Diète estivale

Comme me le disait le rédacteur en chef de Bachtrack (édition française) au début de l’été : « Les vacances ça fait du bien aussi ». Donc je fais une sorte de diète de festivals cette année. Avant Montpellier jusqu’en 2022, je faisais un tour à Avignon, Aix-en-Provence, Orange, et après Montpellier j’étais comme vidé de toute envie de spectacle ou de concert. C’est ainsi que j’ai délaissé depuis longtemps La Roque d’Anthéron ou Salon-de-Provence, où j’ai pourtant de merveilleux souvenirs

Ici même j’ai rendu compte des deux seuls concerts auxquels j’ai assisté en juillet (lire Le chant merveilleux de Marianne et Le phénomène Yuja). Les prochains seront pour la dernière semaine d’août.

Ma nouvelle fonction de reviewer (je préfère finalement le terme anglais au prétentieux « critique musical » français) m’a permis depuis deux ans de visiter des festivals que je ne connaissais pas ou mal.

À Colmar – où je n’étais plus revenu depuis trente ans – je découvrais, en 2023, la programmation du nouveau directeur artistique, mon ami Alain Altinoglu, et surtout ce très jeune chef finlandais, dont tout le microcosme musical faisait grand cas, Tarmo Peltokoski (Le début d’une belle histoire entre Peltokoski et le Capitole de Toulouse).

Ça c’était début juillet, et à la fin du même mois, je m’étais laissé embarquer à Marvão,: « Les lieux sont spectaculaires : à 2h30 de route à l’est de Lisbonne, un promontoire rocheux culminant à 900 mètres et dominant toute la plaine de l’Alentejo, à quelques kilomètres de l’Espagne. » (lire Pépites portugaises). Dans un lieu improbable, j’avais découvert un chef – Dinis Sousa – un orchestre – l’Orquestra XXI – et entendu une formidable Cinquième de Mahler (Un grand Mahler) le 29 juillet 2023.

Je découvre sur YouTube cette captation faite le lendemain à Lisbonne :

Alain Lompech est allé à Marvão cette année. Son enthousiasme à lire sur Bachtrack : Marvão, royaume de la musique et des musiciens rejoint et ravive les souvenirs de cette expédition.

En 2024 j’étais retourné à Colmar, cette fois pour y entendre le maître des lieux avec ses musiciens de La Monnaie et fin août, dans une ville que je connais presque par coeur et que je pensais bien peu festivalière – Nîmes – j’avais entendu la joyeuse équipe réunie autour d’Alexandre Kantorow

Mais quand au cours de mes balades – (Loin du monde), je vois des noms familiers affichés au programme de telle abbaye, de telle église, quand je lis leur actualité sur Instagram, j’ai un peu l’impression de prolonger d’abord une amitié, ensuite des souvenirs, tant de souvenirs partagés.

Thomas Ehnco était hier soir à La Romieu, que je visitais le 18 juillet dernier.

Le cloître de la Collégiale de La Romieu (Gers)

Certains souvenirs me poursuivent et me poursuivront longtemps, comme celui de Jodie Devos, ce 15 juillet 2022 à Montpellier…

Message personnel

Le 25 juillet Laurent Guimier – qui fut un éphémère mais formidable collègue à Radio France – écrivait sur un réseau social que je ne fréquente plus guère : » Il est amoureux. Tout le temps. Amoureux de la musique, de la radio, des soirs à l’Auditorium, au 104 et des festivals ensoleillés. Amoureux d’une équipe qui pense et fabrique sa radio avec passion. Alors moi j’aime @mvoinchet et tout ce qu’il fait pour @francemusique« 

Le 14 juillet 2015, je voyais débarquer à Montpellier ce Marc Voinchet que je ne connaissais que de loin. Il venait d’être pressenti par Mathieu Gallet pour prendre la direction de France Musique, et nous avions passé une bonne partie de la soirée à évoquer cette chaîne qui avait tant compté pour moi (30 ans ont passé) et qui était alors en pleine crise. J’avais parié avec Marc qu’il dépasserait le score de tous ses prédécesseurs – dont la durée de vie à cette fonction n’excédait pas deux ou trois ans ! –

Marc a traversé de redoutables épreuves personnelles ces derniers mois. Je l’ai vu à Montpellier il y a quelques jours. Je sais qu’il a besoin de tous nos messages, de toute notre amitié. Je l’embrasse.

