Loin du monde

Plus en été qu’en d’autres périodes de l’année, j’aime me retrouver loin du monde, loin de la foule. C’est dans l’un de ces lieux complètement à l’écart, qu’on atteint qu’après plusieurs kilomètres de lacets dans la montagne que j’ai appris la mort, le 14 juillet, de Thierry Ardisson : le prieuré de Serrabone

Le prieuré est situé sur l’ancienne commune de Serrabonne, aujourd’hui rattachée à Boule-d’Amont dans les  Pyrénées-Orientales  à une trentaine de kilomètres de Perpignan, dans le massif des Aspres sur les contreforts orientaux du massif du Canigou.

Toutes les photos sont en libre accès ici.

Fontfroide

Contraste absolu avec l’opulente Abbaye de Fontfroide, dont j’avais évidemment souvent entendu parler – un projet de collaboration entre le festival Radio France et Jordi Savall qui y programme quelques concerts en juillet avait même été esquissé mais abandonné pendant la crise sanitaire -. Le massif forestier qui entoure Fontfroide a été quelques jours menacé par les feux qui ont ravagé près de 2000 hectares dans l’Aude, il reste sous surveillance, mais en ce dimanche 13 juillet après les orages et les pluies torrentielles de la veille, ce sont plutôt les flaques d’eau qu’on devait éviter pour visiter le vaste site de l’abbaye. On y apprend que c’est toujours une propriété privée, appartenant aux descendants de Gustave Fayet qui avait entrepris au début du XXe siècle une formidable réhabilitation d’un site exceptionnel.

Mes photos de Fontfroide en accès libre ici.

Elne

La veille, revenant de Collioure (photos à voir ici), j’avais fait halte à Elne, juste à temps pour m’abriter des pluies incessantes qui allaient arroser le Roussillon tout l’après-midi.et visiter un cloître qui témoigne de la longue histoire religieuse de la cité. Photos à voir ici

J’ai aussi le souvenir d’un festival de piano auquel le festival Radio France prêtait naguère son concours.

Prades / Saint-Michel de Cuxa

Après la montée à Serrabone, il était impossible de ne pas pousser jusqu’à Prades (voir ma brève de blog du 14 juillet). La petite cérémonie sur la place de la mairie venait de se terminer, ce n’était pas Jean Castex, mais son successeur à la mairie de Prades qu’on surprit en discussion avec un sous-préfet. Je n’étais jamais venu à Prades, lieu pourtant mythique pour le mélomane que je suis, puisque nul ne peut ignorer le festival de Prades, fondé en 1950 par Pablo Casals.

C’est à l’extérieur de Prades qu’on trouve l’abbaye Saint-Michel-de-Cuxa où ont lieu la plupart des concerts du festival.

Mes photos à voir ici.

Fauré à Pamiers

On est aussi loin du monde quand on s’avise de visiter la ville natale de Gabriel Fauré (1845-1924) : lire La naissance de Fauré. Le 15 juillet à Pamiers on n’est pas submergé par la foule, et la ville ne semble pas exagérément fière de l’enfant du pays. Une sculpture inaugurée l’an dernier est bien cachée au fond de la cour intérieure de la mairie !

Il faut un peu chercher la stèle installée près de la cathédrale (fermée pour les visites !)

Quant à la maison natale de Fauré, elle est située au 17 de la rue Gabriel… Péri (anciennement rue Major)

Bref, pas de quoi se pâmer à Pamiers !

Les humeurs du jour sur breves de blog

Sur les basques de Ravel

C’est à croire que toute la touristerie s’est donné rendez-vous sur la côte basque coté français durant ce viaduc de l’Ascension. Biarritz inatteignable, Guéthary invisitable, et finalement non sans bouchons, l’accès à un nouveau parking de Saint-Jean de Luz peu avant qu’il affiche complet. Mais en sortant, la récompense : la vue directe sur la maison natale de Ravel de l’autre côté du port sur la commune de Ciboure (l’étrange façade flamande qui détonne au milieu des maisons en pur style basque.

