Troisième tour

Le 5 mars dernier, à la fin d’un long article – Élections municipales : hier et aujourd’hui – j’écrivais : « Que donneront les élections du 15 et du 22 mars prochains ? Je suis évidemment de très près les campagnes dans quelques villes où j’ai des attaches, Thonon-les-Bains bien sûr, Paris évidemment, Montpellier, et quelques autres encore…Bien malin qui pourrait faire un pronostic dans les trois villes que j’ai citées… et dans bien d’autres. L’éclatement de l’offre politique, le nombre de listes en concurrence, la perte des repères traditionnels – cause et conséquence des élections présidentielle et législative de 2017 – rendent les résultats plus qu’incertains. Les sondages ? cela fait des années qu’ils sont régulièrement démentis ou corrigés par les élections. Le suspense est entier… »

On a désormais la réponse, à l’issue d’un second tour qui n’a pas eu lieu le 22 mars, mais le 28 juin dernier !

J’aurais pu ajouter une quatrième ville, celle de mon enfance, de mon adolescence, celle aussi où je fus pour la première fois candidat sur une liste municipale en 1977, Poitiers

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Usure

Le taux d’abstention, depuis plus de dix ans, à des élections traditionnellement très suivies – présidentielles et municipales – est évidemment l’élément essentiel du dernier scrutin. Et, contrairement à la majorité des commentateurs, je ne pense pas que la crise sanitaire en soit la principale raison. La démocratie représentative a plus que du plomb dans l’aile: en témoigne éloquemment le mouvement des « Gilets jaunes » qui a établi, dans l’opinion, qu’une minorité agissante, voire violente, pouvait penser dicter sa loi à la majorité par essence silencieuse.

Mais les électeurs ont voté, et comme en 1977, ils ont « dégagé » des équipes depuis trop longtemps au pouvoir. Inutile de reprendre la liste : Bordeaux, Lyon, Marseille…

À Poitiers, la ville était PS depuis 1977, Jacques Santrot d’abord, Alain Claeyes ensuite. Rien de répréhensible dans ce long règne socialiste. De l’usure, de la lassitude, de l’envie de voir d’autres visages, politiquement proches, mais différents.

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Pour citer les trois autres villes où j’ai des attaches, c’est au contraire la constance dans la fidélité à des valeurs, à des idéaux, qui a été « récompensée » par les électeurs.

À Paris, une ville où une majorité d’habitants n’a pas de voiture, Anne Hidalgo a eu beau jeu de mettre en oeuvre, systématiquement, méthodiquement – obstinément lui reprocheront beaucoup – une politique délibérément hostile à l’automobile, favorable au vélo et autres « mobilités douces » pour reprendre l’abscons verbiage à la mode. Mais qui oserait revenir à la voie Georges Pompidou livrée à la circulation automobile ? Anne Hidalgo a fait ce qu’elle a dit, et les électeurs l’ont reconnu.

À Thonon-les-Bainsla constance d’un candidat de droite modérée a fini par payer. Après des essais infructueux en 2008 et 2014, l’avocat Christophe Arminjon a fini par triompher de l’immobilisme immobilier qui avait caractérisé son prédécesseur, élu à chaque fois à une très courte majorité depuis 1995.

À Montpellier, où l’on a localement l’habitude de dire que rien ne se passe comme ailleurs, la démonstration a été faite, au contraire, qu’il y a des invariants en politique.

Bref rappel historique : en 1977, le socialiste Georges Frêche, éminent professeur d’université, fait basculer à gauche une belle assoupie dans le giron de la droite depuis 1959. Georges Frêche meurt subitement en 2010. L’équipe qu’il avait formée et qu’il tenait d’une main de fer se disloque, et en 2014, les élections municipales voient s’affronter les amis d’hier. Philippe Saurel se présente en dissident, au milieu du quinquennat Hollande marqué par les frondes internes au PS, Philippe Saurel ex-adjoint de Georges Frêche, puis d’Hélène Mandroux qui a succédé à Frêche. Saurel profite de cette posture « dégagiste » et se fait élire maire, puis président de la Métropole de Montpellier (contrairement à ses engagements de campagne).

