Festivals et surprises

L’imposture Molière et Cyrano

J’avais fini par penser que Jean-Baptiste Poquelin alias Molière avait un lien de terre ou de sang avec la ville de Pézenas qui, depuis des lustres, l’honore et le célèbre. Et puis non, si Boby Lapointe est bien originaire de cette charmante cité de l’Hérault, Molière, en dehors de séjours attestés et d’amitiés scellées ici n’a strictement aucun lien familial ou officiel avec Pézenas.

Mais du théâtre il y a dans cette ville, durant tout l’été, et c’est tout l’avantage de ma nouvelle position de retraité sans contrainte que de pouvoir au dernier moment, visiter une sorte de festival de théâtre, qui propose chaque soir une pièce du répertoire. Dimanche soir, c’était Cyrano de Bergerac par l’Illustre Théâtre. Et ce fut plus qu’honorable, du très bon théâtre, et un comédien, dont j’ignorais le nom, Gérard Mascot qui a fait mieux qu’endosser le rôle de Cyrano, il l’a incarné de belle manière du début jusqu’à la fin.

Berlioz, Gardiner et Kantorow

C’est très agréable d’assister en simple spectateur à la soirée d’ouverture d’un festival qu’on a dirigé pendant huit ans. De retrouver quantité de figures amies et de n’avoir rien d’autre à faire que d’être pleinement à l’écoute de ce qui se passe, sans devoir être aux aguets

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Alexandre Kantorow et John Eliot Gardiner

Le programme du concert d’ouverture du Festival Radio France, le 17 juillet, n’avait rien de très original, mais les interprètes valaient le déplacement : le quatrième concerto de Beethoven, joué par Alexandre Kantorow, et la Symphonie fantastique de Berlioz, avec l’orchestre philharmonique de Radio France dirigé par John Eliot Gardiner.

Un concert à réécouter avec bonheur sur France Musique.

Dans la Symphonie fantastique, Gardiner avait demandé la présence des quatre harpes requises par Berlioz dans le deuxième mouvement Un bal. Présence évidemment spectaculaire sur la scène de l’Opéra Berlioz de Montpellier

Le lendemain, mardi, Alexandre Kantorow donnait un récital dans une salle Pasteur comble, sur le thème du Wanderer. Partant de la fougueuse et virtuose 1ère sonate de Brahms, en passant par plusieurs des Lieder de Schubert « arrangés » par Liszt, pour l’achever par une Wanderer Fantasie de Schubert gagnée par une inépuisable frénésie. Et en bis une Litanei de Schubert/Liszt à pleurer. Le jeune homme de 19 ans que le Festival avait reçu en 2016 comme « jeune soliste » – un concert à l’époque enregistré par France Musique ! – confirme, sept ans plus tard, l’artiste exceptionnel, le virtuose inspiré, le doux poète qu’il était déjà.

Gabriel le magnifique

Gabriel Bacquier est mort à quatre jours de son 96ème anniversaire.

Je laisse aux spécialistes le soin de dire en termes choisis et experts tout le bien qu’il faut penser de la longue carrière du baryton français le plus célèbre de la seconde moitié du XXème siècle.

Je n’ai jamais entendu Gabriel Bacquier autrement qu’au disque, mais dans chacun de ceux où il paraissait j’ai toujours aimé ce personnage admirable. Cette voix chaleureuse qui semblait ne pas connaître de limite de puissance ni de couleurs. Bien sûr la parfaite incarnation de certains rôles qu’il ne poussait jamais à l’excès (dans Verdi comme dans Offenbach). Et cette diction, cette manière qu’on croit révolue de chanter le français, sans affectation mais dans une forme de perfection dont tant de plus jeunes chanteurs auraient raison de s’inspirer.

Est-il incongru de préférer cette vision pleine et chaleureuse de la mélodie de Duparc à celle, plus précieuse, d’un Gérard Souzay ?

 

Il reste heureusement beaucoup de témoignages de cet art magnifique au disque, à commencer par cette indispensable compilation :

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71wSWOvWrHL._SL1367_Dans cette version de stars des Contes d’Hofmann, Gabriel Bacquier sauve la mise, par sa diction parfaite qui contraste avec le sabir dont font usage ses deux illustres comparses.