Les humeurs du moment toujours à lire sur mes brèves de blog

Un vrai festival

Qu’est-ce que ça fait du bien d’assister à un vrai festival, de partager débats, discussions, moments de musique et d’amitié qui réchauffent le coeur autant que les oreilles ! C’est ce qui m’est arrivé le week-end dernier au Printemps des Arts de Monte-Carlo, et dont j’ai essayé de rendre compte pour Bachtrack.:

Le Bruckner « objectif » de Jukka Pekka Saraste

Venise et Vienne à Monte Carlo

« Un mot d’abord d’un festival qui porte bien et haut son nom, qui n’est pas juste une addition de grands noms et de tubes du classique, qui rempliraient à coup sûr le Forum Grimaldi ou l’Auditorium Rainier III, mais un patchwork astucieux de rencontres d’avant (les before) ou d’après (les after) concert, de soirées de musique de chambre, de récitals, de concerts symphoniques, et à l’intérieur de ces formats habituels, des surprises, des aventures, et toujours ce lien entre un directeur artistique, le compositeur Bruno Mantovani, aussi savant que pédagogue, et le public qui boit ses paroles introductives, rit à ses souvenirs croustillants ou admire sa capacité d’expliquer simplement des concepts bien complexes. » (Extrait de Venise et Vienne au Printemps des Arts de Monte Carlo @JPR)

Ne pas prendre le public pour des c…

En réalité, il n’y a pas de mystère. Un bon festival, une bonne saison de concerts (ou d’opéra) c’est d’abord un(e) bon(ne) « patron(ne)  » qui a des envies, des idées, des intuitions, si possible une grande culture, et qui n’oublie pas qu’il fait partie lui aussi, lui d’abord, du public auquel il s’adresse.

Lors d’une de mes premières présentations de saison à Liège, j’avais eu cette formule, qui avait surpris la presse : « Je ne programme que ce que j’ai envie d’entendre » Au-delà de la formule elliptique, je voulais évidemment dire qu’on ne peut rien faire sans la passion, le désir de convaincre, mais surtout cette irrépressible envie de partager avec le plus grand nombre les merveilles – artistes et/ou partitions – qu’on aime, qu’on a découverts.

Quand j’évoquais avec Bruno Mantovani sa programmation à Monte Carlo, en louant son audace, son courage même, sa réplique a fusé : « Il faut arrêter de prendre le public pour des cons« . Du Mantovani tout craché, tel que je l’aime et le pratique (pas assez souvent à mon gré) depuis des années. J’ai ici même théorisé – ou plus modestement rapporté mon expérience personnelle – sur « le grand public« . Je n’ai pas une ligne à changer à cet article d’il y a bientôt dix ans. J’ajoute, dans le cas de l’ami Mantovani, une sorte de gourmandise (pas seulement celle du gastronome !), d’exubérance absolument contagieuses, que ses origines catalanes n’expliquent pas totalement.

Porter la musique partout où elle peut aller

Lorsque j’ai dû composer ma première édition en 2015 comme directeur du festival de Radio France, fondé il y quarante ans par Georges Frêche (maire de Montpellier), Jean-Noël Jeanneney (PDG de Radio France) et René Koering, j’ai immédiatement pensé célébrer « 30 ans d’amour« , d’audace, de premières, de découvertes d’un festival unique en son genre. Et c’est la même idée qui a présidé à toutes les éditions qui ont suivi jusqu’en 2022. Comme l’attestent ces quelques bandes-annonces

En 2021, après l’épreuve du COVID, nous avions affirmé : Chaque concert est une fête

En réalité, ce n’est pas seulement le slogan d’un festival. C’est l’essence même du concert.

