Il y a un an – on était confinés ! – j’écrivais ceci :
Si comme moi vous ne supportez plus d’entendre de mauvaises versions de chants de Noël – comme Jingle bells – dans les rues commerçantes ou les grandes surfaces, revenez à la tradition des Boston Pops et de leur chef légendaire Arthur Fiedler (1894-1979). Comme à cette pièce qui évoque d’abord l’hiver de Leroy Anderson, écrite en 1948 : Sleigh Ride (23 décembre 2020)
Mais puisque Noël va se fêter en blanc dans tous les massifs montagneux de France et d’Europe, arrêtons-nous sur une chanson White Christmas.
L’histoire de ce tube commence mal pour le compositeur Irving Berlin (1888-1989) et sa seconde épouse Ellin McKay : le 25 décembre 1928 ils perdent leur fils Irving jr, âgé seulement de 24 jours. Chaque année ils vont fleurir sa tombe. C’est le jour de Noël 1941, quelques jours après l’entrée en guerre des Etats-Unis, qu’on entend à la NBC Bing Crosby chanter ce qui va devenir un tube planétaire.
Le 29 mai 1942 Bing Crosby enregistre la chanson dans les studios de Decca avec le John Scott Trotter Orchestra et les Ken Darby Singers. Le single se vendra à cinquante millions d’exemplaires, ce qui en fait le titre le plus vendu dans le monde !
On retrouvera Bing Crosby et Danny Kaye en 1954 dans le film éponyme de Michael CurtizWhite Christmas
Le succès planétaire de cette chanson a été amplifié par de multiples reprises, plus ou moins heureuses.
Pas sûr par exemple qu’Elvis Presley soit inoubliable dans cette version :
En revanche, comme toujours, on fond en écoutant Ella Fitzgerald
… ou mon crooner préféré, Dean Martin.
Même Dalida s’y était mise !
On aime beaucoup Jonas Kaufmann, mais on doit bien avouer qu’on n’est pas très convaincu par cette nouveauté
Je vais, pour ma part, en rester à la douce nostalgie des Boston Pops et de leur légendaire conductorArthur Fiedler
et recommander ce disque improbable, qui reste, à tous égards, un disque de démonstration, une modeste mais merveilleuse chorale suédoise, un petit label, une prise de son exceptionnelle.
Et puis si vous voulez accompagner votre réveillon d’une magnifique « playlist », on recommande sans réserve. ceci :
Lors du premier confinement au printemps dernier j’avais entrepris de publier chaque jour sur Facebook une symphonie de Haydn (il y en a… 107!) dans des versions aussi contrastées et originales que possible.
Depuis le reconfinement intervenu en France le 30 octobre dernier, j’ai entamé une nouvelle série d’enregistrements, tirés de ma discothèque personnelle, qui présentent un caractère de rareté, une oeuvre inhabituelle dans le répertoire d’un interprète, un musicien qui emprunte des chemins de traverse, un chef qui se hasarde là où on ne l’attend pas… Récapitulation d’une première décade de publications:
2 novembre
Aujourd’hui Claudio Abbado dirigeant le Concert de l’an 1991 des Wiener Philharmoniker: l’ouverture de l’opérette Waldmeister (1895) de Johann Strauss
#ElectionDay En ce jour d’élection présidentielle américaine, cet extrait d’une soirée donnée au Carnegie Hall de New York en 1988 pour le centenaire d’Irving Berlin. Marilyn Horne chante « God bless America« .
4 novembre
En attendant les résultats de l’élection américaine, ce témoignage inattendu d’hommage au drapeau américain de la part d’Antonin Dvorak, directeur du Conservatoire de New York de 1892 à 1895. Michael Tilson Thomas dirige le RSO Berlin
5 novembre
Un compositeur américain d’origine russe, Alexei Haieff`(1914-1994) qui m’était complètement inconnu avant que je le découvre dans le gros coffret RCA des rééditions de Charles Munch (1891-1968). La 2ème symphonie de Haieff a été créée le 11 avril 1958 par Munch et le Boston Symphony Orchestra
6 novembre
Pour rester dans la sphère américaine, cette étonnante pépite de la discographie du vénérable chef britannique Adrian Boult (1889-1983) qui, à 80 ans passés, enregistre un bouquet de marches, dont la célébrissime « Stars and Stripes forever » de John Philip Sousa (1854-1932) – lire America is beautiful
7 novembre
Le grand Fritz Reiner(1888-1963) délaisse son orchestre de Chicago pour enregistrer, en 1962, à Londres, avec le Royal Philharmonic Orchestra, une extraordinaire Quatrième symphonie de Brahms, celle que je place au sommet de ma discographie de l’oeuvre. Une version rare, superbement enregistrée par Kenneth Wilkinson au Walthamstow Town Hall, publiée par Chesky Records
8 novembre
Clin d’oeil au nouveau président élu, Joe Biden, à la nouvelle vice-présidente élue, Kamala Harris,la plus surprenante des versions de l’ouverture de « Candide » de Bernstein… ou quand le grand chef russe Evgueni Svetlanov (1928-2002) se déchaîne en public à la tête du London Symphony Orchestra au Festival d’Edimbourg le 28 août 1978.
