Pépites portugaises

J’ignore l’origine de l’expression bien peu distinguée « avoir les portugaises ensablées » ! En l’occurrence, c’est tout le contraire qui s’est produit le week-end dernier pour quelques milliers d’auditeurs/spectateurs du Festival international de Marvão. Les oreilles grandes ouvertes pour apprécier toutes les pépites musicales qui nous étaient offertes par une manifestation encore jeune (c’en était la 9ème édition) mais qui honore véritablement le concept même de festival !

Les lieux sont spectaculaires : à 2h30 de route à l’est de Lisbonne, un promontoire rocheux culminant à 900 mètres et dominant toute la plaine de l’Alentejo, à quelques kilomètres de l’Espagne.

La citadelle de Marvão

Parmi les concerts « couverts » pour Bachtrack, le week-end dernier, j’ai particulièrement apprécié la Cinquième symphonie de Mahler qu’a osé proposer l’Orquestra XXI – un orchestre de jeunes musiciens portugais, tous en poste dans de grandes phalanges étrangères, qui se retrouve trois fois l’an pour travailler sous la houlette de leur fondateur, ‘un chef extrêmement prometteur Dinis Sousa. Lire mon compte-rendu enthousiaste sur Bachtrack.fr : Un grand Mahler au festival de Marvão.`

Deux brefs extraits captés par mon téléphone portable…

Auparavant on aura assisté à une vraie Schubertiade, d’inégal intérêt mais avec un quatuor vocal qui restituait bien l’atmosphère de ces soirées amicales qu’affectionnait tant Schubert.

Le dimanche, dans la même petite église Saint-Jacques, où la température était à peine inférieure aux plus de 30° qui régnaient sur le village, c’était au tour d’un sextuor de jeunes Portugais de nous régaler d’un programme vraiment original (compte-rendu à lire ici : Le triomphe de la jeunesse à Marvão )

(de gauche à droite : Diogo Coelho, Gonçalo Lelis, Ricardo Caspar).

Le soir concert final comme on les aime, un joli patchwork de pièces connues.

Au premier rang, sans protocole, le président de la République portugaise Marcelo Rebelo de Sousa (un petit air d’Yves Montand !) soutien de toujours du Festival.

(de gauche à droite, la soprano Juliane Banse, la jeune violoniste (16 ans!) Leia Zhu, le flûtiste Michael Faust, Christoph Poppen, le clarinettiste Horacio Ferreira, la mezzo Caterina Sereno, le baryton Nikolai Borchev)

Lorsque la nuit est tombée, la citadelle de Marvao s’éclaire aux couleurs du Portugal

Le sesquicentenaire oublié

Cherchez bien son nom dans les programmes de concerts, dans les saisons symphoniques, voire dans les bacs des disquaires. Absent, oublié, inconnu…

C’est pourtant l’un des compositeurs français les plus originaux, les plus admirés de ses contemporains : Charles Koechlin (prononcer Ké-klin), né le 27 novembre 1867, mort le 31 décembre 1950, n’a jamais eu la renommée de Ravel, Roussel, Fauré, Debussy, alors que ces deux derniers, admiratifs de sa science de l’orchestre; lui avaient confié l’orchestration de certaines de leurs oeuvres (Pelléas et MélisandeKhamma)

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Pourquoi cet oubli, cette ignorance ? notamment de la part de chefs  qui ont tant fait pour la musique française, Plasson, Cluytens..

Musique trop sophistiquée, pas assez « mélodique » pour qu’on la retienne facilement ?

Le salut est venu de chefs étrangers qui ont commencé à combler un vide discographique incompréhensible,  Antal Dorati, James Judd, David Zinman.

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Mais c’est surtout à l’immense musicien, compositeur et hautboïste suisse, Heinz Holligerqu’on doit une véritable entreprise de réhabilitation de Charles Koechlin avec une formidable anthologie orchestrale, gravée en une dizaine d’années avec l’orchestre de la radio de Stuttgart (SWR), rééditée en coffret super-économique.

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Tout est à écouter, à découvrir, parfois s’y reprendre à plusieurs fois – l’Offrande musicale est d’une austérité qui peut décontenancer à la première audition ! – les mélodies (avec Juliane Banse) sont de pures merveilles

L’oeuvre pour piano et la musique de chambre de Koechlin sont tout aussi passionnantes

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Laissez-vous aller à égrener Les Heures persanes dans leur version piano puis orchestre…