La maison natale de Ravel à Ciboure sur le port de Saint-Jean-de-Luz

En rentrant je me replongerai dans les écrits de Ravel. Où il évoque sa « basquitude », ses fréquents retours au pays. J’ai trouvé ceci, un témoignage de Gustave Samazeuilh sur « les nombreux étés que nous avons passés ensemble en ce Pays Basque… Nous voisinions quotidiennement, soit dans les logis qu’il habita successivement à Ciboure ou dans la grande rue de Saint-Jean-de-Luz, soit sur ce coteau de Bordagain, où les miens et moi-même avions fixé nos pénates. Ravel aimait le vaste horizon de mer et de montagne qu’on y découvre. Il goûtait la douceur de l’air, la lumière affectueuse et vive. Que de fois sommes-nous montés en haut de la tour de l’ancienne abbaye de Bordagain pour voir se coucher le soleil ou monter la lune au zénith, quitte à prolonger ensuite notre soirée en la maison voisine aux volets rouges, dont l’isolement nous permettait de musiquer ou de deviser jusqu’à des heures fort avancées ? En descendant vers Saint-Jean-de-Luz le matin, je passais devant la maison de Ravel. Un siffle de ralliement bien connu de ses amis d’alors : le thème initial de la Seconde Symphonie de Borodine… Ravel se mettait à sa fenêtre, souvent  en pittoresque costume de bain.

D’autres fois, j’entendais son piano, je grimpais ses étages, et j’avais souvent de précieuses surprises. Une autre fois – beaucoup plus tard – je goûtais le savoureux spectacle de voir Ravel en peignoir jaune et en bonnet rouge écarlate, me jouant d’un doigt, avant d’aller prendre notre bain matinal, le thème du Boléro, et me disant : « Mme Rubinstein me demande un ballet. Ne trouvez-vous pas que ce thème a de l’insistance ? Je m’en vais essayer de le redire un bon nombre de fois sans aucun développement en graduant de mon mieux mon orchestre. » On sait avec quelle étourdissante virtuosité il sut réussir cette gageure.

D’autres jours, nous allions faire de longues promenades pédestres ou des randonnées automobiles en Béarn, sur la côte espagnole jusqu’à Santander, en Navarre, en Soule. Je me souviens, en particulier, de celle qui nous amena, par l’admirable route du col de Lesaca, de Pampelune à Estella, et retour par Roncevaux, Saint-Jean-Pied-de-Port et Mauléon. Ravel en avait rapporté le plan d’une œuvre basque pour piano et orchestre, « Saspiak bat », dont il m’a souvent parlé, et que seule la difficulté qu’il éprouva à trouver l’idée pour la pièce expressive du milieu, à laquelle il tenait particulièrement, lui fit abandonner. J’ai toujours pensé que les éléments des pièces vives, notamment de la première et la dernière : une fête sur la place de Mauléon, avaient été utilisées dans les pièces correspondantes du Premier Concerto de piano… »

Saint-Jean-de-Luz et Louis XIV

Saint-Jean-de-Luz est entrée dans la grande histoire de France pour avoir hébergé le mariage de Louis XIV avec l’infante d’Espagne, Marie-Thérèse d’Autriche le 9 juin 1660 en l’église Saint-Jean-Baptiste.

L’église Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean-de-Luz

La maison, construite en 1643, où Louis XIV séjourna durant un mois en 1660, aujourd’hui appelée Maison Louis XIV

Donnant sur le port, la demeure où résida l’Infante d’Espagne avant son mariage avec Louis XIV.

L’attrait principal de Saint-Jean-de-Luz est bien entendu son bord de mer, qui n’est pas, comme d’autres de la côte basque, envahi par les terrasses et les échoppes.

Ce que j’ai découvert, en longeant l’élégant bâtiment de La Pergola, qui abrite le Casino, c’est que c’est l’oeuvre de l’architecte Robert Mallet-Stevens en 1927

Saint-Jean-Pied-de-Port et les pèlerins de Compostelle

Sans le savoir, j’ai emprunté les routes qu’aimait parcourir Ravel avec son ami Samazeuilh, dans ce pays basque pyrénéen si charmant. Ainsi cette halte à Saint-Jean-Pied-de-Port, où l’on a vu nombre de pèlerins en chemin vers Saint-Jacques-de-Compostelle.

