Déconfiné

Impressions en vrac après une semaine de « déconfinement »

Vers le Sud

J’avais deux bonnes raisons de profiter de la parcelle de liberté recouvrée lundi dernier, l’une professionnelle – régler sur place les questions liées à la réouverture du bureau du Festival Radio France à Montpellier – l’autre familiale – revoir ma mère, 93 ans dans quelques jours, chez elle à Nîmes. Ni train, ni avion, j’ai préféré la voiture.

Sentiment de liberté, ce lundi 11 mai, l’A 86, que je dois emprunter pour rejoindre l’A 10 puis l’A 75, est quasiment vide. Est-ce un effet de la tempête qui secoue la région parisienne depuis 24 heures ? la prudence des déconfinés ?

Vers Orléans, ma voiture affiche une température extérieure de 5° ! Les aires d’autoroute ont partiellement rouvert. Sur ce trajet magnifique qui traverse le Berri, le Massif central, les Cévennes, j’ai mes petites habitudes. Je m’arrête sur l’aire du viaduc de Garabit. Personne. La Truyère, la rivière que franchit le pont métallique conçu par les équipes de Gustave Eiffel, scintille sous le soleil.

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J’ai, comme toujours en prévision d’un long voyage, téléchargé sur mon téléphone portable des éléments de ma discothèque. J’aime réentendre l’art si libre et rhapsodique du chef Constantin Silvestri. 

Dans une oeuvre aussi rabachée que les Préludes de Liszt, Silvestri fait dresser l’oreille.

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Montpellier désert

Le choc en arrivant à Montpellier. La place de la Comédie déserte. Jamais vu depuis plus de trente ans que je viens à Montpellier.

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Terrasses, cafés, restaurants fermés comme partout ailleurs, mais pour une cité qui vit dehors toute l’année, le contraste est saisissant. Le déconfinement n’est pas d’actualité.

Mardi je retrouve avec plaisir quelques-uns des piliers de l’équipe du festival à Montpellier pour mettre en place le processus de réouverture de nos bureaux. Se voir, se parler sans le truchement d’un écran d’ordinateur ou de téléphone, mesurer la chance qui est la nôtre de n’avoir eu aucun malade dans toute l’équipe, réfréner l’impatience de ceux qui voudraient revenir tout de suite au bureau. Je mesure, plus que jamais, la responsabilité qui est la mienne.

Même si le festival 2020 ne ressemblera pas aux autres, même si le joyeux brouhaha qui s’empare des bureaux de Montpellier dès le début juin et s’amplifie dès que le festival bat son plein en juillet, même si ce brouhaha manquera tristement, il faut que les équipes qui préparent le festival « autrement » puissent réintégrer des espaces de travail reconfigurés selon les nouvelles normes sanitaires.

Une journée chez ma mère

Je n’avais pas revu ma mère depuis la fin février. Je la trouve en bonne forme à l’approche de son 93ème anniversaire. La tête fonctionne parfaitement, le corps me semble plus alerte qu’il y a quelques mois. Le virus ne l’a pas touchée, pas plus que les infirmières et aides à domicile qui la visitent chaque jour. Elle évoque, à ma demande, des souvenirs d’autrefois, de sa si nombreuse famille suisse. Plus intéressants que la conversation sur le présent…

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Infantilisation

Je ne supporte plus les journaux télévisés que j’avais l’habitude de suivre sur France 2. Ces reportages « au plus près du terrain », ces « envoyés spéciaux » dépêchés sur… le trottoir du ministère de la Santé, de Matignon ou de l’Elysée pour nous dire ce qu’ils auraient pu dire en studio, et ce ton infantilisant des présentateurs qui commencent toujours par les sujets d’inquiétude…

Heureusement il y a encore C à vous sur France 5, des journalistes qui bossent leurs sujets, des débats contradictoires. Et puis les bouffées d’information non formatée, d’humour, les interviews qu’on n’attend pas et qu’on n’entend nulle part ailleurs, dans Quotidien de Yann Barthès sur TMC.

Indécence

En une du Canard enchaîné de mercredi – introuvable à Montpellier pour cause de grève de la distribution des journaux nationaux (comme si la presse avait besoin de ça!), cet article qui dit tout de l’indécence contemporaine :

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Douce France

Le 16 mai 2018, on avait choisi le siège de la Garde républicaine à Paris pour présenter l’édition 2018 du Festival Radio France Occitanie Montpellier , placée sous l’égide de la Douce France chantée par l’enfant de Narbonne, Charles Trenet. Le Choeur de l’armée française nous avait fait la surprise de quelques chansons.

Erreur
Cette vidéo n’existe pas

Comme on le sait, pas d’édition « physique » du festival l’été prochain. Mais quelque chose d’autre, de différent. On y met toute notre énergie.