Heureusement, il y a plein de festivals en France qui se sont régénérés ces dernières années, grâce à des musiciens et des animateurs gourmands, créatifs, attentifs précisément à offrir au public l’aventure de la découverte, je pense – liste absolument pas exhaustive – à Colmar, Beaune, La Chaise-Dieu

Pour les à-côté de mon séjour à Monaco : brevesdeblog

Pourquoi la Neuvième ?

Je n’ai pas eu, retrouvé, d’explication convaincante au pullulement de Neuvièmes de Beethoven en ce début d’année… Traditions nordique ? germanique ? japonaise ? Un anniversaire ? pas celui de l’oeuvre en tout cas, créée le 7 mai 1824 !

Le fait est que le Finnois Mikko Franck a introduit cette supposée tradition à Radio France en 2018, en faisant jouer chaque début janvier par l’Orchestre philharmonique de Radio France. Et c’est un autre Finlandais, le tout jeune Tarmo Peltokoski, à l’aube de son mandat à la tête de l’Orchestre du Capitole de Toulouse, qui vient de faire de même.

Les résultats cette année sont tout sauf probants. Qu’on en juge :

– ma propre critique pour Bachtrack : La Neuvième sans joie de Jaap von Zweden au Philhar’

– celle d’Erwan Gentric pour Diapason du même concert : Une symphonie n° 9 de Beethoven taillée à coups de serpe.

– pour Bachtrack toujours, la critique de Thibault d’Hauthuille du concert de Toulouse : La joie forcée de Tarmo Peltokoski.

Pas brillant tout ça !

Pour me rassurer, j’ai relu le papier que j’avais écrit à la fin du marathon Beethoven qu’avait dirigé Dinis Sousa à la Philharmonie de Paris en mai dernier : Le triomphe de la fraternité.

Extr. finale 9e symphonie Beethoven / Dinis Sousa dir. Monteverdi Choir & Orchestra

Quelques Neuvièmes inattendues

Ces déceptions de début d’année m’ont donné envie de fouiller dans ma discothèque non pas en quête de versions dites « de référence » connues et reconnues, mais de raretés ou du moins de chefs qu’on ne cite pas souvent – à tort – comme « beethovéniens »

Arvid Jansons / Berlin 1973

Dans la famille Jansons, il y a d’abord eu le père Arvid (1914-1984) et ce disque est – comme par hasard ! – le « live » d’un concert du 31 décembre 1973 !

Erich Leinsdorf / Boston et Berlin

On a trop négligé Erich Leinsdorf (1912-1993), né Viennois, mort Américain. Il a fait une somptueuse intégrale à Boston

Et j’ai ce « live » du 18 septembre 1978 capté à Berlin.

Rafael Kubelik / Munich 1982

La grandeur, le souffle… Magnifique Rafael Kubelik avec son Orchestre de la radio bavaroise !

Yehudi Menuhin / Strasbourg juin 1994

J’ai consacré tout un article à Yehudi Menuhin (1916-1999) … chef d’orchestre. On a beaucoup célébré le violoniste, à l’occasion du centenaire de sa naissance, et complètement oublié l’excellent chef qu’il a été. Ses symphonies de Beethoven mériteraient amplement une réédition.

Leopold Stokowski / Londres 1967

Eh oui Stokowski était aussi un immense beethovénien…

Chacun des « live » de ce coffret est prodigieux.

Kurt Sanderling / Berlin 1987

J’ai eu la chance d’entendre Kurt Sanderling (1912-2011) diriger l’Orchestre de la Suisse Romande à la fin des années 80 à Genève dans deux Neuvièmes : celle de Mahler, puis celle de Beethoven.

