Bi…ou tricentenaire

L’autre Scarlatti

Je me rappellerai longtemps la folle aventure des 555 sonates de Scarlatti données au cours de l’été 2018 dans toute l’Occitanie dans le cadre du Festival Radio France.

Ce très précieux legs est disponible sur le site de France Musique en 185 épisodes !

Mais celui qu’on célèbre aujourd’hui n’est pas le fils, Domenico, mais le père Alessandro Scarlatti, mort il y a 300 ans, le 24 octobre 1725 à Naples. De nouveau on invite à se tourner vers France Musique pour découvrir et décrypter « l’énigmatique Alessandro Scarlatti » avec Clément Rochefort et Xavier Carrère.

Je veux saluer ici un coffret qu’on n’attendait pas vraiment, mais qui constitue une très belle introduction à l’oeuvre si profuse du père Scarlatti

Difficile de détailler ces 9 CD, mais on est en très bonne compagnie avec Gérard Lesne, Véronique Gens, il Seminario Musicale, Fabio Biondi, Nancy Argenta et bien d’autres du même acabit, nombre de cantates, de motets, les oratorios Il Sedecia re di Gerusalemme, La santissima Trinita, les concerts grossi, etc.

C’est sans doute l’enregistrement le plus ancien du coffret, mais je l’ai eu longtemps sur un CD en collection très économique, avec la merveilleuse Helen Donath et notre Maurice André national :

Chiche bicentenaire

On en reparlera abondamment le moment venu : le bicentenaire de la naissance de Johann Strauss, c’est dans quelques jours.

Vendredi et samedi dernier, l’Orchestre national de France annonçait un « Gala Johann Strauss ». Franchement chiche comme programme : une ouverture (du Baron Tzigane), une seule valse et quatre polkas, dont une de Josef le frère ! On peut réécouter ce concert sur France Musique et vérifier les éloges que j’ai faits du chef, Manfred Honeck et des musiciens du National, sur Bachtrack : L’hommage du National et Honeck à Strauss fils.

Je ne pense pas que Manfred Honeck le Viennois – il a été violoniste au Philharmonique de Vienne jusqu’en 1991 – ait beaucoup de concurrents pour diriger cette musique. Mais on préfère sans doute inviter le 1er janvier des chefs plus « people » pour le traditionnel concert du Nouvel an (Nézet-Séguin le 1er janvier 2026 fera-t-il mieux que le petit tour de Dudamel en 2017 ?) !

Comme je l’écris pour Bachtrack, Honeck fait plus d’une fois penser, dans sa gestique, à un grand aîné qu’il a eu tout loisir d’observer lorsqu’il jouait dans l’orchestre, Carlos Kleiber…

On recherchera les quelques disques de la famille Strauss qu’il a enregistrés avec Bamberg ou les Wiener Symphoniker

Dans mes prochaines brèves de blog je reviendrai sûrement sur l’épisode peu glorieux du « casse » du Louvre…

Bruckner et alors ?

On y est, on l’avait annoncé : Les anniversaires 2024 : Bruckner. Le compositeur autrichien est né le 4 septembre 1824 à Ansfelden près de Linz.

Honnêtement, on n’a rien attendu, ni rien à attendre de ce bicentenaire. Rien à découvrir de caché, aucune nouvelle édition « originale », certes quelques nouveautés discographiques plutôt marginales. Mais une « première » au festival de Salzbourg le 15 août dernier : Riccardo Muti dirigeant la 8e symphonie à la tête des Wiener Philharmoniker ! Peut-être pas indispensable…

Alors pour marquer le coup, indépendamment de mes « références » Jochum, Schuricht (relire mon billet de janvier), quelques versions que je chéris particulièrement des symphonies et de quelques grandes oeuvres chorales de Bruckner :

1ere symphonie (1868) : pourquoi pas l’une des premières gravures du jeune Claudio Abbado avec l’Orchestre philharmonique de Vienne (1970) pour Decca… et la toute dernière à Lucerne en août 2012

Symphonie n°2 (1872)

C’est par Carlo-Maria Giulini et sa version enregistrée, en 1974, avec l’orchestre symphonique de Vienne que j’ai naguère découvert cette 2e symphonie. Je lui garde toutes mes faveurs.

Symphonie n°3 (1874)

Carl Schuricht bien sûr avec les Wiener Philharmoniker, mais aussi le grand Kurt Sanderling et le formidable Gewandhaus de Leipzig ou un « live » de 1978 aux Prom’s.