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(Juillet 2015: de g.à d.R.Koering, J.P.R., Jean-Noël Jeanneney, Damien Alary, Mathieu Gallet et Philippe Saurel)

Nommé en juillet 2014 directeur du Festival Radio France Occitanie Montpellier, c’est avec Philippe Saurel que j’aurai à faire dès ma prise de fonction. Etrange personnage, à qui me liera une connivence qui surmontera les divergences, les à-coups que sa pratique solitaire et versatile du pouvoir ne manquera pas de susciter au fil des ans. Comme si, ayant pris goût à la part d’absolutisme que confère le mandat de maire et surtout de président d’une métropole qui regroupe 31 communes, il s’était rêvé en lider maximo, oscillant entre Podemos en Espagne, Macron en France – il reniera sa proximité avec les « marcheurs » présidentiels dès que l’étoile du président commencera à pâlir -, s’acharnant contre ses anciens amis du PS, au point parfois d’aboutir à des situations absurdes, simplement pour s’opposer à la Région présidée par la PS Carole Delga, ou au département de l’Hérault présidé par le PS Kléber Mesquida.

Le 28 juin, Philippe Saurel a été sévèrement distancé (13 points d’écart) par son ancien collègue de la municipalité Mandroux, alors adjoint à la Culture, Michaël Delafosse. 

Le battu l’a reconnu, sans base politique, sans soutiens structurés, l’aventurier qu’il était, et qui avait forcé le destin en 2014, n’avait aucune réserve électorale, alors même que sa gestion de la crise sanitaire avait été plutôt appréciée.

Le nouveau maire de Montpellier – 43 ans – a le mérite de n’avoir jamais varié de ligne politique, même quand l’étiquette PS était au plus creux de la vague. Il a construit une majorité de projet, logique, avec les écologistes. Il a émis deux ou trois idées-force. Sa constance a payé. Il a donné le sentiment aux électeurs qu’il tiendrait ses engagements. Qu’on pouvait lui faire crédit de ses engagements en faveur de la culture, de la justice sociale, d’une gouvernance respectueuse de la démocratie.

Si l’on voulait extrapoler la situation de Montpellier, de Paris, de Lyon et d’autres, on pourrait conseiller au président de la République de prendre garde à ce qu’enseignent ces élections municipales : débâcle d’un parti qui n’a d’autre légitimité et de raison d’être que le soutien à l’épopée victorieuse d’un candidat qui, défiant (presque) toutes les lois de la politique, s’est fait élire en 2017 à la fonction suprême, débâcle d’un parti qui n’a aucune ramification avec le pays profond, d’un parti qui n’a jamais su (ou voulu ?) valoriser ses candidats, ses élus. Qui connaît aujourd’hui plus de deux ou trois ministres de l’actuel gouvernement ? Qui pourrait citer les futures élites du parti présidentiel ?

Emmanuel Macron l’a emporté en 2017 en prenant tout le monde par surprise. En 2022, il risque fort de lui manquer ce qui a toujours constitué le socle électoral des présidents de la Vème République, une base populaire, ancrée dans les territoires.

Ma part de vérité

Je n’ai pu suivre que partiellement, et à la radio (merci France Musique) le concert-événement qui réunissait avant-hier soir à Orange les quatre formations musicales de Radio France, l’Orchestre National de France, l’Orchestre philharmonique de Radio France, le Choeur et la Maîtrise de Radio France sous la baguette de Jukka-Pekka Saraste pour la Huitième symphonie de Mahler (à réécouter ici).

Et j’ai entendu les propos du Ministre de la Culture, Franck Riester, sur France Musique : « C’est important de dire que nous avons une richesse musicale exceptionnelle à Radio France, une richesse que nous souhaitons pérenniser. (…) L’ambition musicale de l’audiovisuel public passe par deux orchestres, par une maîtrise et par un chœur (…) Il doit y avoir des économies, des transformations »

L’occasion me semble venue de livrer ma part de vérité à ce sujet.