J’ai toujours aussi gardé en mémoire la façon extraordinaire qu’il avait de doser les interventions des différents pupitres de l’orchestre pour que la ligne mélodique soit toujours nettement dessinée. C’est un des problèmes auxquels les chefs se trouvent confrontés notamment dans le 1er mouvement de la 9e symphonie (et c’est tout ce que n’a pas fait Jaap van Zweden samedi dernier à Radio France).

Michael Tilson Thomas / Londres 1987

L’intégrale « allégée » des symphonies de Beethoven qu’avait gravée Michael Tilson Thomas à Londres en 1986 avec l’English Chamber Orchestra avait été accueillie au mieux avec une certaine curiosité, le plus souvent avec une condescendance certaine par une critique prompte à ranger les gens dans des cases. MTT dans Beethoven quelle idée ! Encore un préjugé à bannir (MTT Le chef sans âge)

Je ne peux refermer cet article qui évoque l’Ode à la joie et à la fraternité de Beethoven/Schiller sans rappeler les tragiques événements d’il y a dix ans, que j’ai vécus de si près : Le silence des larmes

Les meilleures notes de 2024

Oublier l’encombrant, le navrant, l’accessoire, ne garder que l’exceptionnel, le singulier, l’essentiel. C’est ainsi que je fais mon bilan d’une année musicale dont je ne veux retenir que les moments de grâce.

Ces souvenirs de concert, j’ai la chance de les avoir consignés pour Bachtrack.

La Chauve-Souris de Minkowski

« Marc Minkowski dirige d’une main de maître l’opérette de Strauss, dans une version portée par une distribution idéale. »

Bon c’était encore en décembre 2023, mais la dernière représentation a eu lieu le 31 !

Le triomphe d’Anna Netrebko dans Adriana Lecouvreur

L’Agrippina impériale d’Ottavio Dantone à la Seine musicale

Les tableaux symphoniques d’Esa-Pekka Salonen

Esa-Pekka Salonen et Sarah Connolly avec l’Orchestre de Paris

La Didon bouleversante de Joyce DiDonato

L’Heure espagnole délurée de Louis Langrée à l’Opéra Comique

Le fascinant parcours de Mikko Franck dans les paysages de Sibelius

Mikko Franck et l’orchestre philharmonique de Radio France

Martha Argerich réinvente le concerto de Schumann

Le marathon Beethoven de Dinis Sousa à la Philharmonie

Le bonheur d’avoir entendu le jeune chef portugais Dinis Sousa – découvert à l’été 2023 au Portugal – diriger une quasi intégrale des symphonies de Beethoven

Klaus Mäkelä et Oslo voient double dans Brahms

Ouverture de fête à Colmar avec Alain Altinoglu

Retrouvailles avec la double casquette d’Alain Altinoglu, directeur du festival de Colmar et chef de son excellent orchestre de la Monnaie

Avec Julian Rachlin au festival de Zermatt

Marianne Crebassa bouleversante dans Picture a day like this

<

Le génial Don Giovanni de Julien Chauvin à l’Athénée

I got rhythm avec Bertrand Chamayou et Antonio Pappano

L’admirable Nelson Goerner

Le retour de la musique à Notre Dame de Paris

Pas de toccata de Widor pour la réouverture de Notre Dame, mais je la livre ici dans la version jubilatoire du légendaire Pierre Cochereau, pour conclure cette année en beauté.

Après Colmar

J’ai relaté mon bref périple dans le Grand Est (Vents d’Est), et promis de revenir sur les concerts que j’ai suivis à Colmar et chroniqués pour Bachtrack.

Le quartier de la Petite Venise à Colmar

Richard, Gustav et César en ouverture

D’habitude il fait une chaleur étouffante dans l’église Saint-Mathieu de Colmar où se déroulent les concerts symphoniques. Ce n’était pas le cas vendredi dernier… et c’était bien !

