Monsieur le Comte est (bien) servi

Je n’avais pas gardé un grand souvenir de l’ouvrage lorsqu’il avait été représenté au Festival d’Aix-en-Provence en juillet 1995, je n’étais pas le seul : Le Comte Ory, une sage mécaniqueLes stars de l’époque, Sumi Jo, William Matteuzzi, n’étaient pas en forme, sans parler de leur diction du français…

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Comme on n’a jamais été déçu par la programmation de l’Opéra Comique (lire Fantastique Fantasio), et qu’on n’a que de grands souvenirs des dernières présences de Louis Langrée dans la Salle Favart, on arrivait hier soir à la première du Comte Ory dans les meilleures dispositions.

IMG_3489(Le foyer de l’Opéra Comique, rouvert il y a six mois : Donner sa voix)

Autant le dire sans ambages, on a adoré ce spectacle, la mise en scène de Denis Podalydès collant parfaitement au propos de Rossini (décors, lumières, costumes à l’unisson), une distribution qui réunit la crème du jeune chant français – impensable il y a encore vingt ans ! – Julie Fuchs en ComtessePhilippe Talbot en Comte Ory, Gaelle Arquez en Isolier, Eve-Maud Hubeaux en Dame Ragonde, Patrick Bolleire en Gouverneur, Jean-Sébastien Bou en Raimbaud, Jodie Devos en Alice, l’excellent choeur Les Eléments préparé par Joël Suhubiette, et dans la fosse les timbres fruités de l’Orchestre des Champs-Elysées, et la direction alerte, précise, mozartienne presque, de Louis Langrée, qui, comme toujours, révèle les trésors d’une partition éblouissante à laquelle je n’avais, à vrai dire, jamais porté grande attention.

Le public de cette première a fait un long triomphe à cette belle équipe.

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Avis aux amis belges, l’Opéra royal de Wallonie, dont le directeur était présent hier soir, est co-producteur de ce Comte Ory ! Et pour tout le monde, en direct sur CultureBox le 29 décembre 2017 et en différé sur France Musique le 21 janvier 2018.

Champs Elysées

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Deux soirées à une semaine d’intervalle dans une salle – le Théâtre des Champs-Elysées – où j’ai tant de beaux souvenirs.

Le 9 mai c’était la première d’une série de représentations de Pelléas et Mélisande de Debussy, qui s’est achevée hier soir.

IMG_9367(de gauche à droite, Jean Teitgen, Jean-Sébastien Bou, Louis Langrée, Christian Lacroix, Patricia Petibon, Eric Ruf, Bertrand Couderc, Kyle Ketelsen)IMG_9363

Je n’ai aucune objectivité quand Louis Langrée dirige, et singulièrement Pelléas. Depuis une production à tous égards mémorable du Grand Théâtre de Genève, en 2000, avec Alexia Cousin, Simon Keenlyside et José Van Daml’unique opéra de Debussy est pour moi indissolublement associé au chef français qui, comme le souligne Bruno Serrou dans La Croix « exalte avec une impressionnante maîtrise du temps et du son la dimension immémoriale de l’immense partition de Debussy. Il parvient à transcender la déclamation vocale grâce à un flux instrumental digne d’un océan. ».

L’interview de Louis Langrée dans Le Monde (Dans Pelléas, le drame est dans chaque note) est d’une telle évidence, qu’elle rendrait le plus rétif amoureux de la partition de Debussy, qui n’a, lui, rien fait pour séduire l’amateur d’opéra traditionnel : « J’ai voulu que l’action ne s’arrêtât jamais, qu’elle fût continue, ininterrompue. La mélodie est antilyrique. Elle est impuissante à traduire la mobilité des âmes et de la vie. Je n’ai jamais consenti à ce que ma musique brusquât ou retardât, par suite d’exigences techniques, le mouvement des sentiments et des passions de mes personnages. Elle s’efface dès qu’il convient qu’elle leur laisse l’entière liberté de leurs gestes, de leurs cris, de leur joie ou de leur douleur. »

Bref, on l’aura compris, j’ai passionnément aimé toute cette production, ses interprètes, sa mise en scène. Et je suis heureux que Louis Langrée poursuivre cette aventure Pelléas avec l’Orchestre National de France d’abord le 24 mai prochain en concert à l’Auditorium de la Maison de la radio, avec le Pelléas et Mélisande de Schoenberg et le 4ème concerto de Beethoven avec Nelson Freire (http://www.maisondelaradio.fr) et en enregistrant pour France Culture la musique de scène composée par Fauré pour le drame de Maeterlinck.

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Le 16 mai, c’était une autre fête, la réunion de deux belles voix, de deux tempéraments, plus qu’un récital de stars : Aida Garifullina et Lawrence Brownlee

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On avait applaudi la magnifique performance de la première dans Snegourotchka à l’Opéra Bastille (lire Femmes en scène). On se rappelait l’émotion qui avait saisi les milliers d’auditeurs/spectateurs du concert du 14 juillet 2014 sous la Tour Eiffel lorsque Lawrence Brownlee, remplaçant Juan Diego Florez, avait entonné son premier air…

10509504_10152253111387602_4227885483455547857_n(Une photo « historique » de ce 14 juillet 2014 ! De g. à dr. Anne Hidalgo, Bruno Julliard, François Hollande, JPR, Manuel Valls, Mathieu Gallet)

https://www.youtube.com/watch?v=F2LN3s87j-k

https://www.youtube.com/watch?v=UGn1bu8n1XQ

Et pour que le bonheur soit complet, l’Orchestre de chambre de Paris était dirigé par la belle et fougueuse Speranza Scappucci !

