Premières

Trois premières très différentes cette semaine.

Lundi soir au Châtelet l’un des films les plus originaux de Marcel L’Herbier, magnifiquement restauré, L’Inhumaine, de 1924.

linhumaine

Une restauration parfaite à voir le 4 mai prochain sur Arte. Explications de Serge Bromberg :

Pour cette nouvelle restauration, Lobster Films a pu reprendre le travail depuis les négatifs originaux nitrate encore en bon état grâce au matériel conservés par le CNC.
Ces éléments ont été scannés en 4K sur le Nitroscan des laboratoires Eclair, et la restauration numérique a été effectuée aux laboratoires Lobster Films en 2014. 
Mais outre la qualité d’image absolument lumineuse de cette nouvelle restauration, c’est la restitution des teintes qui permet de découvrir enfin L’Inhumaine telle que Marcel L’Herbier l’avait imaginée. En effet, l’usage était de monter le négatif des films dans l’ordre des teintes. Sur une même bobine se trouvent assemblés bout à bout tous les éléments teintés bleus, sur une autre les éléments teintés verts, ou jaune, ou rouge. 
Ainsi, en remettant dans l’ordre ces plans filmés en noir et blanc et en suivant les indications précieuses écrites à l’encre directement sur la pellicule – indications ne figurant pas sur l’interpositif des années 1970 – ce sont bien les teintes d’origine qui son reconstituées pour chaque plan. Certaines chutes de montage donnent également des indications de teintages et de virages authentiques, et datant de l’époque. 
La remise dans l’ordre de ces plans après teintage révèle l’œuvre au plus proche de ce qui fut montré pour la première fois, éclatante de précision, de beauté formelle et véritable feu d’artifice hypnotique de teintages et de virages. Quant au problème de l’intensité des teintes et de l’insertion des flashes de couleurs pures dans le montage final très rythmé, il a pu enfin être résolu grâce aux nouvelles technologies de restauration numérique.
Une résurrection…

Le film était accompagné par une création musicale du percussionniste Aidje Tafial pour ensemble instrumental, en partie inspirée des partitions que Darius Milhaud avait composées pour deux séquences majeures du film. Indépendamment de la qualité des interprètes, la musique peinait à se renouveler, donnant un sentiment de monotonie paradoxal pour un film aussi audacieux dans le propos, les décors, les situations…

Mardi c’était la première de Penthesilea, le septième opéra de Pascal Dusapin, à La Monnaie de Bruxelles. 

Une heure et demie de musique âpre, sombre, extrêmement prenante – c’est la marque du compositeur – qui vous empoigne et ne vous lâche plus jusqu’au terme de l’oeuvre.

“Dévorée par la passion, rongée par le devoir, affamée par le désir” : telle est Penthésilée, la reine des Amazones, face au guerrier grec Achille qu’elle affronte durant la guerre de Troie. Mais comment traiter de la démesure en évitant le piège de la surenchère illustrative ? C’est à ce dilemme que répond magistralement Pascal Dusapin en composant son septième opéra, Penthesilea, une commande de la Monnaie de Bruxelles, sur l’un des mythes les plus terrifiants de la Grèce antique qui relate la mort d’Achille, tué et dévoré par celle qu’il aime, Penthésilée.
Peu d’auteurs se sont risqués à l’approcher et, quand ils l’ont fait, c’était au risque d’une réprobation générale. Lorsque Heinrich von Kleist s’empare du sujet pour écrire une pièce de théâtre en 1807, celle-ci fait scandale, ne sera jamais publiée de son vivant et devra attendre le XXe siècle avant d’être montée (Fabienne Arvers, Les Inrocks)

Deux jours plus tard, contraste total avec une autre première (pour moi), Le Pré aux Clercs, l’un de ces nombreux opéras français du début du XIXème siècle, dû à Ferdinand Hérold, qui remporta un succès immédiat à sa création en décembre 1832 à l’Opéra-Comique qui le proposait dans une nouvelle production mise en scène avec autant d’efficacité que de sobriété par Eric Ruf, bien dirigée par Paul McCreesh à la tête de l’orchestre Gulbenkian, dans des costumes « d’époque » superbes.