Nommé par Mathieu Gallet à la direction de la musique de Radio France en mai 2014, j’en suis parti un an plus tard en mai 2015, après la longue grève qui avait affecté la Maison ronde. Nul n’a jamais donné d’explication à ce départ, ni l’ancien président de Radio France, ni moi. Quatre ans après, le temps est venu de la dire.

Car c’est bien à propos des formations musicales de Radio France, dont j’avais la responsabilité comme Directeur de la musique, que s’est creusée la divergence entre Mathieu Gallet et moi.

Un mot personnel d’abord

De tous les directeurs de la Musique qui se sont succédé à Radio France, je dois être l’un des seuls à avoir eu l’expérience de la direction, de la gestion de plusieurs orchestres (de 1986 à 1993, à la Radio Suisse romande, je participais à la gestion artistique et budgétaire d’une partie des activités de l’Orchestre de la Suisse Romande, et de 1999 à 2014 j’ai été le directeur général de l’Orchestre philharmonique royal de Liège). Ce qui, je peux le dire, m’a donné un avantage décisif dans la relation avec les syndicats et les « représentations permanentes » des formations musicales de Radio France.

Nous parlions le même langage, je connaissais de l’intérieur l’univers des musiciens, les règles et les usages, souvent hermétiques pour les non initiés. Cette connaissance intime des rouages avait un revers : on ne pouvait pas « me la faire » et faire passer certaines habitudes pas très orthodoxes pour des règles établies !

C’est cette connaissance intime, ajoutée au respect réciproque qui a toujours présidé à mes relations avec les musiciens et leurs représentants, qui m’ont, je crois, permis de faire avancer durablement, en dépit de la brièveté de mon mandat, la cause des quatre formations musicales de Radio France.

Fusion, confusion

Pendant la « campagne » qui a précédé l’élection par le CSA du PDG de Radio France, début 2014, on a vu refleurir dans la presse un « marronnier » qui a la vie dure : Faut-il deux orchestres à Radio France ? Lire Les orchestres de Radio France en crise

Débat encore ravivé par le dernier rapport de la Cour des Comptes : « En 2018, comme en 2014, les formations musicales de Radio France sont au nombre de 4. La décision du fusionner les orchestres n’a pas été prise, en dépit des recommandations de la Cour »:« Il n’est ni dans la vocation ni dans les moyens de Radio France de conserver en son sein deux orchestres symphoniques »

Si le général de Gaulle affirmait en 1966, à propos de la Bourse : « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille », on renverrait bien la formule aux magistrats de la rue Cambon : « La politique culturelle de la France ne se fait pas à la Cour des Comptes« .

Lorsque Mathieu Gallet m’a sollicité pour la direction de la musique de Radio France, nous avons eu plusieurs longs échanges, destinés à fixer le cap de la politique musicale qui serait la sienne et que j’aurais, selon les statuts mêmes de Radio France, à mettre en oeuvre (car, contrairement à ce que l’on croit, et à une pratique dévoyée pendant trop d’années, ce ne sont pas les chefs, les directeurs musicaux des orchestres qui définissent la ligne artistique de Radio France et de leurs formations).

Dans une note très argumentée que je lui avais remise et qu’il avait acceptée comme base de notre collaboration, je disais deux choses très simples :

  • Le mot même de « fusion » n’a aucun sens, s’agissant de formations musicales. Dans certains cas, en Allemagne notamment, il y a eu des regroupements, des réorganisations (par exemple à Berlin, à la suite de la chute du Mur, ou dans certains Länder, comme le Bade-Wurtemberg), dans malheureusement beaucoup d’autres cas, notamment aux Etats-Unis, des suppressions pures et simples. La fusion est une notion économique, technocratique, en rien transposable à la situation des orchestres.
  • A la question : « Faut-il deux orchestres à Radio France ? » j’avais répondu très clairement : Si c’est pour jouer les mêmes répertoires, se faire une concurrence ridicule, refuser les missions normalement dévolues à des orchestres de radio, NON ! Si c’est pour revenir aux objectifs qui ont présidé à la fondation des deux orchestres, redéfinir deux projets artistiques originaux et complémentaires, dans le respect des missions de service public de Radio France, OUI !