Rien pourtant ne remplacera ce qui fait l’essence du spectacle, du concert, des interprètes qui jouent pour le public, et ce public qui partage en un même lieu, à un même moment, des émotions qu’aucune transmission, aucun écran ne produiront jamais à pareil degré.

Cette annonce hier : Une fête de la musique « sans prendre de risques » ! Même plus envie de réagir…

Revoir Paris

Passage chez un coiffeur de Montpellier : accueil chaleureux, respect des consignes avec le sourire.

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Et retour vers la région parisienne. La route est longue,  mais tellement belle, les genêts en fleur ensoleillent le Massif central.

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Brève halte non loin de Sévérac-le Château

Et vendredi, pour quelques courses qu’on avait différées, retour à Paris. Sentiments mitigés. Paris ne m’avait pas manqué pendant le confinement. J’avais, au contraire, apprécié ma maison, mon jardin, les roses, les fleurs qui profitaient de ce printemps si ensoleillé… Peu de monde dans les rues autour de la Madeleine, comme si on était au mois d’août. Des commerçants heureux de rouvrir, un kiosque à journaux qui offre le café.

On ne sait pas si on souhaite un retour « à la normale », au Paris d’avant. Aura-t-on tiré quelque enseignement de ces semaines confinées ? Trop tôt pour l’affirmer.

IMG_0145Place Vendôme

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On croise l’ami Paul Meyer et l’un de ses fils. On s’était parlé, Paul et moi, il y a peu. Plus rien, plus de concert, plus d’invitation, tous les projets sont annulés. Difficile d’envisager demain, pour lui comme pour des milliers d’artistes. Pourtant, comme les sportifs de haut niveau, il continue de s’entraîner, de travailler, pour le jour où…

 

 

 

Remaniement

Trop souvent dans le passé, remaniement a rimé avec reniement. Oubliées les promesses de campagne, perdus de vue les enthousiasmes des débuts, reniées les alliances politiques.

Celui qui vient d’intervenir, après une attente qui a paru insupportable au microcosme médiatique, a au moins le mérite d’échapper à cette sinistre litanie. On ferait presque le reproche au président de la République de conforter sa majorité, de mieux s’appuyer sur ses alliés, de faire plus largement confiance à des élus de terrain, au détriment de ces fameux représentants de la « société civile » qui ont toujours, cette fois comme par le passé, démontré leurs limites dans l’exercice d’une fonction ministérielle (qui se rappelle Pierre Arpaillange à la Justice, Francis Mer à l’Economie, Luc Ferry à l’Education ?).

Souvenons-nous, ce n’est pas si loin que ça, de la nomination surprise par Nicolas Sarkozy de Frédéric Mitterrand au ministère de la Culture en 2009.

 » Je suis devenu ministre par surprise. C’est sans doute vrai puisque je l’ai entendu dire un peu partout. Enfin, j’ai essayé de faire de mon mieux et j’ai quand même tenu trois ans. Avec le recul, ce qui m’a plu dans cette aventure c’est d’avoir osé sauter dans la cage aux lions. Ce fut à la fois dangereux, excitant et amusant.
J’ai reçu pas mal de coups de griffes mais j’en suis sorti sain et sauf.
J’ai retrouvé ma vie d’avant sans regrets ni amertume pendant qu’ils continuent à s’entredévorer. À condition d’apprécier ce type de sport et d’apprendre à courir plus vite que les grands fauves, ça vaut vraiment le coup d’essayer.
L’existence n’offre pas beaucoup de récréations de ce genre…  »
Frédéric Mitterrand

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Une expérience ministérielle doublement racontée par Frédéric Mitterrand.

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« Qu’est-ce qu’être ministre de la Culture et de la Communication à l’heure où la politique culturelle est un des grands enjeux des élections, et où le ministère comme son occupant actuel sont l’objet de vives controverses ? En nous livrant un témoignage direct sur son action aujourd’hui, Frédéric Mitterrand revient sur les conditions de son arrivée au ministère, depuis la direction de la Villa Médicis à Rome et son baptême du feu avec le vote de la loi HADOPI, et sur tous les domaines de son action : la préservation de son budget, les défis du numérique, du livre à la télévision, l’action culturelle outre-mer, les grands chantiers, le patrimoine, le cinéma, les langues, le spectacle vivant, les coopérations internationales… Un témoignage très personnel sur des sujets parfois méconnus des citoyens, comme les relations avec les parlementaires et les élus locaux, les arcanes des négociations budgétaires, les relations de l’État avec les créateurs. Une invitation à découvrir de l’intérieur la vie d’un ministère cher aux Français depuis sa création par André Malraux en 1959 »

Je ne sais pas si le nouveau ministre de la Culture, Franck Riestera lu son prédécesseur, mais il a pour lui de particulièrement bien connaître plusieurs des dossiers qu’il devra traiter (il a été le rapporteur à l’Assemblée Nationale des lois HADOPI , dont F. Mitterrand parle comme de son « baptême du feu » !). Il a pris, par ailleurs, des positions courageuses sur des sujets de société qui l’ont isolé au sein de sa famille politique d’origine.

