Les bonheurs de novembre

Heureux Misérables

C’était jeudi soir, des places prises il y a plusieurs semaines, et un retour dans ce théâtre du Châtelet où l’on n’a que de bons souvenirs.

Je me rappelais vaguement la production anglaise des Misérables d’Alain Boublil et Claude-Michel Schönberg, au printemps 2010 dans ce même théâtre.

Ce qui est proposé cet hiver est bien une nouvelle version en français, dans une nouvelle mise en scène de Ladislas Chollet, qui a fait l’unanimité de la critique (Un retour en majesté, Le souffle lyrique des Misérables)

La performance des auteurs est déjà d’avoir réussi à « résumer » cette oeuvre-monde de Victor Hugo dans une suite de tableaux immédiatement compréhensibles et celle du metteur en scène de n’avoir jamais chargé la barque, ni recouru à des effets spectaculaires comme on les aime souvent du côté de Broadway ou du West End à Londres (où le musical tient l’affiche depuis plus de quarante ans !). Trois heures de beau et grand spectacle.

C’est évidemment la partie musicale qui m’intéresse le plus. Plus qu’une succession d’airs qu’on mémorise, C.M. Schönberg a conçu ces Misérables comme un flux, un continuum, qui donne certes lieu à des solos, des duos, et des ensembles qu’on attend, qui nous émeuvent, nous touchent. C’est admirablement écrit pour les voix et l’orchestre d’une quinzaine de musiciens, dirigé en alternance par deux cheffes, Alexandra Cravero et Charlotte Gauthier, est exceptionnel.

Je cite Emmanuel Dupuy dans Diapason :

« Sur scène, chacun se consume dans des rôles plus dramatiques que burlesques – à l’exception des exécrables époux Thénardier qui offrent à Christine Bonnard et David Alexis matière à exceller dans la mesquinerie. La Fantine de Claire Pérot tire les lames par sa fragilité, même si son célèbre « J’avais rêvé d’une autre vie » mériterait un peu plus d’ampleur. Le Javert de Sébastien Duchange est d’une sublime brutalité, terrible et vulnérable dans son grandiose serment aux étoiles comme dans sa scène de suicide. Les jeunes gens sont tous impeccables, habités d’un idéalisme sans borne, que ce soit la Cosette de Juliette Artigala, le Marius de Jacques Preiss, l’Eponine d’Océane Demontis, l’Enjolras de Stanley Kassa. Dans ce concert de louanges, n’oublions surtout pas les gamins (Gavroche, Cosette et Eponine enfants) issus de la Maîtrise des Hauts-de-Seine. Celui qui remporte la plus incontestable victoire, c’est cependant et comme il se doit Benoît Rameau, ténor souvent entendu dans nos théâtres lyriques, qui incarne ce soir un Jean Valjean atypique par sa tendresse juvénile, mais d’un bout à l’autre bouleversant. Avec dans ses phrasés des éclats, des demi-teintes, une irrésistible poésie – en particulier dans sa touchante prière (« Comme un homme ») qu’il n’hésite pas à chanter en voix mixte. » (Diapasonmag, 28/11/24)

La renaissance de Notre Dame

Jeudi après-midi, je repassais devant Notre-Dame, comme je l’ai fait souvent depuis le 15 avril 2019.

(La façade de Notre-Dame de Paris dans l’après-midi du 28 novembre 2024)

Le lendemain, j’ai suivi, fasciné, la visite présidentielle.

Mais j’avais eu comme un avant-goût de cette redécouverte de Notre-Dame, en visitant une autre Notre-Dame, celle de Chartres, il y trois semaines (voir album photo ici), qui bénéficie depuis plusieurs années d’une restauration impressionnante, et où le contraste entre avant et après est saisissant :

Le bonheur d’un film

Rien à voir avec cette fin de semaine parisienne, mais ce fut l’un des bonheurs de cette fin novembre, ce film de Gustave Kervern, diffusé par Arte. Un peu de Groland, beaucoup de Deschiens, un duo d’actrices Yolande Moreau, Laure Calamy, impayable, deux flics déjantés (Raphael Quenard, Anna Mouglalis), une directrice d’Ehpad – géniale Alison Wheeler – qui ressemble à l’assistante stressée d’un patron du CAC 40, et tout un tas d’autres qu’il faudrait citer.