La porte du Roy qui donne accès à la citadelle qui surplombe la ville.

On aurait pu emprunter le col de Roncevaux, se remémorer la Chanson de Roland, mais une manifestation apparemment sportive nous a privé de cet itinéraire. Pour s’en consoler, on peut écouter cet air extrait d’un opéra dont j’ignorais même jusqu’à l’existence avant que le Palazzetto Bru Zane ne l’exhume – Roland à Roncevaux – d’Auguste Mermet, un ouvrage de 1864.

La découverte de la musique (XI) : Haydn dans les Pyrénées

Je désespérais de retrouver un jour un disque qui a déclenché ma passion pour Haydn et mon admiration pour le chef d’orchestre Antal Dorati. Un disque offert par mes parents – pourquoi celui-ci en particulier ? – un 33 tours écouté pour la première fois dans les Pyrénées !

Mes parents avaient loué, pour la semaine de Noël de 1970, une petite maison, une ancienne bergerie, au lieu-dit Gripp, à quelques kilomètres de la station de La Mongie. Je me rappelle que le confort y était plus que spartiate, qu’un seul malheureux poêle à bois servait de chauffage, et que les toutes petites chambres étaient toujours glacées. Nous avions cependant emporté un électrophone, pour pouvoir écouter comme il se doit cantiques et chants de Noël.

Il y avait un terrain en pente, où nous pûmes nous livrer aux joies de la luge, et mon père essayer de tenir sur des skis…. C’était nos premières (et nos dernières) vacances à la neige.

Plus encore que la symphonie n°94 – qui sera trop associée dans ma mémoire ultérieure aux pitreries de Gerard Hoffnung La musique pour rire – j’ai immédiatement aimé cette majestueuse 103ème symphonie, ce début mystérieux venu des profondeurs de l’orchestre – je n’avais pas encore découvert, et pour cause, les roulements de timbales par lesquels Harnoncourt et quelques autres feront débuter l’oeuvre – cet andante aristocratique, ce menuet qui hésite entre la danse de cour et le Ländler paysan, et ce finale étourdissant.

Des années après, je me suis jeté sur la fameuse intégrale des symphonies réalisée par le même Antal Dorati avec la même Philharmonia Hungarica, espérant retrouver en CD ce vinyle disparu dans les différents déménagements familiaux ou personnels. Vu les dates d’enregistrement, ça ne collait pas.

J’ai espéré de nouveau lorsque Universal a réédité le fonds Mercury Living Presence en trois gros coffrets. Beaucoup de Dorati, un fabuleux trésor… mais nulle part ces symphonies de Haydn.

Et voici que la collection Eloquence réédite en quatre pleins CD les Mozart et les Haydn gravés par Dorati à la fin des années 50 :

Coffret commandé la semaine dernière en Angleterre (on recommande le site prestomusic.com 10 € moins cher que sur le continent !) et reçu ce matin ! Infinie reconnaissance à Cyrus Meher-Homji, infatigable défricheur et réhabilitateur du fonds de catalogue Decca/Philips/DG des années 50 et 60, âme de cette collection Eloquence Australie qui nous restitue ainsi d’inimaginables trésors dans des remasterisations respectueuses des splendides prises de son d’origine.

Il se dit que Wilma Cozart Fine (1927-2009) qui, avec son mari Robert C.Fine, avait dirigé le département classique de Mercury Records, et avait personnellement suivi la réédition en CD de cet héritage exceptionnel, n’avait pas voulu y inclure ces Mozart et Haydn, jugeant que ce n’était pas le répertoire dans lequel on attendait Dorati ! Voici ce qu’en dit aujourd’hui l’éditeur :