Modèle des Huguenots de Meyerbeer, inspiré de l’unique roman de Mérimée et du style troubadour, c’est l’ouvrage qui, quoiqu’ayant causé la mort de son compositeur, resta le plus longtemps au répertoire de l’Opéra Comique, avec plus de 1600 représentations jusqu’en 1949 !

Distribution de belle qualité, presque entièrement francophone, mention spéciale pour Michael Spyres, Eric Huchet, Marie Lenormand, Jael Azzaretti, Emiliano Gonzalez Toro.

Malheureusement il faudra attendre la publication en CD prévue par le Palazzetto Bru Zane pour se remettre l’ouvrage dans l’oreille, France Musique n’ayant pu capter l’ouvrage pour cause de grève.

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Singin’ in the rain

Trop tard pour espérer encore voir Singin’ in the rain au Châtelet à Paris, mais la production reprend pour les fêtes de fin d’année à partir du 27 novembre. Et il faut s’y précipiter. Les adaptations à la scène de films musicaux ne sont pas toujours réussies, surtout quand on a affaire à un chef d’oeuvre : Singin’ in the rain, le film de Stanley Donen et Gene Kelly, sorti en 1952, en est un, incontestable (http://fr.wikipedia.org/wiki/Chantons_sous_la_pluie) et pas seulement à cause de la chanson et de la scène cultes qui donnent son titre au film :

L’histoire se déroule à Hollywood, à la fin de l’ère du cinéma muet. D’origine modeste, Don Lockwood ancien danseur, musicien et cascadeur est devenu une star du cinéma muet. A son grand dam, Lina Lamont, son insipide et antipathique partenaire, est persuadée qu’ils forment un couple à la ville comme à l’écran. Alors que Le Chanteur de Jazz, le tout premier film parlant, connaît un succès fulgurant, le directeur du studio R.F Simpson n’a d’autre choix que de convertir le nouveau film du duo Lockwood / Lamont. L’équipe de production est confrontée à de nombreuses difficultés, notamment l’insupportable voix de crécelle de Lina Lamont. Le meilleur ami de Don Lockwood, Cosmo Brown, a l’idée d’engager Kathy Selden pour doubler la voix de Lina et de transformer The Dueling Cavalier en comédie musicale intitulée The Dancing Cavalier. Entretemps, Don tombe amoureux de Kathy. Lina découvre leur idylle naissante et, furieuse, exige qu’à l’avenir Kathy continue de jouer les doublures et demeure pour toujours dans l’anonymat. Cette idée révolte Simpson, mais il n’a d’autre choix que d’accepter, tout comme Kathy, liée au studio par contrat. La première de The Dancing Cavalier est un triomphe. Le public conquis réclame une chanson de Lina. Don et Cosmo décident d’improviser : ils proposent à Lina de chanter en playback pendant que Kathy, dissimulée derrière le rideau, créé l’illusion en chantant en simultané dans un second micro. Lina commence à « chanter », Don, Cosmo et Simpson remontent le rideau derrière elle… Le spectacle du Châtelet n’était pas une première parisienne, contrairement à ce qui a pu être dit, puisque le Chantons sous la pluie qui a longuement tenu l’affiche de l’Opéra Royal de Wallonie à Liège en 1999, puis du théâtre de la Porte Saint Martin en 2000, avait obtenu le Molière du meilleur spectacle musical en 2001. Une réussite due à Jean-Louis Grinda, alors directeur de la scène liégeoise, et à une fantastique troupe d’acteurs, chanteurs, danseurs, au premier rang desquels figurait l’inoubliable Kathy Selden d’Isabelle Georges. Robert Carsen a fait le pari de la fidélité au film, dans de superbes décors, avec une troupe d’une parfaite homogénéité (Dan Burton, Daniel Crossley, Clare Halse, Emma Kate Nelson impayable en Lina Lamont).Dans la fosse, Gareth Valentine dirige un Orchestre de chambre de Paris en grande forme. IMG_2653

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