Autrement dit, si on ne corrigeait pas une trajectoire qui, depuis trente ans, avait laissé se développer une rivalité féroce entre les deux orchestres de Radio France et leurs chefs respectifs, on offrait aux partisans de la « fusion » ou de l’élimination d’un des deux orchestres, tout comme aux comptables de Bercy ou de la Cour des Comptes, et à une grande partie de la classe politique, toutes les raisons de persévérer dans leurs idées funestes.

La vocation de chaque orchestre

C’est très exactement le discours que je tins, dès ma prise de fonction début juin 2014, à tous mes interlocuteurs, musiciens, équipes administratives, et un peu plus tard à Daniele Gatti, patron de l’Orchestre National, et Mikko Franck, directeur musical désigné de l’Orchestre philharmonique (Myung Whun Chung, le chef « sortant » de cet orchestre considérant, lui, qu’il n’avait de comptes à rendre à personne, et surtout pas à moi !).

Si nous n’étions pas capables, en interne, de nous réformer, de justifier artistiquement l’existence des deux orchestres, d’autres, à l’extérieur, ne manqueraient pas de s’en charger, et sans états d’âme.

À l’Orchestre National de France la défense et illustration de la musique française, du grand répertoire, servi de préférence par des chefs français – dont la presse rappelle régulièrement qu’ils sont quasiment tous en poste à l’étranger ! -, et une présence beaucoup plus forte dans les salles de concert de l’Hexagone. Les premiers résultats de cette orientation se concrétiseraient dès la saison 2015/2016 et de manière spectaculaire en 2016/2017 (lire Les Français enfin). Du jamais vu depuis plus de quarante ans : 8 chefs français invités, Emmanuel Krivine, Louis Langrée, Stéphane Denève, Alain Altinoglu, Jean-Claude Casadesus, Fabien Gabel, Jérémie Rhorer, Alexandre Bloch !

J’ajoute que, pour la deuxième édition du Concert de Paris – le 14 juillet sous la Tour Eiffel – il était indispensable de conforter la place de l’Orchestre National (du Choeur et de la Maîtrise), d’autres formations, comme l’Orchestre de Paris, pouvant légitimement prétendre à cet honneur. La discussion que j’eus, quelques heures avant le concert, sur la pelouse du Champ de Mars avec la Maire de Paris, dut assez la convaincre pour qu’elle conserve, au fil des ans, sa fidélité aux forces musicales de Radio France

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(Photo historique ! Sur les cinq personnes visibles ici, quatre ne sont plus en fonctions : de gauche à droite, Anne Hidalgo, Maire de Paris, Bruno Juilliard, ex-premier adjoint, François Hollande, JPR et Manuel Valls, le 14 juillet 2014)

À l’Orchestre philharmonique de Radio France, les missions dans lesquelles il excelle et qu’il peut assumer grâce à sa « géométrie variable » : la musique du XXème siècle, la création, les productions lyriques, la comédie musicale, les projets radiophoniques, pédagogiques, qui n’excluent pas le grand répertoire. Mikko Franck le Finlandais, né, grandi dans un pays tout entier voué à promouvoir sa musique, sa création, ses talents, comprit très vite la nécessité de « franciser » la programmation de l’orchestre dont il allait devenir le chef.

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La réforme, malgré tout

« Le National pourrait se recentrer sur la musique française, y compris les répertoires et compositeurs méconnus, tandis que le Philharmonique aurait un répertoire plus large, plus audacieux à certains égards « , suggère Jean-Paul Quennesson (Sud), lui-même corniste au National (France Musique1er avril 2015)

Au-delà de la réaffirmation de ces principes, et de leur (ré)activation, qui finalement recueillirent un assentiment quasi-général, une fois certains « réglages » opérés (cf. la déclaration ci-dessus) le véritable enjeu était notre capacité à réformer vraiment et durablement un système, une organisation devenus hors de contrôle. Parce que, en position de force face à des PDG ou des directeurs de la musique qui voulaient la paix, les syndicats, les représentants des musiciens, géraient de fait la planification, l’organisation des « services », les recrutements, et finalement l’administration des orchestres.