9 novembre
Le 9 novembre 1989 le mur érigé en 1961 entre Berlin Ouest et Berlin Est cédait sous la ferveur populaire.Le 25 décembre, dans la superbe salle du Konzerthaus (à l’époque à Berlin-Est), Leonard Bernstein – qui allait mourir dix mois plus tard – dirigeait la Neuvième symphonie de Beethoven, dont le finale était rebaptisé « Ode an die Freiheit » (Ode à la liberté). Ce concert réunissait autour de l’orchestre de la Radio bavaroise des musiciens des orchestres de Paris, Dresde, Londres, New York et Leningrad (Kirov), les choeurs de la radio bavaroise, de la radio de Berlin-Est et le choeur d’enfants de Dresde, ainsi que quatre solistes June Anderson (USA), Sarah Walker (Grande-Bretagne), Klaus König (RDA) et Jan-Hendrik Rootering (Pays-Bas)
10 novembre
Dans le prolongement de l’élection présidentielle américaine, cette absolue rareté dans la discographie pourtant très abondante d’Antal Dorati, un disque intitulé « Be Glad then America! » et cette oeuvre de Robert Russell Bennett (1894-1981), une commande de l’orchestre National de Washington pour le bicentenaire de l’Indépendance en 1976 : « The fun and faith of William Billings, American ».William Billings (1746-1800) est considéré comme le père de la musique chorale américaine
11 novembre
Le chef suisse Ernest Ansermet est né le 11 novembre 1883 (et mort le 20 février 1969). Il a réalisé l’essentiel de ses enregistrements pour Decca avec l’ OSR – Orchestre de la Suisse Romande qu’il avait fondé en 1918. Ici il dirige, le 17 mars 1966 (à 83 ans), avec une énergie juvénile, un répertoire où il était moins attendu, la Troisième symphonie de Brahms à la tête de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks
Voici ce que j’écrivais le 8 avril 2016 – On aime Brahms –
Quant à la 3ème symphonie, depuis que François Hudry me l’avait fait découvrir, je mets au premier rang un chef qu’on n’associe pas spontanément à Brahms (et qui a pourtant réalisé une très belle intégrale – méconnue – chez Decca avec « son » Orchestre de la Suisseromande), Ernest Ansermet, avec l’orchestre de la Radio bavaroise, un « live » de 1966. Tout simplement exceptionnel !
Passage chez mes disquaires habituels en début de semaine. Maigre moisson, mais de grande qualité. On reparlera bien vite de deux grandes dames du piano, honorées l’une et l’autre par de bien beaux coffrets, Yvonne Loriod et Anne Queffélec.
J’ai failli ne pas repérer une boîte (blanche) au titre intrigant :
À une époque – la nôtre ! – qui se veut si « politiquement », donc lexicalement, correcte, proposer un titre aussi explicite que Compositeurs noirs relève de l’inconscience (!). On attend un coffret dédié aux compositeurs homosexuels, ou juifs, ou musulmans… (on l’a déjà fait pour des compositeurs francs-maçons).
Trève d’ironie facile, le projet lancé par CBS aux Etats-Unis, dans l’Amérique de Nixon, peu après l’assassinat de Martin Luther King, sous l’égide du chef d’orchestre noir Paul Freeman (1936-2015) était aussi utile que séduisant. Ce sont les neuf 33 tours de cette série d’enregistrements constituée de 1974 à 1978 qui sont réédités dans ce boîtier (complétés par un disque d’arrangements symphoniques de Spirituals) et qui illustrent les grands figures musicales noires du continent nord-américain. Plusieurs noms m’étaient déjà bien connus (le chevalier de Saint-George, William Grant Still, Samuel Coleridge-Taylor, George Walker…) mais je découvre les autres (Ulysses Simpson Kay, Roque Cordero, José Mauricio Nunes Garcia, José White, David Baker, Fela Sowande, Olly Woodrow Wilson, Thomas Jefferson Anderson, Talib Rasul Hakim, Hale Smith, Adolphus Hailstork…) Deux siècles de musique que cette entreprise remet en lumière. Merci à SONY d’avoir édité (pour la première fois en CD) ce précieux legs (disponible de surcroît à tout petit prix)
Diversité d’esthétiques, d’influences, d’inspirations, dans des interprétations de premier plan. On n’atteint pas toujours le chef-d’oeuvre, mais tout mérite écoute et intérêt.
Faye Robinson chante, dans un français plutôt approximatif, cette scène tirée de l’opéra-comique Ernestinecréé en juillet 1777 à la Comédie Italienne à Paris, qui fera un « bide » complet !
José White(!), de son nom complet José Silvestre White Lafitte, devrait lui aussi être familier à nos oreilles françaises. Né à Cuba en 1836, il est mort le 15 mars 1918… à Paris
Violoniste comme Saint-George, c’est au Conservatoire de Paris qu’il a étudié avec le soutien bienveillant de Rossini. Il dirigera le conservatoire impérial de Rio de Janeiro de 1877 à 1889 avant de revenir finir ses jours dans la capitale française. Le moins qu’on puisse dire est que la France l’a complètement oublié (le centenaire de sa mort il y a moins d’un an est passé sous les radars !) Et pourtant son unique concerto pour violon vaut d’être écouté, surtout sous l’archet vibrant du grand Aaron Rosand.
Avec Ulysses Simpson Kay, on change de siècle et on reste au pays. Né dans l’Arizona en 1917, le compositeur meurt en 1995 dans le New Jersey. Sa rencontre en 1941 avec Paul Hindemith, réfugié aux Etats-Unis, semble déterminer ses orientations stylistiques.
William Grant Still(1895-1978) fait, quant à lui, figure de pionnier (il est le premier chef noir à diriger le Hollywood Bowl en 1936), d’emblème de cette musique de « sang mêlé ». Son Afro-american Symphonypuise son inspiration dans le blues…
Et quand je disais que Neeme Järviavait exploré les plus larges répertoires au disque… en voici la preuve :