Antal Doráti’s complete Haydn and Mozart recordings for Mercury, predating his landmark collection of the Haydn cycle for Decca. In 1966 the Stereo Review critic made a prescient observation: ‘Doráti here establishes himself as a first-rate Haydn conductor.’ There is the passion of advocacy as well as the foundational principles of his Haydn performing style in these early recordings: ‘Only a few of his works were done and were always repeated,’ Doráti remarked in interview. ‘The reason for that, I think, is just human modesty. The taste of a public is modest; they are satisfied with little. But that is why we are here – to show them a wider horizon… Haydn began as a talent and ended up as a genius’. Unlike many of his colleagues, Doráti took pleasure in the process of recording, establishing a happy and concordant working relationship with the husband-and-wife Mercury team of Robert and Wilma Cozart Fine. One of the first fruits of that relationship was a pairing of Mozart’s 40th and Mendelssohn’s 4th symphonies, made in Minneapolis where Doráti was music director and released in 1953 (the ‘Italian’ has been reissued separately by Eloquence, coupled with Doráti’s Schumann and more Mendelssohn, 484 0506). There followed Eine kleine Nachtmusik coupled with the ‘Linz’ in 1956, and a stereo remake of the 40th in 1961. The rarity here is the ‘Mozartiana’ LP from 1967, gathering up the Overture to Lucio Silla with marches and dances, and never previously issued complete on CD. In the meanwhile, Doráti had embarked upon what would be the largest Haydn discography of any conductor with the ‘Farewell’ Symphony, from the same sessions as the stereo remake of Mozart’s 40th. He picked a judicious path through mostly named symphonies (‘Fire’, ‘Surprise’, ‘Military’, ‘Clock’ and ‘Drum Roll’) calculated to appeal to consumers hitherto hardly familiar with the extent of Haydn’s symphonic achievement, conducting the LSO, the Bath Festival Orchestra (‘Festival Chamber Orchestra’) and his own Philharmonia Hungarica. The fire and brilliance of these early recordings sometimes exceeds the later Decca remakes within Doráti’s complete cycle.

Détails de ce coffret :

CD 1 Mozart symphonie n°40 / Minneapolis Symphony (avril 1952)

Les noces de Figaro ouv / Une petite musique de nuit London Symphony (août 1965)

Lucio Silla ouv, Marches K 335, 249, 402, Danses allemandes 603 / Bath Festival (juin 1961)

CD 2 Mozart symphonies 36, 40 / London Symphony (1956, 1961)

Haydn symphonie 59 / Bath festival (août 1965)

CD 3 Haydn symphonies 45, 81 / Bath festival (1961, 1965)

Haydn symphonie 94 / Philharmonia Hungarica (juin 1958)

CD 4 Haydn symphonies 100, 101 / London Symphony (avril 1957)

Haydn symphonie 103 / Philharmonia Hungarica (juin 1958)

L’invitation au voyage

J’avais prévenu, ce blog prendrait quelques libertés avec la régularité. Pas eu le temps de souffler depuis 72 heures. Les réseaux sociaux et les médias ont largement rendu compte de ce qui m’a occupé, et qui valait bien qu’on y consacre toute son énergie et tout son temps.

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Quelques photos, quelques échos, tout sourire,  de ces premiers jours de festival. Heureux que le public ait répondu si nombreux et si enthousiaste à l’invitation au Voyage d’Orient que nous lui avons lancée.

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(Avec Karine Deshayes et Lambert Wilson, soliste et récitant du concert d’ouverture du 11 juillet / Photo Marc Ginot)ON-Capitole-Toulouse-Festival-RF-1(Lucas Debargue, Andris Poga et l’orchestre national du Capitole de Toulouse hier soir)

CnLqw2wWcAUPOQn.jpg-large(Enguerrand de Hys, Stéphanie Varnerin, Rémy Mathieu, Jean Gabriel Saint-Martin irrésistibles dans Ba-Ta-Clan d’Offenbach, sous la houlette de Jean-Christophe Keck)

Regarder  Le Festival vu par France 3 et de nombreuses photos sur le site du Festival.

Un conseil pour ceux qui ne sont pas à Montpellier ou dans la région : écouter ou réécouter les concerts du Festival sur France Musique