Lire : Ouverture de fête à Colmar

Je conseille à ceux qui ont manqué ce concert comme à ceux qui y ont assisté de le (re)voir sur Arte Concert : L’ouverture du festival de Colmar avec Alain Altinoglu et Stéphane Degout

Les pompes et circonstances du samedi soir

Le samedi c’était double dose, d’abord le quatuor Modigliani au théâtre municipal

puis de nouveau l’orchestre de la Monnaie et Alain Altinoglu, avec un programme que j’aurais rêvé d’afficher à Montpellier en 2022.

Lire mon compte-rendu sur Bachtrack : Sérénades britanniques à Colmar.

Avec un soliste que je ne m’attendais pas à retrouver dans ce programme, le ténor anglais Ed Lyon que j’avais vu dans My Fair Lady au Châtelet en 2012 dans le rôle de Freddy.

En conversation avec Ed Lyon

La sérénade pour ténor, cor et cordes de Britten est avec les Illuminations du même Britten l’une de ces oeuvres qu’on ne peut écouter distraitement et qui vous touchent profondément. Les deux oeuvres sont sur un disque de référence absolu :

Vents d’Est

J’étais de nouveau à Colmar ce week-end pour l’ouverture du Festival International de Colmar et de sa deuxième édition placée sous la direction artistique d’Alain Altinoglu (lire Retour à Colmar). Ce que j’ai pensé des trois concerts auxquels j’ai assisté sera à lire très bientôt sur Bachtrack.

Le petit extrait du bis donné hier soir dit assez l’ambiance festive qui régnait sous la vaste nef de l’église Saint-Mathieu.

Extrait de la 1e marche de Pomp and Circumstance d’Elgar / Orchestre symphonique de la Monnaie / Dir. Alain Altinoglu (6/07/2024)

Mais ces voyages en Alsace sont aussi pour moi l’occasion de m’arrêter en chemin dans des villes, dans les lieux, devant lesquels j’étais souvent passé trop vite.

Bar-le-Duc

Le chef-lieu du département de la Meuse n’évoquait vraiment rien de particulier pour moi, et c’est précisément cet inconnu qui m’a attiré pour une brève étape sur le trajet vers Colmar. La ville haute abrite tout un quartier Renaissance remarquablement préservé, où manque simplement, un vendredi matin, un peu de vie. Quasiment aucun commerce, aucun café…

La cathédrale Saint-Pierre

Le Palais de Justice

Hohlandsbourg

Quelques kilomètres avant d’arriver à Colmar, en passant par le col de la Schlucht, on se hisse sur les hauteurs de Hohlandsbourg, l’une de ces nombreuses forteresses qui dominent la plaine d’Alsace.

La vue sur Colmar est admirable.

Au bord du Rhin

Le samedi matin, entre deux averses orageuses, on pousse jusqu’aux deux communes jumelles de Neuf-Brisach (en France), et Vieux-Brisach ou Breisach-am-Rhein (en Allemagne). Neuf-Brisach est célèbre pour sa citadelle édifiée par Vauban, aujourd’hui classée au patrimoine mondial de l’Unesco.

On pourrait penser que la flamme olympique est passée par ici. En fait, sans doute dépitée de ne pas avoir été sélectionnée, la commune a fait édifier sa propre flamme, comme le relate L’Alsace.

L’hôtel de ville de Neuf Brisach et la statue d’hommage à Vauban

Les bateaux de croisière sur le Rhin accostent à Breisach-am-Rhein

La ville haute de Vieux-Brisach / Breisach am Rhein.

Le lion de Belfort

Sur la route du retour ce matin, une halte s’imposait: Belfort et sa belle cité enserrée au milieu d’une imposante citadelle, dominée par la fabuleuse sculpture de Bartholdi, le fameux Lion.

Le Corbusier à Ronchamp

Je ne connaissais La Chapelle Notre Dame du Haut de Ronchamp – comme elle s’appelle complètement – que par mes lectures… et les timbres que je collectionnais enfant.