A voir et à revoir.

Chez Tante Léonie et les favorites

J’ai mis à profit le week-end du 11 novembre pour visiter une région pourtant proche de la mienne, où je n’ai longtemps fait que passer sans m’arrêter. Quatre étapes : le château de Diane de Poitiers à Anet, malheureusement non visitable, puis la « Maison de Tante Léonie » autrement dit le Musée Marcel Proust à Illiers-Combray , le château de Maintenon, sur les traces de l’épouse morganatique de Louis XIV, et bien sûr Chartres.

Le château de Diane

Je m’étais toujours demandé pourquoi la favorite du roi Henri II était nommée Diane de Poitiers, alors qu’elle est originaire du Dauphiné. J’ai eu la réponse en lisant l’excellente notice Wikipedia qui lui est consacrée : la Maison de Poitiers-Valentinois tire son nom non de la capitale du Poitou, mais d’une déformation du lieudit Peytieux à Châteauneuf-de-Bordette dans l’actuel département de la Drôme.

C’est donc pour cette Diane dauphinoise qu’Henri II fait construire le château d’Anet, un magnifique ensemble Renaissance (voir l’album photos complet ici

L’enfance de Marcel Proust

Je ne suis un lecteur intermittent de Proust, je me fais régulièrement la promesse de reprendre La Recherche. Après cette visite, je vais peut-être finir par l’honorer ! J’ai en fait suivi les aventures du très actif président de la Société des Amis de Marcel Proust, Jérôme Bastianelli, dont je connais surtout les casquettes musicales, qui ne s’est pas ménagé pour faire rénover et rouvrir cette fameuse « Maison de Tante Léonie« , que le jeune Marcel visitait enfant, à Illiers-Combray.

Il ne faut pas s’arrêter à Illiers-Combray, à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest de Chartres, pour ses bonnes tables. Il n’y en a que de médiocres. En revanche, tout est fait pour qu’on se passionne pour ce musée qui n’est pas réservé, loin s’en faut, aux seuls lecteurs de Proust. Voir l’album complet ici

Comme la musique n’est jamais loin de Proust, j’ai trouvé ce roman que j’ai hâte de lire :

Jérome Bastianelli invente une biographie de l’auteur de cette fameuse sonate, si souvent évoquée par Proust. On veut bien croire l’éditeur qui la présente comme un premier roman brillant et surprenant, qui, si on n’a pas lu Proust, peut se lire comme la biographie imaginaire d’un grand musicien et qui, si on l’a lu, se révèle comme une délicieuse interprétation critique d’un des plus grands romans du XXe siècle,

La marquise et sa nièce

A quelques kilomètres à l’est de Chartres, c’est une autre résidence d’une autre célèbre favorite, qui se visite, et qui vaut vraiment le détour. C’est le château qu’acquiert en 1674 Françoise d’Aubigné, plus connue comme marquise de Maintenon, d’abord gouvernante des enfants illégitimes de Louis XIV et de Madame de Montespan, puis épouse morganatique du monarque après la mort de la reine Marie-Thérèse. Le château porte surtout la marque de la famille de Noailles, descendante de la nièce de Madame de Maintenon, Françoise.

La marquise de Maintenon et sa nièce Françoise, devenue duchesse de Noailles

Il faut absolument visiter le château et ses nombreuses pièces meublées avec goût (pour l’essentiel au XIXe siècle à l’initiative du maréchal Paul de Noailles), et de somptueux jardIns. Voir l’album photos complet ici.

On a évidemment repéré ce superbe clavecin Albert Dellin (Tournai 1768) laissé en dépôt par le grand claveciniste canadien Kenneth Gilbert (1931-2020)

Un millénaire à Chartres

Le chef-lieu du département d’Eure-et-Loir célèbre cette année le millénaire des fondations de sa célèbre cathédrale.

La restauration/rénovation dont a bénéficié la cathédrale depuis vingt ans laisse imaginer ce que nous découvrirons à Paris dans l’autre Notre-Dame. Très impressionnant ! Voir les photos ici.

Le centre ville n’est pas grand et malgré les bombardements de 1944 conserve quelques beaux témoignages de la ville ancienne, notamment dans sa partie basse.