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PS. J’en reparlerai, mais la nomination de Françoise Nyssen comme Ministre de la Culture est une excellente nouvelle !

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Fantastique Fantasio

On a rarement eu de mauvaises surprises dans la programmation de l’Opéra Comique du temps de Jérôme Deschamps (Du rire aux larmes). 

Olivier Mantei poursuit sur la même lancée victorieuse, il espérait inaugurer le théâtre rénové par ce Fantasio dont nous avions parlé il y a plus de deux ans. Raté pour la salle Favart – mais y a-t-il jamais eu, en France, un chantier terminé à temps ? – mais pari formidablement relevé pour cette nouvelle production qui a trouvé un beau refuge sur la scène du Châtelet (qui doit aussi fermer bientôt pour rénovation, vous suivez ?).

Les spectateurs du Festival de Radio France et les millions d’auditeurs qui, grâce à France Musique, ont pu entendre, dans le monde entier, le concert du 18 juillet 2015, avaient déjà admiré une partition du meilleur Offenbachreconstituée par le grand spécialiste Jean-Christophe Keck, donnée dans une distribution éblouissante…

11219131_10153439694448194_6380105925159628429_n(Julie Depardieu en récitante, Marianne Crébassa en Fantasio, Omo Bello en Elsbeth le 18 juillet 2015 à Montpellier).

Sur la scène du Châtelet, on retrouve la révélation de cette version de concert, Marianne Crébassa, dans le rôle titre, ainsi que Jean-Sébastien Bou qui chantait déjà le prince de Mantoue, Loic Felix (Marinoni), Enguerrand de Hys (Facio) et toute une fine équipe de chanteurs, admirablement mis en scène par l’inventif et facétieux Thomas JollyDans la fosse, Laurent Campellone tire des sortilèges de poésie de l’orchestre philharmonique de Radio France.

Mention spéciale pour le programme vendu au public. Un parfait exemple de pédagogie intelligente, comme on aimerait en lire plus souvent. D’abord toute l’aventure de la « fabrication » de ce Fantasio, le making of (Chroniques d’un opéra), des textes clairs, sans jargon pour spécialistes, très documentés sur le compositeur, l’ouvrage, Mussetl’Opéra comique, les interprètes… Exactement ce qu’il faut pour enrichir l’expérience du spectacle.

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Il faut donc courir voir ce Fantasio, ou le repérer sur CultureBox et sur France Musique !

La fête continue

S’ils le disent et l’écrivent tous, c’est que ça doit être vrai : les festivals cet été font le plein, selon les observateurs les plus critiques ! Celui qui nous occupe à Montpellier non seulement ne déroge pas à ce constat, mais fait exploser les prévisions les plus optimistes.

Tant mieux ! C’est la meilleure garantie pour l’avenir et sans trahir le secret de leurs délibérations, on est heureux des décisions prises ce lundi à l’unanimité par les parties prenantes et qui ouvrent de belles perspectives. Ce ne sont pas encore les lendemains qui chantent, mais on est conforté dans une stratégie gagnante.

Il faut dire qu’on a été gâtés en émotions fortes ce week-end. Un Fantasio au casting de rêve, une création par un Orchestre National de France en grande forme.

11219131_10153439694448194_6380105925159628429_n(Julie Depardieu en récitante, Marianne Crébassa, magnifique Fantasio, Omo Bello en Elsbeth virtuose, Friedemann Layer et l’Orchestre National de Montpellier à leur meilleur)

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(Le compositeur René Koering et les interprètes de son concerto pour piano, créé par Yuri Favorin, Alexander Vedernikov et l’Orchestre National de France)

Ce lundi défilé en direct sur France Musique de la « génération 1985 », à laquelle succédait dans un Corum comble le récital de Piotr Anderszewski, un pianiste décidément rare à tous les sens du terme. Ce soir invités pour la première fois au Festival les musiciens de l’Orchestre National de Bordeaux Aquitaine et mon ami Paul Daniel avec la mezzo Sarah Connolly : la 5e symphonie de Mahler, et – clin d’oeil à la Belgique en ce jour de fête nationale – les six Lieder de Zemlinsky sur des poèmes de Maeterlinck !

11745930_1624265984479064_6537288773938186216_n(Il faut toujours une photo pour immortaliser un concert-anniversaire, merci à Marc Ginot ! De g.à dr. René Koering, JPR; Jean-Noël Jeanneney – co-fondateur du Festival en 1985 comme président de Radio France avec Georges Frêche, alors maire de Montpellier -, Damien Alary, président du conseil régional Languedoc Roussillon, Mathieu Gallet et Philippe Saurel, maire, président de Montpellier-Métropole)