Signalons aussi un « live » prodigieux à Amsterdam, qu’on trouve désormais dans un coffret issu de la monumentale (et très coûteuse) édition de prises de concerts de l’orchestre amstellodamois.

Symphonie n°4 (1874)

La plus connue, la plus jouée (?) des neuf symphonies, peut-être à cause de son surnom « Romantique », est aussi la plus enregistrée. Il y a pléthore d’excellentes versions. Celle-ci est un peu passée sous les radars : Istvan Kertesz (1929-1973) l’enregistrait en 1966 avec l’orchestre symphonique de Londres.

Symphonie n°5 (1878)

Sans doute impressionné par sa longueur, son aspect monumental, c’est la symphonie de Bruckner que j’écoute le moins. Peut-être est-ce pour cela que j’aime la version du jeune Lorin Maazel à Vienne, parce qu’il ne la traite pas justement comme un monument, peut-être un peu trop « tchaikovskien » ?

On aura bientôt la chance de redécouvrir la somme enregistrée à Cleveland par Christoph von Dohnányi qui fête ses 95 ans (!) ce 8 septembre, en particulier les 6 symphonies de Bruckner qu’il a gravées et qui n’ont jamais été bien distribuées en France

Symphonie n°6 (1881)

A l’inverse de la Cinquième, c’est sans doute la symphonie de Bruckner que j’écoute le plus souvent. Je pourrais citer Klemperer, Rögner, Haitink, Sawallisch dans mes favoris, mais j’ai découvert récemment cette réédition d’un chef magnifique, qui n’a jamais bénéficié de la notoriété de ses contemporains, Ferdinand Leitner (1912-1996)

Je me rappelle avoir programmé cette 6e symphonie à Liège en 2008 avec le chef finlandais Petri Sakari. Grand souvenir !

Symphonie n°7 (1884)

Ici aussi pléthore de grandes versions. Pour l’émotion de ce concert de 2005 – avec en première partie Alfred Brendel dans Beethoven ! – Claudio Abbado au festival de Lucerne.

Symphonie n°8 (1892)

Au disque, définitivement et sans concurrence, Eugen Jochum à Berlin.

Et en vidéo, ce témoignage bouleversant d’un Karajan en fin de vie qui y jette ses dernières forces.

Symphonie n°9 (1887)

Comme Jochum pour la 8e, j’en reviens toujours à Carl Schuricht pour la 9e symphonie, magnifique gravure en stéréo (1961) avec l’Orchestre philharmonique de Vienne. Et un deuxième mouvement qui est véritablement un scherzo…

Pour les oeuvres chorales, en dépit de quelques réussites individuelles, la somme enregistrée par Eugen Jochum reste insurpassée.

PS Je préfère anticiper les commentaires/reproches que la publication de ce billet va inévitablement susciter. Ce sont ici quelques choix très subjectifs, qui ne prétendent aucunement constituer une sorte de « discothèque idéale » de Bruckner encore moins résumer ma propre discothèque en la matière. Inutile donc de me rappeler les mérites de Blomstedt, Celibidache, Karajan, Klemperer, Jochum/Dresde, Masur, Skrowaczewski, Wand et tant d’autres… !

Les anniversaires 2024 (III) : Bruckner

Pas sûr que les réfractaires à ce compositeur – il y en a, et des convaincus ! – changent d’avis à l’occasion du bicentenaire de la naissance d’Anton Bruckner (1824-1896). On se demande d’ailleurs ce qu’on aura encore à découvrir. On pourrait consacrer un billet par jour à la seule discographie de ses symphonies, jadis l’apanage des formations et des chefs germaniques, aujourd’hui au répertoire de toute phalange qui se respecte.

Bruckner ou l’infini

Je jette juste ici deux interprètes qui m’ont ouvert la porte de l’univers brucknérien, vers lesquels je reviens toujours comme on revient à la source. Sans autre commentaire.

Eugen Jochum (1902-1987)

Carl Schuricht (1880-1967)

Trois gravures avec les Wiener Philharmoniker (3e, 8e, 9e symphonies), et pour moi une 9e symphonie insurpassée.

Qu’on écoute à 25’36 », Schuricht est le seul à diriger un véritable Scherzo, accentué sur le premier temps, sans donner l’impression de lancer une Panzerdivision à l’assaut. Et puis ces cors, ce hautbois viennois, si savoureux !

Le paysan de Dieu

On profitera, je l’espère, de ce bicentenaire, pour redécouvrir, réécouter, l’oeuvre chorale de Bruckner, qui illustre sans doute le mieux celui qu’on a décrit comme « le paysan de Dieu ».