C’est peu dire que la réforme du système, pourtant clairement annoncée par le nouveau PDG de Radio France (choisi à l’unanimité par le CSA), ne fut pas une partie de plaisir, comme le rappelait Christian Merlin dans Le Figaro du 2 octobre 2014. Je fus taxé d’une excessive rapidité dans la mise en oeuvre de la réforme…

Et pourtant, malgré les vagues, les préavis de grève, les postures, le patient mais nécessaire travail de fond s’engagea, sous une double contrainte : une perspective budgétaire très « contrainte » pour Radio France, et la renégociation de la convention collective, notamment pour l’annexe qui concerne les musiciens. Avant que la longue grève du printemps 2015 ne vienne interrompre les processus en cours, je dois reconnaître – pour leur rendre hommage – que tous les syndicats présents autour de la table de négociations, y compris la CGT, finirent par accepter de discuter de toutes les dispositions que nous avions incluses dans le projet de nouvelle convention collective, comme celle qui consiste pour une formation à « prêter » certains de ses musiciens à l’autre, lorsque l’effectif requis exige le recours à des musiciens « supplémentaires ». Ce « nouvel accord collectif » sera finalement signé deux ans plus tard, en mars 2017 *!

La divergence

Pendant toute cette période, une grande part de mon temps et de mon énergie fut requise, comme membre du Comité exécutif de Radio France (j’avais insisté auprès de Mathieu Gallet pour que le directeur de la musique fasse partie de cette instance nouvelle de gouvernance), par d’innombrables réunions internes et externes visant à la « finalisation » du Contrat d’objectifs et de moyens (COM) qui devait fixer les moyens que l’Etat consentirait à Radio France pour les cinq années à venir. Le même Etat imposant un retour à l’équilibre budgétaire en deux ans, alors même que les travaux de réhabilitation de la Maison ronde pesaient lourdement sur les comptes et la trésorerie de la maison !

J’avais préparé plusieurs scénarios de « reconfiguration » – comme on dit pudiquement pour parler de restrictions ! – de la direction de la musique, et donc des quatre formations musicales, des plus pessimistes aux plus réalistes. Je n’avais jamais cessé de penser que, bien négociée, bien préparée, cette « reconfiguration » devait permettre le maintien des deux orchestres, du choeur et de la maîtrise. Il n’y avait aucune raison ni artistique, ni politique, ni budgétaire, ni philosophique même, d’envisager de se séparer de l’une de ces formations.

Pourtant Mathieu Gallet, influencé ou « conseillé » par quelques visiteurs du soir (qui ne devaient pas lui vouloir que du bien !) se mit en tête, dès la fin décembre 2014, d’éloigner l’Orchestre National, de le « céder » à la Caisse des Dépôts et Consignations propriétaire du Théâtre des Champs-Elysées, qui avait été le lieu de résidence du National, jusqu’à l’ouverture de l’Auditorium de la Maison de la radio le 14 novembre 2014. CQFD. Des contacts furent pris en secret par le jeune PDG, que nous ne cessions de mettre en garde contre les risques d’une opération aussi hasardeuse et « explosive » dans un contexte déjà très tendu. Une fuite (organisée ?) dans les pages éco du Figaro en février 2015 mit le feu aux poudres, contribuant à déclencher l’un des plus longs mouvements de grève à Radio France.

« La direction avait estimé la semaine dernière que « Radio France n’a pas les moyens de financer deux orchestres symphoniques, un choeur et une maîtrise pour un coût de 60 millions d’euros, ne générant que 2 millions de recettes de billetterie « . Le PDG Mathieu Gallet avait évoqué la piste de se séparer de l’Orchestre national de France et de le transférer au Théâtre des Champs Elysées, proposition rejetée par la Caisse des dépôts, propriétaire majoritaire de la salle parisienne. » (France Musique, 1er avril 2015)