Franck Riester remplace Françoise Nyssenque les mêmes qui avaient salué sa nomination décrivent comme fragilisée par les polémiques et manquant de charismeUn politique avisé remplace une professionnelle respectée. Souhaitons-lui bonne chance !

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Invités

Jeudi dernier, j’étais l’invité de midi de France Bleu Hérault et de ses très sympathiques animateurs Agnès Mullor et Hervé Carrasco.
Nous n’avons pas vraiment donné dans la mélancolie ni le sérieux de circonstance. Finalement c’est comme ça que j’aime (qu’on devrait toujours ?) parler de musique.
À écouter ici : L’invité de midi
Sans me prévenir, mes interlocuteurs avaient préparé un petit quizz musical. Je m’attendais, à tort, à quelques pièges.
Je ne sais qui leur a inspiré le choix des extraits, mais ce fut un bonheur d’évoquer les artistes et les concerts qu’ils avaient choisis, tous évidemment programmés dans le tout proche Festival Radio France
D’abord, reconnue dès les premières notes, la Troisième symphonie de Mahler (programmée le 16 juillet avec l’Orchestre des Jeunes de Catalogne – JONC). Puis, avec une émotion toujours renouvelée, la merveilleuse Isabelle Georges chantant Bei mir bist du shein, qui propose, le 17 juillet, un programme original intitulé Happy End avec le pianiste Frederik Steenbrink.
Puis Mozart sous les doigts immédiatement reconnaissables de Fazil Say (le 18 juillet)
Enfin, le début du concerto en ré mineur de Bach, j’ai (bien) supposé qu’il pouvait s’agir de Justin Taylor – un récital programmé le 24 juillet à 12h30.
Finalement un bon aperçu de la diversité d’un Festival plus ouvert et accessible que jamais. (#FestivalRF17)

Et si, pour une fois

emmanuel-macron-et-ses-ministresEt si, pour une fois…

… on faisait crédit à un Président installé depuis moins d’une semaine, à un gouvernement nommé avant-hier, au lieu de systématiquement et immédiatement dézinguer les uns, ricaner des autres.

… on avait le droit de se réjouir que des professionnels reconnus, de belles personnalités – je pense en premier lieu évidemment à Françoise Nyssen, la nouvelle Ministre de la Culture – soient nommés aux bons postes, aux bonnes responsabilités.

… on écoutait, on respectait les électeurs, qui ont tout de même montré éloquemment qu’ils ne faisaient plus confiance aux partis traditionnels, et qui ont placé en tête du premier tour deux candidats qui proposaient de rompre avec les vingt dernières années, et qui, aujourd’hui, ont envie d’espérer que quelque chose change enfin

… on changeait de logiciel  – ce que vient de dire Mathieu Croissandeau, le patron de l’Obssur France 5 – pour analyser la nouvelle donne politique,  ce fait majeur que sont l’élection du plus jeune chef d’Etat qu’ait connu notre pays,  et la constitution d’un gouvernement qui réunit en effet des ministres d’origines politiques diverses. Les partis traditionnels, sévèrement battus au premier tour de la présidentielle, et beaucoup d' »experts »médiatiques de la chose publique, continuent à appliquer des grilles d’analyse qui n’ont plus cours, à se livrer au jeu aussi facile que vain qui consiste à monter en épingle les propos passés des nouveaux ministres sur le nouveau Président et sa ligne politique. Rien que le décompte – tant de ministres de droite, tant de gauche, tant du centre – est obsolète.

… on revendiquait une fierté retrouvée d’être de nouveau, nous la France, le centre d’intérêt du monde entier, et de l’Europe en particulier. Le nouveau président, comme Obama jadis aux Etats-Unis, est attendu, entendu avec espoir, curiosité, bienveillance. Même si cela ne devait pas durer, il en est des premiers pas d’un président comme du premier contact d’un chef avec un orchestre : c’est la première impression qui compte. Et le moins qu’on puisse dire est qu’en dehors des éternels grincheux hexagonaux, les médias du monde entier se sont passionnés pour cette élection hors norme, et ce président qui bouleverse l’ordre établi.

… on cessait, pour quelque temps, l’auto-dénigrement, la dérision facile, pour souhaiter que cette nouvelle aventure réussisse, que les espoirs ne soient pas déçus. Finalement juste souhaiter que notre pays sorte de la spirale du déclinisme et de la morosité qui n’a que trop longtemps été son seul horizon.