J’avoue que la petite heure que j’ai passée sur les hauteurs de Ronchamp à voir enfin de près l’oeuvre du Corbusier m’a profondément ému. Arrêt sur images…

La sagesse de Diderot

Une brève halte à Langres – trop brève pour visiter cette superbe cité – m’a rappelé que c’est la ville natale de Diderot, et je voulais m’imaginer que la sagesse de l’encyclopédiste inspirerait les électeurs.

la sompteuse cathédrale Saint-Mammès de Langres

Un dimanche extraordinaire

Bien entendu, je suis revenu à temps pour voter au 2e tour de ces élections législatives sans précédent.

La soirée électorale qui se déroule au moment où je conclus ce billet me réjouit à un point que je ne pouvais imaginer dimanche dernier. J’ai envie d’imaginer des lendemains qui chantent…On en reparlera très vite !

Coup de jeune pour Wolfgang

Depuis quand n’y avait-il pas eu une « nouveauté » Mozart ? Un disque de symphonies de surcroît ? On a l’impression. que depuis Harnoncourt – il y a vingt ou trente ans -, Abbado qui avait remis l’ouvrage sur le métier peu avant sa mort (2014) quelques initiatives plus récentes – Antonello Manacorda à Potsdam (Sony), Mozart n’était plus à la mode, encore moins pour la jeune génération de la direction d’orchestre.

Et voici que sans prévenir Deutsche Grammophon crée la surprise avec un disque au couplage et au contenu inédits dirigé par le benjamin de la baguette, le Finlandais Tarmo Peltokoski, dont on a déjà dit et écrit le plus grand bien (Le début d’une belle histoire entre Peltokoski et l’orchestre de Toulouse). Trois symphonies de Mozart, les 35, 36 et 40. Et en contrepoint trois improvisations au piano par le chef-compositeur lui-même.

J’ai vu mes petits camarades critiques crier au génie ou s’étouffer devant tant d’impertinence. Comme toujours, tout ce qui est excessif est.. inutile.

Moi j’aime qu’enfin un chef de la jeune, très jeune, génération, s’affronte aux classiques. Parce qu’il est somme toute assez facile d’aborder le grand répertoire symphonique du XXe siècle, un peu moins les romantiques, et encore moins les classiques. Ces chefs se comptent sur les doigts d’une main. Comme Maxim Emelyanychev que ‘j’avais invité à Montpellier pour « mon » dernier festival en 2022.

Alors Peltokoski dans Mozart ? Cela donne une vision juvénile, mais pas surexcitée, sans les tics et les trucs d’un Harnoncourt, avec une fantaisie tout à fait à propos qui conduit le chef à ornementer certaines reprises. Qu’on en juge…

Quand je lis ici et là qu’il prend des tempi vraiment rapides, je me dis qu’on a un peu oublié certains aînés du jeune Finlandais. Karajan au milieu des années 70, cela donnait ça :

Et l’orchestre philharmonique de Berlin peut en remontrer à plus d’une formation d’aujourd’hui !

La surprise du chef

Apparemment elles ne sont pas sur le CD des trois symphonies, mais elles sont disponibles sur les sites numériques (comme Idagio) : Tarmo Peltokoski s’est amusé à glisser trois improvisations de son cru sur chacune des symphonies. C’est extrêmement culotté, déjanté, tout ce qu’on veut, et on adore ! C’est vraiment dans l’esprit du Mozart effronté et joueur qu’on préfère au personnage perruqué et poudré qu’on se représente à tort.

Tableaux rares

Mercredi soir, j’assistais à la Philharmonie de Paris à un concert – redonné ce jeudi – de l’Orchestre de Paris. J’en ai rendu compte dans Bachtrack : Les tableaux symphoniques d’Esa-Pekka Salonen.

