La découverte de Bologne (II) : Mozart adolescent

J’évoquais hier la figure du Padre Martini, personnalité centrale de la vie musicale à Bologne au XVIIIe siècle, prodigieux animateur de l’Accademia Filarmonica di Bologna, fondée en 1666 et toujours bien vivante aujourd’hui.

Parmi les élèves de l’Accademia et du Padre Martini, le plus célèbre est sans doute un certain Wolfgang Amadeus Mozart.

Portrait de Mozart au Musée international de la musique de Bologne

On n’entrera pas ici dans un débat historique ni musicologique sur le point de savoir si le jeune Wolfgang, – il a tout juste 14 ans lors de son premier voyage en Italie avec son père – a été marqué par son séjour plutôt bref, trois mois, à Bologne. Auprès du Padre Martini, il travaille l’harmonie et surtout le contrepoint. Pour être admis à l’Accademia, il devra rendre deux « exercices », deux manuscrits précieusement conservés dans la bibliothèque du musée.

En même temps, on se demande si Mozart avait encore beaucoup à apprendre, quand on entend son opéra Mitridate re di Ponto, créé à Milan le 26 décembre 1770 (lire Ceci n’est pas un opéra)




Quand Vienne vient à Bologne

Comme si je n’avais pas eu assez de l’excellente version de concert de La Chauve-Souris dirigée par Marc Minkowski au théâtre des Champs-Elysées (voir sur Bachtrack : Une Chauve-Souris authentiquement viennoise), j’ai repris une dose de Fledermaus, en italien cette fois – Il Pipistrello – dans l’affreux palais des congrès de Bologne où se tiennent les représentations du Teatro Comunale, qui fait l’objet d’une complète restructuration/rénovation.

Comme je ne m’attendais à rien de particulier, je ne pouvais être qu’agréablement surpris. D’abord par le tout jeune chef ukrainien Sasha Yankevych, 32 ans, qui sans être ni Carlos Kleiber, ni Marc Minkowski, fait mieux qu’infuser à ses très belles troupes bolognaises l’esprit viennois. J’ai moins aimé le casting réuni ici que celui de Paris. La star de la soirée, c’était Désirée Rancatore, en Rosalinde un peu fatiguée, bien à la peine dans les graves. Bonne soirée pour terminer l’année !

Régime de fête (I): un duo à Vienne

Chaque année, je crois, j’écris ici que je n’aime pas cette période de l’année, où la fête devient obligatoire, sans que plus personne ne sache ce que sont, ce qu’étaient, l’Avent, la Saint-Nicolas, Noël, la Saint-Sylvestre, a fortiori la légende du père Noël. Même dans la matinale de France 2, on ouvre chaque jour un volet d’un calendrier de l’Avent : qui, parmi les téléspectateurs, en connaît l’origine ?

Pas plus cette année que les précédentes, je n’aurai à me forcer pour adopter un régime alimentaire raisonnable, même si de récentes circonstances (Une expérience singulière) m’obligent à une prudence plus grande encore.

Des cadeaux

Puisque cadeaux il doit y avoir, je vais proposer, dans les jours qui viennent, quelques idées, peut-être originales, inattendues.

Il y a des dizaines de compilations, de best of, d’airs d’opéras, d’opérettes, de crooners, parmi lesquelles on est bien embarrassé de choisir, ou qui parfois échappent à la vigilance du collectionneur.

En revisitant ma discothèque, je suis tombé sur ce CD qui n’avait pas spécialement retenu mon attention. Un chef, Anton Paulik, deux chanteurs, Werner Krenn, Renate Holm, qui ne font pas partie des stars multi-rééditées, et pourtant un modèle absolu ce que peuvent être le charme, le raffinement, le bon goût de l’opérette viennoise.

La couverture du double CD est muette sur les chanteurs – inhabituel oubli dans cette collection d’excellence – et pourtant leurs noms ne sont pas inconnus des discophiles.

Renate Holm, 90 ans, a commencé sa carrière comme actrice chanteuse, il faut reconnaître qu’elle en avait tous les atouts. Sa célébrité, sa notoriété, n’ont jamais vraiment franchi les limites de la sphère germanique. Sa discographie n’est pas pléthorique, à la différence d’autres de ses contemporaines, comme Anneliese Rothenberger (1924-2010) qui a littéralement phagocyté la branche allemande d’EMI, Electrola.

Ce qu’on aime chez Renate Holm, c’est qu’elle n’est pas simplement un rossignol virtuose, une de ces petites voix pointues et agiles, qui foisonnent dans les enregistrements viennois de l’époque. Elle a du corps, de la chair, et par dessus tout une classe, une élégance, qui la distinguent de ses concurrentes. Ainsi dans le rôle d’Adèle de La Chauve-Souris de Johann Strauss, elle ne surjoue pas la soubrette nunuche, elle pourrait presque tenir la dragée haute à la Rosalinde de Gundula Janowitz, surtout quand la troupe est tenue par Karl Böhm.

Werner Krenn est né en 1943 à Vienne. Il a commencé sa carrière de musicien comme basson solo de l’Orchestre symphonique de Vienne de 1962 à 1966, mais il a reçu son éducation musicale comme membre des Petits Chanteurs de Vienne (Wiener Sängerknaben). De nouveau, comme pour sa partenaire sur ce double album, Werner Krenn est resté dans l’ombre d’autres stars de l’époque, comme Fritz Wunderlich, repéré toutefois par les grands chefs des années 60 et 70. C’est d’ailleurs à lui que Karajan fit appel pour « compléter » son premier enregistrement de la Création de Haydn, Fritz Wunderlich étant mort (accidentellement) au cours de la période d’enregistrement !

On retrouve Werner Krenn dans pas mal de disques, mais on cherchera en vain un disque portrait ou monographique. Pas assez star pour y avoir droit ?

Quant au chef, Anton Paulik (1901-1975) on cherchera en vain une notice biographique, sauf une fiche Wikipedia en néerlandais ! On dira, faute de mieux, que c’était un honnête spécialiste de l’opérette et de la valse viennoise. Et on dira beaucoup mieux de son art lorsqu’on aura entendu ce double album où le chic, la classe le disputent à l’élégance. Une bonne dose de Paulik semble bien nécessaire avant d’affronter le concert viennois du Nouvel an 2022 qui ne promet rien de bon sous la baguette octogénaire d’un chef qui n’a jamais compris l’essence ni le sens de cette musique.