’a plus jamais quitté et continue de m’émouvoir aux larmes à chaque écoute (les deux Alleluia de la fin…)

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Quant à la version Richter/Leinsdorf, je lui voue toujours une affection particulière même si je me suis attaché, depuis, à bien d’autres interprétations. C’était aussi alors une découverte du pianiste russe, et le début d’une immense admiration.

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Brahms encore, une excursion à Detmold et une visite du château, où j’avais pris avec mon Instamatic 50 une photo du piano que Brahms jouait pour son usage personnel durant les deux ans qu’il y passa dès 1857, où il écrivit notamment ses deux sérénades et une large partie de son 1er concerto pour piano.

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J’ai encore le souvenir d’un disque Schubert et de ma découverte de sa 5ème symphonie, si tendre et charmante, je n’ai pas retenu le chef ni l’orchestre. J’attendrai quelques années avant de trouver ma version de référence, celle de Thomas Beecham.71ZVbfei08L._SL1095_

 

 

Ils nous ont précédés

Pour beaucoup d’entre nous, ce 1er avril n’était pas un jour à se réjouir. C’était,  pour plusieurs familles belges, les obsèques des victimes des attentats du 22 mars à Bruxelles. Et comment supporter de dire un dernier adieu, selon la formule convenue, à celles et ceux qui étaient des amis, des relations de travail, qui avaient la vie devant eux…

Pensant à ces jeunesses amputées, à ces familles brisées, je ne pouvais m’empêcher de me repasser ces terribles vers de Rückert mis en musique par Mahler, dans ses Kindertotenlieder :

Oft denk’ ich, sie sind nur ausgegangen!
Bald werden sie wieder nach Hause gelangen! Der Tag ist schön! O sei nicht bang!
Sie machen nur einen weiten Gang!

Jawohl, sie sind nur ausgegangen
Und werden jetzt nach Hause gelangen! O, sei nicht bang, der Tag is schön!
Sie machen nur den Gang zu jenen Höh’n!

Sie sind uns nur vorausgegangen
Und werden nicht wieder nach Hause gelangen! Wir holen sie ein auf jenen Höh’n
Im Sonnenschein!
Der Tag is schön auf jenen Höh’n!

Souvent je pense qu’ils sont seulement partis se promener,
Bientôt ils seront de retour à la maison.
C’est une belle journée, Ô n’aie pas peur,
Ils ne font qu’une longue promenade.

Mais oui, ils sont seulement partis se promener,
Et ils vont maintenant rentrer à la maison.
Ô, n’aie pas peur, c’est une belle journée,
Ils sont seulement partis se promener vers ces hauteurs.

Ils sont seulement partis avant nous,
Et ne demanderont plus à rentrer à la maison,
Nous les retrouverons sur ces hauteurs, 
Dans la lumière du soleil, la journée est belle sur ces sommets.

Les moutons du Sussex sont en deuil

Reçu hier un long message, que je m’autorise à reproduire pour l’essentiel :

« Sir George Christie est mort il y a trois jours. Tristesse…L’avais-tu rencontré à Glyndebourne ? Très grand monsieur ! La nouvelle est passée presque inaperçue en France… à part une dépêche sur France-Musique recopiant le blog de Norman Lebrecht. Je suis sûr que, dans cent ans, l’oeuvre de George sera regardée et jugée comme beaucoup plus importante et déterminante que celle de feu Gérard Mortier. Il a fait débuter tant de chanteurs, metteurs en scène et chefs dans son théâtre quand il a pris les rênes de son opéra : Joan Sutherland, Felicity Lott, Simon Rattle, Luciano Pavarotti, Janet Baker, etc. C’est là qu’il permit aux Peter Sellars, Hanish Kapoor, Deborah Warner, David Hockney de s’exprimer pleinement, sans céder à la mode de qui/quoi que ce soit ! Il a construit son nouveau théâtre sans un centime d’argent public ! Il a créé les tournées de Glyndebourne, où nous avons tous eu notre chance, et son soutien permanent ! Il a grandi avec Fritz Busch, Rudolf Bing, travaillé avec Kathleen Ferrier, Benjamin Britten, Ernest Ansermet, Rafael Kubelik, Georg Solti (très mauvais souvenir)…

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Il était fidèle en amitié, voyageait sans cesse, écoutait, conseillait qui le voulait, ouvrait sa maison à tous ceux qu’il aimait ! Un grand seigneur des arts est parti… Tristesse… »

Celui qui m’écrit ces lignes ajoute des souvenirs plus personnels, qui resteront… personnels !

C’est le père de George, John Christie, qui avait fondé Glyndebourne et sa légende en 1934, c’est le fils de George, Gus, que j’ai rencontré souvent, qui est aujourd’hui l’âme de ce festival unique au monde, dans la campagne du Sussex, à quelques miles de Lewis et Brighton.

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(Gus et George Christie devant la maison familiale de Glyndebourne)

ImageImage(http://en.wikipedia.org/wiki/Glyndebourne_Festival_Opera)