Esa-Pekka Salonen, Sarah Connolly et l’Orchestre de Paris (Philharmonie, 7 février 2024)

Je veux revenir sur le programme qui nous a été proposé, et qui, à rebours de tous les clichés sur les goûts supposés du « grand public« , a attiré un très nombreux public dans la grande salle Pierre Boulez de la Philharmonie. Elgar, Hindemith ? Le choix de l’Orchestre de Paris et de son illustre invité était pour le moins audacieux.

La mer qu’on voit danser

On croit rêver quand on lit dans le programme de salle que les Sea Pictures d’Edward Elgar – 1899 ! – font leur entrée au répertoire de l’Orchestre de Paris… On cherche d’ailleurs – en vain – dans sa mémoire pour retrouver trace d’un concert parisien au cours duquel ce cycle magnifique de mélodies « marines » aurait été donné. C’est pourquoi j’avais été particulièrement fier de pouvoir programmer, avec l’Orchestre national de France et son chef Cristian Macelaru (que je remercie encore d’avoir relevé le défi), le 21 juillet 2022 à Montpellier, ces Sea Pictures suivis de la Sea Symphony, la 1ere symphonie de Ralph Vaughan-Williams (lire Tempête en mer).

Pour Marianne Crebassa c’était aussi une première. Elle avait alors raconté avec quel enthousiasme elle s’était saisie de ce cycle, qui convient idéalement à sa voix.

A la discographie dont j’avais déjà fait état ici (voir La mer qu’on voit danser), on peut ajouter quelques nouvelles perles :

On l’aura compris, entre les lignes, je préfère pour ce cycle une voix plus sombre, comme celle de Kathryn Rudge.

Le timbre plus métallique d’Elina Garanca ou plus clair d’Alice Coote – pour ne mentionner que les plus récentes versions – rendent moins justice à la poésie de ces « marines ».

Mathis le peintre

En deuxième partie des concerts de l’Orchestre de Paris, Salonen avait programmé de nouveau une oeuvre extrêmement rare au concert : la symphonie Mathis der Maler de Hindemith.

En juillet 2023, j’avais eu la chance de suivre pour Bachtrack deux concerts du Festival de Colmar, et à cette occasion j’avais pu visiter le musée Unterlinden et y admirer dans toute sa splendeur retrouvée le fameux retable d’Issenheim dû à Matthias Grünewald (lire et surtout voir Mathis le peintre à Colmar), qui est le sujet même de l’opéra de Hindemith et de la « symphonie » en trois mouvements/tableaux qu’il en a tirée en 1934.

Dans ma discographie, très (trop?) sélective, de l’oeuvre, j’ai omis de mentionner la version d’Esa-Pekka Salonen gravée à Los Angeles. Dans mon article de Bachtrack, je précise pourtant que le chef finlandais est l’un des très rares de sa génération à s’intéresser à un compositeur trop peu considéré et pourtant l’un des plus importants du XXe siècle.

Signes de vie

Ne pas parler ici ou sur les réseaux sociaux des tragédies qui frappent le monde, en Israel ou en Palestine, comme toujours en Ukraine, ne pas commenter les horreurs proférées par des responsables politiques qui font honte à leurs fonctions, lorsqu’ils sont parlementaires, ne signifie pas qu’on est indifférent ou sans opinion. La retenue, le silence sont meilleurs conseillers.

La musique de Sheku

J’ai de l’affection et de l’admiration pour ce garçon depuis que je l’ai vu jouer lors du mariage de Harry et Meghan en 2018, affection et admiration confirmées depuis que j’ai l’entendu à l’auditorium de la Maison de la radio en 2019 et que j’ai dîné avec lui après le concert. Sheku Kanneh-Mason n’avait pas encore 20 ans, et n’avait pas encore achevé son cycle d’études supérieures, il était tel qu’il apparaît sur scène, presque timide, conscient des risques d’une soudaine notoriété.

C’est avec le 1er concerto pour violoncelle de Chostakovitch qu’il avait remporté le concours des jeunes musiciens de la BBC en 2016.

