Redécouvrir Samson

Pour une fois, je précède un anniversaire, le centenaire de la naissance, le 18 mai 1924, du pianiste Samson François. Je suis tombé, par hasard, avant-hier soir sur LCP (La Chaîne Parlementaire) sur une rediffusion de l’émission Rembobina, animée par Patrick Cohen.

J’ai découvert un talent que je ne connaissais pas à l’ancien matinalier de France Inter, que je saluais parfois chez Carrette à côté de la maison de la radio : une excellente connaissance de la musique, et en l’espèce de Ravel et du héros du jour, le pianiste français mort à 46 ans en 1970. Même Eve Ruggieri, qui m’insupportait par son ton mondain (« Pava-reu-ti ») et ses approximations, m’a agréablement surpris par une vivacité d’esprit intacte à l’âge vénérable qui est le sien. Evidemment nous étions, eux et moi, nostalgiques d’une époque, d’abord les années 70 où la musique classique avait droit à la télévision à des émissions hebdomadaires à des heures de grande écoute, puis des années 80 et 90 avec des « Musiques au coeur » (1982-2009 !) qui ont fait défiler les plus grands interprètes (c’est par cette émission que j’ai eu la révélation de Felicity Lott par exemple).

Le son de Samson

Mais si j’ai été scotché devant mon écran par un artiste que je connaissais finalement trop peu et mal, bien que j’aie acquis en son temps le coffret récapitulatif des enregistrements réalisés pour Pathé-Marconi

Je me rappelle l’émotion qui avait saisi mes professeurs du modeste Conservatoire de Poitiers (lire Retour à Poitiers) à l’annonce de la mort brutale de Samson François en 1970. Je ne sais plus à quelle occasion, en revanche, le directeur de l’époque du Conservatoire, Lucien Jean-Baptiste (pas l’acteur !), m’avait fait écouter dans son bureau le 6e prélude de Chopin – sans doute était-ce au programme d’un examen ? – joué par Samson François, qu’il trouvait exemplaire de poésie.

Je me suis replongé avec autant de curiosité que de délectation dans ce coffret, les Chopin bien sûr, les Ravel si connus, que je m’en veux d’avoir négligés si longtemps, et des Debussy admirables.

Je citais dans mon récent article – Retour à Poitiers – les grands artistes que j’avais eu la chance d’entendre dans ma ville de jeunesse. Malheureusement je n’ai jamais entendu Samson François en concert, et j’ai toujours été réservé sur la légende entretenue à son propos – l’oiseau de nuit, porté sur l’alcool, la cigarette voire d’autres substances – comme s’il fallait absolument expliquer l’originalité d’un génie, comme si on avait oublié que le véritable artiste n’est jamais « conforme ». Merci à Patrick Cohen et Eve Ruggieri de m’avoir permis de le redécouvrir.