Le conflit avec l’actionnaire prit une tournure publique, lorsque la ministre de la Culture de l’époque, Fleur Pellerin, exigea sur un mode comminatoire que Mathieu Gallet lui envoie son projet stratégique, que celui-ci réitéra, contre toute vraisemblance, son projet « d’externaliser » l’Orchestre National, et que la Ministre lui répondit sèchement, s’inspirant des positions défendues tant par les directions compétentes du ministère que de Radio France et connues de tous, que le futur de Radio France s’inscrirait avec deux orchestres et un choeur reconfigurés, confirmés dans leurs objectifs et leur vocation (Crise à Radio France : Mathieu Gallet le dos au mur)

Je ne pouvais pas soutenir M. Gallet dans son entêtement, il ne pouvait pas accepter que son directeur de la Musique soit sur une position qui lui semblait être celle de son « adversaire » du moment, le Ministère de la Culture. Le divorce était consommé, je devais partir… (Jean-Pierre Rousseau quitte la direction de la musique,21 mai 2015).

Divergence, divorce mais pas rupture puisque je conservais la direction du Festival Radio France et la confiance de son co-président… Mathieu Gallet – qui, jusqu’à son départ forcé de la présidence de Radio France en janvier 2018, n’a jamais ménagé son soutien au Festival !

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(En juillet 2015, de gauche à droite, René Koering, fondateur et directeur du Festival jusqu’en 2011, J.P.R., Jean-Noël Jeanneney, PDG de Radio France en 1985, René Alary, président de la Région Languedoc-Roussillon, Mathieu Gallet, Philippe Saurel, maire de Montpellier)

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(le 28 juillet 2017, à Marciac, avec Katia et Marielle Labèque)

Ironie de l’histoire, mon successeur, nommé au printemps 2016, sera Michel Orier, qui un an plus tôt était le tout puissant et actif Directeur général de la Création artistique du Ministère de la Culture ! Depuis lors, Michel Orier – qui a mis tout son poids dans la réalisation de l’idée de concert Mahler voulue par le nouveau directeur des Chorégies d’Orange, Jean-Louis Grinda, ami et complice d’aventures liégeoises – a non seulement mené à bien les réformes engagées dès 2014, mais il a conforté le rôle irremplaçable des quatre formations musicales de Radio France dans le paysage musical français et international. Et démontré que la Maison de la radio pouvait battre des records de fréquentation de son Studio 104 et de son Auditorium !

* Extraits du « Nouvel accord d’entreprise » de Radio France

Le Nouvel accord d’entreprise vise à mettre en adéquation les conditions de travail des Musicien-nes avec les nouveaux modes de création, de diffusion et d’exploitation de la musique pour faire de Radio France un acteur majeur du secteur de la musique.

Ainsi le Nouvel accord d’entreprise permettra de :

Développer le paritarisme artistique en associant davantage les Musicien-nes à l’élaboration des programmes par la redéfinition du rôle des représentations permanentes artistiques des orchestres et du choeur ;
Gagner en flexibilité dans la gestion des plannings en prévoyant plus en amont la programmation des saisons tout en permettant la tenue de projets exceptionnels afin d’améliorer le service aux antennes ;
Garantir la qualité artistique des formations musicales en optimisant la programmation des Musicien-nes de Radio France au sein des productions des orchestres et du choeur, notamment en cas de défaillance pour maladie ;
Développer la collaboration entre les formations musicales, notamment entre les orchestres en permettant aux Musicien-nes de porter des projets artistiques communs ou de travailler, avec leur accord, dans l’une ou l’autre des formations de Radio France pour répondre à des besoins de nomenclature ;
Renouveler les formats de concerts notamment en permettant la divisibilité de l’ensemble des formations musicales ;
Renouveler les publics en développant les tournées et les offres de concerts les samedis et dimanches pour les familles, l’enfance et la jeunesse ;
Simplifier le système des décomptes et des pauses afin de pouvoir mettre en oeuvre des programmes courts, de créer et d’enregistrer des musiques de film, des projets numériques etc.
Mettre à niveau et simplifier le système de rémunération des Musicien-nes.

(Source : Radio France Espace presse 31 mars 2017)