Sept ans après, Sheku a encore approfondi sa vision, plus lyrique qu’exubérante.

C’est ainsi qu’on l’a entendu jeudi dernier à la Philharmonie de Paris, avec l’Orchestre de Paris dirigé par Nathalie Stutzmann, comme je l’ai écrit sur Bachtrack : La jeunesse triomphante de Sheku Kanneh-Mason.

Renaissance

C’est peut-être un détail sans importance pour vous lecteurs, mais pour moi ça veut dire beaucoup. La maison historique de la famille maternelle, que j’avais trouvée en si piteux état lorsque j’étais passé à Entlebuch, au coeur de l’Emmental, en 2020 (lire Été 69), a retrouvé tout son lustre au terme d’une rénovation respectueuse de la tradition typique de cette vallée suisse, les murs d’écailles en bois.

J’ai pu en informer ma mère avec qui je peux encore échanger brièvement en vidéo lorsque l’opportunité se présente. À son âge, dans la maison de retraite où elle vit désormais, parfois absente à ce monde, il faut saisir le bon moment, celui où elle se reconnecte à ses souvenirs, où un sourire éclaire son visage lorsqu’elle reconnaît ses proches.

Encore

Cadeau pour finir que ce bis capté il y a quelques semaines à Stresa : toute la vie, l’ardeur, la jeunesse s’y trouvent exaltées. Yuja Wang et Tarmo Peltokoski (Retour à Colmar) et la pure joie de jouer :

Retour à Colmar

Ce fut un beau, un très beau week-end ! Je n’avais plus que de vagues souvenirs du chef-lieu du Haut-Rhin, mais déjà sous une chaleur étouffante : ce devait être il y a trente ans Evgueni Svetlanov et son orchestre russe dans la Sixième de Mahler. Et la découverte du polyptyque de Mathias Grünewald au musée Unterlinden (lire Mathis le peintre).

Le Koifhus, l’ancienne Douane

La fameuse Maison des Têtes

Inutile de dire que dans une aussi jolie ville, la gastronomie est reine. Tradition germanique, bien pratique quand on va au concert, les restaurants servent dès 19 h. On veut citer ici deux établissements où la chaleur de l’accueil, la diligence du service ont précédé et prolongé le bonheur de l’assiette :

La Maison Rouge et un sublime pâté en croute

et – un dimanche soir – À l’échevin, le restaurant de l’hôtel Le Maréchal, un petit menu qui porte bien son nom « Ballade en Alsace » avec un « consommé de choucroute en montgolfière, kassler, foie gras et truffes »… à tomber ! Le tout à des prix plus que raisonnables !

Un nouveau festival

Quand j’ai vu le programme que l’ami Alain Altinoglu, qui en est le nouveau directeur artistique, avait concocté pour le vénérable Festival de Colmar, en particulier ce qui se passait samedi et dimanche, je me suis dit que l’occasion était toute trouvée pour un retour en Alsace, surtout si Bachtrack m’y envoyait en mission ! Deux concerts de l’orchestre du Capitole de Toulouse sous la baguette du nouveau prodige de la direction, Tarmo Peltokoski, tout fraichement désigné par le maire de Toulouse pour prendre la direction musicale de l’ensemble au 1er septembre 2014. Et pas n’importe quels programmes !

« Ces deux concerts marquent, en tout cas, le début d’une belle relation entre un déjà très grand chef et un orchestre prêt à le suivre sur les sommets de l’excellence. » C’est la conclusion de mon article sur Bachtrack : A Colmar le début d’une belle histoire entre Tarmo Peltokoski et l’ONCT

Preuve en quelques images de ce que j’ai écrit à propos d’une mémorable Quatrième symphonie de Bruckner, c’était samedi soir :

Il y a des soirs où l’on est heureux de s’attarder après le concert, de saluer et de féliciter les musiciens..