Vacances 2022 : retour à Ambronay

Sur la route des vacances halte ce week-end dans l’Ain, et retour en des lieux jadis familiers où je n’avais plus eu l’occasion de remettre les pieds depuis presque trente ans !

Ambronay

Ambronay, c’est cette ancienne abbaye bénédictine dans l’Ain, où en 1980, un fou de musique – Alain Brunet – décida de créer un festival de musique baroque et une académie. Quarante-deux après, il en a abandonné la direction mais en préside toujours ce qui est devenu, en 2003, un Centre Culturel de Rencontres. J’ai rarement rencontré personnage plus passionné, obstiné, déterminé, qui a toujours fini par convaincre les meilleurs musiciens de le suivre dans son aventure.

Mes premiers souvenirs d’Ambronay sont des émissions de radio – la Radio Suisse romande n’est pas loin, et Disques en Lice, l’émission de critique de disques, aujourd’hui disparue, de la RSR, était venue au moins deux fois dans mon souvenir. Une fois, c’était Jordi Savall autour des suites de Bach. Une autre fois, avant un concert où nous devions entendre le Stabat Mater de Vivaldi, j’étais assis à la tribune à côté de Gérard Lesne. Dans l’écoute comparative à l’aveugle, le jeu consistait évidemment à essayer de reconnaître les interprètes. Ecoutant la version que nous ne savions pas être celle de Nathalie Stutzmann, Gérard Lesne comme moi étions incapables de discerner le sexe de l’interprète, homme ou femme, tant la voix de Nathalie portait une superbe ambiguïté.

Autre souvenir, cette fois comme directeur de France Musique, et dans le cadre d’un partenariat qu’Alain Brunet avait obtenu sans problème de ma part, mais avec les réticences d’usage de la technique de Radio France, j’étais revenu en 1994 notamment pour un concert de l’académie animée alors par William Christie, David et Jonathas de Marc-Antoine Charpentier, qui révéla une jeune soprano qui allait faire son chemin : Patricia Petibon.

Je n’ai pu m’empêcher, revenant en ces lieux, de penser à l’ami Jacques Merlet, qui n’avait pas été le dernier à croire à l’aventure d’Ambronay et qui y installait ses quartiers d’automne. Il y a ainsi des ombres heureuses qui peuplent les mémoires et les pierres.

Pérouges

C’est pendant ce bref séjour de l’automne 1994 que je découvris Pérouges, à une vingtaine de kilomètres d’Ambronay, cette cité médiévale bien préservée. Un déjeuner à l’Hostellerie de Pérouges me fit côtoyer William Christie et son commensal. Quelques amabilités échangées. Ce fut le seul et dernier contact sympathique que j’eus avec ce personnage qu’il m’est arrivé d’apprécier comme musicien.

L’Hostellerie de Pérouges
Pérouges la porte Sud

La Diva inconnue

Tous les matins du monde d’Alain Corneau, à partir du roman de Pascal Quignard, avait révélé au grand public tout ensemble la viole de gambe, M. de Sainte-Colombe, Marin Marais et Jordi Savall.

On peut en dire autant du film Diva (1981), le premier long-métrage du réalisateur Jean-Jacques Beineix, qui vient de disparaître à 75 ans.

Soudain, grâce à la voix de Wilhelmenia Fernandez, le public se prit de passion pour un air d’un opéra jusqu’alors connu des seuls initiés à l’art lyrique, La Wally, d’Alfredo Catalani (1854-1893)

On mesure mal aujourd’hui l’engouement (et la détestation de la part de certains critiques) que suscitèrent le film d’abord, l’actrice/.chanteuse américaine qui concurrença vite en termes de notoriété sa compatriote Barbara Hendricks, sur tous les plateaux de télévision, et l’opéra italien.

Mais on en resta à peu près là quant à approfondir nos connaissances sur le compositeur et l’opéra. Catalani né quatre ans avant Puccini dans la même ville de Lucques, mort de la tuberculose à 39 ans à Milan, n’a écrit que six opéras, dont deux seulement, inspirés de légendes germaniques, ont connu une certaine notoriété (Loreley en 1890 et La Wally en 1892)

Ce n’est pas faire injure au joli filet de voix de Wilhelmenia Fernandez, que de dire qu’elle n’aurait pas pu chanter le rôle sur scène, celui-ci requérant une ampleur, une couleur, qui ne sont pas les siennes, mais qu’illustrent au disque Renata Tebaldi – même captée sur le tard (1970) – ou Eva Marton;

Mais qui pourrait surpasser Maria Callas dans cet air ?

On ne va pas résumer la carrière de Jean-Jacques Beineix à ce premier film fondateur, on a beaucoup aimé la suite de son parcours cinématographique.

On trouve sur YouTube une représentation (tyrolienne à souhait !) de la Wally donnée au théâtre de Piacenza, avec une distribution plus qu’honnête.