Bouquet d’hommages

Michel Bouquet ou l’ambiguïté

C’est très certainement à juste titre que Michel Bouquet ploie sous les hommages unanimes et je n’aurai pas l’outrecuidance d’exprimer une voix divergente. M’en voudra-t-on si je ne suis pas un admirateur béat de l’acteur de théâtre des dernières années, ai-je le droit de trouver qu’à la fin Michel Bouquet faisait du Michel Bouquet, sans que son talent soit le moins du monde en cause ?

Pour tout dire, j’aime plutôt me rappeler l’exceptionnel acteur de cinéma, ces personnages d’une féroce ambiguïté que lui confièrent Truffaut, Chabrol et quelques autres plus oubliés dans les années 70.

Avant et après

J’avais oublié de signaler dans mes devoirs de vacances ce livre de poche commencé nonchalamment il y a quelques semaines, et achevé avant-hier. Alain Duhamel a publié cet essai au début de 2021, et comme toujours celui-ci ne se résume pas à son titre. C’est beaucoup moins un portrait, certes vif, acéré, sans complaisance aucune, du président-candidat, qu’une analyse particulièrement affinée de l’évolution des forces politiques… et des candidatures, alors vraisemblables, à l’élection présidentielle.

C’est un exercice très amusant que de commencer ce type de livre avant une élection et de le terminer une fois le résultat partiellement connu. Ce que Duhamel dit des candidats et candidates qui ont concouru est à la fois impitoyable et d’une justesse impérieuse (Hidalgo, Pécresse, Bertrand, Jadot, Mélenchon, etc.).

L’évidence

Je n’ai besoin d’aucun soutien, d’aucune justification, d’aucune excuse, pour affirmer que, le dimanche 24 avril, le choix, mon choix, est clair : je vote Macron. Même pas parce que je ne supporte pas, n’ai jamais supporté ni l’extrême droite, ni l’extrême gauche. Mais tout simplement parce qu’Emmanuel Macron c’est le seul qui défie la comparaison avec tous ses concurrents. Il est plein de défauts, d’oublis, de tout ce que les éditorialistes adorent reprocher à un président de la République. Mais c’est le seul. Aujourd’hui. Donc c’est lui dimanche prochain.

Aznavour l’amoureux de la langue française

Je ne me suis pas cru obligé de commenter immédiatement la disparition de Charles AznavourRéticence naturelle à me soumettre à la dictature de l’émotioncomme en décembre dernier avec la mort de Johnny Hallyday (et de Jean d’Ormesson).

Je n’ai eu aucune occasion de rencontrer Charles Aznavour, ni d’assister à l’un de ses tours de chant. Il y a quelques années, l’orchestre philharmonique de Liège avait été approché pour accompagner le chanteur dans une tournée européenne, les choses ne se sont pas faites et lorsque Charles Aznavour est venu chanter au Forum de Liège, il n’a malheureusement pas laissé un grand souvenir aux spectateurs qui avaient payé très cher leurs places pour une prestation qui avait duré à peine une heure…

Au début de l’été, j’avais juste aperçu la frêle silhouette du vieil homme, appuyé sur une canne, entrant dans le restaurant proche de la Maison de la radio où je déjeunais.

Mais Aznavour était déjà un monument national avant de disparaître.

Le meilleur article que j’aie lu sur lui est celui de Véronique Mortaigne dans Le Monde.

Extraits :

Charles Aznavour, c’était la France. Pas celle d’Edith Piaf – le réalisme, les faubourgs, les mômes de rien –, ni celle de Maurice Chevalier ou de Charles Trenet. Aznavour, c’était la France internationaliste, terre d’accueil, qui sait enseigner aux enfants de la République les valeurs fondamentales, mais aussi le charme, le romantisme sexy, et une sorte de légèreté en équilibre constant entre le Nord introverti et le Sud extravagant.

L’universalité d’Aznavour doit à ses mots, droits, utilisés avec une précision chirurgicale. Et par les mélodies, de celles qui tombent dans l’oreille. Et tout le monde de fredonner : « J’habite seul avec maman/Dans un très vieil appartement/Rue Sarasate/J’ai pour me tenir compagnie/Une tortue, deux canaris/Et une chatte. »

Dans cette archive (un Grand Echiquier ?) où Charles Aznavour est accompagné – grand luxe – par Alexis Weissenbergdans une chanson qui n’est pas parmi les plus connues, on mesure ce que souligne Véronique Mortaigne, l’amour de la langue française, du maniement, du choix des mots. C’est peut-être le plus étonnant, s’agissant d’un auteur qu’on n’a jamais associé aux chanteurs « à texte » (comme Ferré, Brel, Brassens, ou Trenet). Je vais peut-être réécouter différemment certaines chansons…

Les médias, les réseaux sociaux, ont évoqué surtout le chanteur, et un peu négligé l’acteur : Aznavour et le cinémaOserai-je dire qu’il m’a plus souvent intéressé et touché dans ce registre ? Dans des rôles magnifiques d’humanité.

https://www.youtube.com/watch?v=K3ZSR231ScY

Hommage Monsieur Aznavour !